Les pelouses, la photosynthèse et l’eau
Cette année encore, la pluie a été généreuse (parfois trop!) et la plupart de nos pelouses sont belles. Mais nous avons aussi eu quelques canicules très pénibles et le gazon souffre beaucoup de ces périodes-là. Or, il y a une chose qui est essentielle pour avoir une belle pelouse: une coupe élevée.
On ne le répétera jamais assez: plus le gazon est long, plus il sera vigoureux pour produire de longues racines et survivre ainsi aux périodes de sécheresse. C’est simple, les plantes poussent grâce à la photosynthèse: un phénomène qui fonctionne grâce à l’énergie lumineuse et à la chlorophylle. Donc plus la surface des feuilles vertes est importante, plus les plantes pourront produire de la matière organique, d’autres feuilles et des racines profondes. Les surfaces gazonnées ne devraient jamais être tondues plus bas que 8 cm (environ 3 pouces) en climat continental. L’autre facteur très important, c’est l’eau, et c’est la raison pour laquelle les pelouses peuvent être coupées plus court en climat maritime pluvieux.
Pas de tonte en période de canicule!
Beaucoup de propriétaires et la majorité des compagnies qui entretiennent les pelouses s’obstinent à tondre à 5 cm (2 pouces) et à le faire chaque semaine, même en période de canicule. Or, quand la température monte au-dessus de 30 °C, la plupart des graminées à gazon ralentissent leur croissance. Si la chaleur se prolonge, le gazon ne pousse plus du tout et jaunit. La pelouse tombe en dormance. Une coupe pendant une telle période de stress peut être fatale. Par contre, une pelouse laissée longue, même jusqu’à 10 cm (4 pouces) en période de canicule, va traverser cette étape sans problème.
Pourquoi une telle obsession à tondre coûte que coûte chaque semaine? Le désir de contrôler la nature? On m’a déjà dit que ça fait plus propre. Ah bon? Mais la pelouse ce n’est pas un tapis synthétique!
Pelouses aux soins intensifs
Bien sûr, il est plus difficile de jouer au ballon lorsque le gazon est long. Les terrains de soccer sont d’ailleurs toujours coupés très court. Mais ça, c’est un usage intensif et cela demande donc aussi des soins intensifs: arrosage, aération et autre dorlotage de pelouse. D’ailleurs pour qu’un terrain de soccer reste beau, il ne devrait pas être utilisé plus de 25h/semaine et c’est ce qu’on fait avec les terrains de compétition qui sont souvent clôturés et arrosés intensément.
L’aération et le terreautage sont bien sûr d’autres façons d’aider notre pelouse, mais c’est plus laborieux. J’ai découvert dernièrement une compagnie qui propose l’aération hydrique, plutôt que le carottage, afin de ne pas nuire aux systèmes d’irrigation souterrains. J’ai voulu savoir quel était ce produit miracle qui permettait d’aérer la pelouse et on m’a répondu que c’était de l’eau additionnée d’enzymes pour décomposer le feutre. Donc ce n’est pas vraiment un moyen de décompacter un sol qui aurait subi un trafic intense.
Les terrains de golf
Je saisis l’occasion pour parler un peu des terrains de golf qui exigent encore plus de soins et d’eau, surtout pour les «verts» qui sont tondus au ras du sol! Mais pourquoi s’obstine-t-on à jouer au golf dans des régions comme l’Arizona et même l’Arabie où il ne pleut presque jamais? Est-ce raisonnable de puiser dans cette ressource qui devient de plus en plus problématique dans certaines parties du monde? La technologie peut tout résoudre bien sûr, mais à quel coût pour l’environnement? Pourquoi ne pas adapter son rythme de vie et ses activités à un climat aride? Traditionnellement dans les pays chauds: on fait la sieste lorsque le soleil est au zénith et on s’active le matin et le soir. Et bien sûr on n’a jamais joué au golf dans un désert avant l’avènement du tourisme de luxe.
Quelques statistiques
Au Québec, l’approvisionnement en eau n’est pas un problème en général, mais nous utilisons de l’eau potable pour arroser nos pelouses! Or il y a des coûts associés au traitement et à la distribution de toute cette eau. Savez-vous que nous sommes les plus grands consommateurs d’eau au monde avec 260 litres/personne/jour? (source: gouvernement du Québec)
À titre comparatif, voici quelques chiffres éloquents sur la consommation d’eau dans différents pays:
- Canada, États-Unis, Japon, Australie, Suisse: supérieur à 250 litres/personne/jour;
- Finlande, Italie, Espagne, Portugal, Corée du Sud, Grèce, Suède: de 160 à 250 litres/personne/jour;
- Danemark, Royaume-Uni, Autriche, France, Luxembourg, Irlande: de 130 à 160 litres/personne/jour;
- Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Hongrie, Bulgarie, Pologne, République tchèque: inférieur à 130 litres/personne/jour;
- Asie et Amérique latine: de 50 à 100 litres/personne/jour;
- Afrique subsaharienne: de 10 à 20 litres/personne/jour
(Sources Eurostat + Ifen + Conseil mondial de l’eau).
Vive la biodiversité!
Évidemment, une autre façon de rendre notre pelouse mieux adaptée à notre chaleur estivale, c’est d’y semer des plantes mieux adaptées à la sécheresse et qui résistent à une coupe régulière comme le thym rampant, le trèfle, le lotier, et différentes fétuques que l’on trouve dans des mélanges à entretien minimum dans les jardineries. J’ai déjà parlé de cela dans un autre article. Rappelons que la fin de l’été est un excellent moment pour faire un sursemis.
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Merci. Toujours intéressant. Qu est ce que un sursemis et comment procéder. Merci
Un sursemis est un semis sur une surface déjà végétalisée, donc éparpiller des semences de votre choix parmi la pelouse déjà en place. Au besoin, la nature les fera germer et graduellement votre pelouse se colonisera de végétaux choisis pour mieux résister aux conditions difficiles expliquées par Mme Smeesters.
Pendant des années j’ai voulu me payer la traite avec une belle pelouse verte comme celle des terrains de golf. J’ai donc engagé une entreprise qui offrait tout le kit : tonte, fertilisation, herbicide. Fertilisation et herbicide furent appliqués indépendamment de la température. Résultat : brûlure de la pelouse après les applications. Cerise sur le Sunday : une tonte de pelouse au raz du sol. Résultat : encore brûlure de la pelouse. Au bout de quelques années, je n’avais pratiquement plus qu’une pelouse jaunie tout l’été ou carrément plus du tout … malgré tous les arrosages autorisés par la municipalité. Beaucoup d’argent volatilisé, beaucoup d’eau gaspillé pour une pelouse dégarnie et lorsque garnie : jaune et rasée au sol. Je me suis tannée. Fini la fertilisation. Fini l’herbicide. J’avais entendu dire que le trèfle avait la capacité d’engraisser le sol et de supporter la sécheresse. Parfait ! Une mince couche de terre à pelouse, semence à gazon pour ombre aux endroits ombragés, semence à gazon pour soleil aux endroits ensoleillés, micro trèfles le long des allées, trèfle blanc à la grandeur de la pelouse. Touche finale : arrosage dosé pour que ça lève. Et bien mes graines n’ont pas pris de temps à lever. J’ai maintenant un tapis de trèfles toujours vert à la grandeur. Plus besoin d’arrosage, plus besoin d’engrais et … même plus besoin d’herbicide car le trèfle, qui est maintenant dense, les étouffe littéralement. Seul mon entrepreneur n’est pas content : ma pelouse est tellement fournie que le sac à rognure de sa tondeuse ne fournit plus. Mon bac brun en est plein ! Petit nuage à l’horizon : une pelouse écolo ne rime pas avec une pelouse de golf. Elle risque de faire mal aux compagnies qui s’en enrichissent.
Autre solution pour vous, que votre entrepreneur qui coupe votre gazon y laisse les rognures, ça fertilisera votre pelouse en même temps. C’est ce qu’on appelle de l’herbirecyclage.
Mais pourquoi tondre le trèfle ??
Excellente idée, géniale même. Merci ?
Très intéressant cet article et le sursemis. Merci beaucoup à vous.