La magie de la bioluminescence: quand la nature fait sa propre lumière
J’ai toujours été fascinée par les phénomènes lumineux dans la nature. Je sais que la bioluminescence existe chez plusieurs organismes, mais dans nos forêts québécoises, ces manifestations restent rares et discrètes. Contrairement aux décors féériques d’Avatar ou aux documentaires sur les océans profonds, notre environnement semble, à première vue, dépourvu de cette magie lumineuse.
L’autre soir, en promenant mes chiens, j’ai pourtant aperçu une lueur bleutée entre les arbres. Mon cœur s’est emballé – était-ce enfin un spécimen de mycène bioluminescent que j’espère depuis des années? Un phénomène biologique rare que je pourrais me vanter d’avoir observé?
En m’approchant, j’ai constaté qu’il s’agissait simplement de la réflexion de la lune sur un morceau de plastique abandonné… Déception scientifique! Mais cette méprise m’a rappelé à quel point nous sommes peu exposés à la bioluminescence dans notre quotidien, surtout au Québec, alors qu’elle constitue un phénomène fascinant et relativement répandu dans certains écosystèmes.

Mais ça m’a donné une idée: et si on parlait des «plantes» qui brillent réellement dans le noir? Je me suis sérieusement penchée sur la question, croyez-moi! La bioluminescence est un phénomène fascinant qu’on retrouve chez plusieurs organismes, des lucioles aux poissons des profondeurs. Mais pourquoi pas chez les végétaux?
La science derrière la lumière
D’abord, il faut comprendre comment la bioluminescence fonctionne. Dans sa forme la plus simple, c’est une réaction chimique qui transforme l’énergie en lumière. Sans entrer dans tous les détails (sinon on serait encore ici demain matin), c’est une molécule appelée luciférine qui, lorsqu’elle est oxydée par une enzyme appelée luciférase, produit de la lumière.
Pour le comprendre simplement, imaginez que la luciférase est comme une batterie qui contient de l’oxygène (du courant) et qui, lorsqu’elle est insérée dans une lampe torche (la luciférine), produit de la lumière jusqu’à ce que l’énergie (l’oxygène) soit toute utilisée. La nature a développé son propre système d’éclairage bien avant que Thomas Edison ne s’y mette!

Et pourquoi certains organismes brillent-ils? C’est une question d’évolution et d’adaptation. Dans bien des cas, c’est pour attirer (comme les lucioles qui cherchent un partenaire) ou pour repousser (comme certains organismes marins qui utilisent la lumière pour surprendre les prédateurs). D’autres fois, c’est pour attirer des proies, comme le célèbre poisson-pêcheur des profondeurs avec sa «canne à pêche» lumineuse qui attire les curieux directement vers sa gueule.
Ne confondez pas la bioluminescence avec la fluorescence, par contre! La fluorescence se produit quand un organisme réfléchit la lumière. Sans source de lumière extérieure, même minime, ce phénomène est impossible. Plusieurs plantes sont fluorescentes, même si cela reste invisible à nos yeux: certains motifs sur les fleurs guident les insectes pollinisateurs!
C’est le même principe que les yeux de chat qui brillent dans la nuit: ils ne génèrent pas leur propre lumière, ils renvoient simplement celle de la lune ou de nos lampes.
Des champignons qui éclairent nos forêts
Parlons d’abord des stars de la bioluminescence végétale: les champignons! Techniquement, ce ne sont pas des plantes (les mycologues me remercieront de cette précision!), mais ils sont souvent les premiers organismes auxquels on pense quand on parle de «végétaux» lumineux.
Il existe environ 80 espèces de champignons bioluminescents, comme le Faux Clytocybe lumineux (ou pleurote de l’olivier), qui serait à l’origine de la légende des feux follets, ou les espèces du genre Panellus. Ces champignons émettent une douce lueur verdâtre qui peut transformer une forêt en décor de conte de fées. On les trouve principalement dans les forêts tropicales et tempérées chaudes, mais certaines espèces poussent aussi dans nos forêts nordiques.

Mais pourquoi brillent-ils? Une théorie est que la lueur attire les insectes qui vont ensuite disperser leurs spores, un peu comme les fleurs utilisent les couleurs et les parfums pour attirer les pollinisateurs. Une autre théorie suggère que cette lumière pourrait repousser certains animaux qui voudraient les manger. Ce qui est fascinant, c’est que ces adaptations ont probablement commencé comme de simples sous-produits métaboliques. Autrement dit: le hasard de l’évolution! S’avérant avantageuse, cette lumière aurait pu être renforcée par la sélection naturelle au fil des millions d’années.
Pour bien briller, ces champignons ont besoin de conditions particulières: obscurité (évidemment!), humidité élevée, et souvent une température douce. C’est pourquoi on les voit briller davantage après une pluie, quand l’humidité est à son maximum.
Les algues qui transforment l’océan en ciel étoilé
Avez-vous déjà vu ces vidéos où des gens marchent sur une plage la nuit et laissent des traces brillantes derrière eux? Ce n’est pas de la magie, ce sont des algues! Plus précisément, ce sont souvent des dinoflagellés, des micro-organismes marins qui émettent une lumière bleue quand ils sont perturbés.
Meh hey!! C’est une algue brune, c’est un protiste, même pas une vraie plante encore!!
Je sais, je sais, c’est encore un «faux végétal» que je vous présente… Désolée!!
Le phénomène, parfois appelé «larmes de mer», est absolument magnifique. Chaque mouvement dans l’eau – qu’il s’agisse des vagues, d’un nageur ou même d’un poisson – déclenche une réaction lumineuse. C’est comme si l’océan lui-même était parsemé d’étoiles.

Bien que magnifique, cette photo est réalisée avec une technique de longue exposition. Ce n’est pas exactement ce qu’on voit quand on est présent.
Cette bioluminescence n’est pas juste pour le spectacle, elle a une fonction bien précise: c’est un mécanisme de défense! Quand un prédateur tente de manger ces minuscules organismes, la lumière émise peut l’effrayer ou, plus astucieusement, attirer les prédateurs DE ce prédateur! Des algues qui crient en signaux lumineux «AU SECOURS, ON ME MANGE!», c’est quand même cool, même si ce ne sont pas de «vrais» végétaux, non?
Les dinoflagellés brillent particulièrement quand ils sont agités, ce qui explique pourquoi on voit ce phénomène lors du déferlement des vagues ou quand on remue l’eau. Ce mécanisme leur permet de réagir spécifiquement aux perturbations qui pourraient indiquer la présence d’un prédateur, économisant ainsi leur énergie en ne produisant de la lumière que lorsque c’est nécessaire.
Ma grande expérience ratée de jardin lumineux
Évidemment, j’ai immédiatement voulu faire briller mon jardin. Parce que qui n’a pas besoin d’un jardin-magique-qui-brille, franchement?
Je me suis bien renseignée sur les plantes, champignons et dinoflagellés lumineux. Je me voyais déjà transformer mon jardin en forêt magique.
Mes conclusions: il n’existe aucune plante qui émet naturellement de la lumière. Les champignons sont très difficiles à cultiver, encore plus à l’extérieur, et je ne vous parle même pas des algues brunes! Même si j’avais contrôlé toutes les conditions, ces organismes sont adaptés à des écosystèmes spécifiques qu’il est difficile de les reproduire artificiellement. Imaginez dans mon potager plus ou moins sauvage!
Bref, cette expérience est morte dans l’œuf, n’a jamais été plus loin que des recherches sur internet, et fut une grande déception…!
Je vous adore Audrey, merci pour vos articles toujours enrichissants et qui font du bien!
Merci!
Super intéressant !
Désolée pour ta découverte
Du plastique! XD
Très instructif !
Les dinoflagellés (appellation que je ne connaissais pas) peuvent être observés régulièrement dans le fleuve, par expérience : en avale et en amont de l’embouchure du Saguenay.
N en n avalez pas trop ……!
C’est ce que j’ai lu en faisant mes recherches, mais j’avoue que je n’en ai jamais vu! Je n’ai passé qu’un été à travailler dans cette magnifique région, et je n’étais près de l’eau que de jour! Ça me fera une bonne excuse pour y retourner!
J’adore vos articles Audrey, merci tellement.Pour cette magie lumineuse je retourne en enfance lorsque je vois les lucioles dans mon jardin.
Merci Audrey pour vos recherches, comme vous un jardin bioluminescent me plairait énormément… dommage, on n’est pas dans un film.
Bonne continuation !
Cool comme reportage, bravo!
Les lucioles, c’est tout ce que nous avons de lumineux, mais tellement magique…en juin, c’est tout un spectacle !
Merci Audrey,
c’es toujours un plaisir de vous lire
Pauvre Audrey. Avatar est quand même un beau film. Et puis, l’important c’est de participer comme on dit aux enfants quand l’expérience n’a pas bien fonctionnée. Peut être que le génie génétique va venir a votre secours dans l’avenir ? Espoir, espoir… Faites un vœux lors d’une nuit scintillante et particulièrement remplie d’étoiles filantes !!!