Où vont les insectes en hiver?
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En été, les insectes sont partout: dans votre jardin, tournant autour de votre tête, écrasés sur le pare-brise de votre voiture, etc. Parfois nous les apprécions – les abeilles qui pollinisent nos fleurs, les beaux papillons qui fréquentent nos parterres, les insectes prédateurs comme les coccinelles et les chrysopes qui dévorent les insectes moins désirables, etc. -, parfois nous les détestons – ceux qui dévorent nos plantes, nous piquent ou qui tentent d’entrer dans nos oreilles et autres. Dans tous les cas, cependant, ils disparaissent soudainement à l’automne, du moins dans les climats tempérés. Où vont-ils pour l’hiver? Et ils «vont» certainement quelque part, car lorsque l’été se pointe, ils sont de retour.
En fait, les insectes et autres arthropodes ont de nombreuses stratégies pour faire face au froid de l’hiver. En voici quelques-unes.
1. Voyager pour trouver la chaleur
Certains insectes quittent nos jardins vers des climats plus doux avant l’arrivée de l’hiver. Le papillon monarque (Danaus plexipplus) en est l’exemple le plus connu, en grande partie parce qu’il migre de manière très visible. Mais des centaines d’autres papillons migrent aussi, notamment la belle-dame (Vanessa cardui), qui voyage jusqu’à trois fois plus loin que le monarque. Certaines sauterelles et pucerons migrent vers le nord et le sud, selon les saisons, de même que de nombreuses libellules.
2. Mourir sans laisser de descendance
Certains insectes migrent en été des climats doux vers les régions aux hivers froids, puis y meurent quand le froid frappe: ils ne migrent pas à la recherche de chaleur ou du moins, pas assez pour se sauver. Le papillon du ver de l’épi de maïs (espèces du genre Helicoverpa), également appelé noctuelle de la tomate et ver de la capsule du cotonnier, car il s’attaque à ces trois cultures très différentes, parcourt parfois des milliers de kilomètres pour se rendre aux champs de culture des climats froids l’été, dévastant nos récoltes, mais il ne retourne pas dans le Sud. Il meurt plutôt sur place lorsque le temps froid arrive; même les œufs qu’il a pondu ne survivent pas. Une nouvelle génération arrivera l’année suivante, venant des climats doux où l’insecte peut hiverner. Certains pucerons ont le même comportement. Comment cette stratégie de survie fonctionne pour ces insectes n’est pas évident, mais c’est bien ce qu’ils font!
3. Chercher la chaleur en profondeur
Certains insectes migrent… mais seulement sur de courtes distances, vers le bas. Ils s’enfoncent plus profondément dans le sol pour se mettre à l’abri du gel. C’est le cas d’insectes bénéfiques, comme les bourdons, et d’insectes nuisibles, comme les scarabées. Beaucoup d’insectes aquatiques passent l’hiver au fond de leur étang, où l’eau ne gèle pas. Souvent, ils ne sont pas en dormance véritable, mais simplement au ralenti, vivant de leurs réserves en attendant patiemment le printemps avant de pouvoir manger à nouveau.
4. Profiter des constructions humaines
Les structures faites par les humains, chauffées de l’intérieur, sont plus chaudes que l’environnement qui les entoure et certains insectes, comme les chrysopes, ont appris à en tirer parti. Ils se déplacent dans des espaces sous des revêtements ou dans des fissures dans le bois et y passent l’hiver dans la chaleur relative qu’ils y trouvent. Souvent, ils marquent l’emplacement aux phéromones pour indiquer aux générations futures où venir se cacher. Les abeilles domestiques aussi profitent bien des ruches qu’on leur fabrique, souvent de préférence aux troncs creux des arbres, leur abri naturel. La coccinelle asiatique (Harmonia axyridis) va plus loin et s’installe à l’intérieur des maisons, formant des agrégations de centaines d’individus et causant des ennuis aux propriétaires de la demeure. Lisez Une invasion de coccinelles pour plus d’informations sur ce phénomène.
5. Pas gênés par le froid
Certains insectes restent actifs en hiver, errant souvent sous la neige ou dans l’herbe dense. Ils ont souvent un type d’antigel dans leur système qui leur permet de tolérer le froid extrême. Certaines espèces de collemboles, appelées puces de neige, prospèrent dans le Grand Nord, souvent sur des glaciers, se nourrissant de grains de pollen, de minuscules algues et d’autres particules. Vérifiez la neige dans votre jardin cet hiver avec vos meilleures lunettes de lecture et vous verrez probablement de minuscules points noirs qui s’y promènent à des températures nettement inférieures à zéro. Ce sont probablement des collemboles.
6. Dormir tout l’hiver
C’est une des stratégies les plus populaires. Les insectes qui la pratiquent pénètrent souvent dans un abri quelconque (communément dans des têtes florales, des tiges creuses, des feuilles mortes, dans le sol, etc.) et entrent dans un état proche de la dormance appelé diapause. Parfois leur sang est riche en cryoprotectants comme le glycérol, une sorte d’antigel naturel, mais dans beaucoup de cas, nous ne savons pas exactement comment ils font. On sait que la chenille laineuse de l’Arctique (Gynaephora groenlandica) est capable de survivre à des températures aussi basses que -70 ° C. Elle devient alors solidement gelée et dure comme la pierre. Ces insectes cryotolérants restent essentiellement gelés tout l’hiver, puis se réveillent au printemps et reprennent leurs activités habituelles comme si de rien n’était. Certains de ces insectes robustes hivernent sous forme d’adultes, d’autres à l’état de larves ou de pupes.
7. Passer la balle à la prochaine génération
D’autres insectes meurent à l’automne, mais avant de le faire, pondent des œufs, parfois à l’air libre, mais le plus souvent dans un abri quelconque (feuilles mortes, tiges creuses, etc.). Ainsi, c’est aux œufs de s’occuper de résister aux grands froids. Et un œuf résiste souvent beaucoup mieux au froid qu’un insecte adulte. (D’ailleurs, ce phénomène dépasse le royaume des insectes. N’est-ce pas que les médecins réussissent à congeler les œufs humains pendant des années, puis à les dégeler et à les implanter, pour donner des bébés en parfaite santé?) Souvent ces œufs hivernants sont riches en glycérol ou autres cryoprotectants. Passer l’hiver sous forme d’œuf est une stratégie très populaire chez les insectes et arthropodes.
Aidons les insectes bénéfiques à passer l’hiver
Les insectes peuvent être utiles pour les humains, notamment comme pollinisateurs et comme prédateurs d’insectes qui mangent nos cultures, ou nuisibles, mangeant ces mêmes cultures… ou nous-mêmes (moustiques, taons, etc.) Pour réduire les populations d’insectes nuisibles, cependant, la stratégie la plus efficace et la plus écologique consiste à maintenir une forte population d’insectes bénéfiques. Et vous pouvez faire beaucoup pour cela en protégeant les cachettes que les insectes utilisent en hiver. Parmi celles-ci, il y a:
• Les feuilles mortes: Laissez les feuilles mortes où elles gisent ou, à tout le moins, gardez-les sur votre propriété. Vous pouvez les ajouter à vos plates-bandes sous forme de paillis, les déposer dans des zones boisées, les mettre dans le compost et autres, mais ne les jetez pas ni les brûlez, sinon vous réduirez sévèrement l’habitat hivernal de nombreux insectes bénéfiques.
• Herbes hautes: Laissez certaines sections de votre pelouse hautes en hiver pour abriter les insectes bénéfiques.
• Tiges et tête florales: De nombreux insectes passent l’hiver dans les têtes florales séchées ou sur ou dans les tiges mortes des annuelles, des légumes et des vivaces. Donnez- leur une chance en ne nettoyant pas vos plates-bandes de fleurs et de légumes à l’automne.
• Tas de compost: Que votre compost soit soigneusement rangé dans un composteur commercial ou qu’il soit simplement un gros tas de déchets, de nombreux insectes et arthropodes bénéfiques (carabes, araignées, centipèdes, etc.) apprécient la chaleur qu’il dégage et la protection qu’il procure.
• Sol: De nombreux insectes, y compris les bourdons, passent l’hiver sous terre. Si possible, ne retournez pas le sol à l’automne, cela pourrait laisser le froid pénétrer à de plus grandes profondeurs et tuer les hivernants.
• Bois mort: souches, troncs tombés, arbres morts, voilà des lieux d’hivernage pour toute une foule d’insectes. De plus, un tiers de tous les oiseaux forestiers nichent dans des trous ou dans les cavités des arbres morts. Donc, s’il n’y a pas de raison sérieuse pour les enlever, laissez-les debout, tout simplement!
• Tas de bois: De nombreux insectes, y compris certains des plus beaux papillons, comme le morio (Nymphalis antiopa), aiment bien y passer l’hiver.
• Hangars, remises et autres structures: Les insectes s’abritent souvent dans les dépendances pour échapper au froid. S’il y a quelques fissures ici et là, si la porte ferme plutôt mal, tant mieux. Cela facilitera leurs entrée et sortie.
Essentiellement, plus vous laisserez votre jardin à lui-même à l’automne, plus la population d’insectes bénéfiques sera en santé l’été suivant! Alors, quand l’automne arrive, détendez-vous et laissez votre jardin se débrouiller tout seul.
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A reblogué ceci sur lebienetreauboutdesdoigtsnaturellement.
Et que font les perce oreilles?
La maman perce-oreille s’enfonce dans le sol et protège ses oeufs pendant l’hiver. Quand ils éclosent au printemps, elle meurt.
Très intéressant!! L’hiver dernier, Janvier 2019, à London en Ontario (où je vis), on a eu une vague de chaleur inhabituelle, et le mercure a monté au dessus de zéro pendant quelques jours. J’ai aperçu une chenille sur les marches de mon entrée – j’étais tellement surprise et je craignais pour sa vie puisque le grand froid est vite revenu au gallop! Serait-il possible que cette chenille serait cryotolérante se serait “dégelée” pour un temps?
C’est possible, mais je soupçonne que ce “réveil prématuré” lui aurait probablement été fatal.
[…] Sauf erreur de ma part, il aura probablement un peu moins de succès l’hiver ? vu que certa… […]