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Prolifération de plantes aquatiques dans nos lacs

Avec toutes les précipitations qu’on a connues ces deux dernières années, on assiste au ruissellement des eaux de surface et à la descente des éléments nutritifs, tel le phosphore, dans les cours d’eau. Il en résulte un accroissement de la contamination des plans d’eau par des plantes aquatiques.

Contrer la prolifération des plantes aquatiques

Voici deux solutions simples, applicables simultanément:

  1. Couper les sources de phosphore, tel l’emploi d’engrais, de savon avec phosphate et remplacer les fosses septiques non conformes.
  2. Retirer le phosphore présent dans l’eau. On y arrive en comprenant le processus de consommation circulaire (PCC) qui règne sur la planète.

Un exemple du processus de consommation circulaire (PCC)

Prenons un arbre dans une forêt. Il pousse et produit ses feuilles, tiges et racines en puisant dans le sol des éléments nutritifs, dont le phosphore, un des éléments contribuant à la prolifération des plantes aquatiques. Les feuilles des arbres tombent au sol et forment un paillis. Les insectes du sol décomposent les feuilles pour en faire de l’humus et les éléments nutritifs sont à nouveau disponibles pour l’arbre, afin de refaire d’autres feuilles… Et le cycle continu ainsi! Rien ne perd et rien ne se crée, mais tout se transforme indéfiniment. C’est ça le processus de consommation circulaire (PCC).

Est-ce vrai? Oui! Et voici pourquoi!

Le cycle de transformation dans les lacs

Lorsqu’un surplus d’éléments nutritifs, en particulier le phosphore, se retrouve dans l’environnement et que les plantes terrestres ne peuvent pas l’absorber, ce phosphore sera lessivé en surface par les pluies ou pénétrera dans le sol pour aller rejoindre les nappes phréatiques et se retrouvera inévitablement un de ces jours dans un lac.

Comme le processus de consommation circulaire (PCC) est omniprésent sur la planète, le phosphore ainsi acheminé dans les lacs devra être géré par des plantes aquatiques à la place des plantes terrestres. Il n’y a rien de sorcier dans ce travail de la nature, puisqu’elle ne fait que poursuivre son PCC, avec les suppléments de phosphore qu’on lui impose.

Donc, au même titre que les arbres retrouvent leur phosphore par la décomposition de leurs feuilles, les plantes aquatiques se nourriront du phosphore généré par la décomposition de leur propre feuillage si celui-ci reste dans le cours d’eau.

Si nous voulons diminuer le taux de phosphore dans les lacs, le gros bon sens veut qu’on récolte le feuillage des plantes aquatiques, en les coupant. Mais attention! Il ne faut pas les arracher puisqu’il faut que leur feuillage repousse, captant ainsi du nouveau phosphore dans l’eau et non pas le même phosphore redevenu disponible par la décomposition de leur feuillage au fond du lac.

Laisser pourrir les plantes aquatiques dans un milieu humide, c’est alimenter en compost ce milieu humide. Plus il y a de plantes aquatiques, plus il y aura accumulation de compost et plus il y aura croissance de plantes aquatiques au fil des ans.

Le processus avec les plantes aquatiques

Arrivée du feuillage des plantes extraites du lac. Photo: Serge Fortier.

Pour bien comprendre le processus, supposons qu’on récolte le feuillage des plantes aquatiques d’un lac (nénuphars, myriophylle ou autres) et qu’on fait un tas de compost avec celles-ci. Une fois les plantes décomposées (ça ne prend que quelques mois), on obtient un bon et riche compost. Ensuite, si on allait épandre ce compost dans le lac, que dirait le ministère? Que diraient les riverains? Mettre du compost dans un lac ce serait le contaminer, n’est-ce pas?

Pourtant, ce compost provient des plantes qui poussaient dans ce lac et qui auraient été compostées au fond de celui-ci si elles n’avaient pas été récoltées. Alors, dites-moi la différence entre faire cela et laisser les plantes pourrir d’elles-mêmes au fond du lac, comme proposent les décideurs? Sur quels principes environnementaux se basent les experts pour interdire aux riverains de faucher les plantes aquatiques qui prolifèrent de plus en plus dans leur plan d’eau, les empêchant de profiter de celui-ci et qui abaissant la valeur de leur propriété? Le fait d’interdire la récolte des feuillages a-t-il contribué à diminuer la contamination des plans d’eau?

Compostage des plantes aquatiques après 30 jours. Photo: Serge Fortier.

Le PCC est la clé pour comprendre vraiment comment la nature fonctionne. Pour les plantes aquatiques, la solution est de récolter et de les valoriser sous forme de paillis ou compost sur la terre, afin de retourner à la terre ce qui vient de la terre.

Gestion sur le sol d’un jardin pour l’automne et l’hiver. Épaisseur de 5 cm de plantes fraîches sur
la surface du jardin. Reste à mettre une bâche par-dessus pour l’hiver. Au printemps, le tout
sera décomposé et il ne restera qu’à enfouir et le jardin sera prêt, fertile et exempt de
mauvaises herbes. Photo: Serge Fortier.
Photo: Serge Fortier.

Récolter les plantes aquatiques, une solution pertinente

En comprenant cela, les riverains feraient d’une pierre plusieurs coups! Ceux-ci retrouveraient les plaisirs d’être près d’un plan d’eau tout en profitant d’un compost riche pour leur jardin ou leur aménagement.

Ce principe est aussi vrai pour les plantes aquatiques poussant dans les fossés, les ruisseaux ou n’importe quel autre milieu humide, comme le phragmite, les grands roseaux qui ont envahi ces milieux et dont les massifs augmentent de plus en plus. Lors d’un prochain article, j’expliquerai les particularités de cette plante envahissante, ses modes de propagation, son utilité dans l’écosystème sur le plan environnemental et les manières dont on pourrait la valoriser de façon profitable au lieu de la voir comme une ennemie qui nous envahit.

Valoriser ce que la nature nous donne au lieu de dépenser des fortunes pour gérer ces ressources comme étant des déchets et des nuisances nous aiderait à diminuer notre coût de vie en plus de contribuer à assainir notre environnement!

Les débris de feuilles et de plantes aquatiques qui s’échouent sur la plage ont avantage à être récupérés et à être composter au jardin. Photo: Serge Fortier.

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  1. mille merci pour tous ces bons renseignements…

  2. Très bon article

  3. Merci Lison!
    Je vous invite à propager l’information.

  4. Existe-t-il des plantes aquatiques comestibles? Nous pourrions faire d’une pierre, deux coups! Riz sauvage ?

    • C’est une idée à explorer! Je ne m’y suis jamais attardé.
      Par contre je peux vous dire que les quenouilles le sont. Au début de leur croissance c’est un peu comme des coeurs de bambou.

  5. Quel article intéressant que j’ai transmis à mon association de lac qui, j’espère, le transmettra à leurs partenaires qui le feront à leur tour. La prolifération des plantes aquatiques est un problème qui s’aggrave en Estrie…

    • Oui, en effet! Parce que rien n’est fait en ce sens, les solutions proposées coûtent chères et n’ont pas contribué à ralentir la progression du problème. Et s’il y a une solution proposée, la plupart des municipalités, donc des citoyens n’ont pas les moyens de les mettre en place.
      J’espère comme vous que ces solutions logiques seront transmises aux décideurs.

  6. Enfin une publication qui prône une solution simple et pratique pour contrer l’enrichissement de nos lacs et à laquelle l’utilisateur peut contribuer facilement ! Avez-vous fait des tentatives pour éduquer le ministère de l’environnement à cette solution ? Merci pour votre article ??

    • Par expérience, le ministère est le dernier niveau qui peut changer les choses. Ils ont les lobbies corporatifs constamment dans leur pattes et les décisions doivent impérativement favoriser notre cher système capitaliste. Alors les décisions vont toujours dans le sens qu’il faut que ça coûte cher. Tant qu’il n’y aura pas suffisamment de citoyens sensibilisés et de comités environnementaux qui amènent des solutions aux élus municipaux qui, à leur tour proposent à la FQM ou la UMQ ces solutions, nous n’aurons aucun pouvoir de changer les choses. Cela a toujours été ainsi en politique. C’est donc à nous, à l’intelligence citoyenne, de prêcher par l’exemple. Je ne peux malheureusement pas influencer un ministère si je n’ai pas l’appui solide d’une masse critique de citoyens. C’est pourquoi il faut commencer par sensibiliser les comités de citoyens, de riverains et les élus municipaux.

  7. La logique et les connaissances ne sont pas indispensables pour être un décideur ou un « expert ».
    Valoriser ces désespérants phragmites qui effacent tant de paysages, j’ai hâte de lire ce que vous en écrirez!

    • Entretemps, je vous invite à partager ce texte aux bonnes personnes qui seraient en position de décider. Car nos décideurs n’ont la science infuse. Ce sont des citoyens comme vous et moi qui décident avec ce qu’on leur a donné comme infos. Comme dans notre système il existe un lobby corporatif capitaliste puissant, chaque occasion de faire des profit prime sur la protection de l’environnement. Un problème environnemental est vu comme une source de revenu pour le système car gérer des problèmes ça coûte cher parce que ça donne l’occasion à des grosses corporations multinationales de s’enrichir aux dépends du petit peuple qui est obligé de payer pour tenter de se débarrasser du problème.

  8. Wow. Merci. Ça me rappelle un documentaire expliquant que quelque part en Afrique des lacs éteint envahis par une sorte de nénuphar. Les nénuphars étaient retirés de l’eau et laissés à pourrir en énormes piles. Puis, un chercheur les a valorisés en les broyant et faisant ensuite des boulettes mises à sécher. Ces boulettes pouvaient ensuite servir de combustible pour la cuisine. Au lieu que les femmes marchent des heures pour trouver du petit bois.

    • Eh oui, Lucie!
      Et bien souvent, ces solutions partent d’un besoin (dans ce cas-ci, le besoin de faire du feu) mais qui, par ricochet épure le milieu humide. Je suis certain que le but premier n’était justement pas d’épurer le milieu, mais c’est ce qui arrive sans que les habitants en aient eu l’intention.

  9. Bonne idée Serge! Mais il faudrait aussi combattre le problème à sa source: interdire l’application d’engrais (chimiques ou naturels) sur les pelouses comme le fait la ville de Magog. Malheureusement, les règlements devraient aussi être mieux connus et encadrés .

    • Pas seulement les villes et les résidents, il faut sensibiliser les fermiers aussi.

      • Les fermiers d’ailleurs pourraient contribuer à la gestion des feuillages de plantes aquatiques dans leur fosse à fumier. Ce qui leur apporterait un compost pour leur champs.

    • Tu as parfaitement raison Édith!
      Et c’est d’ailleurs pourquoi cela est la première chose à faire que j’ai inscrit au début dans mon texte.
      L’environnement, c’est comme un convoyeur. Si on le charge de polluant, il faut un certain temps avant que les effets négatifs nous tombent dessus. On est rendu là de nos jours, mais si l’on veut qu’un jour gérer correctement le problème et ne plus vivre ces conséquences, il faut impérativement cesser de charger le convoyeur. Mais comme l’image du convoyeur, l’environnement devra se vider de ce qu’on lui a mis et cela va prendre un certain temps pour en voir les effets même si demain matin on coupe les sources de polluant. C’est ce qui découragent souvent les gens car nous, les humains, on n’est pas patient et on veut des résultats immédiats.
      Serrons la vis aux délinquants environnementaux par des règlementations et des amendes comme tu le suggères avec raison, priorisons la sensibilisation, comme toi et moi faisons, mais en attendant que ça change, profitons des récompenses à cours terme que cette article suggère, c’est à dire de pouvoir continuer à profiter de nos plans d’eau et de bénéficier d’une ressource pour fertiliser de façon naturelle et gratuite nos jardins et plates bandes.
      Merci Édith pour ton intervention!

  10. Comment faucher les plantes aquatiques ?

    • Faux, faucardeuse, à la main, cela dépend des conditions et de ce que vous voulez.
      Il faut être créatif quand on sort du cadre qu’une société nous a imposée.

  11. Je travaille dans le domaine de l’environnement (traitement des eaux usées) et on utilise des plantes (marais filtrants) pour épurer les eaux usées. La nature est bien faite et plusieurs plantes aquatiques permettent d’épurer l’eau en retirant les contaminants solubles dans l’eau. Retirer ces plantes ne fera qu’aggraver la problématique puisque la majeure partie de la contamination des lacs provient des installations septiques non conformes et du retrait du milieu naturel autour des lacs pour y mettre de belles pelouses fertilisées à outrance…

    • je suis heureux, Marie que vous reconnaissiez que les plantes aquatiques purifient les eaux.
      Je vous ferai remarqué que je ne parle pas d’arracher ou d’éliminer les plantes aquatiques d’un milieu contaminé.
      Je vous invite à relire le texte quelques fois, sans jugement, car il explique la logique environnementale qu’il faut comprendre.

  12. SVP, faire attention avec la diffusion de mauvaises infos. Le problème n’est pas la nature et enlever les plantes aquatiques n’aidera pas nécessairement la santé de nos lacs. Je ne travaille pas pour le Ministère de l’Environnement, mais je sais que les gens qui y travaillent sont très au fait des problématiques des lacs.

    • Je précise encore que l’idée n’est d’enlever les plantes aquatiques. Il y a une différence entre enlever et couper.
      Le ministère de l’environnement est-il au courant du principe des iles flottantes? Si oui, quelle est la différence entre utiliser des plantes aquatiques flottant sur un radeau artificiel à grand frais ou utiliser ce que la nature nous donne gratuitement pour faire ce travail. Pensez-y deux minutes au lieu de vous en tenir qu’à des notions qui ne tiennent pas compte de la logique environnementale. L’être humain se pense plus fin que nature et essaie de réinventer la roue qui tourne depuis bien plus longtemps que celui-ci est sur terre.

  13. «Sur quels principes environnementaux se basent les experts pour interdire aux riverains de faucher les plantes aquatiques qui prolifèrent de plus en plus dans leur plan d’eau». RÉPONSE de l’expert: la fauche de plantes aquatiques comme le myriophylle n’est en rien une mesure de lutte (il repousse). Elle peut théoriquement enlever un peu de phosphore si on récolte les débris de fauche, mais comme le myriophylle puise son phosphore dans le sol et non dans l’eau, et que de surcroît le myriophylle s’en contente de très peu pour pousser, cela ne fera pas de différence en définitive, sinon de fragmenter encore davantage la plante et donc de la propager. Cela fonctionne mieux dans des étangs d’épuration conçus à cet effet, avec le myriophylle ou d’autres plantes, mais il fait faire un retrait continuel d’énormes quantités pour voir un effet. Réduire la phosphore à la source est la chose à faire, mais enlever les plantes aquatiques dans un lac naturel n’a que rarement porté ses fruits pour cet objectif. CL, Université Laval.

    • Bonjour,
      C’est bien intéressant tout cela, mais j’ai l’impression que des variables essentielles sont omises. Notamment au niveau de l’impact sur la biodiversite d’arracher ces plantes. Je pense aux oeufs, larves insectes qui trouvent abris dans ces plantes. L’impact ne serait-il pas plus négatif en fin de compte??? Je suis plutôt fervent de la non intervention en général, Larry Hodgson ne l’était il pas aussi d’ailleurs? Ces plantes sont souvent bio-indicatrices et ont un rôle à jouer pour rétablir un équilibre naturel.
      Cordialement

      • La fauche se fait non pas au début du printemps mais à partir du milieu de l’été, au moment où toutes les espèces ont pondus et ont souvent quitté le milieu. N’oubliez pas qu’il existait un écosystème avant qu’il y ait des plantes aquatiques à profusion. Celui-ci s’est modifier tout simplement. Pourquoi alors s’inquiéter de nuire à l’écosystème alors qu’on ne s’inquiète pas que l’écosystème original en soit affecté?
        Le phénomène est naturel, mais en tant normal, si l’humain n’aurait pas fait toutes ces niaiseries en polluant ses plans d’eau, cette modification du milieu ne serait pas ce qu’il est présentement.

    • Les plantes flottantes comme le faux nymphéa pelté ne vont pas chercher leur nutriments dans le sol.

      • Peu importe ou la plante prends ses nutriments, le fait est qu’une plante qui meurt là ou elle a poussé s’autofertilise en ajoutant des nutriments par le compostage de ses matières. Ce qui amène inévitablement une augmentation de la croissance de ces plantes. Tant que cela ne sera pas compris, mais surtout admis dans la sphère scientifique, on va tourner en rond, dépenser des fortunes et constater la progression du problème.

    • Mais alors, vous suggérez quoi?
      À ce que je sache, les moyens utilisés jusqu’ici par les experts ont-ils contribués à ralentir l’expansion de cette plante?
      Entretemps, les riverains perdent les jouissances que leur apporte de rester près d’un plan d’eau, leur propriété perd de la valeur et aucun bénéfice n’est retiré de cette plante. Alors on fait quoi, on la regarde pousser, se multiplier et on braille sur notre sort? Près de chez moi, le petit lac qui contenait un peu de myriophylle s’est remplit en quelques année et ce sans qu’il soit fauché par qui que ce soit. Différente techniques ont été utilisée (aérateur, aménagement d’un marais filtrant à l’entrée du lac, en règle avec les recommandations d’expert) et cela ne ralentit pas le problème.
      Pour ce qui est de sa propagation par fragment, cela se fait pareil par la glace qui enveloppe les tiges de myriophylle et les arrache au moment du dégel et de la montée des eaux au printemps pour les distribuer au gré du vent et des courants.
      Oui il y a du phosphore dans le sol dont le myriophylle se sert pour se nourrir, mais cela n’empêche pas le fait que chaque fois que celui-ci meurt et pourrit au fond de l’eau, c’est un apport de nutriment supplémentaire rendu disponible pour lui et pour toute autres plantes aquatiques qui pourra s’installer, car un milieu ne fonctionne pas en silo fermé. Ne pas reconnaître qu’il y a une augmentation d’éléments nutritifs lors de la décomposition d’une matière organique est de ne pas comprendre le fonctionnement même de l’environnement et le processus de consommation circulaire ou rien ne se perd et rien ne se crée.

  14. J’avoue

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