Categories

Recherche

L’éclairage artificiel des orchidées: cinquième partie – Adapter les pratiques horticoles!

Maintenant que nous avons mis en place une bonne installation de culture, nous allons examiner quelques aménagements complémentaires qui assureront un environnement de croissance optimal à notre collection. Pour les orchidées, il faut notamment prévoir un contrôle rigoureux de la durée d’éclairage, un apport en humidité (surtout en hiver, car l’air intérieur devient alors beaucoup trop sec), une circulation d’air constante (24 heures sur 24), une baisse de la température la nuit et une obscurité de très bonne qualité durant la nuit. Ces aménagements ne sont pas difficiles à mettre en place, mais ils seront déterminants pour la réussite de notre entreprise.

Prévoyez une minuterie pour varier la durée de l’éclairage au fil des saisons

Les orchidées ont besoin d’une durée d’éclairage appropriée. Comme nous l’expliquions dans une chronique précédente, plusieurs espèces d’orchidées ont besoin d’une variation saisonnière de la durée du jour pour synchroniser leur floraison avec le moment de l’année où leurs insectes pollinisateurs sont les plus abondants dans la nature. 

Pour maîtriser au mieux ce cycle, on peut utiliser une minuterie programmable qui permet de simuler les conditions naturelles et de favoriser la floraison. Par exemple, on leur donnera 12 heures d’éclairage en novembre, décembre et janvier, puis 14 heures en mai, juin et juillet. Dans les autres mois, on effectuera une transition progressive de la durée, en augmentant l’éclairage d’une demi-heure par mois en février, mars et avril, puis en diminuant la durée en août, septembre et octobre.

Les orchidées se synchroniseront avec ces variations d’éclairage et pourront ainsi percevoir les variations saisonnières qui stimulent leur floraison. Même les orchidées peu sensibles aux variations saisonnières toléreront cette modulation de l’éclairage et s’y soumettront sans difficulté.

Pour des raisons de sécurité, il est fortement recommandé d’utiliser des composants électriques conçus pour l’extérieur (par exemple, une minuterie étanche pour résister à l’humidité, des luminaires extérieurs, un câblage à triple connecteur incluant une mise à la terre fiable, etc.). En effet, les cycles de température et d’humidité nécessaires à la culture des orchidées dépassent souvent les limites de conception des composants domestiques traditionnels. De plus, la manipulation des contenants d’arrosage peut occasionner des débordements pour lesquels les « composants électriques intérieurs » ne sont pas conçus, car ils ne sont pas étanches.

Augmentez l’humidité intérieure pour les orchidées tropicales

Dans nos maisons, l’air est peu humide, surtout en hiver, lorsque le chauffage domestique maintient une température confortable pour les humains malgré le froid extérieur. Pour pallier ce manque, vous pouvez avoir recours à l’une des stratégies suivantes :

  1. Déposer vos plantes sur un lit de billes d’argile (ou de gravier) qui libérera localement un peu d’humidité que les orchidées apprécieront beaucoup. C’est souvent la solution préférée pour la culture sur le rebord d’une fenêtre. Malheureusement, les plateaux humidifiants exigent un entretien régulier, car les bactéries prolifèrent souvent dans l’eau stagnante. Pour simplifier l’entretien, il est possible d’utiliser un tapis en fibre synthétique que l’on gardera humide en permanence. Un simple lavage en machine éliminera toutes les odeurs indésirables. On trouve ce genre de tapis dans les animaleries, car ils sont également fortement recommandés pour les reptiles en captivité.
Les plateaux humidifiants sont souvent utilisés en bordure de fenêtre. On peut utiliser des billes d’argile, du gravier ou un tapis synthétique, plus facile à entretenir.
  1. Pour les grandes collections d’orchidées, un humidificateur domestique est souvent la meilleure solution. Les meilleurs fabricants proposent des modèles spécialement conçus pour les espaces de culture, équipés de fonctions spécialisées pour l’horticulture domestique, comme le démarrage et l’arrêt automatiques, afin de faciliter le maintien de conditions de culture optimales. Choisissez un modèle à vapeur froide dont la puissance est proportionnelle à la taille de votre pièce. Les appareils modernes sont souvent équipés du Wi-Fi et d’une sonde de température, ce qui est très pratique pour la surveillance automatisée à distance.
Certains fabricants proposent des humidificateurs à vapeur froide spécialement conçus pour l’horticulture domestique.

Prévoyez une baisse de température nocturne pour les orchidées

Lors de la fermeture des luminaires, la température dans les espaces de culture baisse inévitablement, surtout si les plantes sont proches des luminaires. Cette baisse de température est tout à fait souhaitable, mais elle doit être contrôlée pour éviter tout risque de condensation et pour maintenir l’activité chimique de la plante durant la nuit. Une baisse de 5 à 10 °C est recommandée pour la plupart des orchidées. Elle correspond à la baisse de température que l’on peut observer dans la plupart des milieux naturels où elles ont évolué.

C’est un paramètre facile à contrôler avec un simple thermostat électronique que l’on aura programmé en conséquence. Comme indiqué dans une chronique précédente, peu d’orchidées tropicales apprécient des températures nocturnes inférieures à 15°C. Ce sera donc notre température de base. En revanche, le jour, on préférera une température moyenne de 22 °C, qui est à la fois plus confortable pour les orchidées tropicales et pour les habitants de la maison. Ce contraste de température de 7 °C devrait convenir à la plupart des orchidées. Sachez toutefois que certaines orchidées exotiques peuvent avoir des exigences particulières et qu’il faudra peut-être augmenter ou diminuer ce contraste thermique pour certaines plantes spécialisées..

Gardez l’air en mouvement dans les espaces de culture

Dans nos maisons, il y a peu de mouvements d’air, beaucoup moins qu’en milieu naturel. Cela entraîne quelques inconvénients. Le plus évident est l’accumulation de chaleur dans les étagères, que l’on peut facilement éviter en faisant circuler de l’air frais dans les installations de culture. Le soir, au moment de l’extinction des luminaires, il est conseillé de maintenir un mouvement d’air afin de réduire les risques de condensation. En effet, lorsque la température baisse en soirée, l’humidité en excès dans l’air a tendance à se déposer sur les plantes, favorisant ainsi le développement d’activités fongiques et bactériologiques. Un simple mouvement d’air, doux mais continu, permettra d’évaporer cette humidité et d’empêcher la prolifération des pathogènes.

Un autre avantage à connaître

L’autre « grand avantage » de la circulation de l’air est un peu plus subtil à comprendre. Contrairement à toutes les espèces animales, les espèces végétales n’ont pas de poumons élastiques leur permettant d’inspirer ou d’expirer les gaz indispensables à leur croissance. Les plantes ne peuvent qu’ouvrir leurs stomates respiratoires et attendre que les gaz produits se diffusent dans l’atmosphère, sans avoir la capacité d’expulser ces gaz ni d’aspirer de l’air frais. C’est là que la circulation de l’air joue un rôle primordial, facilitant la diffusion gazeuse et réapprovisionnant les stomates en air frais. La communauté scientifique n’a pas encore réussi à quantifier cet effet bénéfique sur les échanges gazeux, mais il est raisonnable de penser que la circulation d’air douce et continue peut accélérer ces échanges d’un facteur très important, surtout si le mouvement d’air atteint le dessous des feuilles, où se trouvent la plupart des stomates.

Un ventilateur USB peu puissant suffit à maintenir l’air en mouvement dans cet espace de culture relativement dense. Il est conseillé de l’installer assez bas afin de renouveler l’air sous les feuilles, là où se trouvent les stomates et où les risques de condensation sont plus importants.

Maintenez une bonne obscurité la nuit afin ne pas perturber les réactions chimiques nocturnes

Les orchidophiles expérimentés veillent également à ce que leurs plantes en culture intérieure bénéficient d’une obscurité totale durant la nuit, sans lumière parasite. La chimie interne des plantes change radicalement durant cette période, car la photosynthèse n’est plus possible. Cependant, les plantes restent actives et profitent de l’obscurité nocturne pour effectuer certaines transformations chimiques qui ne sont pas possibles le jour, car perturbées par la lumière. Les détails techniques sont relativement complexes, car ils impliquent des réactions de chimie organique très sophistiquées. Mais retenez que plusieurs processus chimiques internes des plantes exigent une bonne obscurité pour se produire durant la nuit.

En pratique

Il faudra éviter d’allumer l’éclairage artificiel durant la nuit afin de ne pas « réveiller » la photosynthèse. Il faudra également éteindre toutes les lumières susceptibles d’atteindre les espaces de culture. Si une veilleuse est nécessaire pour assurer une circulation sécurisée dans la pièce, on en choisira une de très faible intensité et on l’installera près du sol, sous le niveau des plateaux de culture.

Les Cattleyas sont des plantes à respiration nocturne et ils exigent une excellente obscurité pour ouvrir leurs stomates respiratoires. C’est aussi le cas de plusieurs orchidées épiphytes exposées à une forte illumination solaire comme les Vandas et les Vanilles.

Plusieurs espèces d’orchidées sont dites à CAM (MCA pour « métabolisme crassulacéen acide » en français), c’est-à-dire qu’elles capturent le CO? (indispensable à la photosynthèse) uniquement la nuit. Dans leur habitat naturel, ces plantes sont exposées à un ensoleillement très intense et ne peuvent pas ouvrir leurs stomates respiratoires durant la journée, car elles perdraient alors beaucoup trop d’humidité. Elles ont donc adapté leur fonctionnement en effectuant leurs échanges gazeux durant la nuit et elles exigent donc une obscurité quasi totale. C’est également le cas des crassulacées, des hoyas, des cactées et de la plupart des plantes adaptées aux régions arides ou semi-désertiques. Pour en savoir plus, consultez l’excellent résumé qu’en a fait Larry en janvier 2020.

Note de l’éditeur

Les chroniques de M. Charpentier sur les orchidées sont publiées sur le site du Jardinier paresseux dans un modèle légal libre de droits. Les sociétés horticoles qui le souhaitent peuvent republier ses chroniques dans leur journal technique. Veuillez toutefois inclure la mention suivante: 

Cet article a initialement été publié en français sur le site internet du JardinierParesseux.com et en version anglaise sur le blogue LaidBackGardener.blog.


  1. Tellement intéressant vos articles. Mon limetier a 5 ans et à tous les hivers il perd la totalité de ses feuilles. Il reprend sa beauté lorsque je le sort à l’extérieur au printemps. Cette année, je l’ai rentré début novembre. Il est en encore magnifique. J’espère qu’il fera des fleurs au cours de l’hiver. Il a fait des fruits la première année seulement. J’ai suivi vos conseils sur l’éclairage des orchidées et l’ai appliqué à mon limetier. Je vais essayer la même chose concernant l’humidité. Je me souhaite bonne chance. Merci monsieur Charpentier pour ces précieux conseils.