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Séjour des orchidées au jardin en été; prévoyance et suivi

Plusieurs auteurs recommandent de sortir les orchidées à l’extérieur en été pour leur donner un petit regain d’énergie. Cette pratique est en effet très bénéfique pour de nombreuses orchidées – surtout si l’on vit dans une région tempérée.  

Malheureusement, le séjour au jardin peut s’avérer plus risqué et plus problématique pour les amateurs d’orchidées qui vivent en région nordique. Examinons ensemble les avantages et les risques associés à cette transition vers l’extérieur qui est bien plus radicale qu’il n’y paraît.

Le séjour au jardin peut offrir plusieurs bénéfices

À l’extérieur, l’éclairage est plus naturel et surtout plus complet avec un spectre lumineux plus large incluant des rayons ultraviolets «antiseptiques» et des rouges profonds qui stimulent la croissance et le phototropisme. Le vitrage de nos habitations ne laisse passer que très peu de ces composantes lumineuses qui sont pourtant si utiles à l’hygiène des espaces de culture intérieure. Malgré tous nos efforts, il est vraiment difficile de reproduire un spectre lumineux aussi complet avec de l’éclairage artificiel. Bref, le changement de luminosité est radical quand nous sortons nos orchidées pour leur faire profiter du grand air. 

De plus, les cycles de température sont plus stimulants qu’à l’intérieur et l’aération des plantes est elle aussi plus naturelle et plus efficace au jardin.

Avec une bonne discipline d’arrosage, on pourra garantir une croissance optimale de nos orchidées en été. Tous les éléments nécessaires à la photosynthèse (lumière, hydratation, cycle de température naturelle et ventilation adéquate) sont alors renforcés. Tout cela devrait mener à des orchidées en meilleure santé et à une floraison plus abondante. Pour rappel, consultez la chronique sur la photosynthèse.

Sur un plan plus pratique, certains collectionneurs apprécieront également les économies d’énergie que permet le séjour au jardin, en réduisant les besoins en éclairage artificiel pendant quelques mois. On pourra également éviter certains problèmes de surchauffe à l’intérieur provoqués par l’ardeur du soleil en été surtout si nos aménagements intérieurs comportent de grandes surfaces vitrées.

Un abri d’auto recouvert d’une toile semi-transparente peut abriter de façon très économique une collection d’orchidées en la protégeant du soleil direct et de la pluie violente tout en permettant une excellente circulation d’air. Photo: Robert Charpentier

On doit gérer les risques associés de manière vigilante 

Les environnements de croissance plus stimulants sont évidemment plus risqués, surtout après une transition soudaine de l’intérieur vers l’extérieur. En effet, vos orchidées risquent de ne pas avoir la résistance nécessaire pour supporter les conditions extérieures nettement plus intenses. Pour éviter les brûlures causées par le soleil, on installera nos plantes sous des arbres ou des structures ombragées comme des lattes ou des toiles semi-transparentes, afin qu’elles ne soient jamais exposées à plus de 50 % d’ensoleillement extérieur. Le soleil direct doit absolument être évité en mi-journée, disons entre 10 h et 16 h, car les risques de brûlure du feuillage sont alors trop importants.

La pluie

La pluie trop abondante et/ou trop fréquente représente également un risque important. On installera donc nos orchidées à l’abri de la pluie et des vents violents tout en maintenant une circulation d’air aussi régulière et constante que possible.

La forme «en coupe» du Phalaenopsis (et de quelques autres orchidées) entraîne une accumulation d’eau qui mènera souvent à la pourriture de la couronne. Pour éviter ce problème, on peut simplement incliner la plante sur le côté et ainsi permettre son drainage naturel. Photo: Robert Charpentier

Les températures nocturnes

C’est la tolérance aux températures nocturnes qui sera l’élément principal déterminant le moment de transition des orchidées vers l’extérieur. La majorité de nos orchidées sont originaires des régions tropicales et elles tolèrent très bien la chaleur de nos étés, mais la fraîcheur nocturne peut grandement les perturber. Les plantes tropicales chaudes (par exemple les Phalaenopsis et les Vandas) vont préférer des nuits supérieures à 15 °C, même si elles peuvent occasionnellement tolérer des baisses de température jusqu’à 10 °C. Les Cattleyas et les Oncidiums pourront être déplacés à l’extérieur lorsque la température nocturne demeure au-dessus de 12 °C.

Quelques rares orchidées, comme les Cymbidiums et certains Dendrobiums supporteront des températures aussi basses que 5 °C, mais elles sont considérées comme des exceptions. En cas de doute, ne sortez pas vos orchidées avant que les températures nocturnes ne dépassent régulièrement les 14-16 °C. Inversement, à la fin de l’été, on rentrera les tropicales chaudes en premier pour leur éviter un coup de froid trop brutal.

Pour certaines orchidées, le séjour au jardin présente trop de risques et devrait être très limité, voire complètement évité 

Le climat du Québec est très éloigné des conditions tropicales – ça, c’est clair. Non seulement les minima et les maximas sont différents, mais les fluctuations saisonnières sont beaucoup plus marquées. Il faudra donc faire preuve d’une grande prudence avec les orchidées plus sensibles. Par exemple, les Aeranthes, les Calantes caduques, les Cynoches, les Miltoniopsis, plusieurs Paphiopedilums et les Psycopsis sont rarement sortis à l’extérieur. Certains collectionneurs plus dévoués sortiront ces plantes en journée seulement pour leur redonner un peu de vitalité supplémentaire, mais les rentreront en début de soirée pour éviter tout dommage.

Il est sage d’adopter une stratégie pour repousser les insectes

Les infestations d’insectes sont assez rares dans les collections d’orchidées qui séjournent au jardin. On peut toutefois y rencontrer des limaces et des escargots, qui peuvent être facilement contrôlés à l’aide de granules anti-limaces. On peut également répandre de la terre diatomée autour de nos plantes pour limiter les déplacements d’insectes rampants. Enfin, l’application d’un répulsif à insectes et araignées comme un savon insecticide et de l’huile de Neem (c’est-à-dire huile de margousier) peut s’avérer très utile. On appliquera la solution directement sur le feuillage à toutes les 3 à 4 semaines pour garantir une efficacité continue.

Quelques produits recommandés pour lutter contre les pestes: un anti-limace à base de phosphate ferrique à disperser sur les tables de culture, de la terre diatomée contre les insectes rampants, du savon insecticide (5 ml/litre d’eau) et de l’huile de margousier (Neem oil - 10 ml/litre d’eau) à vaporiser mensuellement sur le feuillage. Photo: Robert Charpentier

Quelques conseils pratiques pour améliorer votre expérience estivale

Si vous tentez l’expérience du séjour au jardin, il peut s’avérer judicieux de planifier prudemment le transfert à l’extérieur.

Au sujet de vos installations extérieures

On ne déposera jamais des pots d’orchidées directement au sol. Les risques d’infestations par les insectes (notamment les fourmis) sont beaucoup trop grands. Il est donc préférable d’utiliser des tables dont la surface est métallique (ou en verre) qui sont plus hygiéniques et beaucoup plus faciles d’entretien. Si vous souhaitez utiliser une table en bois, il est recommandé de la recouvrir de papier d’aluminium afin d’éviter que la surface de bois contamine vos pots de culture (et vice-versa). En effet, les surfaces de bois sont souvent riches en champignons et en bactéries indésirables. L’aluminium aurait aussi certaines propriétés insectifuges et antiparasitaires, quoique le cuivre soit nettement meilleur à cet égard. Finalement, dans certains cas, on pourra accrocher ses plantes à l’aide d’un fil métallique solidement enroulé autour d’une branche d’arbre ou d’une clôture protégée des grands vents et du soleil direct.

Il est facile de surélever les plantes afin d’éviter tout contact avec la surface des tables (souvent contaminées) en plus d’améliorer la circulation d’air autour des pots. Photo: Robert Charpentier

Au sujet de l’entretien régulier

Il faudra inspecter régulièrement vos plantes en séjour extérieur. Je recommande une inspection hebdomadaire afin de déceler rapidement tout problème de brûlure solaire, d’accumulation d’eau stagnante ou d’apparition d’insectes.

Il est normal d’avoir à arroser un peu plus souvent à l’extérieur. Comme suggéré dans une chronique antérieure, l’utilisation de bâtonnets de bambou insérés dans le substrat vous indiquera clairement le taux d’humidité au centre du pot. Il faudra simplement l’examiner un peu plus souvent. 

Il est également recommandé d’espacer suffisamment vos plantes pour permettre la circulation de l’air si indispensable à la saine croissance des orchidées. Un traitement préventif au savon insecticide est aussi recommandé mensuellement. Une procédure de nettoyage plus complète sera décrite dans la chronique du mois d’août, juste à temps pour le retour à l’intérieur.

Si vous remarquez que l’une de vos plantes entame un processus de floraison, il sera préférable de la ramener à l’intérieur pour qu’elle puisse terminer sa délicate mise en fleur à l’abri des intempéries extérieures.

Certains orchidophiles n’hésiteront pas à investir dans une installation extérieure sophistiquée, à la fois plus esthétique et plus fonctionnelle. Photo: Marc Better
Une conception soignée permet d’éviter plusieurs risques associés au séjour à l’extérieur. Revoici l’installation précédente, mais cette fois avec plantes en culture entourées d’un grillage de protection Photo: Marc Better

Remerciements

L’auteur souhaite remercier Marc Better pour avoir autorisé l’utilisation de photos de son installation extérieure – tellement bien conçue et bien réalisée. Marc est un orchidophile américain très expérimenté qui cultive ses orchidées en extérieur. 

Note de l’éditeur

Les chroniques de M. Charpentier sur les orchidées sont publiées sur le site du Jardinier paresseux dans un modèle légal de type «Copyleft». Les sociétés horticoles qui le souhaitent peuvent intégrer ses chroniques dans leur journal technique ou simplement diffuser le lien internet auprès de leurs membres. Veuillez toutefois inclure la mention suivante: 

Cet article a initialement été publié en français sur le site internet du JardinierParesseux.com et en version anglaise sur le blogue LaidBackGardener.


  1. Bernard Valiquette

    Bonjour et merci pour vos précieux conseils, j’ai un problème de cochinelle farineusses, plusieurs fois avec prédateurs, on me dis purée d’Ortie mais auquel dose svp , ou toute autre idées

    • Bonjour Bernard,
      Je ne connais pas la purée d’ortie. Dans ma prochaine chronique (celle de juillet 2025), je présente ma stratégie d’inspection mensuelle des orchidées où je discute brièvement du contrôle des insectes. En voici un court extrait:

      Occasionnellement, on peut détecter la présence de ravageurs dans nos orchidées (cf. 3.5). Les cochenilles et les pucerons sont les plus courants. Il faut rester calme et méthodique ! D’abord, éliminez tous les insectes visibles à l’aide d’une lingette désinfectante (par exemple Lysol ou Clorox). Ensuite, saupoudrez de la terre diatomée autour du pied de la plante afin de bloquer les passages des larves qui se sont développées dans le substrat. La terre diatomée est un abrasif microscopique sur lequel les larves en déplacement se coupent, ce qui provoque une hémorragie mortelle. On peut aussi traiter la plante infestée avec un savon insecticide en suivant les instructions du fabricant du pesticide. Il peut être utile d’installer des petits pièges collants (jaunes) et de les vérifier périodiquement. En cas de récidive, il faudra consulter un spécialiste dans un centre de jardinage ou au sein d’une association d’orchidophiles. Emportez avec vous un échantillon pour faciliter le diagnostic du conseiller.

  2. Wow
    Wow! Que de précieuses informations!
    Le 101 devient formation pour jardiniers avertis. J’ ai plusieurs orchidées, elles sont dehors, sur le balcon, sous les arbres et effectivement magnifiques après le passage à l’extérieur. Effectivement, jamais de pot de plante directement au sol (fourmis adorent et vers de terre! Mon chat passait du temps devant le pot en hiver car il l’entendait. Pas bien bon pour la plante en hiver…)
    On aime ces informations et la structure de bois est idéale & belle.

    Question : quels soins proposez-vous pour la rentrée? Lorsque les nuits descendent sous 15C, quelle adaptation devrions-nous faire pour ne pas choquer la plante?

    • Bonjour Anne, merci de vos commentaires.
      La rentrée des orchidées est généralement moins stressante pour la plante que sa sortie à l’extérieur. I faut toutefois prendre le temps de bien inspecter ses plantes au moment de la rentrée. Ce sera le sujet de la chronique de juillet 2025. Au besoin, il faudra nettoyer et traiter les plantes qui donnent des signes d’infestation pour ne pas contaminer ses espaces de culture intérieure. Ce sera le sujet de la chronique de septembre 2025. SVP continuer de nous lire et de commenter. C’est très apprécié !

  3. Sur la photo on voit de l’huile de Murphy, que j’utilise pour les planchers. Est ce que ça correspond à la description d’huile de margousier?

    • Bonjour Lucie, sur la photo le murphy sert à nettoyer le bois selon moi et la bouteille à gauche du murphy est l’huile de neem.

      • Bonjour Lucie et Marie-France,
        Le nettoyant concentré pour le bois ‘Murphy’ est une savon à base d’huile végétale (noix de Coco) et de Citronnelle naturelle. C’est la bouteille à l’extrême droite sur la photo. Il s’avère être un produit efficace pour le contrôle des insectes tout en étant non-toxique pour les enfants et les animaux domestiques. Il est aussi vraiment économique quand on le compare aux produits spécialisés vendus en jardinerie.
        L’huile de Margousier (Neem Oil en anglais) est vendue en pharmacie dans le rayon de produit de beauté pour les soins du visage et des cheveux. C’est la fine bouteille au centre de la photo. C’est aussi un produit de très faible toxicité (évidemment puisque c’est un produit de beauté) mais tout de même efficace pour repousser les insectes. Cette huile végétale se colle à la surface des feuilles et elle repousse les insectes rampants pendant quelques semaines. Elle contiendrait aussi certaines enzymes (ou hormones) qui empoisonnent les insectes rampants qui tenteront de manger le feuillage de vos plantes.
        On peut mélanger les deux huiles dans le même vaporisateur pour avoir une efficacité immédiate (par le Murphy) et une efficacité à plus long terme (par l’huile de Neem). Les doses recommandées sont inscrites dans la légende sous la photo. Je recommande de garder l’huile de Neem au frigo pour en prolonger l’efficacité à long terme.

  4. vous pouvez acheter de l’huile de neem en berlingot de 1 cl sur internet, site Aroma Zone

  5. Merci – c’est une information utile !

  6. Article intéressant, certes, mais j’ai surtout envie de dire que vous écrivez très bien. Une écriture élégante et soignée, et le mot juste.

  7. Je vis dans une région où les étés sont courts et les nuits froides, j’ai donc toujours hésité à sortir mes orchidées. Mais après avoir lu cet article, je me sens beaucoup plus en confiance, car je connais les conditions minimales à respecter : la température nocturne ne doit pas descendre en dessous de 15 °C. J’ai aussi appris Incredibox l’astuce d’incliner le pot de Phalaenopsis pour éviter la pourriture du dessus, une astuce que je n’avais jamais faite auparavant. Pour moi, ce n’est pas seulement un guide, mais une invitation à essayer quelque chose de nouveau.

  8. Merci à Charpentier! Quelle belle réponse, détaillée, claire, j’ai adoré!

  9. Merci pour ce bel article
    J’ai tenté ma chance de les sortir l’an dernier…mes chevreuils se sont régalés…zut de zut….Je ne les sort plus.