Categories

Recherche

Aménager son potager, pour plus de biodiversité

Dans Paresser au potager, pour plus de biodiversité, on a vu comment un peu de laisser-aller peut favoriser la présence de divers êtres vivants utiles pour notre jardin. Mieux encore, plus il y a de vie, moins il y a de boulot! En laissant la nature suivre son cours, un équilibre naturel se met en place et les plantes, insectes et micro-organismes travaillent pour nous: un sol plus riche, moins de ravageurs, plus de récoltes… et surtout moins d’efforts à fournir. Mais, si vous êtes prêt à faire un petit effort de plus, votre jardin peut devenir encore plus vivant et productif, tout en ayant un impact positif sur l’environnement. Et rassurez-vous, vous pourrez bientôt retourner à votre hamac… promis!

Les organismes qui vivent dans notre jardin ont quelques besoins essentiels qui ne sont pas si différents des nôtres. Et non, le Wi-Fi n’en fait pas partie! Je parle ici d’eau, de nourriture et d’abri.

La Fête des semences et de l’agriculture urbaine de Québec édition 2025 aura lieu les 1er et 2 mars au pavillon Alphonse-Desjardins de l’Université Laval sous le thème «Cultivons la biodiversité». Vous pourrez y trouver des semences, des livres, des matériaux et des conseils d’experts pour vous aider à rendre votre jardin le plus diversifié possible.

Photo: BasieB

Eau

Toutes les formes de vie – plantes, champignons, animaux, insectes, micro-organismes – ont besoin d’eau pour survivre. On arrose nos cultures, alors pourquoi ne pas arroser la faune (pas littéralement, à moins qu’une marmotte s’en donne à cœur joie dans vos carottes!)? En intégrant des points d’eau, on favorise un jardin riche en biodiversité. Et ça empêchera peut-être les rongeurs de mordiller vos boyaux suintants lorsqu’ils ont soif!

Préserver l’humidité du sol est un premier geste simple et efficace. Ajouter du paillis, du compost, semer des engrais verts ou simplement laisser les débris végétaux en place limite l’évaporation et nourrit la faune du sol, comme les micro-organismes, les insectes et les vers de terre, qui participent activement à la fertilité du jardin.

Photo: David Levinson/Pexels

Offrir des points d’eau accessibles est tout aussi essentiel et parfois simple. Une soucoupe peu profonde avec des cailloux permet aux pollinisateurs comme les abeilles et les papillons de s’abreuver en toute sécurité. Un bain surélevé protège les oiseaux des prédateurs lorsqu’ils s’abreuvent ou prennent leur bain, et une fontaine avec un léger écoulement les attire tout en ajoutant un murmure apaisant au jardin. Pour les petits espaces, un jardin d’eau en contenant – un simple bassin avec des plantes aquatiques comme les papyrus – constitue une solution efficace qui profite aux insectes, aux oiseaux et aux petits mammifères.

Des zones d’eau pertinentes

Si l’espace le permet, aménager une mare ou un étang, même de petite taille, crée un véritable havre de vie. Grenouilles, libellules et oiseaux y trouvent refuge, et l’ajout de plantes aquatiques comme les nénuphars ou même de poissons contribue à un écosystème plus riche et autonome.

Les chauves-souris, elles aussi, dépendent des points d’eau, mais contrairement aux autres animaux, elles boivent en plein vol. Elles ont besoin d’un espace libre d’environ six mètres pour plonger et s’abreuver en toute sécurité.

Photo: Petr Ganaj/Pexels

Même les flaques d’eau temporaires peuvent être bénéfiques. Si vous avez une partie de votre terrain est souvent humide, conservez-la pour y ajouter des plantes adaptées plutôt que de la considérer comme un espace perdu. En plaçant des pierres plates irrégulières à l’ombre, l’eau de pluie s’accumulera assez lorsqu’il pleut pour permettre aux papillons de s’abreuver et d’accéder aux minéraux dissous provenant de la roche. Une bouteille d’eau trouée posée dessus peut aussi assurer un débit constant.

Il existe de nombreuses solutions pour fournir de l’eau au jardin, souvent avec peu d’effort, mais c’est ce qui aura le plus grand impact sur la biodiversité et l’équilibre naturel du jardin.

Nourriture

Je comprends, on ne cultive pas un potager pour nourrir nos colocataires de jardin, mais en leur fournissant des ressources alimentaires variées, on attire et maintient les pollinisateurs, les insectes auxiliaires et les animaux qui participent à l’équilibre écologique.

Les fleurs

Les fleurs jouent un rôle clé dans l’alimentation des pollinisateurs en fournissant pollen et nectar, deux ressources essentielles. Les pollinisateurs sont indispensables au potager, car ils assurent la fécondation des légumes et des fruits, améliorant ainsi le rendement et la qualité des récoltes. Le pollen, riche en protéines, est consommé par de nombreux insectes comme les abeilles pour nourrir leurs larves. Le nectar, quant à lui, est une source d’énergie immédiate, particulièrement appréciée des papillons et des bourdons. Planter une variété de fleurs mellifères, comme l’aster, la phacélie, la lavande, le trèfle et le cosmos, assure une floraison continue et un apport régulier en nourriture.

Les papillons diurnes et nocturnes ont des besoins spécifiques. De plus, les papillons diurnes, comme les monarques, privilégient les fleurs ouvertes et accessibles telles que l’échinacée et la verveine. Les papillons de nuit, souvent actifs à la tombée du jour, recherchent des fleurs aux parfums marqués et aux teintes claires, comme l’onagre, qui libère son nectar en soirée et attire ainsi ces pollinisateurs discrets.

Photo: Svehlik

Intégrer des fleurs au potager est une excellente façon d’attirer les pollinisateurs tout en embellissant l’espace. On peut les planter en bordure des rangs de légumes, entre les cultures pour favoriser la pollinisation, ou dans des espaces dédiés aux plantes nectarifères et mellifères. Pourquoi ne pas aménager une plate-bande de fleurs coupées au centre du potager? Certaines espèces, comme la capucine, jouent un double rôle en attirant les insectes bénéfiques tout en repoussant certains ravageurs. En choisissant des plantes vivaces qui fleurissent à différentes périodes de l’année, comme l’aspérule odorante, la monarde, l’achillée et l’agastache, cela assure une floraison durable et de la nutrition pour les pollinisateurs, sans nécessiter de replantation annuelle. Les plantes annuelles, comme les zinnias et les cosmos, apportent une touche de diversité saisonnière.

Les plantes hôtes, arbres et arbustes

Les chenilles, stade larvaire des papillons, dépendent de plantes hôtes spécifiques pour se nourrir avant leur métamorphose. Certaines espèces ont des besoins très ciblés: les chenilles du machaon raffolent du fenouil et de l’aneth, tandis que celles du monarque se nourrissent exclusivement d’asclépiade. Cultiver ces plantes permet d’accueillir davantage de papillons adultes au jardin. Cependant, ne vous inquiétez pas si certaines feuilles sont grignotées, c’est un signe que la biodiversité fait son travail!

Deux chenilles du machaon sur du fenouil. Photo: Oligo

Les arbres et arbustes fruitiers, tels que le sureau, le framboisier et les pommiers, jouent un rôle clé dans l’écosystème du jardin. Leurs fleurs nourrissent les pollinisateurs au printemps, et même les fruits tombés au sol profitent aux insectes décomposeurs et aux animaux granivores, contribuant ainsi au recyclage naturel des nutriments.

En choisissant des arbustes indigènes comme l’amélanchier, le cerisier de Virginie ou le sorbier, on peut fournir des graines et des fruits essentiels aux oiseaux et aux petits mammifères, surtout en hiver. Laisser certaines plantes monter en graines, comme la coriandre, offre une précieuse source de nourriture aux oiseaux granivores et aux petits mammifères, qui contribuent aussi à leur dispersion. Pourquoi ne pas planter des tournesols pour nourrir la faune de leurs graines tout en permettant aux haricots de grimper sur leurs tiges? On peut aussi installer des mangeoires temporaires en hiver pour soutenir les oiseaux durant cette période difficile et assurer leur retour les années suivantes.

L’amélanchier est un arbuste indigène qui attire les oiseaux et les petits animaux. Photo: Oksana Aleekseva.

Les plantes indigènes

Les plantes indigènes ont un rôle fondamental dans la biodiversité du potager. Contrairement aux plantes cultivées et introduites, elles ont évolué en harmonie avec la faune locale, ce qui les rend plus efficaces pour nourrir les pollinisateurs et autres animaux bénéfiques. Elles sont parfaitement adaptées aux conditions climatiques et aux sols de leur région, nécessitant ainsi moins d’entretien, d’arrosage et d’engrais. En plus d’attirer une faune spécifique, elles fournissent pollen, nectar et graines aux pollinisateurs, oiseaux et petits mammifères, tout en contribuant à la régénération naturelle des sols et à la stabilité des écosystèmes locaux.

Les pollinisateurs sauvages, tels que les abeilles solitaires, les bourdons et certains coléoptères, jouent un rôle essentiel dans la reproduction des plantes. Contrairement aux abeilles domestiques, ils visitent une plus grande diversité de fleurs et sont souvent plus efficaces pour la pollinisation de certaines cultures. En intégrant des plantes indigènes adaptées à leurs besoins, on favorise leur présence et on améliore la productivité du potager.

Abris

Les abris sont essentiels pour la biodiversité, car ils offrent refuge et protection aux différentes espèces du jardin. Après tout, on ne voudrait pas que nos petits alliés se retrouvent tout nus dans la rue! Comment leur offrir un chez-soi sans transformer notre propre maison en refuge pour toute la faune locale? L’idée est de partager notre jardin, pas notre bungalow ou notre 4 et demi!

Conserver des zones sauvages en friche est une manière simple, mais efficace d’offrir un refuge à la faune. En laissant certaines parties du jardin non entretenues, on crée des espaces où les petits animaux peuvent se cacher, se nourrir et se reposer à l’abri des prédateurs.

Les tas de pierres ou de bois constituent d’excellents micro-habitats pour les reptiles, les insectes et les petits mammifères. Ces structures naturelles leur offrent des cachettes idéales contre les intempéries et les prédateurs, tout en favorisant la biodiversité du sol.

Quoi planter?

Planter des arbustes denses comme les noisetiers, les sureaux et les aubépines, permet de créer des refuges sûrs pour les oiseaux et les petits mammifères. Une haie libre et composée d’espèces variées, offre à la fois protection, nourriture et habitats de nidification pour une multitude d’animaux.

Photo: emer1940

Aménager une prairie naturelle ou un pré fleuri permet à la flore et à la faune locales de prospérer librement. Ces espaces favorisent le retour des insectes pollinisateurs et des petits animaux qui y trouvent refuge et nourriture.

À chacun sa place

Laisser les feuilles mortes et les tiges creuses en hiver est un geste simple qui permet aux insectes, amphibiens et petits mammifères de passer la saison froide en toute sécurité. Ces débris naturels leur servent d’abri et de source de nourriture tout en enrichissant le sol. Le paillis sert aussi d’abri aux organismes qui participent à l’équilibre du jardin. 

Installer un hôtel à insectes permet d’héberger les abeilles solitaires, les chrysopes et les coccinelles, précieuses alliées du jardinier. Toutefois, il est important de bien l’entretenir et de le nettoyer régulièrement afin d’éviter la prolifération de parasites, comme la chambre de vos adolescents.

Photo: Harry Wedzinga

Enfin, les nichoirs pour oiseaux et chauves-souris encouragent leur présence dans le jardin. En offrant des abris sécurisés, on favorise la nidification et on contribue à la régulation des insectes nuisibles, tout en profitant du spectacle de ces animaux indispensables à la biodiversité.

Vous n’êtes pas obligé de tout faire non plus! Après tout, c’est un potager, pas une aire de conservation. Faites ce que vous pouvez; chaque petite action contribue non seulement à la biodiversité et à l’environnement, mais aussi à la santé de nos plantes et de cet écosystème qu’est notre jardin. Et on se régale en observant toute la vie qu’on y trouve… à moins que vous n’ayez peur des bibittes?


  1. C’est quand la fête des semances à Montréal?

  2. Merci pour cet excellent article, j’ai hâte au printemps! Pour l’instant, je regarde les oiseaux qui visitent les mangeoires dans mon jardin et qui grignotent les graines des vivaces que je ne taille pas à l’automne. L’idée du pré fleuri me séduit, retirer une partie gazonnée pour la fleurir, moins de tondeuse, plus de beauté!

  3. J’ai un jardin communautaire et je pense être la seule à offrir de l’eau aux oiseaux et insectes Je cultive aussi des fleurs pour attirer oiseaux et insectes. Il m’arrive à la fin de l’été d’avoir le bonheur d’apercevoir 2 monarques sur mes zinnias!

  4. Tu sais que sur mon terrain en arrière et en avant, il y a toutes sortes de choses qui poussent et qui y habitent… Et que rien n’est organisé!! Des arbres, des arbustes, des fleurs, des herbes, un champ fleuri grâce à toi, des bulbes, etc. Des oiseaux, des insectes, des écureuils, des chats, des ratons et un lapin par moment, etc. Depuis 2 ans, ce sont les merles qui mangent mes camerises! Je suis plus paresseuse que les deux jardiniers paresseux et je me plais à répéter que je partage le territoire avec grand plaisir!

  5. Très touchant de lire ce message de « Maman »! Ça rajoute à la beauté et à l’aspect apaisant de l’article. Merci!

  6. Bonjour,
    Est-ce que vous mettez des coquilles de noix (pistache, pecan etc )dans le paillis de votre potager ?
    Merci

    • On peut utiliser les coquilles de noix comme paillis au potager. Elles sont durables. Cependant, elles se décomposent lentement et peuvent rendre le sol compact si elles sont trop épaisses. Il est préférable de les concasser et de les mélanger à d’autres types de paillis, comme des feuilles déchiquetées.

  7. Les fortes pluies de 2024 m´ont donné une mare de 5 m de long sur la pelouse avec de
    l´eau en haut de la cheville. Une vraie pouponnière à moustique. C´en était plein.
    N´ayant tuteurer mes tomates les plants se sont affalés au sol avec parfois des tomates commençant à mûrir pile poil devant l´entrée d´un nid de souris. Alors oui, en jouant à Uber eat et offrant la bouffe à leur domicile, les souris, raton laveur qui grimpe la clôture et peut être écureuils se sont bien gavés tout
    l´été. J´ai eu plus de perte que de récolte. Quand au maïs j´ai eu 3 épis. Le raton laveur a pris le reste et détruit les plants Tout l´hiver une souris principalement dans la cuisine. Je ne
    l´ai jamais vu mais entendu et bien sur trouvé ses petits  » cadeaux » . Mes 4 chats qui les chassent à l´extérieur n´en n´ont que faire comme si c´est un copain de plus. Bientôt le temps plus doux on la capturera avec une chaudière et du beurre d´arachide pour la relâcher plus loin.
    Alors mes invités opportunistes se portent bien. Merci !

  8. Merci, ça m’aidera à influencer mon entourage.
    Je suis en accord et je pratique plusieurs de ces aménagements.

  9. Très intéressant. Toutefois quand vous dites de nettoyer l’abris à insectes ça me questionne car le mien est habité par des abeilles solitaires mais en rotation, des fois beaucoup d’espaces occupés, d’autres fois moins. Je ne vois pas trop comment je pourrais le nettoyer sinon au gel peut être? Merci!