Par Julie Boudreau
16 novembre 2024

Les tillandsias

Après le «Air Guitar», voici les «Air Plants», des plantes aériennes qui n’ont pas besoin d’être mises en terre pour pousser comme des championnes. Grandes vedettes des arrangements tendance, on les dit invincibles. Ce n’est pas bien loin de la vérité… quand on sait comment s’y prendre!

Oui, elles ont du style. Suspendues à un fil, fixées à un bout d’écorce, plantées dans des coquillages et de mignons contenants de toutes formes: dans une déco intérieure, elles font fureur. Cependant, bien des adorateurs des «filles de l’air», comme on les appelle, oublient que ce sont des plantes… vivantes.

On serait porté à croire le contraire, vu la texture rigide de certaines et surtout, l’absence de racines des autres. Et pourtant, leur survie dépend de nos bons soins.

Comment vivre sans racines?

Si certains tillandsias sont dépourvus, ou presque, de racines, c’est parce que ce sont des plantes épiphytes. Les plantes épiphytes sont capables de se développer, simplement déposées sur une autre plante. Pour ces espèces tropicales, il est courant de vivre accrochée à l’écorce d’un arbre. Certaines ne vivent qu’en altitude, dans la cime des arbres. D’autres, qui affectionnent un climat plus aride, poussent directement sur des cactus. Dans un cas comme dans l’autre, les racines servent plutôt de crampons pour fixer les plantes sur leur support de culture.

Toutes originaires d’Amérique du Sud et d’Amérique centrale, les tillandsias forment un groupe très diversifié. Il y a pratiquement autant de conseils pour prendre soin des tillandsias que de tillandsias. Et des tillandsias, il y en a plus de 550 espèces différentes!

Les conditions gagnantes pour cultiver les tillandsias

Commençons donc par quelques conseils généraux qui fonctionnent assez bien avec la majorité des espèces. D’abord, la plupart des tillandsias aiment les températures chaudes, entre 10 °C et 30 °C, et les atmosphères humides. Cultiver les tillandsias, cela veut nécessairement dire qu’il faut être propriétaire d’un vaporisateur. Ils aiment aussi les endroits très lumineux, et sous notre latitude, avec un peu de soleil direct. Puis, la plupart des tillandsias aiment qu’on leur donne un bain, environ deux fois par mois, en les laissant tremper une heure ou deux dans une eau claire. Enfin, une bonne circulation de l’air leur est aussi favorable. Quant à la fertilisation, elle n’est vraiment pas nécessaire, mais une très faible dose d’engrais pour orchidées peut être ajoutée à l’eau d’arrosage, seulement lorsque les plantes filent le parfait bonheur. Penser réanimer une fille de l’air au bord du gouffre avec de l’engrais serait une erreur.

Le vaste univers des exceptions

Et maintenant, faisons une petite incursion dans les exceptions. Le meilleur conseil que l’on peut donner est de se procurer des tillandsias bien identifiés, avec leur nom latin. Ainsi, il est facile de saisir le nom sur le Web pour connaître en détail les besoins spécifiques de l’élue.

À défaut d’un nom, on peut diviser les tillandsias en deux grands groupes: les feuillages vert foncé et les feuillages gris. En général, les plantes à feuillage vert (comme le tillandsia raquette (Tillandsia cyanea)) portent des feuilles lustrées et souples et développent des racines, ce qui indique qu’il est possible de les planter en contenant, dans un terreau pour cactus. Celles qui développent des rosettes de feuillage aiment qu’on remplisse le cœur de la plante d’eau, une à deux fois par semaine. Ce sont aussi des espèces qui aiment les atmosphères humides.

Le second groupe rassemble les espèces à feuillages gris (T. juncea, T. caput-medusae, T. ionantha) souvent couverts d’écailles avec peu ou pas de racines. Celles-ci poussent naturellement dans des milieux un peu plus arides. Ce sont elles, en général, qui sont commercialisées sous l’appellation de filles de l’air ou de plantes aériennes. Ici, nous sommes devant un groupe de plantes capable d’absorber l’eau par le feuillage. Un heureux mélange de vaporisation régulière et de trempage est tout ce qui est requis. Pour éviter la pourriture, une des causes de mortalité commune, il est bien important de laisser sécher les plants avant de les réhydrater.

À l’opposé, l’autre moyen de perdre les tillandsias est de les priver d’eau à l’extrême. Ils se mettent alors à ratatiner. L’assèchement de l’extrémité des feuilles est signe que la plante a besoin d’un bon trempage, qui peut durer jusqu’à 24 heures, dans le cas d’une réanimation extrême. Pour ceux qui ont envie d’exceller dans la culture des tillandsias, mentionnons que l’eau du robinet est parfois trop lourde et minéralisée. C’est pourquoi les mordus d’épiphytes chouchoutent leurs plantes avec de l’eau de source ou de l’eau de pluie.

Une plante parfois bien mal traitée

Populaires, les tillandsias sont aussi victimes de leur propre succès. Plusieurs commerçants les proposent au même titre que des bibelots décoratifs. C’est 100 % mignon de fixer des contenants aimantés sur le frigo, mais combien de frigos se trouvent près d’une fenêtre ensoleillée? Si la circulation d’air est un des éléments essentiels à la santé des tillandsias, pourquoi les vendre dans des terrariums fermés? Joli? Oui. Réaliste? Peut-être pas.

Pour en connaître davantage sur les filles de l’air, je vous recommande chaudement cet article de Larry qui aborde tous les aspects de la culture de ces plantes fascinantes dans les moindres détails.

Julie Boudreau

Julie Boudreau est horticultrice, diplômée de l’ITA de Saint-Hyacinthe. Elle œuvre dans le domaine l’horticulture depuis plus de 25 ans. Elle a publié une dizaine de livres et participé à de nombreuses émissions de télévision et de radio. Elle est enseignante au Centre de formation horticole de Laval. Passionnée de son métier, Julie Boudreau se consacre à promouvoir le jardinage, le design de jardin, la botanique et l'écologie, sous toutes ses formes. Un peu grano, écolo depuis toujours, gourmande et essayeuse, Julie est une épicurieuse avec un fort penchant pour tout ce qui se prononce en latin.

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