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Des amaryllis morts-vivants

Il ne semble pas avoir de limites aux atrocités qu’on peut faire subir aux plantes pour mieux les vendre. Après avoir offert des cactus décorés de fleurs séchées, des poinsettias pulvérisés de teinture fluorescente et de paillettes, des succulentes peintes de couleurs barbares et des orchidées injectées de teinture bleue, voici qu’on invente un nouvel attrape-nigaud: un bulbe d’amaryllis mourant trempé dans de la cire de couleur. Je m’explique.

Amaryllis trempée dans la cire.

Fleurir à nu

Quand un bulbe d’amaryllis est prêt à fleurir, il fleurira, même si on ne le plante pas. On peut le laisser traîner sur une tablette ou dans une boîte, sans soins aucuns, et la fleur sortira. On dit qu’il «fleurit à nu». Évidemment, cela n’est pas très bon pour la plante. Cette méthode force le bulbe à utiliser toutes ses réserves d’énergie et limite sa survie future. Idéalement, on l’aurait empoté avant la floraison ou sinon tout de suite après, mais reste que la plante fleurit sans avoir été empotée, ce qui est assez surprenant.

Or certains commerçants vont encore plus loin. Ils suppriment le plateau à la base du bulbe, plateau d’où poussent normalement les racines, puis ils trempent le bulbe dans une cire d’une des couleurs des fêtes: rouge, vert, blanc, or, argent, etc. Parfois ils ajoutent de la neige artificielle ou des paillettes. On enfonce alors dans la base du bulbe déraciné un petit support pour qu’il tienne debout, ce qui est, quant à moi, un genre de crucifixion végétale. Le bulbe devient alors un élément de décoration.

Tristement, on vient aussi de condamner le bulbe à mort. Sans racines, avec son plateau supprimé, étouffé par une couche de cire qui l’empêche même de respirer, le bulbe est désormais voué à mourir… mais avant le moment fatidique, il fera un ultime effort pour produire des fleurs. C’est essentiellement un mort-vivant. Un peu comme une poule à qui on a coupé la tête, mais qui bouge encore.

Pas besoin de planter un bulbe d’amaryllis: il est parfaitement capable de fleurir à nu.
Amaryllis cirée, vaporisée de neige artificielle et crucifiée.

«Pas besoin d’eau!»

Évidemment, le marchand affiche fièrement «Pas besoin d’eau!». Bien sûr que non! Depuis quand un mort-vivant a-t-il besoin d’eau? Et même si vous vouliez lui en donner, comment le faire quand le bulbe mourant n’a plus de racines pour en absorber?

Le bulbe produira donc une tige florale dressée, des boutons de fleurs et souvent des fleurs (mais il arrive qu’elles commencent à s’assécher avant de s’épanouir complètement, car les réserves d’énergie du bulbe s’épuisent de jour en jour). Joyeuses Fêtes! Après, vous jetez le bulbe, tout simplement: impossible de le récupérer.

Des morts-vivants pour Noël?

De plus, ils osent vendre ces bulbes morts-vivants pour Noël, une fête qui devrait théoriquement souligner la vie et l’optimisme! Ils devraient plutôt les offrir à l’Halloween, la Fête des morts!

Bulbe trempée dans la cire orange et décoré d’un autocollant halloweenesque.

 

Oups! Je viens de découvrir que «ils» l’ont déjà prévu. Vraiment, quand il s’agit de leurrer le public, il n’y a pas de limites!

 

 

Cet article a été publié pour la première fois sur ce blogue le 20 novembre 2005. Son contenu et sa mise en page ont été révisés.

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