Réponses à vos questions: fissures dans l’écorce
Il y a 3 ans, j’ai déplacé un petit érable d’environ 30 cm qui avait poussé dans une plate-bande. Les premières années, tout allait bien et il a bien profité. Toutefois, ce printemps, j’ai remarqué que l’écorce était fendue à quelques endroits, mais uniquement d’un côté du tronc.
Devrais-je le laisser aller en espérant qu’il survivra ou est-il irrécupérable?
Sonia Houle
Réponse
Il est loin d’être irrécupérable. Les arbres ont une grande capacité de survie et, dans la majorité des cas, ils arrivent à se remettre de ce type de blessure.
Ce que vous observez est probablement dû à une brûlure d’hiver, aussi appelée coup de soleil hivernal ou sunscald en anglais. Le problème survient surtout chez les jeunes arbres ou ceux à écorce mince, lorsque le tronc est exposé à un ensoleillement direct en plein hiver alors que les tissus sont encore en dormance et gelés. La fissure qui en résulte porte le nom de gélivure.
Sous l’effet du soleil, l’écorce se réchauffe et les cellules du phloème et du cambium, deux tissus essentiels situés juste sous l’écorce, se réactivent légèrement. Le phloème agit comme une tuyauterie descendante, transportant les sucres des feuilles vers les racines, tandis que le cambium est la fine couche qui produit le nouveau bois et la nouvelle écorce. Or, lorsque la température chute brusquement au coucher du soleil, ces cellules encore gorgées d’eau gèlent et éclatent, ce qui provoque une nécrose localisée des tissus. Avec le temps, cette zone affaiblie peut se fendre, donnant naissance aux gélivures caractéristiques que l’on remarque au printemps.
Cependant, le gel ne fait souvent que révéler un point faible déjà existant à l’intérieur du tronc. Une petite blessure antérieure lors de la transplantation ou un choc mécanique peut permettre à des champignons microscopiques d’entrer dans le bois, créant un fil de bois plus fragile. En hiver, lorsque l’eau contenue dans ce bois affaibli gèle et prend de l’expansion, la pression interne pousse l’écorce à se fissurer.
La brûlure d’hiver déclenche le problème, mais c’est la faiblesse interne qui le permet.

Est-ce que c’est grave?
Règle générale, les brûlures d’hiver ne tuent pas les arbres, du moins, pas immédiatement. Ces lésions sont souvent surtout esthétiques, sauf dans des cas plus sévères. Toutefois, une blessure dans l’écorce peut devenir une porte d’entrée pour des infections fongiques ou des insectes.
Évidemment, si la fissure fait complètement le tour du tronc, le cambium et le phloème ne peuvent plus assurer la circulation de l’eau et des nutriments entre les racines et le feuillage: l’arbre finit alors par mourir.
De plus, un arbre déjà affaibli – par exemple à cause d’une sécheresse, d’un sol inadéquat ou d’un autre stress environnemental – sera beaucoup plus vulnérable et risque davantage de succomber à ce type de blessure.
Quoi faire pour aider l’arbre à guérir?
Il ne faut surtout pas peinturer ou «panser» la zone abîmée avec de la peinture d’émondage ou un produit imperméable. Pendant longtemps, on croyait que ces produits empêchaient les champignons et les insectes de s’y installer. Or, on sait maintenant qu’ils créent au contraire un milieu humide et stagnant qui favorise les infections.
Lorsqu’un arbre subit une blessure, il enclenche immédiatement son mécanisme naturel de défense: il scelle les cellules atteintes avec des composés protecteurs présents dans la sève, ce qui repousse physiquement et chimiquement les envahisseurs potentiels. Ensuite, il forme un cal de recouvrement autour de la zone touchée, qui grandit petit à petit pour l’isoler. On ne parle pas d’une guérison complète, mais d’une compartimentation: l’arbre met la blessure en quarantaine pour maintenir sa santé générale.
Au printemps, vous pouvez retirer uniquement l’écorce déjà détachée, à l’aide d’un couteau propre et bien stérilisé. Par la suite, l’idéal est d’améliorer les conditions de croissance afin de réduire les facteurs de stress. Le plus simple consiste à appliquer une couche de 5 à 10 cm de paillis organique autour de la base (en évitant tout contact direct avec le tronc). Cela réduit les écarts de température au niveau des racines et retient l’humidité du sol. En période de sécheresse, un arrosage profond, mais espacé aidera l’arbre à récupérer plus rapidement.
Surveillez aussi l’apparition de signes d’infection ou d’insectes dans la fissure, et consultez un arboriculteur si la situation se détériore.
Comment éviter les brûlures d’hiver
Dans la plupart des cas, les arbres récupèrent très bien de ce type de blessure. Toutefois, il existe quelques façons simples de prévenir les brûlures d’hiver.
En plus d’utiliser du paillis au pied de l’arbre et d’assurer un bon arrosage pendant un an ou deux après la plantation – ou lors de sécheresses prolongées –, il est possible de protéger le tronc des jeunes arbres exposés au soleil en hiver. On peut installer à l’automne un film protecteur ou un pare-soleil blanc du côté sud ou sud-ouest du tronc, puis le retirer au printemps.
Il est aussi préférable d’éviter la fertilisation en fin de saison, surtout les engrais riches en azote, car ils stimulent une croissance tardive qui ne parvient pas à se durcir avant l’hiver, rendant les tissus plus vulnérables.
Enfin, dans une situation comme la vôtre où un arbre transplanté passe soudainement de l’ombre au plein soleil, il est mieux de protéger son tronc ou de l’ombrager temporairement, par exemple en maintenant des arbustes ou de grandes vivaces autour de lui. À l’inverse, éviter de dégager brusquement un arbre sensible peut aussi prévenir un coup de soleil hivernal.
Éviter aussi les blessures au pied du tronc (coups de tondeuse, coupe-bordure), car ce sont elles qui déclenchent souvent le problème à la base.
Un peu de patience
Ces fissures ne m’inquiètent pas du tout. Pour l’instant, il y a peu à faire, sinon chouchouter votre arbre: une bonne couche de paillis, un arrosage en profondeur lors des sécheresses prolongées et beaucoup de patience.
Et puis, entre nous: qui n’a pas quelques cicatrices, signes d’une vie bien remplie?
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(Bien sûr, nous recevons un très grand nombre de messages – il nous est donc impossible de répondre à tout le monde. Mais qui sait? Votre question pourrait devenir le prochain article!)



Wow! Belle réponse Mathieu, même si ce n’était pas moi qui avais posé cette question.
Tu as totalement raison. Qui d’entre nous n’a aucune cicatrice, signe d’une vie bien remplie et d’une certaine prise de risques, n’est-ce pas? 😉
Je suis assidument vos commentaires journaliers et j’ai une petite question : j’ai 12 rosiers, 10 en pots, 2 en pleine terre, mais tous paraissent rachitiques, voire ringards… Que faire ?
Très intéressant et instructif de vous lire, merci.
Lorsque j’ai acheté ma maison en 2000. Une de mes érable avait une très grosse blessure (environ 30/36 de longueur et 4/5 de largeur), probablement causé par une auto. Maintenant en 2025, la blessure est presque fermée sans aucun soin, la nature seulement.
Merci beaucoup pour toute l’information!
Je transfère à mes contacts car précieuses
J´ai remarqué que les jeunes conifères, sapins de moins de 2 mètres de haut avec leur mince écorce sert parfois de nourriture, faute de mieux pour les rongeurs et lièvres. Une petite entaille ne dérange pas, mais plus elle cherche à faire le tour du tronc, pire sont les conséquences. Si elle fait le tour l´arbre est condamné. Il mourra dans l´été suivant faute de sève. À 75, 80 % il semblerait sans remettre. Il bourgeonnement de partout, mais il vit sur du temps emprunté.. En effet la partie du tronc blessé se recouvre de resine pour se protéger, mais cessera toute croissance alors que la partie supérieure du tronc augmentera de diamètre. Au bout de 2 à 3 ans les différences de diamètres sont frappantes. L´arbre semble bien se développer mais plus la partie supérieure prendra du poids avec un volume de branches toujours plus imposant, jusqu´au jour ou le tronc blessé qui ne s´est plus développé, ne pourra plus supporter son propre poids, celui de la neige / verglas ou un bon coup de vent et se brisera. Plus haute est la blessure, meilleures sont les chances qu´il reparte du bas. Autrement il mourra.
Grâce à cet article, je suis rassurée. Il y a quelques années, nous avons transplanté des dizaines d’érables dans le champ arrière car nous voulions y faire renaître une petite forêt. Mais il y a deux ans, près de la moitié des érables ont fendu durant l’hiver. Tous les côtés étaient face au soleil. Je les croyais en fin de vie. Heureusement, ils ont survécu et semblent ne pas être malades, les fentes se referment peu la peu. La nature est bien faite!
Merci beaucoup pour l’information!