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18 faits fascinants sur la rhubarbe

Par Larry Hodgson

La rhubarbe est une plante commune de nos jardins, un classique du potager. On la récolte généralement à partir du milieu du printemps, lorsque ses feuilles s’épanouissent. Seul le pétiole (la tige) est consommé, souvent après cuisson et avec beaucoup de sucre pour réduire son acidité, même si, enfant, j’aimais grignoter des pétioles de rhubarbe crus simplement trempés dans du sucre.

Mais alors que nous sommes nombreux à cultiver la rhubarbe, que savons-nous vraiment d’elle? Voici quelques informations fascinantes que vous ne connaissez peut-être pas sur cette plante, son histoire, son utilisation et les détails de sa culture.

Tranches de racine de rhubarbe séchées.
À l’origine, la rhubarbe était importée en Europe sous forme de morceaux de racine séchés et utilisée à des fins médicinales. Photo: herbalshop.com
  1. La rhubarbe a d’abord été importée de Chine en tant que plante médicinale. Elle y est cultivée depuis des milliers d’années (5000 ans d’après une estimation) et y est essentiellement utilisée comme médicament. C’était une panacée, bonne pour traiter tous les maux, des problèmes de digestion jusqu’aux cancers, même si aujourd’hui les études peinent à trouver dans cette plante une valeur médicinale très notable. Elle était si appréciée autrefois que, lors de son voyage en Chine, l’un des objectifs de Marco Polo (1254–1324) était de découvrir d’où venait cette plante précieuse (il rapporta qu’elle était cultivée à Tangut dans le nord de la Chine). Ruy González de Clavijo, ambassadeur de Castille à la cour de Tamerlan, a rapporté en 1403-1405 que «la meilleure de toutes les marchandises venant à Samarkand venait de la Chine: en particulier les soies, les satins, le musc, les rubis, les diamants, les perles et la rhubarbe.» Oui, à pied d’égalité avec les diamants et les rubis!
Illustration noir & blanc montrant la rhubarbe cultivée dans la Chine ancienne.
La rhubarbe a une longue histoire d’utilisation en Chine, mais uniquement comme plante médicinale, pas comme légume. Ill.: Jean-Baptiste Du Halde, Description géographique, historique, chronologique, politique et physique de l’Empire de la Chine.
  1. Ce n’est que depuis relativement peu que la rhubarbe est utilisée comme plante comestible. Jusqu’au 18e siècle, elle était considérée comme une plante strictement médicinale. Cependant, comme le sucre est devenu plus largement disponible au cours de ce siècle (et le sucre est nécessaire pour diminuer l’acidité du pétiole), la rhubarbe a commencé à être utilisée comme source de nourriture en Grande-Bretagne, puis ailleurs en Europe. Au 19e siècle, l’usage médicinal de la rhubarbe en Europe et en Amérique du Nord était déjà largement abandonné et elle y était alors cultivée presque exclusivement pour ses délicieux pétioles acidulés.
  2. Le nom «rhubarbe» signifie racine barbare. Il vient du grec rha barbaron. Les Grecs connaissaient la plante que nous appelons rhubarbe comme importation, ses racines ayant été importées de Chine à grands frais. La nouvelle plante était considérée comme étrangère et, bien sûr, pour les anciens Grecs, tout ce qui venait de l’extérieur de leur civilisation était considéré comme barbare.
  3. La rhubarbe appartient à la famille des Polygonacées et est ainsi une parente de plantes comme l’oseille, la renouée et le sarrasin.
  4. Donner le bon nom botanique à la rhubarbe est compliqué. La rhubarbe comestible a longtemps été identifiée taxonomiquement comme Rheum rhabarbarum, mais des études récentes ont montré que la plupart des plantes de rhubarbe cultivées aujourd’hui appartiennent en fait à une espèce hybride, probablement entre la rhubarbe chinoise (R. rhabarbarum) et l’espèce européenne (R. rhaponticum). On devrait alors les appeler R. × hybridum. Notre rhubarbe est un tétraploïde (elle a 4 paires de chromosomes), avec 44 chromosomes, alors que la plupart des espèces de rhubarbes ont 2 paires (22 chromosomes).
Nouvelles pousses de rhubarbe au printemps, entourées de neige.
La rhubarbe pointe déjà le bout de son nez au tout début du printemps. Photo: Øyvind Holmstad, Wikimedia Commons.
  1. La rhubarbe est très résistante au froid. Elle survit dans des climats aussi froids que la zone de rusticité 3 et croît ainsi très bien en Alaska et en Sibérie. Elle est moins tolérante à la chaleur, toutefois, et réussit mieux dans les régions où les étés sont frais. Elle est souvent de courte vie dans les régions aux étés chauds (où les températures nocturnes sont supérieures à 24 °C pendant la majeure partie de l’été) et peut même y être traitée comme une plante annuelle, plantée pour une seule récolte, puis mise au compost.
  2. Les feuilles de rhubarbe ne sont pas aussi toxiques qu’on le croit souvent. Il est bien connu des jardiniers que vous ne devez consommer que la tige de la feuille (le pétiole) et non le limbe lui-même, car ce dernier est toxique. Cependant, il n’est que modérément toxique. Un adulte de 65 kg aurait besoin de manger de 4 à 8 kg de lames de rhubarbe pour atteindre une dose mortelle. Sa toxicité provient en grande partie de l’acide oxalique, un composé que les humains ingèrent facilement en petites quantités (on la trouve dans de nombreux aliments au goût acidulé, y compris l’oseille, les épinards et les betteraves, ainsi que le thé, le chocolat, les noix, le persil et les graines de pavot) et notre propre corps aussi en produit tout naturellement. Les pétioles ne contiennent qu’environ un dixième de l’acide oxalique du limbe et on peut alors les manger impunément. Par contre, les personnes souffrant de goutte ou de calculs rénaux devraient éviter tous les aliments contenant de l’acide oxalique, dont les pétioles de rhubarbe. 
  3. La rhubarbe est toxique pour les animaux de compagnie. Mais dans quelle mesure, cependant, ce n’est pas clair. Très probablement que, comme chez les humains, le limbe des feuilles est toxique, tandis que le pétiole ne l’est probablement pas. Cependant, l’empoisonnement à la rhubarbe chez les animaux de compagnie est si rare (la plupart des animaux n’aiment pas du tout son goût et refusent d’en manger) que les détails sont incertains. Il est peu probable que manger de la rhubarbe soit mortel, mais en manger suffisamment pourrait sans doute rendre les animaux domestiques malades.
  4. Le mot «rhubarbe» est parfois utilisé pour imiter le son d’une foule. Dans le monde de la radio, de la télévision et du cinéma, on demande à des groupes d’acteurs de répéter le mot «rhubarbe» comme bruit de fond, créant l’effet d’une foule quelque peu menaçante.
Tarte à la rhubarbe.
Même si l’on fait surtout des desserts à partir de la rhubarbe, un rôle habituellement dédié aux fruits, elle est en fait un légume. Photo: Hayford Peirce, Wikimedia Commons
  1. La rhubarbe est-elle un fruit ou un légume? Les jardiniers se sont longtemps disputés avec les cuistots à ce sujet! D’un point de vue botanique, elle est évidemment un légume, car nous la cultivons pour ses pétioles comestibles, pas pour ses «fruits» (qui sont des graines sèches sans intérêt culinaire). Cependant, ses pétioles sont couramment utilisés cuits avec du sucre dans les desserts (tartes, compotes, crumbles, etc.), domaine où règnent généralement les fruits (fraises, pommes, pêches, etc.) et alors les cuisiniers considèrent la rhubarbe comme un fruit. Curieusement, dans l’État de New York, elle a même été légalement déclarée un fruit… pour éviter une taxe sur les légumes importés.
Rhubarbe forcée, cultivée à la noirceur.
La rhubarbe est parfois cultivée des dans abris en vue d’une récolte très précoce. Photo: knutsonfarms.us
  1. Dans certaines régions, la rhubarbe est forcée dans des abris chauffés, à la noirceur. Non pas parce qu’elle a besoin d’une protection contre le froid, mais pour la stimuler à pousser très tôt dans la saison, comme primeur. Ainsi, elle arrive sur le marché dès février, même janvier, bien avant que la rhubarbe cultivée en extérieur ne soit disponible. Pour ce faire, le producteur déterre des plantes de 3 ans dans ses champs et les plante serrées les unes contre les autres dans un abri chauffé à environ 13 °C, ce qui réveille les plantes de leur dormance hivernale. Comme cette rhubarbe est cultivée entièrement dans l’obscurité (traditionnellement, on n’utilise comme seule lumière que des bougies, et seulement lors de la récolte!), elle pousse presque sans chlorophylle. Les feuilles sont jaune-verdâtre et les pétioles, rouge cerise particulièrement vif. Cette rhubarbe forcée, très prisée des chefs pour son goût fin, se vend 4 ou 5 fois plus cher que la rhubarbe cultivée en plein air. Ce forçage est notamment appliqué dans le Yorkshire (nord de l’Angleterre) et dans le nord-ouest américain.
Forçage de la rhubarbe à l’aide d’un seau.
Forçage de la rhubarbe en plein air à l’aide d’un seau. Photo: quickcrop.ie
  1. Vous pouvez forcer la rhubarbe vous-même, et ce, même assez facilement. À la fin de l’hiver, couvrez-la plante avec un seau ou un pot de couleur foncée (vous devrez peut-être l’alourdir avec une brique ou une pierre), en vous assurant d’exclure toute lumière. Dans l’obscurité et la chaleur (le récipient se réchauffera au soleil, permettant de garder la plante nettement plus chaude que l’air ambiant), les feuilles se réveilleront tôt et pousseront rapidement. Lorsque la pression des feuilles en croissance commence à soulever le seau, récoltez-les avec leur limbe curieusement jaune et dégustez les superbes pétioles rouge lumineux.
Pétioles de rhubarbe coupés montrant, certains rouges, d’autres verts.
La rhubarbe à pétiole vert est aussi comestible que celle à pétiole rouge.. Photo: Simplyoneden.com
  1. Malgré l’affirmation contraire que l’on entend parfois, la rhubarbe verte n’est pas toxique. Et vous n’avez pas non plus à attendre que les pétioles rougissent avant de les récolter, autre croyance populaire. Les cultivars individuels de rhubarbe peuvent avoir des pétioles verts, roses ou rouges, selon leur génétique, tout comme les gens peuvent avoir les yeux marron, bleus, noisette, etc. La coloration n’a aucun effet sur le goût ni la toxicité des pétioles: ils sont tous comestibles. Il est vrai que le goût varie d’un cultivar à l’autre et que certains sont en effet naturellement plus sucrés (ou moins acidulés), mais la couleur du pétiole n’est pas l’un des facteurs qui influencent cette différence de goût.
  2. Vous pouvez récolter la rhubarbe tout l’été. Même si, en règle générale, la rhubarbe est récoltée du printemps jusqu’aux premiers jours de l’été, lorsque les pétioles sont les plus tendres, la croyance que les pétioles de rhubarbe deviennent toxiques en été est fausse. Si vous ne les récoltez pas au printemps, vous pouvez le faire à tout moment jusqu’à la fin de l’automne. Attendez-vous simplement à ce que les pétioles soient un peu plus coriaces. Et notez que vous devez toujours laisser suffisamment de feuillage sur la plante pour qu’elle puisse accumuler assez d’énergie pour assurer la récolte de l’année suivante.
  3. Il ne faut pas récolter la rhubarbe l’année de la plantation… à moins que vous ne la cultiviez comme annuelle, comme dans le Midi. Laissez-la grandir et accumuler son énergie la première année, tout simplement. Même la 2e année, ne récoltez que modérément, peut-être deux feuilles par plante, en laissant au moins 5 bonnes feuilles fortes intactes pour faire de la photosynthèse pendant l’été. À la troisième année, la récolte peut commencer pour de bon, mais assurez-vous de laisser au moins 5 grandes feuilles pour assurer la suite.
Rhubarbe en fleurs.
Malgré la croyance populaire, il n’est pas nécessaire de supprimer les fleurs de la rhubarbe. Photo: Øyvind Holmstad, Wikimedia Commons
  1. Vous n’êtes pas obligé de supprimer les fleurs de la rhubarbe, bien que de nombreux jardiniers prétendent véhémentement le contraire. Elles sont très attrayantes, alors pourquoi ne pas les laisser s’épanouir à leur guise et profiter du spectacle? Après la floraison, coupez la tige florale pour que la plante ne produise pas des semences envahissantes, voilà tout. 
  2. Pourquoi la rhubarbe produit-elle parfois des pétioles creux? Cela est généralement causé soit par une carence en minéraux, soit par un temps exceptionnellement chaud. Si vous soupçonnez une carence, fertilisez avec un engrais complet — comme un engrais à base de poisson ou d’algues — qui contient alors tous les minéraux qui peuvent manquer. Et pour garder la plante davantage au frais, couvrez le sol autour de la plante d’un paillis épais. Notez toutefois que même si les pétioles sont creux, ils demeurent parfaitement comestibles. 
Division de la rhubarbe
Si votre rhubarbe devient moins productive avec le temps, divisez-la. Photo: growtogether.areavoices.com
  1. La rhubarbe a une longue durée de vie. C’est d’ailleurs l’un des légumes les plus pérennes. La plante peut vivre 20, 40, même 60 ans et plus. Cependant, elle commence généralement à décliner après environ 20 ans, plus tôt dans les sols de moindre qualité. Si vous remarquez un déclin dans votre rhubarbe, divisez-la au printemps ou à l’automne et replantez-la dans un nouvel emplacement dans un sol bien enrichi en compost, adéquatement drainé et en plein soleil. Cela lui donnera une nouvelle vie!

Si vous souhaitez en savoir plus sur la culture de la rhubarbe, lisez l’article La rhubarbe: pour les jardiniers patients.


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commentaire sur "18 faits fascinants sur la rhubarbe"

  1. Ma rhubarbe a plus de 40 ans et est toujours aussi belle. Elle couvre bien 4m2

  2. Vous faites vraiment le tour de la question! Pour les amateurs, cf. l’article “Rhubarb” de The Oxford Companion To Food, ou bien en allemand, un petit livre de recettes, Rhabarber, éditions NJN 20013, et Rhabarber, Rhabarber! (le titre fait allusion à l’usage du mot sur scène pour évoquer la rumeur d’une foule), très complet (histoire, botanique, culture, recettes), chez Husum 2003. Il y a une tradition significative autour de la rhubarbe dans le nord de l’Allemagne avec en particulier une boisson gazeuse qui en comporte, comme en Angleterre. On peut cultiver la rhubarbe hors sol: la mienne vit bien sur un balcon dans un grand bac de 40cm de profondeur, 40 de largeur sur 60 de longueur, mais elle n’est pas très productive, je vais enrichir sa terre.

  3. Les tartes à la rhubarbe que faisait ma regrettée mémé… miam…

  4. En plus des recettes traditionnelles de marmelades, tartes , gâteaux et muffins, j’en fais une limonade très désaltérante , mais aussi délicieuse en été. Un fruit à redécouvrir.. Merci pour toute l’information .

  5. Merci pour votre article très instructif et merci à l’avance pour vos conseils. J’ai divisé ma rhubarbe en 3 l’automne passé. Elle a bien repoussé dois je attendre avant de la récolter?

  6. Je donnais les feuilles entières à mes poules, aucune n’en a jamais souffert a priori ^^
    Elles mangeaient principalement le pétiole, mais aussi le limbe (elles ne le finissaient peut-être pas, en revanche).

  7. Je ne savais pas qu’il ne fallait pas tout cueillir.C’est peut-être pour cela que j’ai un pied qui a “disparu”

  8. Je suis un peu hors sujet, mais… vous dites qu’il faut laisser à la rhubarbe quelques feuilles pour qu’elle se refasse des forces… le principe est-il le même pour les asperges? Faut-il en laisser quelques unes « feuillir »?

  9. Chez-moi nous mangeons la rhubarbe crue avec un peu de sel, c’est délicieux. Je me souviens que chez mon oncle il mettait du sucre et nous n’aimions pas ça. Mais les gâteaux renversés à la rhubarbe de ma mère étaient tout à fait délicieux ! Merci pour toute cette information.

  10. Bonjour Larry , à lire les commentaires je vois l’importance de comment cueillir la rhubarbe , un autre demande pour l’asperge..je me demande pourquoi y a pas de livre sur comment et quand cueillir nos légumes, fruits , fines herbes . C’est bien beau savoir comment les faites pousser mais lorsqu’arrive le temps des cueillettes on arrache tout pour l’un pas tout pour l’autre ou bien juste quelques feuilles si on veut qu’il épaississe ?????Se donner tant de mal pour les faire pousser à partir des semences mais gâcher le tout lors de la cueillette c’est bien dommage .

  11. J’aimerais profiter du tres gros plant de rhubarbe de mon voisin pour en avoir chez nous.a quelle moment faudrait le diviser pour le replanter et de quelle façon

  12. Bonjour,
    Je voulais ajouter que l’on peut faire un excellent purin avec les feuilles de la rhubarbe; ainsi zéro déchet!
    Ce purin est un répulsif contre certains insectes, notamment les pucerons, Il aide également à lutter contre le ver ou la teigne du poireau et la teigne de la carotte.
    En plus des plantes potagères, il s’utilise sur les rosiers, les arbres fruitiers, les arbustes à fleurs, les vivaces.
    Pour préparer ce purin, faites macérer 1,5 kg de feuilles dans 10 L d’eau pendant 72 h, filtrez et pulvérisez. Vous pourrez le conserver plusieurs semaines, voire plusieurs mois dans un bidon fermé, stocké au frais et à l’abri de la lumière

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