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Comment un décembre doux peut-il affecter nos végétaux?

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L’hiver 2015-2016 pourrait être le plus chaud depuis 1880.

Le temps exceptionnellement doux que nous vivons en Amérique du Nord semble vouloir se maintenir jusqu’en janvier et même jusqu’au début de février, avec déjà des records de température presque quotidiens ces jours-ci. On annonce même que l’hiver 2015-2016 pourrait être l’hiver le plus chaud depuis 1880, avec des températures 6 à 11 degrés supérieures à la normale.

La situation n’est pas aussi exceptionnelle en Europe, mais néanmoins, l’ouest du continent, dont la France, le Belgique et la Suisse, risquent également de connaître un hiver plus doux que la normale.

On sait que c’est la faute d’El Niño — l’eau dans l’océan Pacifique est plus chaude que la normale, ce qui a des effets presque planétaires — mais qu’est-ce que ça change dans la vie des jardiniers?

Tant que ça reste doux…

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Le chou kale est encore en parfait état dans nos jardins.

Pour l’instant, la température plus douce est plutôt bénéfique pour les végétaux. Aucune plante n’a vraiment besoin de -40?C pour sa survie — tout au plus, les plus résistantes tolèrent de telles températures — et les températures cette année sont tout de même assez basses pour rencontrer les minimums nécessaires aux végétaux de climat tempéré (plusieurs exigent une longue période de températures inférieures à 7?C pour pouvoir fleurir, ce qui nous aurons). Si vous n’avez pas encore récolté vos choux kale et poireaux, ils sont encore en parfait état dans plusieurs régions et d’ailleurs, plus sucrés que jamais. Si la température douce se poursuit jusqu’à la fin janvier, on risque même de voir certaines plantes commencer à fleurir, notamment les bulbes (perce-neiges, crocus, narcisses), les hellébores et même certains arbustes (forsythias, faux-amandiers, etc.).

Le problème est plutôt que le froid peut arriver trop rapidement par la suite, avant que les végétaux ne soient prêts à l’affronter. Un décembre et janvier très doux suivis d’un coup de froid en février pourrait être désastreux pour beaucoup de végétaux.

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Idéalement l’automne progressera lentement, devenant de plus en plus froid sur une longue période.

C’est que les plantes s’acclimatent graduellement aux températures froides. La situation idéale serait un automne où les températures baissent graduellement, suivi d’un début d’hiver où les températures continuent de baisser peu à peu. Ainsi les végétaux s’acclimateront très bien au froid à venir. Mais si les températures continuent de se maintenir à 10?C au-dessus de la normale, comme c’est le cas actuellement, donc au-dessus de 0?C en janvier, beaucoup de plantes ne seront pas prêtes aux températures de -15, -25 et -35?C qui peuvent survenir au Québec et leurs cellules peuvent alors être endommagées ou tuées. Évidemment, il est fort possible que nous n’ayons pas ces températures extra froides cet hiver, et d’ailleurs on prédit un janvier très doux, mais les mêmes prévisions météorologiques semblent indiquer que février et mars, du moins, seront plus près des températures hivernales normales.

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La neige protège les plantes contre le froid.

Aussi, la neige, qui a un effet isolant important sur le sol et donc sur les végétaux (elle protège leur racines et leurs bourgeons dormants), est quasiment absente jusqu’ici cette année, même en montagne. Les régions qui comptent habituellement sur une bonne couche de neige en décembre pour protéger les végétaux des grands froids habituels de janvier et de février n’auront pas cette protection cette année. Nous ne pouvons qu’espérer que la neige commencera à s’accumuler bientôt.

Les ennemis de nos plantes se la coulent douce

20151212G.jpgLes hivers froids nuisent énormément aux insectes et autres petits prédateurs de nos plantes, car la mortalité chez les œufs, les chrysalides et les insectes hivernants est alors importante. Un hiver doux, par contre, est souvent suivi d’un été où les ennemis de nos plantes sont très nombreux et les dégâts peuvent être majeurs. Même les mauvaises herbes risquent d’être plus nombreuses l’été prochain, car peu de leurs graines auront été tuées par le froid.

Effets sur différents végétaux

Un automne/début d’hiver doux suivi d’un froid subit, ou encore, de températures en dents de scie, où on passe de chaud au froid de façon répétée, affectent chaque type de plante différemment. Voici quelques exemples:

Végétaux hors zone: les plantes cultivés au-delà de leur zone de rusticité habituelle, peu importe leur catégorie (arbre, arbuste, fruitier, vivace, etc.), risquent d’être les plus endommagées (exemple: un arbuste de zone 6 cultivée en zone 4), car ils s’acclimatent encore moins au froid. Il n’est pas trop tard de couvrir leur base de feuilles mortes ou de paillis, un excellent remplacement pour la neige absente.

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Boutons séchés sur un rhododendron.

Arbustes et arbres à fleurs: les arbustes et arbres qui fleurissent au printemps risquent de voir leur floraison réduite ou éliminée, car ces espèces portent déjà les boutons de la floraison à venir et ils sont alors exposés aux soubresauts du climat. Déjà les boutons de certains forsythias, rhododendrons, azalées et magnolias commencent à gonfler, signe qu’ils se préparent à ouvrir, alors qu’ils ne devraient pas le faire avant le mois d’avril. Ces boutons ne pourront plus s’endurcir et ainsi leur floraison 2016 pourrait être sévèrement diminuée. Dans mon voisinage, j’ai déjà vu un forsythia avec quelques fleurs ouvertes! C’est certain que cette floraison ne durera pas longtemps… et qui les branches qui fleurissent maintenant ne fleuriront pas une deuxième fois au printemps.

Notez que les protections hivernales en jute ou en géotextile qui certains jardiniers installent sur ces plantes ne les protègent nullement contre le froid (elles coupent plutôt l’effet asséchant du vent) et seront donc essentiellement inutiles contre le problème actuel.

Fruitiers: vignes à raisin, cerisiers, pruniers, abricotiers, framboisiers, ronces, etc. risquent de voir leur production réduite ou éliminée par un automne/hiver doux suivi de coups de froid, car ils ont alors tendance alors à moins s’endurcir pour l’hiver. De plus, si le temps doux continue jusqu’en janvier, leurs boutons floraux peuvent commencer à gonfler, ce qui les laissera susceptibles au moindre gel. Les pommiers sont généralement moins influencés par les facteurs mentionnés que les autres fruitiers.

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Même si un bulbe fleurit hors saison, cela n’aura pas de séquelles à moyen ou à long terme.

Bulbes rustiques: certains peuvent se mettre à fleurir trop tôt, mais au pire cela ne fera que faire avorter la floraison de la saison. Le feuillage de certains bulbes (notamment les muscaris) peut aussi déjà être en train de pousser, mais ça non plus n’est pas grave. Le bulbe lui-même, profondément enfoncé dans le sol, ne sera pas trop touché par cette  anomalie météorologique. Au pire, sa floraison 2016 sera écourtée, mais il sera en mesure de refleurir en 2017.

Vivaces: l’hellébore (Helleborus spp.) est probablement la seule vivace qui risque de fleurir hors saison et ainsi voir sa floraison au printemps 2016 réduite. Les autres sont en dormance et bien emmitouflées par la masse de terre qui les entoure: ainsi elles sont relativement bien protégées des froids subits. Cela est d’autant plus vrai si vous n’avez pas coupé leurs feuilles à l’automne, car leurs propres feuilles sont conçues pour les protéger contre les méfaits de l’hiver. Si vous avez fait le ménage de vos plates-bandes cette automne, il serait sage de couvrir les plantes de feuilles mortes ou de paillis sans tarder.

Pelouses: un long automne doux est plutôt bénéfique aux pelouses, surtout aux pelouses fraîchement installées, car cela permet à leurs racines — qui sont présentement encore en croissance! — de bien s’établir et donc de mieux affronter les rigueurs de l’hiver. Aussi la plupart des graminées de pelouse utilisées dans les régions septentrionales résistent assez bien aux coups de froid. Par contre, un coup de froid exceptionnel peut quand même faire des dégâts.

Et voilà! Croisons les doigts… et espérons que la neige arrive bientôt!

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commentaire sur "Comment un décembre doux peut-il affecter nos végétaux?"

  1. Sylvie Parent dit :

    Est-ce que le temps doux peut-être néfaste aussi pour l’ail ? Un paillis de paille sera t’il suffisant pour protéger les caïeux ?

  2. Maryse Alain dit :

    Je suis inquiète pour mon ail que j’ai planté ã la fin d’octobre.

  3. C'est dans l'adresse dit :

    Une remarque, les professionnels savent qu’un hiver rigoureux pose plus problèmes. Car, si en effet il tue plus d’ennemis, il laisse aussi les plus forte qui à leur tour engendre des générations plus résistantes. Il suffit de savoir ce que nous préférons !

  4. […] inhabituelles actuelles sur les végétaux d’ornement. Je vous en suggère la lecture : lien ici. Parfois, les plantes subissent des phénomènes météorologiques extrêmes isolés, qui peuvent […]

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