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Rentrer les fines herbes ou non?

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Fines herbes placées sur un rebord de fenêtre pour une séance de photos, mais dans quel état seront-elles dans quelques semaines?

Depuis au moins 38 ans, différents magazines et émissions télévisées nous font miroiter l’idée qu’on peut facilement cultiver les fines herbes dans la maison pendant l’hiver et ainsi avoir toujours des aromates frais à ajouter à nos mets. Je le sais, car je l’ai essayé moi-même il y a 38 ans, influencé par un magazine que j’avais parcouru dans la salle d’attente de mon dentiste.

Fasciné par le concept, j’ai installé toute une variété de fines herbes devant la grande fenêtre orientée plein sud de ma cuisine. Après un début plutôt encourageant en septembre, les plantes ont commencé, pour la plupart, à dépérir peu à peu: nouvelles pousses étiolées, feuilles mortes ou desséchées, araignées rouges (tétranyques) sur certaines plantes, aleurodes (mouches blanches) sur d’autres, etc. Fin janvier, la plupart étaient mortes et celles encore en vie étaient plutôt mal en point.

L’automne suivant, je me suis repris, cette fois sous une lampe fluorescente dans la cuisine installée expressément pour la culture des fines herbes. Les résultats étaient meilleurs pour certaines plantes, mais en général quand même mitigés.

Finalement, j’ai presque abandonné la culture des fines herbes à l’intérieur. À quelques exceptions près.

Je suis venu à la conclusion que la plupart des journalistes qui font la promotion de la culture des fines herbes à l’intérieur ne savent absolument pas de quoi ils parlent et ne font que répéter, comme des perroquets, des informations erronées que d’autres journalistes aussi mal informés ont déjà dit ou écrits.

Ainsi les mauvaises informations se transmettent de génération en génération.

Plantes malheureuses

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À peine 3 semaines après la rentrée, ces basilics sont déjà morts.

Le problème, c’est que peu de fines herbes tolèrent les conditions qu’on peut leur offrir dans nos maisons pendant l’hiver, surtout le faible éclairage disponible et l’air trop sec.

En effet, même devant une grande fenêtre orientée au sud, l’éclairage reçu par les plantes en décembre et en janvier dans nos demeures est l’équivalent d’un emplacement ombragé à l’extérieur en juin et en juillet, notamment parce que les journées sont très courtes et souvent grises. Les lampes fluorescentes aident, bien sûr (réglez la minuterie de 16 à 18 heures par jour pour assurer un maximum de lumière), mais donnent un éclairage tout au plus moyen, de quoi garder les plantes en vie, mais pas vraiment en croissance active.

Aussi, le taux d’humidité de l’air dans la plupart des demeures approche davantage celui du Sahara que celui que les fines herbes aiment, soit au moins 50%.

Or, les plantes affaiblies par un manque de lumière et un air trop sec, en plus de s’étioler, deviennent sujettes aux maladies et aux insectes, notamment aux aleurodes (mouches blanches) et aux tétranyques (araignées) et finissent par dépérir.

Mais il ne faut pas abandonner tout espoir: il y a certaines fines herbes qui réussissent bien dans la maison. En voici un résumé:

Les plus faciles

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Si vous pouvez trouver un laurier-sauce sans cochenilles, c’est une plante qui s’adapte très bien aux conditions dans nos demeures.

Laurier-sauce (Laurus nobilis) : cette plante aux feuilles coriaces est la plus facile des fines herbes pour la maison. On peut la placer au soleil, à la mi-ombre ou sous une lampe fluorescente. Sa croissance est très lente (mais elle poussera quand même) et elle semble indifférente à la température tant qu’il n’y a pas de gel. À force de rentrer le laurier-sauce tous les automnes et de le sortir au soleil tous les étés, il deviendra graduellement un arbuste assez robuste, voire un petit arbre.

Attention toutefois aux cochenilles à carapace (kermès)! La présence de cochenilles sur les lauriers-sauce semble presque universelle au Québec ces temps-ci et les plantes en vente en pépinière en semblent généralement déjà infestées. Lisez Encore un laurier infesté pour plus de détails.

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Persil

Persil (Petroselinum crispum): si vous l’empotez et le placez dans un endroit bien éclairé, il poussera lentement mais sûrement tout l’hiver. Surveillez les tétranyques (araignées rouges): elles l’aiment bien. Au printemps, il commencera à fleurir et deviendra amer et inutilisable. Jetez-le alors au compost.

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Stevia

Stevia (Stevia rebaudiana): cette herbe ultrasucrée est une des rares fines herbes qui est d’origine tropicale (la plupart proviennent de climats où l’hiver est frais sinon froid) et, de ce fait, tolère très bien les températures chaudes que nous maintenons dans nos demeures. Si la plante s’étiole un peu, taillez-la tout simplement. Ne la laissez pas sécher, tout simplement.

Dans la même veine, d’autres plantes aromatiques d’origine tropicale peuvent bien pousser dans nos demeures, comme les divers géraniums à senteur (Pelargonium spp.) et le rau r?m ou coriandre vietnamienne (Persicaria odorata), etc. La citronnelle (Cymbopogon spp.) aussi, mais seulement si vous pouvez lui offrir une très forte intensité lumineuse.

Les «pensez-y bien»

Voici quelques fines herbes qui réussiront dans la maison si vous rencontrez leurs besoins spéciaux.

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Ciboulette

Ciboulette (Allium schoenoprasum), mélisse (Melissa officinalis) et estragon français (Artemisia dracunculus sativa): trois plantes de climat froid qui risquent de dépérir peu à peu à la température de la pièce… à moins de leur faire subir un court hiver. Empotez-les en septembre ou octobre et laissez-les en plein air jusqu’à ce qu’elles aient subi deux ou trois bonnes gelées, soit généralement vers la fin de novembre ou au début de décembre au Québec, vers Noël ou plus tard en Europe. En les rentrant à la chaleur, les plantes se penseront rendues au printemps et recommenceront à pousser.

Origan (Origanum vulgare), sauge (Salvia officinalis) et thym (Thymus vulgaris et autres): les plantes adultes «vieillissent mal» quand on les rentre dans la maison. Mieux vaut prendre des boutures de tige cet automne et alors cultiver de jeunes plants dans la maison. Le thym citron (T. x citriodorus) est particulièrement facile à cultiver à l’intérieur.

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Les semis de basilic réussissent mieux que les plantes rentrées à l’automne.

Basilic (Ocimum basilicum): autre plante qui vieillit très mal. Même, elle survit rarement longtemps à la transition entre l’extérieur et l’intérieur. Par contre, on peut la semer à l’intérieur (sous une lampe fluorescente) et obtenir d’excellents résultats avec les jeunes plants ainsi produits. Dès que les plants plus matures commencent à moins bien pousser, semez-en d’autres. À force de semer et de récolter les plants de basilic dans leur jeunesse, on peut bien les réussir. Notez que le basilic aime la chaleur: il faut le garder dans une pièce qui reste relativement chaude même la nuit (de préférence, au-dessus de 15?C).

Il existe toutefois certains basilics qui réussissent a bien pousser tout l’hiver dans la maison, tant qu’on peut offrir un fort éclairage du moins, comme le basilic africain (O. ‘African Blue’) et le basilic citron ‘Pesto Perpetuo’ (O. x citriodorum ‘Pesto Perpetuo’)… mais alors, ni l’un ni l’autre n’ont le même gout que le basilic classique (O. basilicum).

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Romarin: il faut le plein soleil et la fraîcheur pour bien le réussir.

Romarin (Rosmarinus officinalis): il est inutile de rentrer cette plante dans une pièce fortement chauffée: elle ne fera que dépérir. Mais si vous avez une pièce peu chauffée et très bien éclairée, où la température ne dépasse pas 15°C la nuit, que vous vous l’arrosez attentivement, juste assez pour que le terreau soit à peine humide, le romarin peut donner d’excellents résultats.

La lavande vraie (Lavandula angustifolia) aussi préfère passer ses hivers en pleine terre, mais peut parfois réussir sous les mêmes conditions que le romarin: fort éclairage et faible température. La lavande à toupet (L. stoechas et ses hybrides) peut aussi passer l’hiver dans la maison sous les mêmes conditions.

Menthe (Mentha spp.) et livèche (Levisticum officinale): il s’agit de fines herbes rustiques qui sont habituées au froid et qui préfèrent passer l’hiver dehors. Quand on essaie de les cultiver à l’intérieur, habituellement elles dépérissent peu à peu, incapables de s’acclimater à une chaleur constante et l’air sec. Mais si vous avez une pièce à peine chauffée mais très bien éclairée ou une serre froide…

À éviter

Aneth (Anethum graveolens), anis (Pimpinella anisum), coriandre (Coriandrum sativum), bourrache (Borago officinalis) et cerfeuil (Anthriscus cerefolium): il s’agit de plantes annuelles qui arrivent à la fin de leur cycle de vie à l’automne, quand elles ne sont pas déjà mortes à ce moment. On ne peut pas faire revivre une plante génétiquement programmée pour mourir! On peut toujours en semer de nouvelles (une lampe fluorescente sera alors nécessaire) pour l’utilisation de leurs feuilles, mais elles arrivent rarement à fleurir dans la maison, donc leurs graines (qui est souvent la partie consommée) ne seront pas produites.

Pendant le séjour hivernal des fines herbes…

Si vous rentrez des fines herbes pour l’hiver, il faudra leur offrir, tel que mentionné, un éclairage maximal et, de préférence, une bonne humidité atmosphérique. À cette dernière fin, un humidificateur peut être utile. Arrosez-les copieusement, mais seulement quand le terreau est sec au toucher.

Si vous cultivez vos fines herbes devant une fenêtre, il est inutile de les fertiliser à la fin de l’automne et au début de l’hiver, car elles ne pousseront pas ou si peu: attendez la mi-février ou le mois de mars, quand leur croissance redémarrera, pour commencer à le faire. Sous une lampe fluorescente, par contre, leur croissance continuera tout l’hiver et il vaudra mieux alors les fertiliser mensuellement avec un engrais tout usage pendant toute cette saison.

Surveillez la présence de prédateurs, surtout araignées rouges et aleurodes, mais aussi pucerons. Traitez-les avec un savon insecticide si vous en décelez.

Et voilà: avec ces quelques renseignements, vous devriez être capable de cultiver au moins certaines fines herbes dans votre demeure cet hiver… et d’impressionner vos invités avec des fines herbes fraîches lors de votre prochaine réception!

 

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commentaire sur "Rentrer les fines herbes ou non?"

  1. Pour ma part, j’ai conservé un basilic (sûrement un ocimum basilicum) pendant deux ans à l’intérieur, sur le rebord d’une fenêtre orientée au nord, au-dessus d’un calorifère à eau chaude, dans un appartement où la température descendait rarement sous 27 degrés celsius. Je ne lui donnais aucun soin particulier.

    Ma mère conserve depuis des années du basilic (sûrement un ocimum basilicum) à l’intérieur. Elle rentre des branches de ses plans extérieurs, leur fait faire des racines dans un verre d’eau et les plante en terre. Elle obtient de magnifiques plants, très fournis, presque des arbres. Elle les met au bord d’une fenêtre orientée plein sud et leur donne beaucoup d’eau (elle remplit d’eau la soucoupe sous le pot). La température intérieure se maintient à environ 23 degrés celsius à l’année, et ses fenêtres ne laissent pas rentrer de froid l’hiver.

  2. Un article très intéressant 🙂 merci pour les informations 😉

  3. J’ai un aquarium 90 gallons avec éclairage néon bleu et blanc. Si j’entre mes fines herbes pensez vous que j’aurais du succès! Le gravier de deux pouces d’épaisseur pourrait garder un niveau d’humidité adéquat à moins que ça se mette à sentir mauvais

  4. […] en pot ou en pleine terre. (J’ai discuté plus longuement de cette polémique dans le blogue Rentrer les fines herbes ou non). Mais si un «succès modeste» vous suffit, voici quoi […]

  5. Cette plante n’est pas “fidèle du type” par

  6. Je vais tenter l’expérience avec mon romarin (un plant maigrichon acheté en épicerie). Il est actuellement dans un pot à la mi-ombre et pousse très bien. Quand devrais-je le rentrer? Vous dites que cette plante aime la fraîcheur. Tolère-t-elle alors les premiers gels?

    Pour ce qui est du basilic et du thym, quand est le meilleur temps pour les rentrer?

    Par ailleurs, j’ai semé un peu tardivement de la ciboulette à l’intérieur. Je n’ai réussi qu’à sauver un seul plant, que j’ai mis dans une jardinière avec mon persil, mon thym et mon basilic. Je me demandais si je pouvais mettre ce plant en terre à l’automne pour espérer pouvoir en récolter l’année prochaine. Devrais-je le faire maintenant pour que mon plant est le temps de faire des racines?

    Merci encore une fois de vos précieux conseils.

  7. […] fait longtemps que j’ai abandonné mes efforts pour cultiver des potées de légumes et d’herbes aromatiques sur le rebord de la fenêtre. C’était toujours un désastre! Refus de pousser, croissance pâle […]

  8. Pourriez-vous me dire si les lampes de croissance pour les plantes (style avec lumières rouges et bleues) sont efficaces?

  9. […] à court terme, mais ni les herbes ni les légumes ne sont faciles à cultiver à l’intérieur; la plupart meurent assez rapidement. Pourquoi alors compliquer encore plus leur lutte pour la survie en les plantant à […]

  10. J’avais essayé plusieurs fois avec de l’estragon (déjà en pot, je n’ai pas de jardin), mais ils sont morts, mangés par les araignées rouges. Elles ont l’air de beaucoup aimer cette plante aussi.

    • L’estragon est une vivace de climat assez froid (zone 6, parfois 5). Il est tout à fait normal qu’il soit en mauvais état quand on essaie de le cultiver à l’intérieur de nos maisons chauffées à une période où il préférerait dormir au froid à l’extérieur. Et comme il est affaibli, ces ennemis l’attaquent. C’est ce qui arrive quand on soustrait une plante de son environnement habituel.

  11. Bonjour
    J’en suis à ma 3e année de production de semis de fines herbes, tomates, poivrons, etc grâce à vos bons conseils et ça pousse. J’achète très peu de plants maintenant. Pour la première fois, l’automne dernier, j’ai mis un de mes plants de basilic et sa motte de terre dans un pot de 2 litres de crème glacée Coaticook. 🙂 Je l’ai entré à l’intérieur ainsi que le plant de laurier-sauce. Ne voulant pas être envahi par des insectes indésirables, je les ai aspergés de bug-tek suggéré par le pépiniériste. Je les ai mis sur une petite table à la hauteur de la fenêtre coté sud-est. C’est l’unique l’éclairage qu’ils ont reçu. Je les ai arrosés souvent car la terre séchait rapidement. J’ai très peu utilisé les feuilles du basilic parce que la production était très lente. A la mi-février, j’ai commencé le fertilisant à très petite dose. Il a produit beaucoup de feuilles que j’ai pu cueillir en bonne quantité sans compter qu’il a fait de nouvelles tiges. Il y a 3 semaines, il a commencé à produire des fleurs que j’ai enlevées. Depuis une semaine, j’ai remarqué des gouttelettes collantes et de petits dépôts jaunâtres sur certaines tiges et leurs feuillages. Sur les plus vieilles tiges, les dépôts sont noirs. Pour l’instant, les jeunes tiges et leurs feuillages n’en ont pas. Les dépôts s’enlèvent en frottant avec un tissu. Savez-vous ce que sont ces dépôts jaunâtres qui noircissent avec le temps? Est-ce les oeufs d’un insecte? Que dois-je faire? Merci beaucoup

  12. Je pense avoir trouver: des “cochenilles”. Qu’en pensez-vous? Si c’est bien cela, je crois qu’elles viennent du laurier… je viens de lire votre article “Encore un laurier infesté”. J’ai mis à la poubelle le basilic. J’ai des semis en route par contre, je ne veux pas mettre le laurier à la poubelle du moins, pas tout de suite. Je viens de l’asperger d’insecticide. Je verrai. D’ici là, est-ce possible d’acclimater mon laurier à l’extérieur maintenant? Si oui, comment dois-je m’y prendre? C’est un laurier que j’ai acheté l’été dernier. C’est tout nouveau pour moi. Merci beaucoup.

    Lise

    • Je comprends que le laurier a une plus grande valeur qu’un plant de basilic, mais pas si elle est infestée de cochenilles. Mieux vaut vous en débarrasser aussi. Il se trouve que le laurier peut tolérer quelques degrés de gel. Vous pouvez essayer de le mettre à l’extérieur, mais encore, je vous suggère de vous en débarrasser. En général, même qu’on fait des traitements adéquats et qu’on pense avoir conquis le problème, il revient au galop.

  13. bonjour je voudrais savoir ,j’ai laissé mon plant de basilic a l’extérieur,il a gelée et sécher
    ,est il toujours comestible

  14. ok merci pour l info