Par Julie Boudreau
30 novembre 2024

La chimie des plantes

Apprivoiser les chiffres sur un emballage de fertilisant, pas facile. Pourtant, il n’y en a que trois. Puis, au bout du compte, tout ce qu’on veut, c’est rendre nos plantes heureuses.

Le trio d’enfer: N-P-K

Sur la majorité des emballages d’engrais, on trouve trois nombres, séparés par un tiret. Toujours dans le même ordre, N-P-K, ils désignent trois éléments chimiques. Le N pour azote, le P pour phosphore et le K pour potassium. Chaque nombre désigne le pourcentage de cet élément contenu dans l’emballage. Par exemple, un engrais de formulation 10-5-6 indique qu’il y a 10 % d’azote, 5 % de phosphore et 6 % de potassium, donc en tout 21 % d’unités fertilisantes.

Riche de cette information, on serait porté à croire qu’en choisissant un engrais avec des nombres élevés, on obtient un engrais plus efficace. Eh bien, non. D’abord, parce que les plantes ont une certaine limite à leur capacité d’absorption. Il est inutile de donner trois tasses d’azote à une plante qui n’a besoin que d’une cuillère à soupe. Tout le reste est lessivé, c’est-à-dire gaspillé. Ensuite, même si l’azote, le phosphore et le potassium jouent des rôles importants dans la croissance et le développement des plantes, il existe une foule d’autres éléments chimiques qui sont tout aussi importants. Ces autres éléments chimiques sont naturellement plus présents dans les engrais organiques (comme les algues marines, l’hydrolysat de poisson ou le frass) que dans les engrais de synthèse (comme le 20-20-20 ou le 10-52-10).

De quoi sont faites les plantes?

D’abord et avant tout, une plante, c’est «CHO». Environ 80 % d’une plante est composée d’eau (H₂O). C’est donc l’oxygène (O) et l’hydrogène (H) qui dominent, mais aussi, le carbone (C) qui est la matière essentielle à l’ensemble des éléments qui composent les tissus végétaux. Ces trois éléments, les plantes les obtiennent dans l’air (CO₂ et O₂) et bien sûr, dans l’eau.

Arrive ensuite le fameux trio, N-P-K, présent en grande quantité dans toutes les parties végétales. L’azote, par exemple, est une composante essentielle de la molécule de chlorophylle. Les membranes cellulaires sont faites de phosphore et le potassium est utile pour assurer la libre circulation de l’eau et des éléments nutritifs. De façon réductrice, on dit souvent que l’azote est pour les feuilles, le phosphore pour les fleurs et les fruits et le potassium pour la résistance au froid et aux maladies. Disons que les rôles joués par chaque élément sont beaucoup plus diversifiés et complexes. Mais nous garderons cela pour la biochimie avancée!

La majorité des végétaux comblent tous leurs besoins avec une cinquantaine d’éléments chimiques différents. Les plus importants sont les éléments majeurs et ceux d’ordre secondaire sont appelés les éléments mineurs.

Les ligues majeures

En plus des 6 éléments mentionnés ci-haut, il est en trois autres qui sont bien importants, le soufre (S), le calcium (Ca) et le magnésium (Mg). Ce sont les incontournables, présents en plus grande quantité dans les plantes.

Les ligues mineures

Les microéléments, ou oligoéléments sont présents en plus petite quantité, parfois même en quantité infinitésimale, mais ils sont tout de même bien importants. Il y a notamment le fer (Fe), le manganèse (Mn), le cuivre (Cu), le zinc (Zn), le molybdène (Mo), le bore (B) et le chlore (Cl). Même si leur présence n’est pas toujours indiquée sur l’emballage, ils sont bel et bien présents dans les engrais naturels. En fait, c’est ce qui distingue souvent un engrais de synthèse d’un engrais naturel: ces petits extra.

Aussi, de nombreux scientifiques s’entendent pour reconnaître l’efficacité supérieure des fertilisants organiques (ou naturels), même si les nombres du ratio N-P-K sont inférieurs à ceux des engrais de synthèse. Les éléments fertilisants naturels sont mieux protégés du lessivage, ils vivent une meilleure synergie avec les autres microéléments du sol et surtout, ils stimulent l’activité biologique du sol. Il faut donc souligner que la nutrition des plantes ne dépend pas seulement des engrais. Elle est aussi influencée par la richesse, la texture et la structure du sol, sa vie microbienne et son taux d’humidité.

La morale de cette histoire, c’est qu’il faut procurer aux plantes la gamme la plus complète possible d’éléments chimiques, afin de s’assurer qu’elles comblent tous leurs besoins. La plante, par ses racines et un peu par ses feuilles, absorbe les éléments dont elle a besoin. Oui, elle choisit. Et chaque plante a ses préférences. Le maïs, comme plusieurs graminées, raffole de l’azote, les tomates aiment bien le calcium et le magnésium, et ainsi de suite. Pour éviter le gaspillage et la fertilisation inutile, le secret est de respecter les recommandations du fabricant. Ne jamais doubler les doses et respecter les fréquences d’application. Ainsi, on est assuré d’utiliser les fertilisants de manière optimale et de rendre les plantes heureuses!

Julie Boudreau

Julie Boudreau est horticultrice, diplômée de l’ITA de Saint-Hyacinthe. Elle œuvre dans le domaine l’horticulture depuis plus de 25 ans. Elle a publié une dizaine de livres et participé à de nombreuses émissions de télévision et de radio. Elle est enseignante au Centre de formation horticole de Laval. Passionnée de son métier, Julie Boudreau se consacre à promouvoir le jardinage, le design de jardin, la botanique et l'écologie, sous toutes ses formes. Un peu grano, écolo depuis toujours, gourmande et essayeuse, Julie est une épicurieuse avec un fort penchant pour tout ce qui se prononce en latin.

---

Nos partenaires locaux