Le scototropisme, vous connaissez? Eh bien, Google non plus!
Par Julie Boudreau
Il y a quelques mois déjà, je rédigeais un article très détaillé sur les philodendrons et leurs besoins de culture. Et dans une de mes lectures, j’avais relevé le mot «scototropisme». Tiens? Un mot que je ne connais pas! Je l’avais donc noté, me promettant d’éventuellement pousser ma recherche afin de découvrir ce que ça peut bien manger en hiver, un individu scototropiste! Mon intention était double, car en botanique, j’enseigne le phototropisme et le gravitropisme. Je me disais que ce serait intéressant d’ajouter le fameux scototropisme à la liste. Puis, ma seconde intention était de vous faire découvrir à vous, chers lecteurs de ce blogue, un mot tout nouveau!

Me voici donc devant mon moteur de recherche favori qui me propose… cinq résultats. Cinq? De ce nombre, deux articles Reddit dont la valeur encyclopédique peut être remise en question (désolée!), même si je suis «fan» des forums de discussion de Reddit. Puis, il y avait une brève mention du scototropisme dans un document abordant l’architecture hydraulique des plantes (merci monsieur Frank Ewers). Le quatrième site proposait une liste néerlandaise de mots de 13 lettres, probablement mise là pour mystifier ses opposants au jeu de Scrabble. Je commençais à ne plus y croire. Par chance, le tout dernier texte était un article datant de 1968, rédigé par le professeur Husson, de l’Université de Dijon! Merci la France! Tout n’est pas perdu!
Toujours dans le noir
Fière de cette découverte, je plonge dans la fastidieuse lecture, à l’affût de toute information que pourrait me procurer le professeur Husson au sujet du plus en plus mystérieux scototropisme.
Et c’est ainsi que je découvre que le professeur Husson était probablement, lui aussi, amateur de Scrabble. Il est là, LE mot, accompagné d’une vingtaine d’autres mots, tous affublés du suffixe «tropisme». Rien sur sa définition. Même pas une petite phrase de trois mots, comme «Le scototropisme… existe.»
Chercher la réponse dans les moindres replis
Impossible! Il doit y avoir des écrits… quelque part. C’est alors que j’ai scruté les tréfonds de la littérature pour dénicher un texte, ma foi fort passionnant, datant de 1885! C’est ici, dans ce discours présenté à la Classe des sciences de l’Académie royale de Belgique, que j’ai trouvé LA réponse.
«Cette faculté de se diriger en sens inverse de la lumière pour se placer à l’ombre, opposée à l’héliotropisme, pourrait être désignée sous le nom de scototropisme.» – Edouard Morren
Et voilà tout simplement ce qu’est le scototropisme: aimer les petits coins sombres! Dans ce fameux texte, on cite l’exemple de la vanille, dont les racines adventives s’incrustent dans des interstices. Et dans le cas qui m’intéressait originellement, les racines de plusieurs espèces de philodendrons et de monsteras se comportent ainsi. Dès que la racine est suffisamment longue pour avoir une certaine «mobilité», elle s’éloigne de la lumière et recherche une crevasse où s’insérer. Dans mes «incroyablement nombreuses» lectures sur le scototropisme (pantoute), j’ai aussi appris que lorsqu’elles atteignent le sol, ces racines, partant des nœuds le long de la tige, prennent la relève quant à l’absorption de l’eau et des minéraux, rendant les racines premières pratiquement inutiles.

Malgré le peu d’information disponible, l’étude des «tropismes» est quand même intéressante, car elle introduit la notion de mouvement chez les plantes. C’est en partie à cause du phototropisme, qui donne aux feuilles et aux fleurs la capacité de se tourner vers le soleil, que l’on a mieux compris le fonctionnement des hormones dans les plantes. En effet, l’auxine qui influence la croissance cellulaire et fait la feuille ou la fleur se développe plus vite du côté sombre que du soleil. C’est un phénomène bien connu chez les tournesols. Il y a donc, dans les racines adventives de certaines plantes tropicales, des hormones qui encouragent ces racines à chercher les petits coins ombragés. Dans le cas présent, difficile d’expliquer plus en détail quelles mystérieuses hormones sont en jeu pour influencer ce mouvement particulier des racines.
Bref, le mystère continue de planer dans les sombres tréfonds du scototropisme!
Bonjour
On trouve aussi le mot scototropisme dans les annales du musée océanographique de Monaco mais à propos de poissons. C’est en bas de la page 30 du numéro 5 avec la racine du mot. https://www.biodiversitylibrary.org/page/21259171.
Il y a plusieurs sources avec l’orthographe skototropisme.
Cordialement.
B.Lagrelle
C’est vraiment intéressant ou comme dirait Charles Tissère: » Fascinant ».
Merci Julie et merci à B.Lagrelle pour voir le même phénomène chez les poissons.
Vraiment tout est lié!
super intéressant. je connais aussi des gens qui sont scototropes!!
Dans wikipedia en anglais, on a « skototropism, which is defined as the growth towards darkness »
Très intéressant. Quand j’aurai le goût d’être tranquille, je dirai que j’ai une crise de scototropisme! Merci!
Bonjour,
Mon truc pour connaître la définition d’un mot est de questionner sur la racine grecque ou latine. Sur Google à partir de « scoto racine grecque » j’ai obtenu: ténèbres, obscurité, absence de lumière et pour « tropisme »: réaction d’orientation ou locomotion orientée. Ça marche!
Vraiment très intéressant ! Le Jardinier Paresseux nous apprend beaucoup de choses !!! Un grand merci !
J’aime apprendre. Merci Julieé
voici ce que DeepSeek dit:
Le **scototropisme** est causé par une combinaison de facteurs biologiques, environnementaux et évolutifs. Voici les principales causes et explications de ce phénomène :
### 1. **Instinct de survie et protection**
– Les organismes scototropiques sont souvent attirés par l’obscurité pour se protéger des prédateurs. Les zones sombres offrent un camouflage naturel et réduisent les risques d’être repérés.
– Par exemple, de nombreux insectes nocturnes évitent la lumière du jour pour échapper aux oiseaux ou autres prédateurs diurnes.
### 2. **Régulation thermique**
– Les environnements sombres sont souvent plus frais et humides, ce qui peut aider certains organismes à réguler leur température corporelle. Cela est particulièrement important pour les espèces vivant dans des climats chauds ou arides.
### 3. **Comportement alimentaire**
– Certains animaux sont attirés par l’obscurité car leurs proies y sont plus actives. Par exemple, les prédateurs nocturnes peuvent utiliser le scototropisme pour chasser plus efficacement.
### 4. **Adaptation évolutive**
– Le scototropisme peut être le résultat d’une adaptation évolutive. Les espèces qui ont développé une préférence pour l’obscurité ont pu survivre et se reproduire plus efficacement dans des environnements sombres, transmettant ce trait à leurs descendants.
### 5. **Réponses physiologiques**
– Chez certains insectes, le scototropisme est lié à des mécanismes physiologiques. Par exemple, leurs yeux sont souvent plus sensibles à la faible luminosité, ce qui les pousse à éviter la lumière vive qui pourrait les désorienter ou les blesser.
### 6. **Facteurs environnementaux**
– La disponibilité de ressources (comme la nourriture ou les abris) dans les zones sombres peut influencer ce comportement. Par exemple, les champignons ou les matières organiques en décomposition, souvent présents dans des endroits sombres, attirent certains insectes.
### Exemple concret :
Les **blattes (cafards)** sont un exemple classique d’organismes scototropiques. Elles fuient la lumière et se cachent dans des endroits sombres pour éviter les prédateurs et rester dans des environnements humides, favorables à leur survie.
En résumé, le scototropisme est une réponse complexe influencée par des besoins de survie, des adaptations évolutives et des conditions environnementales.
J’adore tous vos articles, beaucoup me sont utiles. J’adore l’humour de Julie Boudreault.