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L’air le plus pur en ville

Rappelez-vous, il y a plusieurs années, la NASA (celle des astronautes!) a fait une étude sur les possibilités de filtrer les polluants de l’air des demeures. L’étude était assez alarmante au premier abord, car elle indiquait que les maisons étaient fortement polluées. En fait, mieux valait inspirer l’air du centre-ville de Manhattan à l’heure de pointe plutôt que celui d’une maison ou d’un bureau. La raison? Plusieurs produits dont nous ne nous méfions pas dans notre vie quotidienne – tapis, aérosols, peintures, bois pressé, colles, photocopieurs, produits de beauté, cigarettes, etc. – dégagent des gaz très toxiques, tel le formaldéhyde, le benzène, le chloroforme et d’autres bien pires encore.

La solution? Les plantes d’intérieur

Heureusement, la NASA a aussi trouvé une solution à ce problème: cultiver des plantes d’intérieur. Les végétaux, avait-elle découvert, ont la capacité de rendre l’air tellement pur qu’il ne vaut pas la peine de faire une cure dans les Alpes pour nettoyer les poumons. L’air des maisons peut être bien plus propre. Pour faire la preuve de tout cela, la NASA a listé, dans un premier communiqué, les réactions des 15 plantes testées. Fin de l’histoire… ou presque.

La plante-araignée faisait partie de la liste de la NASA. Photo: Saichol Chaleewun

Évidemment, on savait déjà tout cela depuis fort longtemps. Ce n’est pas pour rien que l’on appelle les forêts les poumons de la terre. On sait que les plantes produisent essentiellement tout l’oxygène de la planète: sans elles, on ne pourrait même plus respirer. Tout ce que ce communiqué avait de nouveau, c’était d’être plus spécifique quant aux polluants exacts que les plantes filtraient. Depuis, d’autres études ont démontré que les végétaux nettoient en fait tous les polluants aériens. On aurait pu lister les animaux familiers et même les êtres humains comme dépollueurs: du fait que l’on respire, on filtre aussi l’air. La crasse des cigarettes qui s’accumule dans les poumons des fumeurs et des fumeurs secondaires, c’est un polluant que les poumons ont retiré de l’air contaminé par la fumée!

L’Homo sapiens, grand purificateur de l’air? Pourquoi pas!

Ce qui m’avait fait sourire à l’époque où ce communiqué a commencé à circuler, c’est que tous les médias ont pris ces deux pages comme s’il s’agissait des paroles du Saint-Père lui-même. Depuis, au moins une fois par année, les mêmes médias ressortent le même communiqué fatigué. Pas de mises à jour, juste les mêmes renseignements, ad infinitum. Qui n’a pas lu, vu ou entendu que la plante-araignée (Chlorophytum) nettoie l’air? Pourquoi alors le répéter?

Photo: Elle Hughes

Je dois admettre que, même si je savais déjà tout cela, de même que tous les vrais jardiniers autour de moi (on se rappelle toujours les faits qui nous servent bien, n’est-ce pas?), j’ai moi aussi succombé à la tentation. J’en ai parlé à la radio, j’ai écrit sur le sujet dans une chronique dans Le Soleil… que voulez-vous ? C’était trop facile comme sujet pour ne pas en profiter! En plus, cela me donnait enfin une excuse pour acheter plus de plantes d’intérieur.

Une mise à jour importante

Le problème, dans tout cela, c’est que ces mêmes renseignements circulent depuis tout ce temps… et que, comme c’est souvent le cas dans les médias, ils sont mal expliqués. En fait, il n’y a pas de liste des 15 plantes qui nettoient le mieux l’air. Il y a bel et bien eu la liste des 15 premières plantes, comme la plante-araignée, que la NASA a étudiées, mais elle s’est rendue à 50 plantes avant que l’on conclue finalement que toutes les plantes vivantes nettoyaient l’air.

Votre plante-araignée si chérie n’est donc pas nécessairement meilleure que votre oxalis, qui ne figure sur aucune liste. Et même, plusieurs plantes qui figuraient sur la première liste se sont révélées de piètres filtres d’air, du moins, comparativement à d’autres. La plante-araignée, en fait, ne figure qu’à la trente-huitième place des 50 plantes finalement étudiées (la meilleure? Le palmier d’ArecChrysalidocarpus lutescens!). C’est bien, mais il y a mieux! Pourquoi alors porter l’araignée aux nues?

Photo: dimaberlinphotos

Aussi, est-ce que quelqu’un vous a dit que filtrer l’air pour le purifier coûte cher aux plantes d’intérieur? Plusieurs dommages notés chez les végétaux. Le brunissement de la pointe des feuilles et le vieillissement prématuré des feuilles inférieures sont en bonne partie causés par les polluants qui s’accumulent dans leurs tissus: les poumons des plantes, ce sont les feuilles… et les feuilles souffrent autant de la pollution que les poumons du tabagisme! Tant mieux pour vous, donc, si votre maison est bien remplie de plantes vertes, car mieux vaut que les plantes filtrent la pollution et paient le prix par une vie plus courte que vous et votre famille!

Des plantes qui polluent l’air

Malheureusement aussi, plusieurs plantes, tout en nettoyant l’air d’un côté, le polluent de l’autre. Les conifères, entre autres, dégagent des produits toxiques, heureusement en faibles quantités… mais suffisamment pour se poser des questions sur la qualité de l’air au Québec, et plus particulièrement dans le nord-est de l’Amérique du Nord, qui est essentiellement recouvert de forêts de conifères. Heureusement, un seul conifère est couramment utilisé comme plante d’intérieur, le célèbre sapin de Norfolk (Araucaria heterophylla), et, même là, la NASA nous assure qu’il dépollue plus qu’il n’empeste (30e place sur 50).

Pin de Norfolk

Par contre, je suis quand même convaincu que l’air est très pur chez moi, même si j’ai une demi-douzaine de conifères tropicaux (oui, cela existe, mais il faut savoir où les trouver!), car j’ai quelque 594 autres plantes d’intérieur pour nettoyer l’air. Inutile d’aller à la campagne chercher de l’air pur: l’air le plus pur en ville, il est chez moi!


Larry Hodgson a publié des milliers d’articles et 65 livres au cours de sa carrière, en français et en anglais. Son fils, Mathieu, s’est donné pour mission de rendre les écrits de son père accessibles au public. Ce texte a été publié à l’origine dans Fleurs, plantes et jardins en janvier 2000.


  1. Avec l’aéroport qui s’agrandit près de chez-moi, je vais devoir emplir mon logement de plantes!!

  2. Bonjour Mathieu,
    Quelle ironie en lisant cet article de votre papa avec ces 594 plantes d´intérieurs et l´air le plus pur. Ces plantes ont certainement contribuées à lui offrir une meilleure qualité de vie et une vie plus longue jusqu´à ce que malheureusement, ses poumons le lache….
    Ce qui me fait penser aux vents dominants extérieurs. La côte Pacifique respirant les polluants venant d´Asie, et nous ceux du
    Mid ouest et la zone industrielle.
    Encore merci à votre papa cet érudit vulgarisateur si humain.
    Merci Larry et tout là haut je ne serai surpris qu´il poursuive son travail….

  3. Vos infolettres sont utiles, je m’en fais un fichier Excel personnel sans aucun but commercial, que je consulte lorsque mon temps de jardinnage arrive.

  4. I will consider some of these plants for my home. (Drift Boss)