Les paillis font foi de tout dans la nature!
Les paillis! On en parle de plus en plus, et pour cause! C’est qu’il s’agit d’une couche essentielle à la vie végétale. De plus, c’est la vie végétale qui les produit! Cependant, quelles matières végétales conviennent à nos cultures? Quelle culture en bénéficierait? Quelle épaisseur doit-on mettre? À quel moment est-ce nécessaire? Comment doit-on appliquer le paillis? Est-ce encore une mode de plus pour nous faire dépenser?
Autant de questions pertinentes auxquelles je vais répondre en abordant ce thème important sous un angle environnemental et non celui d’une technique de jardinage en compétition avec d’autres techniques qui n’utilisent pas les paillis.

Le paillis sous l'angle environnemental
La nature fait bien les choses! Elle démontre chaque jour, et partout sur la planète, qu’elle prend soin des végétaux de manière à ce qu’ils soient autonomes dans des écosystèmes où tous les êtres vivants impliqués trouvent leur compte. De la plus petite bactérie jusqu’au précieux ver de terre, toute cette vie contribue à la vie des autres dans un équilibre qui assure la vie à perpétuité.
Pour assurer cet équilibre, il y a des lois à respecter! Une société sans lois et sans règles deviendrait le chaos. En jardinage et en horticulture, c’est pareil! Si l’on transgresse des lois fondamentales en environnement, les problèmes surgissent et, avec eux, la consommation de produits pour tenter d’y remédier.
Les bonnes utilisations du paillis
L’utilisation de paillis fait partie du respect de ces lois fondamentales en environnement! Les paillis sont d’ailleurs la base même de tout l’écosystème bénéfique aux végétaux. Ils font partie du grand cycle de la vie. Dans un cycle, il n’y a ni début ni fin, cependant pour les besoins de l’article, considérons le paillis comme point de départ de ce cycle.

Dans la nature, lorsqu’une matière végétale meurt (feuilles des arbres, aiguilles de conifères, herbes dans les prairies), celle-ci se retrouve au sol et forme une couche de protection. Bien que les plantes d’où elle provient ne s’en servent plus, il n’en demeure pas moins qu’elle leur est encore très utile: elle devient une couche de protection pour la vie dans la terre, pour régulariser la température du sol et pour éviter que l’eau du sol ne s’évapore.
C’est déjà beaucoup, mais ce n’est pas tout! Un rôle primordial et trop souvent ignoré dans le monde du jardinage est que les paillis dans la nature deviennent inévitablement la nourriture des propres plantes les ayant produits.
Le cycle de vie de la nature
Les plantes dans la nature n’ont pas besoin de se rendre au magasin pour s’acheter de l’engrais, du compost, des mycorhizes et autres, comme nous le faisons. Un jour, je me suis demandé s’il serait possible de prendre soin de mes plantes de la même façon que la nature le fait?

La première évidence que j’ai reconnue en observant la nature, c’est que partout où il y a des végétaux sauvages, il y a toujours trois couches de matière: le sol, l’humus recouvert d’une couche de végétaux morts ou vivants. C’est toujours comme cela dans la nature! C’est comme un pâté chinois (steak, blé d’Inde, patate), ce mets connu des Québécois, mais qui l’est moins ou pas du tout pour nos lecteurs d’outre-mer.
Trois couches distinctes et ayant des rôles bien définis et surtout très essentiels, c’est ce qu’il faut retenir! Il est donc logique d’avoir une couche de surface constituée de végétaux, morts ou vivants, qui cache le sol (paillis ou plantes couvre-sol).
Lorsqu’on cultive des plantes d’une saison, tels les légumes et fines herbes ou des fleurs annuelles, il est impensable de mettre des couvre-sols, car ils n’ont pas le temps de s’établir. Alors il reste l’utilisation de paillis. Mais lesquels?
Quel type de paillis choisir?

On peut s’en faire proposer de tous les types… Quelles doivent donc être les qualités d’un paillis pour qu’il soit adéquat et joue tous les rôles que la nature lui fait jouer?
- Il faut que ce soit de source végétale (pas de plastique ou autres).
- Il faut qu’il soit dans le même groupe de végétaux que les plantes sur lesquelles on l’applique: paillis de conifère pour conifère, paillis de feuilles* et de copeaux pour les feuillus et paillis de plantes herbacées pour le jardin, les vivaces et les annuelles.
- Il doit se décomposer rapidement afin de nourrir la vie dans la terre.
- Il doit être peu ou pas décomposé, pas trop grossier et doit rester aéré.
- Il doit être disponible et nécessiter peu de transport (question environnementale).
- Il doit finalement être abordable afin d’être accessible à tous les budgets.
*Notez que le paillis de feuilles peut aussi être utilisé sur les cultures de plantes herbacées, car son rapport carbone/azote est relativement équilibré.
Les matières qui répondent à ces 6 qualités se retrouvent facilement dans la nature, dans notre environnement. Si, pour sauver la planète, on se doit de réduire la surconsommation, voilà donc un moyen de le faire en profitant de ce que la nature nous donne! Feuilles des arbres, herbes de toutes sortes, y compris les plantes aquatiques qui se compostent au fond de nos lacs au lieu de dans nos jardins, résidus de culture, aiguilles de conifères, copeaux de bois, BRF, autant de matières qui nous entourent. Il s’agit de choisir la bonne matière pour la bonne culture!
Maintenant, l’épaisseur!
On entend souvent dire qu’il faut mettre 5 à 10 cm de paillis. Je me suis souvent demandé: «Mais d’où vient cette affirmation?»
Sur le plan de la logique environnementale, je n’ai jamais vu dans la nature aussi épais de feuilles ou d’aiguilles dans les forêts et autant d’herbe morte dans les prairies sauvages! Imaginez pailler de 10 cm de matières vos petites carottes dans le jardin ou vos petites fleurs annuelles dans vos plates-bandes!
La nature n’ajoute qu’une fine couche de matière, rarement plus de 1 cm par année, mais elle en ajoute à chaque année, créant ainsi une superposition de matière à des stades différents de décomposition, apportant ainsi de la nourriture sur une base régulière, mais non excessive aux végétaux.

Qu’arrive-t-il lorsqu’on utilise de 5 à 10 cm de paillis?
- Apport excessif de matière carbonée affectant ainsi l’équilibre du sol, en particulier la disponibilité de l’azote pour vos plantes.
- Le sol se tiendra plus frais durant l’été, car un paillis isole. S’il est recommandé de couvrir nos plantes fragiles au gel d’un paillis pour l’hiver, il en va de même pour empêcher le soleil de réchauffer le sol durant l’été.
- Les risques de pourriture des collets de certaines plantes s’accentuent.
- Dans un jardin potager, la trop grande quantité de matière en surface devient un embarras le printemps suivant, car le tout n’est pas décomposé, surtout s’il s’agit de matière riche en carbone.
- Imaginez le volume de matière qu’il faut pour couvrir un jardin à raison de 5 à 10 cm d’épaisseur! C’est insoutenable sur le plan environnemental! Comment voulez-vous que la nature fournisse autant de ressources versus le si peu de production de ressources que vous récolterez ou qui retournera au sol?
Devant cette évidence de la nature, la seule raison que j’ai trouvée et qui justifierait l’emploi de tant de paillis serait de répondre à cette tentation forte de notre système économique à surconsommer des produits qui se vendent.

Mes recommandations
Pour conclure, voici mes recommandations:
- Prioriser les ressources que la nature vous donne. Dans mes livres et en conférence, j’explique comment bien gérer ces matières.
- Priorisez l’utilisation des matières comme paillis plutôt que de les envoyer au compostage. Vous augmenterez ainsi leur utilité et diminuerez vos efforts et vos dépenses.
- Appliquez entre 2 à 3 cm d’épaisseur et en ajouter au besoin, lorsque l’épaisseur tombe en bas de 1,5 cm.
- Ne laissez jamais un sol à nu, à moins que vous teniez assurément à désherber, à arroser, à biner, à fertiliser et à gérer des problèmes de culture dus à des plantes stressées parce que le «pâté chinois naturel» n’est pas en place.
Bon jardinage!
Bonjour dans votre phrase
Priorisez l utilisation des matières comme paillis. De quelle matière sagit il
Merci pour votre réponse
Feuilles des arbres, tonte de pelouse, mauvaises herbes, résidus de culture, plantes aquatiques.
Merci pour cet article éclairant. Il me rassure sur la quantité de feuilles à étendre au jardin et dans mes plate-bandes. De plus, je me questionnais sur la pertinence d’utiliser les tiges de vignes comme paillis. Nulle part, même chez les vignerons, on ne semble utiliser cette matière au sol. Or, d’après mon expérience réalisée sur un an et à la lumière de votre article, je crois comprendre qu’une qualité de paillis lui fait défaut : il ne se décompose pas assez rapidement afin de nourrir la vie dans la terre. Voilà l’éclairage qu’il me manquait pour comprendre. Alors merci encore! Ça fait longtemps que je cherchais cet élément de réponse.
Je suis heureux que cet article vous ait éclairé sur cette question.
font foi de tout ? C’est bizarre cette formulation… non? ça veut rien dire…
Pas autant que de mettre « anonyme » au lieu de votre nom!
Sur les déchiqueteuse on fait souvent référence au ration de déchiquetage ( 20:1 / 10:1) qui détermine finalement la grosseur des copeaux. Y a t’il un ratio idéal pour un potager et un verger ? Merci !
Plus c’est fin et plus ça se décomposera vite, ce qui est l’idéal! En autant que la matériel reste aéré une fois mis en place.
Cet article m’aide à comprendre la quantité de paillis, j’ai déjà essayé écorce de cacao, cèdre, et paille. Depuis peu, j’utilise les feuilles mortes et BRF. Reproduire ce que la nature fait est une garanti de succès
Je vous félicite pour cette compréhension!
Bon jardinage, Madeleine!
Bonjour monsieur Serge,
J’ai beaucoup d’aiguilles de conifères sur mon terrain. Est ce que c’est bon pour le potager? Est ce que cela acidifie le sol?
Merci pour cet article très instructif!
A
Si vous relisez l’article, il est dit:
Il faut qu’il soit dans le même groupe de végétaux que les plantes sur lesquelles on l’applique: Paillis de conifère pour conifère, paillis de feuilles* et de copeaux pour les feuillus et paillis de plantes herbacées ou de feuilles pour le jardin, les vivaces et les annuelles. Sans quoi il ne se créera pas l’écosystème adéquat pour les cultures que vous y faites.
Merci Serge pour votre article très intéressant, j’ai trois pins maritimes dans mon jardin plantés relativement près les uns des autres il y a maintenant 32 ans, au début nous nous sommes acharnés, innocents que nous étions, à ratisser toutes les aiguilles tombées sur le gazon, rien ne poussait sous ces arbres, un jour j’ai proposé à mon mari de laisser l’espace où tombaient les aiguilles sans ratisser et de planter des bruyères, des cyclamens ainsi que des lauriers tin, tous poussent très bien sur une couche de 15 à 20 cm d’aiguilles, j’en prélève un peu pour pailler mes hortensias qui s’en portent à merveille, diminution drastique des arrosages. Je vis dans le sud ouest de la France près de Toulouse.
Bravo Danielle!
Vous recréez ainsi le cycle naturel et cela en plus demande moins d’effort. Cela n’est pas un signe de paresse mais de sagesse! 🙂
Merci d’ expliquer de pailler avec la matière fournie par la plante elle même. Mes très grands pins me fournissent amplement en paillis et en arômes exquis lorsque le soleil chauffe un peu. Mais je l’utilisais également avec les feuillus . Je vais réviser mes méthodes.
Bienvenue Lucie!
Bon succès dans vos expériences futures!
Bonjour, mer pour cet article. Je construis petit à petit mon potager
Mon sol est rocheux et je n’ai pas beaucoup de terre alors je plante mes tomates, poivrons, fraises et herbes dans des bacs. Est-ce que je peux utiliser les résidus de la tonte de gazon comme paillis? Il s’agit d’un gazon mixte composé de trèfle, gazon, pensées sauvages et autres couvre-sol sauvages que je ne connais pas. Merci pour votre réponse
Toutes plantes herbacées conviennent pour jouer les rôles précieux de paillis pour un jardin, qu’il soit en bac ou en pleine terre.
J’adhère du mieux que je peux à ces principes. Je manque toutefois de matière pour la grandeur de platebandes que j’ai. C’est un défi! Il m’arrive de quêter des feuilles chez mes voisins à l’automne.
Merci pour les précisions concernant l’épaisseur à mettre.
Une chose que je ne comprends tellement pas en matière de paillis c’est qu’on retrouve presqu’exclusivement du paillis de cèdre sur le marché alors qu’à mon avis il s’agit de l’un des pires. Et on oublie ce qui est vendu comme étant du brf et qui ne l’est pas.
Il est facile et surtout payant de proposer le paillis de cèdre à toutes les sauces, bien que sur le plan de la logique environnementale il ne correspond pas aux besoins de plusieurs cultures. De ce fait, en déséquilibrant l’écosystème du sol, l’achat de compost, engrais, chaux, michoryses devient nécessaire. C’est pourquoi le jardinage coûte si cher.
Avec la logique environnementale, on ne se trompe pas!