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Le B – A – BA de la semi-permaculture

Par Julie Boudreau

La permaculture est une notion qui revient continuellement dans les discussions. Que l’on parle de miniforêts, de forêts nourricières, de culture maraîchère et même de notions de design pour les places publiques urbaines, on mentionne invariablement les principes de la permaculture.

Même si dans les faits, il faut un immense jardin pour pratiquer pleinement la permaculture, on peut appliquer quelques principes dans tous les jardins. Photo: Julie Boudreau

Or, la permaculture en soi est tout un projet. Même si j’applique de nombreux principes issus de la permaculture, il ne me viendrait jamais à l’idée de prétendre que mon grand terrain de banlieue est un lieu dédié à cette pratique. C’est qu’il me manque quelques hectares!

Dans sa réalisation la plus complète, la permaculture invite à produire ses propres céréales (blé, seigle, avoine) afin de produire ses propres farines. On y élève son propre bétail, qui fournit le fumier pour fertiliser les champs de production. On dispose de forêts pour récupérer son propre bois d’œuvre… La permaculture vise donc l’autonomie alimentaire, que l’on nomme aussi l’autosuffisance.

Cultiver son propre seigle bio pour éventuellement faire sa propre farine et son propre pain n’est pas donné à tout le monde! C’est une portion de la permaculture qui demeure inaccessible quand on vit en ville ou en banlieue. Photo: Pascal Royer de la Ferme bio J. A. Paquin.

C’est pourquoi je préfère aborder la chose sous un angle différent que j’appelle la semi-permaculture. Je décris souvent ma cour comme un jardin à tendance «permacultivée»!

Car, il y a dans l’univers de la permaculture plusieurs notions fort intéressantes et faciles à mettre en place dans tout jardin. Voici donc quelques grands principes que l’on peut assez facilement mettre en place dans un jardin de plus petite échelle.

Les trois piliers de la permaculture

Les angles et les manières d’analyser les principes de la permaculture sont nombreux, mais essentiellement, on revient toujours à trois notions essentielles et incontournables. Le respect de la Terre, le souci des gens et le partage équitable.

Par respect de la terre, on pense bien sûr à ce qu’on va laisser aux générations suivantes. Mais il est aussi question de respect de tous les êtres vivants, du plus minuscule microbe vivant dans le sol au plus géant des cétacées.

Le souci de gens se pratique à diverses échelles. Il y a bien sûr tous les liens de proximité. C’est une invitation à avoir de l’empathie, à être toujours aimable avec les gens autour de nous. Mais c’est aussi de réaliser que parfois notre recherche du plus grand confort se fait au détriment des autres.

Enfin, la permaculture invite au partage équitable des ressources et des richesses. Pour un jardinier, c’est la partie la plus agréable et la plus facile à appliquer. C’est simple, au lieu de regarder les milliers de tomates moisir au potager, on les partage! Un panier « À donner » au bord du chemin ou une affiche « Servez-vous » devant un pommier plein à craquer et hop! Mission accomplie.

En somme, c’est une invitation à prendre conscience que toutes nos actions, aussi banales soient-elles, peuvent avoir des répercussions à l’extérieur des limites de notre propriété, à l’extérieur de notre ville et parfois à l’extérieur de notre pays. Simplement avec ces trois notions, on peut déjà effectuer des changements et poser de nouvelles actions qui seront plus en harmonie avec les principes de la permaculture.

Travailler avec des cycles

La permaculture ne se limite pas à ces trois grands principes. Elle a de multiples facettes. Un des axes de réflexion est la notion de cycle ou de boucle. Dans un cycle parfait, il n’y a pas d’intrants ni d’extrants.

Travailler en cycles fermés est un des grands principes de la permaculture. Il faut trouver le moyen de ne rien faire entrer et de ne rien sortir de son jardin. Ce sont nos habitudes de consommation qui sont mises au défi! Photo: Wikimedia Commons.

Voici un exemple: dans la forêt, les feuilles tombent au sol à l’automne. Avec l’aide des vers de terre et des organismes microscopiques du sol, ces feuilles se décomposent et deviennent du compost. Ce compost nourrit les arbres qui produisent des feuilles. Et le cycle recommence!

Personne n’est allé dans la forêt pour ajouter du 20-20-20. Personne n’a ramassé les feuilles mortes pour nettoyer la forêt. Et pourtant, tout fonctionne! Réfléchir sur les cycles nous ramène aussi à nos habitudes de consommation. Tout ce qu’on achète devient un intrant. Tout ce qu’on jette devient un extrant.

Dans mon jardin, j’ai beaucoup de grands arbres. La première année, j’ai sorti 60 sacs de feuilles et j’ai trouvé cela insensé. Ainsi, graduellement, j’ai développé des manières de garder ces feuilles sur mon terrain. Elles sont devenues le paillis de mes grandes plates-bandes. À l’automne, je pousse simplement les feuilles sous les arbustes. J’en entrepose une partie pour tapisser les allées dans mon potager. Bref, les feuilles ne sortent plus de mon terrain et je n’achète plus de paillis en sac.

Et ici, on ne parle que d’un seul cycle, celui de la vie d’une feuille! Mais on peut aussi étudier le cycle de l’eau, de la mobilité, celui des plantes ou des animaux… Le but est de trouver des moyens de réduire ce qui entre et ce qui sort.

Développer son jardin en zones

Ce qu’on oublie souvent de mentionner de la permaculture c’est que c’est d’abord et avant tout une méthode de planification et d’aménagement. Donc, nécessairement, il faut un plan! Dès le départ, les initiateurs de cette pratique ont proposé une planification divisée en zones, de zéro à cinq. Plus on s’éloigne de la maison, plus le chiffre augmente. La zone zéro (0) est la maison. Et même dans sa maison, on peut challenger nos pratiques et appliquer des notions!

Voici un petit croquis rapide de mon propre jardin, divisé selon les zones de permaculture! J’avoue que c’est un peu tiré par les cheveux, mais quand même l’organisation logique des espaces y est! Photo: Julie Boudreau

La zone un (1) est la zone des fines herbes, des légumes à récolte étalée (courgettes, pois, haricots). Elle est située très proche de la maison et plus spécifiquement de la cuisine. Logique! Quand on cuisine, on doit pouvoir aller récolter quelques feuilles de basilic frais en un rien de temps. Si on installe son jardin de fines herbes au fond de la cour, on sera moins enclin de s’y rendre. Loin des yeux, loin du cœur. Des pots, sur un balcon ou un patio, feront aussi partie de la zone 1. Si on a à installer une serre, elle sera dans la zone un (1), car la production demande un suivi constant.

La zone deux (2) est celle des petits animaux (poules, lapins, etc.) des arbustes fruitiers, du potager extensif. Dans mon cas, cette zone se limite à quelques plants de bleuets, de cassis, de framboises et ma planche d’ail! J’y inclus aussi les vignes à raisins qui entourent mon patio!

La zone trois (3) sera celle des céréales (blé, seigle, avoine, etc.), des pommes de terre, du maïs, des gros animaux (bœuf, porc, mouton, etc.) et de l’étang! On comprendra que la plupart d’entre nous ne disposeront pas d’une zone 3 dans notre jardin!

Un peu plus loin, on aura la zone quatre (4), qui sera celle des pâturages et de la forêt nourricière. Chez moi, la forêt nourricière se limite à un noyer et un pommier sous lesquels pousse un peu de thé des bois!

Puis, si on a cette chance, la zone cinq (5) est la zone sauvage! La « nature naturelle », comme on dit! Prairies, forêts, ruisseaux. Soupir de rêverie.

Comme on le devine, c’est pratiquement impossible dans une petite cour d’avoir des surfaces assez grandes pour chacune des zones, mais il y a une notion de gros bon sens dans cette approche que l’on peut transposer dans un jardin résidentiel. Ce qui demande plus d’attention est cultivé plus près de la maison. Ce qui pousse pas mal tout seul ou les légumes où il n’y a qu’une seule période de récolte sont placés plus loin.

Déjà, avec ces quelques grands principes, il y a de quoi s’amuser amplement. Mon expérience personnelle avec la permaculture en est une de questionnement perpétuel. Bien alimenté par ma fibre écolo, j’analyse chacun de mes achats, je cherche des moyens de réutiliser, de réduire ma consommation, de mieux fertiliser, d’économiser l’eau…

Simplement en rapatriant toutes mes fines herbes à quelque pas de la cuisine, j’ai pris l’habitude de faire sécher celles que je peux conserver pour l’hiver. Je m’autosuffis en thym, en origan, en sauge, en estragon et en sarriette. J’ai mon pesto de basilic pour l’année, bien rangé au congélateur (je suis due pour une seconde production, d’ailleurs). Et tous les deux ans, j’organise mon célèbre « Party Pommes », où j’invite famille, voisins et amis à venir vider mon pommier en cuisinant tartes, compotes, strudels gargantuesques (une petite pensée pour Flore) et que sais-je aux pommes! Un de mes moments préférés où je combine le partage de l’abondance et vie sociale à cultiver de précieux moments avec ceux que j’aime!

Ouais! La vie est bonne quand on aime les plantes… et la Terre!


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Étiquettes + Permaculture


  1. Impossible de me désinscrire de votre newsletter, merci de procéder. Je vous ai déjà demandé plusieurs fois.

    • Sur la page principale en haut à droite vous devriez voir « se désabonner «  Vous n’avez qu’à cliquer
      En tous les cas moi c’est comme ça que ça apparaît,sinon regardez bien vous trouverez sûrement la fonction quelque part sur la page, ou vous pouvez cliquer sur les trois petits points et vous trouverez une fonction qui dit « bloquer le jardinier paresseux « . Si vous utilisez cette dernière vous pouvez annuler n’importe quand si vous décidez de revenir sans être obligé de vous réabonner

  2. Merci Julie pour ce très bel article

  3. Dans notre école d’horticulture aucune chimie étalée sur les sols les feuilles de la ville venaient chez nous sur les tas tout comme les déchets de tontes communales , nous employions les gadoues vertes. Les fruitiers pommiers poiriers étaient ensachés à la formation des fruits ,évitant naturellement les carpocapses Rien n’était acheté à l’extérieur avant l’ère de la consommation ni après au temps du premier responsable horticole

    • Merci Monsieur le Solognot, pour cette évocation d’une école d’horticulture bien gérée et d’une commune ayant du bon sens. J’ai habité 20+ ans un tout petit village de Normandie, la Communauté de communes était loin de mettre en service ses feuilles, ses tontes et ses gadoues vertes! Quel joli terme d’ailleurs “gadoues vertes”
      Tout de même, il y avait de la chimie : rien ne se perd, tout se transforme, disait Monsieur Lavoisier

  4. Wow! Julie, quel bel article qui fait rêver ce matin! En sirotant mon café matinal, j’ai été en mesure de tout voir et ressentir la beauté de la nature, des plantes et de la Terre que tu nous as si bien décrite. Merci pour ta très belle plume et ta belle philosophie de vie!

  5. Très inspirant, j’adore votre manière d’expliquer toute en simplicité et l’amour de la Nature si bien transmis, MERCI !

  6. Merci Julie, j’apprécie grandement ton article sur la Permaculture. Je travaille à mettre en place ces principes depuis plusieurs années et j’en apprends encore.

  7. Chère Julie,
    Votre rubrique est pleine de promesses. Je vais repenser à mes façons de faire… et garder en tête vos sages principes.

  8. La Permaculture est un approche, une vision. Elle dit de suivre les sages dynamiques de la nature .Elle peut être reproduite n’importe dans quelle dimensión de notre vie. Creer de micro-ecosystemes a partir des observations qu’on fait des interactions des elements de la nature dans notre
    propre morceau de jardin. L’OBSERVATION étant la premier stratégie à développer sur ce qui se passe dans son jardin:
    Quelles sont les insectes? d’où vien le vent? le ruissellement de la pluie prend quelle direction?, la lumière du soleil, le type de Sol, les oiseaux, etc.
    Comment faire pour que l’écosystème que je veux reproduire soit VIABLE et soutenue dans le temps avec un MOINDRE D’INTERACTION POSSIBLE. Et aussi, commen peux-je L,’IMPLEMENTER pouque tout les elements que l’integrent soit impulser dans son activite (arbres, sol, mammifères, herbes, fleurs, vegetaux, champignons, grimpants, racines, oiseaux, insectes, poissons, microorganismes) et que l’abondance me revient. La Permaculture peut etre apliquer d asns les relations humaines, systemes monétaires, activités humaines et plus. C’est de savoir que nous sommes un élément de la nature dans cette belle planète et qu’avec notre intelligence, nous pouvons recréer des écosystèmes en observant comme ça marche. Depuis de milliards d’années, les forêts ( boréales, tropicaux, etc, ) fonctionnent merveilleusement incluant tous les êtres, chacun dans sa fonction et ses interactions sans l’intervention de l’être humaine.
    Nous sommes l’espèce la plus évoluée de la planète. Nous pouvons comprendre comment ça fonctionne en OBSERVANT

  9. Pierre Boissonneault

    Dans mon esprit Permaculture est associé à Bio-dynamie qui est de la pseudo-science avec des pratiques ésotériques qui datent des siècles passés.

  10. Merci Julie pour ton article super intéressant. C’est toujours très agréable de te lire.

  11. Mille mercis , ton article encore une fois , m’inspire beaucoup.
    Tu es incrrrrroyable bella. Xxx

  12. Un bijou d’article! Merci ??

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