À la suite du lancement du Défi Pissenlits en 2021, plusieurs municipalités ont lancé des campagnes en suggérant de ne pas tondre pendant tout le mois de mai. J’ai déjà écrit à ce sujet l’an dernier, mais je crois qu’il est utile d’en reparler, car ce n’est pas une bonne idée de suspendre la coupe du gazon pendant un mois au printemps. Du moins si on veut conserver un espace gazonné polyvalent capable de résister au piétinement pour toutes sortes d’activités familiales, sportives ou sociales.
Les nuances du Défi Pissenlits
Si on laisse pousser la pelouse trop longtemps, les enfants ne pourront plus jouer au ballon et la tondeuse ne pourra plus passer. Il faudra peut-être louer de l’équipement et ensuite ramasser tout le gazon coupé. Une coupe radicale est nuisible à la pelouse. Il vaut mieux la couper régulièrement pour conserver une surface dense.
De plus, si on arrête de tondre le gazon pendant un mois, cela ne va pas vraiment encourager les pollinisateurs. On va juste obtenir de l’herbe longue qui va priver de lumière les fleurs de pelouse qui aiment le soleil, incluant les pissenlits! Le but du Défi Pissenlits est de retarder la coupe et de les laisser fleurir avant qu’ils ne montent en graines. Le temps de la floraison des pissenlits dure à peine 2 semaines en moyenne. Cette période dépend de la région où vous habitez : en Gaspésie et en Abitibi, ce sera peut-être à la fin de mai et peut-être que dans ces régions, il n’est pas nécessaire de tondre avant. Mais à Montréal et là où le climat est plus clément, on commence généralement à couper le gazon au début mai et encore bien plus tôt en France!
Des plantes fleuries à introduire dans votre pelouse
J’aime les pissenlits et je vous encourage à les laisser fleurir dans votre pelouse, mais les abeilles ont encore besoin de fleurs tout au long de la saison. Le but ultime de cette campagne est de favoriser la biodiversité. Je vous encourage donc à laisser vivre et même à introduire dans votre pelouse toutes sortes de petites plantes fleuries qui offriront du pollen et du nectar tout au long de la saison: thym serpolet, trèfle, houstonie, antennaire du Canada, etc. À l’exception des deux dernières espèces, ce sont des plantes introduites au Québec. Mais les graminées à gazon et les pissenlits ne sont pas indigènes non plus. En fait, la végétation naturelle au sud du Québec: c’était la forêt mixte!
Les pelouses n’ont pas toujours existé, même en Europe. C’était une affaire de riches qui pouvaient se payer de la main-d’œuvre pour couper ces espaces improductifs. La pelouse est devenue plus populaire quand la tondeuse à gazon est arrivée sur le marché au milieu du 19e siècle. Mais c’est avec l’arrivée des engrais chimiques et des pesticides en horticulture, dans les années 1960-1970, qu’on en est arrivé à exiger des pelouses parfaitement uniformes. J’ai connu une époque où il était même interdit de laisser fleurir les pissenlits et plusieurs autres fleurs «sauvages» dans certaines municipalités.
La biodiversité, ça commence dans ma pelouse
Heureusement, on a fait du chemin depuis lors! Grâce aux prises de conscience environnementales dans les années 1980 et à l’arrivée d’une nouvelle génération de jeunes dans toutes les sphères de la société au tournant du siècle, le vent tourne maintenant de plus en plus vers un style de vie et des aménagements beaucoup plus proches de la nature.
Les campagnes Défi Pissenlits et Mai sans tonte témoignent de cette volonté de rompre avec les monocultures et d’opter pour des aménagements paysagers plus naturels. Mais le meilleur slogan serait «La biodiversité: ça commence dans ma pelouse»!