Site icon Jardinier paresseux

Le petit guide du coloriste… paresseux

Sans doute avez-vous entendu parler des règles de la couleur au jardin: des couleurs qui éloignent, d’autres qui rapprochent, la roue des couleurs, les combinaisons heureuses, etc., peut-être même essayez-vous de les comprendre et de les suivre? Bonne chance, alors! Elles sont tout ce qu’il y a de plus ésotérique: pas du tout évidentes à mettre en pratique.

Photo: Getty Images

Personnellement, je ne crois pas du tout à ces règles et ne les utilise jamais lorsque je planifie un aménagement. D’accord, je sais qu’il y a des gens (je les appelle des «coloristes») qui y croient dur comme fer. Actuellement, ce sont ces coloristes qui dominent en aménagement paysager. Toutefois, à regarder ce qui se passe ailleurs dans le monde, en France, en Angleterre, en Californie, par exemple, je crois sincèrement que leur domination est à la veille de prendre fin. Tant mieux pour le jardinier amateur qui souffrait sous le joug de ces règles aussi difficiles à comprendre qu’à appliquer.

Mais d’où viennent ces règles sur l’utilisation de la couleur dans le jardin?

Du domaine de la peinture, bien sûr!

Après tout, les peintres aussi travaillent avec les couleurs et ont trouvé, au cours de longues années de recherche, des façons d’utiliser les couleurs qui leur donnent un coup de main dans leur domaine.

Photo: Getty Images

Pourtant, ces «règles de la couleur» ne furent jamais conçues pour être adaptées à l’aménagement paysager. Leur but était de créer un sentiment de profondeur sur un tableau plat, un milieu à seulement deux dimensions, D’où l’idée des «couleurs qui rapprochent» et des «couleurs qui éloignent». Un effort pour créer trois dimensions là où il n’y en a que deux. Or, autant que je sache, un aménagement paysager est en trois dimensions. Pire, certains coloristes, trouvant qu’il n’y a pas déjà assez de règles, se sont laissés aller à imposer leurs propres goûts en aménagement. Comme le professeur qui défend à ses élèves de mettre des plantes jaunes dans leurs plans d’aménagement. Une chance qu’il ne m’avait pas comme élève: j’aurais fait exprès pour mettre du jaune partout!

Mais faire fi de toutes vos idées préconçues sur les couleurs sans rien vous proposer en retour serait vous laisser dans le désarroi le plus total… et je ne ferais jamais ça, chers lecteurs. Aussi, je vous propose dix conseils qui découlent davantage du «gros bon sens» et du «vécu» que de théories, et qui donneront fière allure à vos aménagements, quand bien même vous ne connaissez rien des «règles de la couleur». Ils ne sont pas vraiment nouveaux, mais ils vous donneront de bons résultats.

Couleurs au jardin, le gros bon sens

Photo: Getty Images
  1. Utilisez les plantes que vous aimez dans les couleurs que vous aimez. Succès garanti! Comment voulez-vous être autrement que malheureux si vous utilisez ce que vous détestez, comme quand vous permettez à d’autres de vous imposer leur choix de couleurs?
  2. Plantez par taches de couleur. Sinon, l’effet de chaque couleur sera tout simplement trop dilué. Tant qu’à avoir du rouge, aussi bien avoir un rouge qui paraîtra. Pour faire une telle tache, rassemblez des plantes identiques par groupes de 10 à 15, pour les petites plantes, de cinq à neuf pour les plantes de taille moyenne et de trois pour les plus grandes. Seuls les végétaux vraiment imposants par leur taille ont assez de prestance pour être utilisés individuellement.
  3. Répétez les taches. L’harmonie vient beaucoup moins du choix des couleurs que de leur répétition. Répétez la même tache au moins deux fois (trois fois et plus dans les jardins plus vastes) et l’œil trouvera toujours l’aménagement harmonieux, peu importe le choix de couleur.
  4. N’essayez pas de faire des «combinaisons heureuses». Il n’y a rien de plus frustrant que d’essayer de combiner telle teinte avec exactement telle autre. D’abord, l’effet n’est jamais le même dans le jardin que sur papier, sans doute parce que le papier est blanc alors qu’un jardin est vert… mais surtout, il est presque impossible d’avoir les deux plantes du mariage heureux en fleurs en même temps.
  5. Utilisez des taches blanches ou du gris pour atténuer si vous craignez qu’une combinaison soit trop criarde, il suffit de séparer les deux couleurs «offensantes» par des plantes à fleurs blanches ou à feuillage gris ou argenté et le contraste se trouvera amoindri.
  6. Utilisez plus de couleurs pâles à l’ombre et de couleurs sombres au soleil.?Les blancs, rose pâle et autres couleurs pastel illuminent littéralement l’ombre, car ils reflètent la lumière, mais ils peuvent aussi éblouir s’ils sont trop concentrés dans des emplacements ensoleillés. Au soleil, essayez des couleurs sombres (bleu marine, pourpre, marron, par exemple) pour absorber les reflets agaçants.
  7. Évitez la symétrie trop parfaite dans les plantations. Pas de lignes droites, de triangles parfaits, de plantes identiques de chaque côté d’un sentier, etc. Il s’agit alors qu’une seule plante meure pour voir toute votre planification s’envoler en fumée. Si vous voulez des lignes droites ou autres formes géométriques, utilisez des matériaux inertes qui sont beaucoup plus fiables.
  8. Non, vous n’êtes pas obligé de toujours utiliser des chiffres impairs!?Pensez-vous vraiment que l’œil fait la différence entre 15 plants de phlox et 16?
  9. Osez oser. C’est votre aménagement et vous ne serez jamais content des résultats si vous vous laissez imposer des idées.
  10. Enfin, ne suivez jamais de règles… même pas celles-ci!

Bon plaisir avec tous vos projets d’aménagement!


Publication d’origine

Larry Hodgson a publié des milliers d’articles et 65 livres au cours de sa carrière, en français et en anglais. Son fils, Mathieu, s’est donné pour mission de rendre les écrits de son père accessibles au public. Ce texte a été publié à l’origine dans Fleurs, plantes et jardins en septembre 2001.

Quitter la version mobile