Quand les campagnols grugent l’écorce de nos arbustes
Que faire quand les campagnols grugent l’écorce de nos arbustes
Par Larry Hodgson
Question: Un de mes lilas de 1,8 m a été rongé à sa base par des mulots qui y ont pris abri sous la neige cet hiver. Y a-t-il un moyen technique du genre vaporisation au silicone ou autre pour le protéger des bactéries? Je ne veux pas le perdre.
Françoise
Réponse: Les campagnols, couramment appelés mulots, sont de petits rongeurs à queue courte. Ils sont à peine plus gros qu’une souris. Il existe plus de 150 espèces de campagnols, présentes un peu partout dans l’hémisphère Nord. Au Canada, l’espèce la plus courante est le campagnol de Pennsylvanie (Microtus pennsylvanicus); en Europe, le campagnol commun (M. arvalis).
Durant l’été, les campagnols sont rarement remarqués, étant petits et nocturnes. De plus, ils se nourrissent discrètement de graines, feuilles, insectes, etc., faisant rarement des dommages notables, et passent alors sous le radar des jardiniers.
Par contre, l’hiver, quand le sol est gelé, les campagnols ne trouvent pas toujours assez de nourriture pour se maintenir. Ils cherchent alors des nourritures alternatives, dont l’écorce de nos arbustes et jeunes arbres. Aussi, parfois, les bulbes de tulipes et les racines de nos vivaces. On remarque surtout ces dégâts au printemps, quand la neige fond. Il est alors trop tard pour réagir.
On note aussi dans les gazons, à la surface du sol, des sentiers de 2,5 à 5 cm de large dont l’herbe a été piétinée et détruite et qui conduisent à des terriers peu profonds. Habituellement, la pelouse récupère assez rapidement de ce dégât. Par contre, cela dérange quand même au plus haut point les jardiniers avides de pelouses parfaites.
Que pouvez-vous faire pour sauver votre arbuste?
Lorsque les campagnols grugent l’écorce tout autour de la branche d’un arbuste, cela laisse un cercle de tige nue. C’est ce qu’on appelle une annélation. Et lorsque cela se produit, vous ne pouvez rien faire pour sauver la partie supérieure de la branche. Sans écorce pour transporter la sève, donc véhiculer les nutriments, l’eau et d’autres matériaux du système racinaire aux branches, tout ce qui se trouve au-dessus de la blessure mourra.
Peindre ou pulvériser le bois exposé avec de la peinture ou de la pâte d’élagage (je ne recommanderais certainement pas le silicone!) n’aura alors aucun avantage. Si aucune sève ne peut traverser l’espace dénudé, vous perdriez simplement votre temps. La partie supérieure mourra de toute façon.
Ce que vous pouvez faire, par contre, c’est rabattre l’arbuste. Coupez les tiges annelées (il peut y en avoir plusieurs) juste sous la blessure. Une nouvelle tige va bientôt se former et viendra remplacer l’ancienne. Dans 2 ou 3 ans, votre lilas aura probablement complètement récupéré.
Il s’agit en quelque sorte d’une version forcée de la taille de rajeunissement. C’est une technique bien connue des jardiniers, utilisée pour donner aux arbustes vieillissants une nouvelle vigueur et pour contrôler une croissance excessive.
La plupart des arbustes à tiges multiples produiront facilement de nouvelles branches sous la blessure et se rétabliront rapidement et complètement. En fait, beaucoup se rétabliront dans l’année suivant la taille. Le lilas est en fait plus lent à réagir que la plupart des arbustes.
Chez les arbres, la situation se complique
Voilà pour les arbustes à tiges multiples, comme votre lilas. Mais qu’en est-il des arbres à tronc unique?
Si le tronc d’un arbre est annelé, la situation est beaucoup plus grave. La plupart n’ont pas la capacité de repousser à partir de leur souche. Donc, il n’y a essentiellement rien à faire sinon abattre l’arbre. Il n’est certainement pas nécessaire de pulvériser quoi que ce soit sur une annélation!
Même les arbres qui ont la capacité de repousser à partir de la base (fruitiers, peupliers, saules, ormes, etc.) ne vous donneront pas toujours les résultats que vous souhaitez. Certainement pas s’il s’agit d’arbres greffés. Oui, certains arbres greffés repousseront à partir de la base si vous les rabattez, mais ne vous donneront pas l’arbre de qualité que vous vouliez.
Ce sera notamment le cas de la plupart des arbres fruitiers. Les pépinières les produisent en greffant la variété désirée sur un porte-greffe, une variété de valeur inconnue et produisant presque toujours des fruits de qualité inférieure. Si un arbre repousse à partir de sa souche après l’annélation, ce ne sera pas le cultivar intéressant, mais un arbre similaire au fruitier sauvage. Par exemple, un pommier cultivé pour ses fruits de qualité, comme un ‘Liberty’ ou un ‘Macfree’, donnera plutôt un pommier aux fruits bien ordinaires.
C’est la même chose pour les arbres ornementaux. Un érable de Norvège ‘Crimson King’, cultivé pour ses feuilles rouge foncé, produira un érable de Norvège aux feuilles vertes.
Il ne sert à rien d’essayer de sauver un tel arbre en la laissant repousser à partir de la souche.
Un cas d’exception : l’annélation incomplète
S’il y a encore de l’écorce qui relie le bas de l’arbre à la partie supérieure, c’est une situation très différente. En d’autres termes, les campagnols ont retiré de l’écorce, mais sans avoir entièrement annelé la tige. Dans ce cas, oui, vous pourriez essayer de sauver l’arbre.
Normalement, si le tronc a encore une large bande d’écorce couvrant la moitié du tronc ou plus, il peut récupérer. Assez de sève pourrait circuler pour le garder en vie. Avec le temps, il produira même une nouvelle écorce qui couvrira la blessure. Même les troncs avec moins de 50% de couverture survivent parfois, mais les chances diminuent. Et il faudra sans doute des années pour que l’écorce réussisse à recouvrir le tronc nu, du moins, sur un grand arbre. Cela étant, vous pourriez quand même juger sage d’abattre un arbre partiellement annelé et de le remplacer par un arbre intact.
Si vous décidez d’essayer de sauver un arbre partiellement annelé, c’est certainement assez facile à faire! Nettoyez simplement la plaie et retirez les éclats et les corps étrangers. Puis, laissez faire.
N’appliquez pas de silicone (je dois avouer que c’est la première fois que j’entends que quelqu’un utilise ce produit sur les plantes!). Et il n’est pas non plus nécessaire d’appliquer une peinture ou une pâte d’élagage, une peinture au latex, un emballage quelconque ou d’autres prétendues barrières protectrices. Ces produits étaient populaires dans le passé, mais plus maintenant. Les arboriculteurs n’en utilisent plus et ne les recommandent plus. C’est qu’on a découvert qu’ils ont tendance à créer un milieu humide où les spores de maladie fongique, présentes dans l’air et donc déjà sur place lors de l’application, peuvent germer. Ainsi, plutôt que de prévenir les champignons, ils les encouragent! Vous trouverez plus d’information à ce sujet dans le billet Faut-il appliquer une peinture d’émondage?
Laissez simplement la plaie à l’air libre. Mère Nature s’en chargera!
Un traitement de dernier recours
Il existe cependant une ultime solution pour sauver un arbre entièrement annelé. Mais très peu de jardiniers amateurs l’emploient. Même les pépinières ne l’utilisent pas. C’est plutôt quelque chose que vous verrez dans le verger d’un fruiticulteur avide qui aime expérimenter.
La technique en question s’appelle une «greffe en pont». Il s’agit de greffer plusieurs bandes d’écorce vivante, les plaçant de manière à ce qu’elles s’étendent de l’écorce en dessous, puis sur la blessure, puis rejoignent l’écorce vivante au-dessus. Ainsi, la sève pourrait circuler de haut en bas et de bas en haut. Si la greffe en pont fonctionne, les bandes s’élargiront pour éventuellement recouvrir la blessure. L’arbre peut alors récupérer complètement. Mais il restera une cicatrice assez surprenante!
Vous trouverez des renseignements sur le greffage en pont ici: La greffe réparatrice.
La prévention
Le meilleur traitement contre les campagnols est la prévention.
À l’automne, vous pouvez protéger les tiges sensibles aux dégâts avec une spirale anti-rongeur, un grillage métallique, des pièges, etc. Je vous suggère de lire à ce sujet le billet Contrôle des campagnols avant l’hiver.
Par contre, si vous avez eu des dégâts ce printemps, sachez que la population de campagnols va sans doute chuter de façon importante cette année. Et rebondira massivement seulement dans 3 à 4 ans. Car la population des campagnols varie beaucoup. Alors, après un hiver où les écorces des arbustes sont attaquées (signe que la population est en surabondance), elle chute radicalement. Donc, ce n’est pas l’hiver prochain qu’il vous faut agir, mais plutôt à l’automne dans 3 ou 4 ans.
Wow, merci pour les explications, je me posais la même question.
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Wouaw, quel article. Vous êtes en feu ce matin. Merci cher Mentor.
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Vraiment intéressant et documenté. Merci
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Merci beaucoup. Ça réponds à certains mystères printaniers!?
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Mystères printaniers en effet et frustrations au comble! J’ai du abattre en octobre dernier un pommetier d’une quinzaine d’années attaqué par les mulots l’hiver précédent. J’ai l’habitude de voir des traces de mulots au sol mais jamais ils ne s’en étaient pris à un arbre de cette taille sorte, le diamètre faisant au moins un pied. Merci pour ces informations. Je serai vigilante à l’automne…
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Toujours intéressant, merci
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Depuis quelques années j’utilise du moustiquaire métallique pour fenêtre. Il se vend en rouleau d’environ 1 mètre de large. Le coût revient à environ 1$ du pied linéaire. Le moustiquaire est réétulisable année après année. C’est le meilleur moyen que j’ai trouvé pour protéger mes arbustes et arbres fruitiers.
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Nous étions envahis de campagnols. Mais depuis quelques années nous avons de nouveaux résidents sur notre terrain. Des belettes/hermines qui se promènent dans les tunnels sous la neige. Nous avons beaucoup moins de dégâts depuis.
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Merci pour cet article, vraiment intéressant !
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Je reconnais les dommages causés à ma pelouse…
En prime, j’ai un rosier qui, à mon grand étonnement, a eu toutes les racines rongées, au point qu’au printemps, j’ai pu l’enlever du sol tout simplement: aucune racine ne le retenait!
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J’ai sauvé mon Magnolia ‘Yellow Bird’ dont l’écorce avait été bouffée entièrement sur 3 pieds de long. Une amie m’avait suggéré d’appliquer un cataplasme d’argile verte et de recouvrir le tout de tissu. Et bien cela a marché, Mon arbre a fait ses feuilles et a continué à vivre. Sauf que l’hiver arrivé, j’ai enlevé le cataplasme de peur que les mulots s’y installent. Mais l’arbre a fendu durant l’hiver tout le long de la partie non recouverte d’écorce. Il a cependant repoussé de la base et il me donnera une fleur cette année. Si j’avais laissé le cataplasme pour l’hiver, peut-être qu’il n’aurait pas fendu…
Il faut comprendre que l’arbre ne meurt pas immédiatement après l’attaque, mais souvent 6 à 18 mois plus tard, car la sève continue de monter des racines, mais plus à descendre des feuilles. Donc, le cataplasme n’aurait pas été utile.
Pourriez-vous nous parler des taupes. Nous sommes envahis par des taupes et ne savons pas comment s’en débarrasser. Nous sommes nombreux dans le coin à avoir ce problème. Dans vos archives, ça sort comme hameçonnage, donc on ne peut y accéder. Merci de répondre collectivement.
Bérénice Rioux
https://jardinierparesseux.com/2019/04/12/comment-controler-les-taupes/
À Denis Roy: Très bon moyen en effet que j’ai essayé sur mes nombreux arbres surtout lorsqu’ils étaient très jeunes. J’ai aussi utilisé, et utilise encore, des bouts de drains agricoles (de 6 ou 8 po.de diamètre selon la dimension du tronc, et 1-1.5 pi. environ de long) qui se perdaient dans le hangar: super! Autre chose: on a remarqué que si l’herbe est trop longue à l’automne, cela favorise les mulots qui ont ce qu’il faut pour bien voyager sous la neige: on coupe donc l’herbe un peu plus court à l’automne à cause des mulots. Enfin, nous sommes en campagne et lorsque la population de chats de notre voisin agriculteur se nourrissant naturellement de mulots est suffisante, on a très peu de chemins de mulots au printemps; de même, si la population féline est basse, là les chemins de mulots sont plus nombreux. Belle façon de savoir si on a suffisamment de chats, de reconnaître leur utilité naturelle et bien sûr l’efficacité de leur travail!
Dans notre pays, qui n’est pas l’hiver, comme l’a chanté Gilles Vignaud, ce n’est pas l’hiver que les campagnols ruinent les cultures, mais au beau temps. Ce sont les “rats taupiers” qui creusent des galeries, comme les taupes, mais souvent près de la surface. Une calamité en particulier pour les prairies et les semis.! C’est là que les renards, belettes, chouettes, grands ducs et autres éperviers savent se rendre utiles.
Fort intéressant! Une autre mode de vie, mais… les mêmes prédateurs!
J´ai vu des pins de 2 M et moins de haut avec annulations partielles ou totales. Ceux qui ont survécut ont vu leur diamètre croître au dessous et au dessus de cette partie. Aussi avec le vent et la charge plus importante, les troncs ont cédé avec le temps.je croyais que les lièvres grugeaient également. Merci pour cet article très de saison.
C’est peut bien des lièvres dans votre cas. ?
J’ai des cèdres comme clôture mi-toillenne. C’est la 1ère année que je me fais gruger une 20ed’écorces. Je vais espéré que le tout revienne à la normal.
Bonne chance!
L’an passe j’ai utilise les pieges. J’en ai attrapper 53 !!
Ce pritemps je n’ai vue aucun domages cause par ces petits rongeurs
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