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Légende de Noël: le cactus de Noël

Il commence à faire froid, non? Je viens vous réchauffer avec ma légende du jour, car je vous emmène au Brésil. J’en profite pour rappeler que mes textes sont inspirés de la vraie légende, mais que j’ai mis un peu (parfois beaucoup!) de viande sur ma cuisse de dinde. C’est que ces légendes tiendraient en trois phrases autrement!

Dans notre conte du jour, il n’est pas question de dinde, mais de cactus. Bonne lecture, chers jardiniers…

Le fils du cultivateur de radis

Il détestait les radis.

Vraiment, profondément, et irrémédiablement: Mateus haïssait les radis.

Son père, Luiz, était cultivateur de radis. Et chaque année, il quittait sa maison au Brésil en décembre, pour se rendre au marché de Noël d’Oaxaca, au Mexique, où il vendait ses radis. Pourquoi si loin? Parce que ce marché de Noël achetait absolument TOUS leurs radis.

Photo: Natalia S

Son père lui avait raconté que les gens se réunissaient tous les 23 décembre pour vendre leurs produits au grand marché de Noël d’Oaxaca. Ils utilisaient les radis y pour graver le prix de leurs marchandises. Il faut dire qu’un radis, ça survit bien, même en abîmant sa peau, et que ça attire les regards avec ses jolies teintes rouges ou roses. Bref, non seulement le goût des radis était intolérable pour Mateus, mais en plus, les radis le privaient de son père à Noël!

Seul à Noël…

Luiz partait au début du mois de décembre avec ses radis, et le jeune garçon restait seul à veiller sur la maison jusqu’au retour de son père à la fin janvier. C’est que c’est loin, Oaxaca! Et Mateus en était venu à détester cette période de l’année autant que les radis…

Être seul à Noël, ce n’était pas très amusant, même si c’était pour avoir de l’argent pour manger le reste de l’année. La gentille voisine qui s’occupait de lui durant cette période n’était pas mauvaise, mais ce n’était pas comme passer les fêtes avec son papa.

Cette année-là, Luiz avait hésité à inviter son fils. Était-il assez grand? C’était un long voyage, et peu importe à quel point il aimait son fils, il savait que cette excursion au Mexique n’était pas idéale pour un enfant. Ce pouvait être dangereux et terriblement ennuyeux par moment. Après y avoir longuement réfléchi, il n’invita pas son garçon, se disant que l’année prochaine serait la bonne.

Se préparant à quitter avec ses radis, il s’approcha de Mateus et lui tendit un petit radis.

– Je sais que c’est difficile pour toi, mon garçon, mais j’ai une promesse à te faire. Si tu arrives à apprécier un peu les radis, l’année prochaine, quand tu seras plus grand, je t’amènerai avec moi.

– Mais papa… Je déteste les radis depuis toujours!

– Je sais, mais tu es intelligent et tu trouveras certainement un moyen d’apprécier ce radis, même sans le manger! Sois créatif!

Être créatif? Pour apprendre à aimer les radis? Quelle drôle d’idée! Dubitatif, Mateus prit le radis et le regarda d’un œil soupçonneux avant de le glisser dans sa poche. Son père partit et il se retrouva seul.

Durant ces semaines de solitude, il n’embêtait pas trop la voisine avec sa présence et allait plutôt se promener dans la forêt. La forêt amazonienne était, selon lui, le plus bel endroit du monde. C’était une forêt dense et colorée, pleine d’odeurs et de sons mystérieux. Bien sûr, il y avait des prédateurs aussi, alors il fallait être très prudent!

Parfois, le jeune garçon s’arrêtait au pied d’un arbre gigantesque et sortait le radis de sa poche. Il avait beau se creuser les méninges, impossible de trouver comment faire pour apprendre à aimer les radis, sans en manger. Une fois, il fit une entaille dans la peau rose du légume et préleva un tout petit morceau de la racine, qu’il goûta.

Rien à faire: le radis, ce n’était pas pour lui!

Il regardait son radis à la couleur éclatante, une touche de blanc là où il avait fait l’entaille. La raison qui en faisait un marqueur de prix de choix pour le marché de Noël. Avec ces couleurs, ce pourrait être un joli ornement de Noël, pensa Mateus. Une décoration comme les gens du village en accrochaient aux arbres! Satisfait de sa «découverte», il rentra.

Les jours suivants, il retournait dans la forêt et s’imaginait les arbres pleins de radis. Ce serait original et c’était bien une façon d’apprécier le radis, non? Il se prit à espérer le retour de son père pour lui faire part de son idée. Mais Noël devait d’abord passer… Et le temps était long pour ce garçon solitaire.

– Quand est-ce que Noël arrive? demanda Mateus à voix haute. Je voudrais un signe que c’est Noël!

Pour la voisine, c’était une journée comme une autre, et en fait, il était assez difficile de savoir quel jour précisément était la fête. Mateus ne pouvait qu’attendre… Attendre… Attendre…

Le jour de Noël

Au matin de Noël, il se leva à son habitude sans réaliser quel jour il était et se rendit dans la forêt. À sa grande surprise, il trouva son arbre préféré… différent! Des centaines de fleurs roses étaient accrochées aux branches. Sous l’arbre, les tiges tombantes qui portaient les grosses fleurs colorées donnaient l’impression d’envelopper le garçon de beauté et de douceur.

Photo: edvandroabreuribeiro

C’était son signe! Quelqu’un avait entendu sa prière! Ces magnifiques branches fleuries étaient le signe qu’il s’agissait du jour de Noël! La moitié de son attente était passée!

En regardant de plus près, il vit que ces étranges fleurs poussaient sur des cactus qui, eux-mêmes, poussaient dans les arbres. Il ne les avait jamais remarqués avant, cachés dans le feuillage de la forêt, mais maintenant, il les voyait, ces cactus de Noël.

Plus encore

Un autre constat le frappa: ces fleurs étaient exactement de la même couleur que son radis! Inspiré par tant de beauté, il entreprit de sculpter son radis pour en faire une jolie fleur, comme celles des arbres.

Photo: felipetubaraorj

Quand son père revint en janvier, Mateus était impatient de lui montrer sa petite œuvre d’art. Le regard de Luiz se remplit de fierté en voyant la sculpture et il déclara à son fils qu’il était prêt à l’accompagner l’année suivante.

– La vie, c’est comme une recette, Mateus. Tu as tout à portée de main, mais ce qui fait en sorte que ta recette sera un succès ou un échec, c’est ce que tu décides de faire avec tes ingrédients.

L’année suivante, Luiz emmena avec lui son fils au marché de Noël en lui expliquant l’importance des radis. Oui, les gens sculptaient les prix sur des radis, mais ce n’était pas tout! Comme Mateus, ils avaient compris que l’étincelle de magie et de bonheur qu’on partage à Noël était l’ingrédient le plus important pour la réussite de l’événement.

Un «2 pesos» gravé simplement sur un radis, c’est bien moins joli et attrayant qu’une gravure accompagnée d’un petit dessin de sapin! Et puis pourquoi ne pas utiliser quelques cure-dents pour assembler plusieurs de ces petits légumes? Oh, et soyons fou, faisons carrément un sapin en radis pour attirer l’œil des clients!

Une chose en entraînant une autre, des œuvres d’art faites avec des radis se créèrent et, ce qui n’était au départ qu’un simple moyen d’indiquer le prix des marchandises, devint un grand concours annuel, tous les 23 décembre: la noche de los rábanos. La nuit des radis.

C’était l’occasion de se rassembler, de célébrer et de partager de la joie et du bonheur à partir d’un rien! Quelques radis et beaucoup de patience avaient le pouvoir de créer du bonheur! Et même pas besoin d’en manger! Cette année-là, Mateus compris ce que son papa avait voulu dire: la recette du bonheur est simple, il suffit d’ouvrir les yeux et de se donner la chance de voir toutes les possibilités. La vie est pleine d’ingrédients et, si on ne les aime pas, il suffit de savoir les apprêter autrement.

Conclusion

J’ai plusieurs points à ajouter à cette histoire. D’abord, sachez que je n’ai rien contre les radis! Au contraire, je voulais partager avec vous l’existence de cette fête à Oaxaca, qui existe vraiment depuis 1897, et où des œuvres d’art absolument incroyables sont créées à partir de radis.

Ensuite, la légende du cactus de Noël est sans doute plus vieille que l’existence du marché, je m’excuse auprès des historiens confus et de ceux qui auraient voulu qu’elle soit plus longue!

Finalement, le cactus de Noël fleurit lorsque les jours raccourcissent, mais comme il est originaire du Brésil, soit de l’Amérique du Sud, les jours rallongent en automne… Du coup, le cactus de Noël de la légende est probablement plus le cactus que nous, dans l’hémisphère Nord, connaissons sous le nom de cactus de Pâques, qui fleurit quand les jours sont plus longs…

J’espère que vous avez apprécié ces légendes de Noël et qu’elles nourriront vos discussions lors des fêtes. Vous êtes plusieurs à m’avoir mentionné que vous aviez partagé ces histoires avec vos proches. Ça me touche beaucoup de savoir que je vous ai moi-même touchés. C’est mon ingrédient secret à moi pour agrémenter la vie: partager, faire rire et ressentir des émotions grâce à ma plume… Et, je l’admets, grâce à ma cuisine!

Et vous, quel est l’ingrédient secret de votre bonheur?


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  1. Quelques minutes de rêve !
    Merci.
    Bonne et très heureuse année 2025.

    • Nous sommes plusieurs à l’écrire, pourquoi pas une publication avec toutes vos histoires si enrichissantes et à la fois distrayantes!
      Bonne année 2025!

  2. Wow une belle douceur ce matin merci Audrey

  3. Une de mes passions est de sculpter du bois principalement du tilleul car la densité de ce bois est ni trop dure ni trop molle ce qui facilite sa sculpture. Alors de sculpter des radis est une très belle légende en ce qui me concerne. Joyeuses fêtes et un gros merci pour cette légende.

  4. Magnifique !
    Merci ?

  5. Merci Audrey pour un autre conte merveilleux. Vos textes égaient mes matins et réchauffent le coeur. Merci de mettre de la magie dans nos journées. Je vous souhaite un magnifique Temps des Fêtes.

  6. Yé, c’est jeudi…je me suis levée tôt pour te lire chère Audrey! Une autre jolie histoire que je partagerai avec notre jeune amie française! Ça fait plaisir de me faire raconter des histoires, moi qui en ai lu tellement au cours de mes années aux petits de maternelle autour de moi…et ça continue avec mes petits -fils! Maintenant je vais chercher des cachettes pour qu’ils trouvent les 7 petits Pères Noël,ma tradition du temps des fêtes!
    Merci encore pour cette créativité que tu partages avec nous!
    Joyeuses Fêtes ? et au plaisir de te lire à nouveau l’an prochain!

  7. J’adore ta façon de conter. Je n’aime pas non plus les radis mais ceux-là, ils sont très beaux.

  8. Puis-je me joindre à vous pour raconter une toute petite histoire ? Ma maman était une excellente couturière. Un jour j’avais besoin d’une nouvelle robe pour un anniversaire, mais nous étions pauvres… Ma mère m’a regardée et m’a dit : “tu sais qu’avec du vieux, on peut faire du neuf ” ? Elle prit une vieille robe à elle, tailla dedans une petite robe toute simple qu’elle agrémenta d’une jolie rose en vieille dentelle… Voilà j’étais fière de porter ma jolie robe… toute neuve…

  9. Joie, chaleur, bonheur. Vous avez l’art de commencer ma journée en douceur et avec un grand sourire. Merci Audrey pour votre plume magnifique et magique.

  10. D’après Lary (article consultable sur le site du Jardinier Paresseux), le vrai cactus de Noël (Schlumbergera × buckleyi), a des fleurs mauves, contrairement à celui représenté dans l’article. (Schlumbergera truncata),
    Pardon pour ces détails techniques qui dépoétisent un peu l’ histoire de la Noche de los Rabanos.
    En Saintonge et Angoumois, terre de beaucoup d’ancêtres de Québécois, on appelle Rabaneau la Ravenelle (Raphanus raphanistrum), une brassicacée de la même famille que les radis.
    J.J. amateur de radis et de légendes.

  11. Quel talent de conteuse vous avez, merci, je vous lis fidèlement.

  12. Ah Audrey ! Quel beau texte ! Je dirais que vous avez le talent d’y faire fleurir les émotions ! Merci

  13. Quel talent de conteuse! Merci pour cette belle histoire de Noël. C’est tellement agréable de te lire!

  14. Bravo Audrey pour ce joli conte de Noël!
    Je suis comme le petit garçon de l’histoire: je n’aime pas trop le goût piquant des radis mais dernièrement pour mettre de la couleur dans une salade verte, j’ai acheté des radis rouges de production locale. Je me suis dit qu’en les coupant bien mince, je pourrais atténuer leur goût piquant. Quelle ne fut pas ma surprise en les croquant: : aucun goût piquant, seulement une fraîcheur inégalée! La marque si vous voulez faire un essai c’est : Le Ciel.
    Oui, des radis qui goûtent le ciel, ça existe!!! (je ne travaille pas pour cette entreprise).

  15. Dans mon chez moi, sur la rive-sud de Montréal, j’ai quatre couleurs de cactus de Noël :
    – Un rouge, comme sur la photo, qui fleurit dès la mi-novembre. Ses fleurs sont plus petites et délicates que pour les suivants.
    – Un jaune doré + rose intense que je nomme saumon. Sa floraison, magnifique et généreuse, commence un peu avant la fin novembre.
    – Puis fleurit, à partir du début décembre, le rose et blanc, comme de petits anges en vol…
    – Et maintenant, c’est le flamboyant fushia (rouge-mauve) dont les fleurs sont autant généreuses que le saumon.
    Le jour de Noël, j’aurai encore des fushia, quelques rose et blanc et les dernières saumon. Je n’ai déjà plus de fleurs sur mon petit cactus de Noël rouge.
    Quand on les observe bien, ces cactus de Noël sont nettement différents aussi par leurs feuilles : la grosseur, la longueur, le nombre de pointes et même la couleur !
    Joyeuses fêtes !

  16. Merci Audrey,
    Moi aussi j’ai bien aimé ton texte ce matin et les photos des sculptures fait de radis. magnifique!
    Heureux temps des fêtes !
    Ps: un radis tranché mince dans ma salade c’est devenu un classique.

  17. Bonjour, (toujours de France !)

    Magnifique histoire : je me suis régalée !! (sans jeu de mots :-D)
    Moi aussi, je vais la raconter dans ma famille que nous rejoignons en Lorraine. (Je réside dans le Sud-Ouest…)
    On attend toujours la neige…

    Quelle évasion merveilleuse.
    Ça met le cœur et la tête à la fête, avant l’heure. 🙂
    Mille mercis !!!

  18. Merci Audrey pour tes articles toujours passionnants mais surtout pour ce conte de Noël. Joyeuses fêtes de fin d année.
    (France et plus précisément d Alsace – Grand Est)

  19. Un merveilleux conte encore une fois !! Merci !

  20. C’est magnifique qu’elle belle légende et aussi les autres que j’ai lu merci je les partage avec des amies et famille c’est attendrissant et moi pour vous répondre les gens disent de moi que je suis souriante et généreuse voilà
    Je vous souhaite un beau temps des fêtes et une très bonne année 2025 MERCI ??

  21. Je souris à pleines dents en lisant… étendue sur ma chaise sous le chaud soleil du Mexique avec un cocktail en main (pas aux radis malheureusement) au son des répertoires de musiques mexicaine et de Noël. Je me ferai un devoir de rechercher ces sculptures au buffet du moins. Merci de me faire voyager même si je suis un peu loin de Oaxaca.

  22. Merci pour toutes ses recherches et votre touche personnelle. Mon ingrédient secret de bonheur c’est de vous lire.
    Joyeuses fêtes

  23. En effet, merveilleuse cette nuit des ránanos à Oaxaca! Les gens viennent de partout, de la Sierra del Norte ou del Sur pour exposer leurs merveilles au Zocalo. Il m’est arrivé souvent de profiter de cette fête à Oaxaca…

  24. Merci encore pour ce conte et pour ces somptueuses photos de radis sculptés
    Je coupe moi aussi mes radis en rondelles , je les trouve moins piquants
    En France nous avons les cactus de Noel que l’on fait “durer” et qui deviennent imposants
    Nous trouvons aussi les poinsettias qu’on appelle alors rose de Noel
    Je vous souhaite à tout le jardinier paresseux un beau temps de fête
    Peut être avez vous de la neige?
    pour cela fait longtemps que nous n’avons plus la neige de mon enfance

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