Paresser au potager, pour plus de biodiversité
Le terme «biodiversité» est sur toutes les lèvres ces jours-ci, signe que la prise de conscience environnementale ne cesse de grandir. Dans les médias, de la radio aux réseaux sociaux, on nous régale d’histoires de pollinisateurs, de micro-organismes, de prés fleuris, de variétés anciennes et d’agriculture urbaine. C’est dans cet esprit que la Fête des semences et de l’agriculture urbaine de Québec, édition 2025, a choisi pour thème «cultivons la biodiversité», invitant chacun à découvrir comment enrichir le vivant, protéger les ressources naturelles et créer un écosystème plus équilibré pour nos cultures.
Mais au fond, savez-nous vraiment ce qu’est la biodiversité?
C’est tout simplement la variété de formes de vie qui cohabitent dans un même milieu: plantes, insectes, micro-organismes, oiseaux, mammifères… Mais aussi les relations entre ces différents organismes ainsi que celles des écosystèmes entre eux. Dans son sens le plus large, c’est toute la vie sur terre. Plus cette diversité est riche, plus l’ensemble est équilibré. Au potager, cela se traduit par des sols plus vivants, des cultures plus résilientes et moins de problèmes de ravageurs. Bref, en favorisant la vie sous toutes ses formes, vous vous facilitez la tâche à long terme!
«Êtes-vous en train de me dire qu’en plus de gérer les semis, la plantation, le désherbage, le bêchage, le labourage, la fertilisation, le compostage, le sarclage, le binage, les récoltes et la conservation, je dois aussi m’occuper de toutes sortes de bibittes?»
Non, je suis en train de vous dire le contraire! Toutes ces formes de vie, du plus petit au plus grand, qu’il s’agisse d’animaux, de végétaux ou de micro-organismes, vont s’occuper de votre jardin à votre place!
Entendez-moi bien: je ne prétends pas que la biodiversité est une solution magique à tous les problèmes du potager. Par contre, beaucoup de nos interventions ont des conséquences insoupçonnées sur l’équilibre du jardin et peuvent engendrer d’autres soucis pour lesquels nous sommes obligés d’intervenir.
Voici donc quelques façons de paresser au potager tout en favorisant la biodiversité!
Le sol, pas touche: il travaille déjà pour vous
Quand vous bêchez ou labourez, vous perturbez sans le vouloir toute la petite faune du sol – insectes, bactéries, champignons, etc. – qui s’affaire justement à rendre votre terre plus riche. Les vers, par exemple, adorent décomposer la matière organique et creuser des galeries, ce qui allège le sol et améliore son drainage. Les champignons mycorhiziens, eux, se branchent sur les racines pour aider vos plantes à mieux capter les nutriments. Et puis, il y a les bactéries qui libèrent des éléments clés comme l’azote et le phosphore, histoire d’améliorer la fertilité et la santé de vos cultures. Bref, quand vous laissez la terre tranquille, vous laissez aussi tout ce beau monde faire le gros du travail pour vous!

Un sol riche en vie abrite aussi des prédateurs naturels (carabes, araignées, etc.) qui s’attaquent aux ravageurs (limaces, larves, pucerons). Certains champignons produisent même des substances antibiotiques ou entrent en compétition avec des champignons pathogènes, freinant leur développement. Les bactéries, elles, sécrètent aussi des composés qui inhibent la prolifération de micro-organismes nuisibles.
Ça peut sembler contre-intuitif, mais bêcher et labourer finissent par compacter le sol. À court terme, il paraît plus léger, mais à moyen terme, il se tasse encore plus, car ces interventions perturbent les organismes qui assurent sa structure naturelle. À long terme, le sol devient donc plus compact et moins fertile. Moins on en fait, mieux il se porte!
Paille-moi ça!
Le paillis, c’est le meilleur ami du jardinier paresseux! Il protège le sol contre l’érosion, limite l’évaporation de l’eau, freine la pousse des mauvaises herbes et enrichit la terre en matière organique, tout en éliminant le besoin de sarcler. Moins d’arrosage, moins de désherbage, moins de corvées… et pourtant, un sol plus fertile et plein de vie. Pas pire, non?

En réduisant l’érosion causée par la pluie et le vent, le paillis empêche la perte de nutriments et préserve les micro-habitats des bactéries, champignons et insectes du sol. En maintenant un taux d’humidité stable, il assure la survie et l’activité de ces organismes essentiels à la fertilité du sol. De plus, il agit comme un isolant naturel, protégeant la terre des écarts de température et favorisant une vie souterraine active toute l’année. Et comme il bloque la lumière, il freine la germination des mauvaises herbes, réduisant ainsi considérablement le besoin de sarclage. Moins de travail du sol, moins de perturbations… une microfaune en pleine forme! Le paillis est aussi un refuge pour de nombreux prédateurs naturels, comme des insectes, des mammifères, des reptiles et des amphibiens, qui s’attaquent aux ravageurs du jardin.
Bref, le paillis ne fait pas que simplifier la vie du jardinier: il transforme le potager en un écosystème équilibré où la biodiversité s’épanouit naturellement.
Les mauvaises herbes, pas si mauvaises que ça
S’occuper des mauvaises herbes, c’est bien trop demandant pour un jardinier paresseux! Pas besoin de viser la perfection. Saviez-vous que tolérer certaines plantes «indésirables» au potager, quoique ça puisse sembler un brin fou, stimule en réalité la biodiversité et améliore la santé des cultures?
En maintenant un couvert végétal permanent, incluant les mauvaises herbes, on stimule l’activité biologique du sol. Les racines des adventices abritent et nourrissent une multitude d’organismes essentiels, comme les vers de terre, les bactéries et les champignons. De plus, la diversité des systèmes racinaires améliore la structure du sol, facilitant ainsi l’infiltration de l’eau et l’aération naturelle.

Certaines mauvaises herbes jouent également un rôle clé en attirant des pollinisateurs et des insectes prédateurs. Des plantes comme le trèfle ou encore la moutarde des champs offrent pollen et nectar aux abeilles, bourdons et syrphes, tout en servant de refuge à des prédateurs naturels comme les coccinelles et les chrysopes, qui aident à réguler les populations de pucerons et autres ravageurs.
Les adventices et les interactions biologiques du sol
En plus de soutenir la faune utile, ces plantes spontanées participent aussi aux interactions biologiques du sol. Plusieurs adventices, comme le pissenlit, forment des symbioses avec des champignons mycorhiziens, ce qui peut indirectement améliorer l’absorption des nutriments par les cultures voisines. Elles aident aussi à maintenir l’humidité du sol, à limiter l’érosion et à stabiliser la température du sol, jouant ainsi le même rôle que le paillis.
Toutefois, il ne faut pas trop se laisser aller quand même! Certaines adventices, comme le chiendent, sont trop envahissantes et peuvent entrer en concurrence avec les cultures. Une gestion sélective permet d’en tirer les avantages sans nuire aux cultures. On peut, par exemple, conserver certaines espèces mellifères dans les allées et entre les cultures tout en contrôlant celles qui prennent trop de place.
Moins de pesticides, plus de bébittes… bénéfiques!
Éliminer des pesticides, c’est un geste gagnant pour tout le monde, pas seulement pour l’environnement. D’abord, cela permet de sauver les pollinisateurs, ces travailleurs de l’ombre. Les pesticides, même ceux qui sont biologiques, ont l’habitude de faire disparaître des amis comme les abeilles et les bourdons, qui, pourtant, jouent un rôle crucial dans la pollinisation. Plus de pollinisateurs, plus de pollinisation. Résultat: des fruits et des graines plus nombreux, plus gros et plus savoureux dans le jardin.
De plus, l’absence de pesticides aide à maintenir un équilibre naturel des ravageurs. Les populations d’insectes prédateurs, tels que les guêpes parasitoïdes et les araignées, se stabilisent, ce qui permet de mieux contrôler les nuisibles comme les pucerons et les chenilles. Cela empêche aussi les explosions soudaines de ravageurs, qui se produisent souvent lorsque leurs ennemis naturels sont éliminés.
Pesticides et santé du sol
L’impact sur la santé du sol est également positif. Les pesticides peuvent perturber la microfaune bénéfique, notamment les vers de terre et les champignons mycorhiziens, qui sont essentiels pour la fertilité et la résistance des plantes.
Un jardin sans pesticides respecte les écosystèmes environnants. Les insecticides, fongicides et herbicides peuvent se disperser dans les cours d’eau ou affecter la faune et la flore alentour. Un jardin écologique, au contraire, contribue à créer des corridors écologiques qui favorisent la circulation des espèces, comme les oiseaux insectivores, les petits mammifères, les reptiles et les amphibiens. Ces espèces jouent un rôle crucial dans le contrôle des insectes nuisibles et dans le maintien de la biodiversité. Certes, ils peuvent aussi manger nos cultures, mais ils font partie de l’équilibre naturel. En général, c’est un mal pour un bien. Si ces animaux n’étaient pas là, on risquerait une explosion de ravageurs, sans aucun prédateur naturel pour les contenir. Je suis prêt à céder une partie de mes récoltes aux écureuils, mais, s’il vous plaît, laissez-m’en un peu!
Laissez la nature faire le ménage à votre place
Le «grand ménage» d’automne ou de printemps dans le jardin est une pratique qui requiert beaucoup trop d’effort pour moi. Pourquoi le faire lorsque l’éviter est bénéfique pour la biodiversité et la productivité du potager?
En évitant d’arracher systématiquement les feuilles mortes et autres résidus de culture, on permet aux insectes bénéfiques, tels que les chrysopes et les coccinelles, de trouver des abris hivernaux dans les tiges creuses, le paillis ou sous les feuilles. De plus, cette végétation protège également les racines des plantes vivaces et bisannuelles contre le froid. Les petits animaux, comme les crapauds, bénéficient également de ces refuges naturels.

Cette approche aide aussi à mieux protéger le sol. Les résidus végétaux, comme les feuilles, tiges et racines, limitent l’érosion et le compactage, tout en enrichissant la terre en matière organique. Ils nourrissent les micro-organismes, augmentent la teneur en humus et améliorent la structure du sol. Plutôt que de voir ces «déchets» comme un problème, pourquoi ne pas en tirer profit? Laissez-les se décomposer sur place: moins de travail pour vous, moins besoin de fertiliser!
Les graines de la biodiversité
Laisser certaines plantes monter en graines est également bénéfique pour la biodiversité. Cela fournit de la nourriture pour les oiseaux granivores et permet la dissémination naturelle de semences. De plus, les plantes qui fleurissent tardivement, comme certaines laitues ou radis laissés en place, peuvent nourrir les pollinisateurs en automne ou au début du printemps, prolongeant ainsi la période de floraison. Et je suis toujours heureux de trouver de la coriandre poussant spontanément dans mon jardin, même si je n’en ai pas planté depuis des années!
Il est mieux de ne laissez pas en place les plants malades ou infestés de ravageurs, car ils peuvent abriter des pathogènes et des insectes nuisibles qui survivront à l’hiver et risquent de contaminer vos cultures au printemps suivant.
Favoriser la biodiversité et réduire notre travail
Non, favoriser la biodiversité ne réglera pas tout : il y aura toujours des ravageurs, des maladies et des adventices. Si seulement les écureuils mangeaient les mauvaises herbes au lieu de mes tomates! Vous n’êtes peut-être pas prêt pour un « potager-fouillis », mais même adopter quelques pratiques paresseuses peut alléger le travail, tout en enrichissant la santé et la biodiversité de votre jardin. Pourquoi se compliquer la vie quand la nature s’organise si bien?
La Fête des semences et de l’agriculture urbaine de Québec 2025 se tiendra les 1er et 2 mars au pavillon Alphonse-Desjardins de l’Université Laval. Cet événement gratuit rassemble plus de 65 exposants et propose des conférences, réparties entre présentations sur place et en ligne. Sous le thème «Cultivons la biodiversité», les sujets incluront la lutte biologique, les pollinisateurs, la santé des sols, et les plantes envahissantes ou indigènes.
Les visiteurs pourront participer à des ateliers et profiter d’une activité gratuite de partage de semences. L’événement met également en avant des produits locaux, écoresponsables et gourmands. Avec des activités familiales et des opportunités d’apprentissage, la Fête des semences célèbre la biodiversité et l’agriculture urbaine dans un cadre convivial et éducatif.
J’y serai avec Audray de tisanji pour échanger avec vous sur les plantes, l’aménagement et, bien sûr, les semences ! En prime, une surprise spéciale t’attend : un petit cadeau qui attirera les pollinisateurs et embellira ton espace avec une touche naturelle… mais chut, on garde un peu de mystère ! Attention, il n’y en aura pas pour tout le monde ! Premier arrivé, premier servi.
Pour réduire ma surface gazonnée, varier et faire des combinaisons dans mes plates -bandes- 2 plein soleil, l’autre pas mal ombragée, et améliorer mon potager.
Depuis quelques jours, presqu’impossible de lire vos articles que je reçois par courriel, puisque déjà abonnée et réabonnée à votre demande. Une fenêtre s’ouvre sans cesse pour la mise à jour de mon abonnement déjà effectuée que j’ai confirmée via le lien que vous m’avez fait parvenir par courriel. J’espère que ce problème se règlera rapidement !
Même chose pour moi: on me demande toujours de me réabonner, même si je l’ai fait et confirmé…
Je suis déjà inscrite mais la fenêtre d’inscription prend tout la. Place et je dois me réinscrire pour qu’elle disparaisse .
Pareil pour moi! 🙁
Apprécié
Articles très appréciés. Merci!
Je suis aussi du genre à ne jamais nettoyer mon terrain en automne et même au printemps et à ma grande surprise sans que je plante aucune graine dans mon ancien bac à tomate , mère nature m’a fait une surprise, 10 plants de tomate sans que je lève le petit doigt.. Belle leçon d’humilité
Des sujets toujours intéressants et qui nous concernent,
Depuis plus de 15 ans que j’habite à cette adresse où il y avait déjà plusieurs vivaces matures, je n’ai encore jamais utilisé aucun insecticide uniquement de l’huile de dormance pour mes pommiers
J’ai beaucoup diminué ma surface de potager qui est maintenant dans des bacs surélevés cependant je suis au prise avec des scarabées japonnais que faire
Voici un article sur le sujet: https://jardinierparesseux.com/2025/01/23/pour-controler-le-scarabee-japonais/
Merci pour cet autre bel article, Mathieu!
Concernant les commentaires sur la fenêtre qui apparaît demandant de se ré-abonner, je l’ai aussi. Cependant, quand je clique à l’extérieur de la fenêtre, elle disparaît. Pas besoin de me ré-abonner à chaque fois. Si ça peut aider…