Où sont les limites du jardinage?
Question philosophique: qu’est-ce que le jardinage inclut?
J’adore écrire des articles surprenants sur différents aspects de l’écologie. Parfois, je déborde même un peu du sujet du jardinage en vous parlant d’apiculture, d’acériculture, de castor, de plantes étranges et lointaines…
En fait, en ce qui me concerne, le jardinage, c’est vraiment très, très vaste, et tout ça a un lien d’une façon ou d’une autre!
Pour moi, le jardinage c’est…
Bien sûr, quand on pense jardinage, il y a les plantes d’ornement. On peut penser à nos plantes d’intérieur, à nos plates-bandes ou encore à nos jardinières sur le balcon.
Ensuite, il y a le jardinage de plantes comestibles: des fines herbes pour la cuisine, un plant de tomate en pot, ou encore un énorme potager.
Ce sont les aspects qu’on pourrait appeler «de base» du jardinage. Je pense que jusqu’ici, vous serez d’accord avec moi. Alors qu’est-ce que je considère comme étant du jardinage qui pourrait ne pas en être pour vous?
Tout ce qui permet de profiter de l’extérieur, d’aménager son espace, de l’exploiter fait partie de ma description du jardinage. On pourrait aussi appeler ça de l’entretien général, mais c’est beaucoup moins drôle!

Ainsi, l’entretien de la pelouse, les cabanes à oiseaux, la production de miel et même l’installation d’une nouvelle pergola peuvent entrer dans le terme assez large de «jardinage». L’observation des insectes, la cueillette de plantes sauvages, l’écoute des chants d’oiseaux, ne font-ils pas partie du résultat de vos efforts? Après tout, quel serait l’intérêt de planter de jolies fleurs si on n’en hume point les parfums de temps en temps?
J’inclus aussi dans l’activité de jardinage tout l’aspect recherche d’informations, magasinage et produits dérivés, ni plus ni moins! Vous allez à la jardinerie, choisissez de jolies plantes, vous vous renseignez sur quelles semences acheter, vous achetez un livre du Jardinier paresseux, un joli cache-pot… Tout ça, ça rentre dans ma vision du jardinage!

Pourquoi cette question?
Faire la cuisine, est-ce que ça commence avec la recherche d’une recette? Avec l’achat de vos ingrédients? Ça se termine par la vaisselle ou la consommation de votre repas? C’est pareil avec le jardinage! Si le boulanger est une sorte de cuisinier, en quoi l’acériculteur ne serait pas un jardinier? Après tout, récolter de l’eau d’érable, ce n’est pas si différent de récolter un concombre! Et quand il cherche des informations, est-ce du jardinage aussi, du coup ? Difficile de mettre une ligne de début et de fin, non?
L’humain a cette drôle de manie de vouloir nommer absolument tout ce qu’il voit ou ce qu’il fait. On nomme les espèces, on cherche les ressemblances et on les classe dans de grands groupes avec des noms compliqués. Mais une fleur ne pourrait-elle pas tout simplement être une fleur?
J’ai souvent cette discussion avec mon conjoint sur le besoin que nous avons de tout nommer et j’en suis venu à me demander ce qu’était le jardinage? Où est-ce que ça commence et où est-ce que ça se termine? Quand on se dit jardinier, est-ce que ça implique qu’on ait de la terre dans la figure 24h par jour? Ou bien qu’on ait une grande collection de cache-pots et de semences quelque part dans un placard?
Pour Le Larousse en ligne, la définition du jardinage est la suivante: «Culture des jardins.»
J’ai ri! C’est un peu réducteur, non? En tout cas, je ne trouve pas cela très aidant!
Avec Le Robert, on a ceci: «Culture des jardins, notamment des plantes décoratives et alimentaires.»
Ce n’est pas encore ça… Le Wiktionnaire dit ceci: «Art de cultiver les jardins, ou travail que l’on fait aux jardins.»
Je pense que c’est la définition la plus large (même si c’est chiche!). On parle ici de l’«art» de cultiver, ce qui peut vouloir dire plus que juste «l’action de cultiver»… Mais bon, ça reste pauvre. À les croire, s’occuper de plantes d’intérieur, ce n’est pas du jardinage…!
Essayons donc de faire notre propre définition…
Pourquoi le jardinage?
Tout d’abord, il faut déterminer à quoi sert le jardinage. C’est un moyen de production. Des fruits et des légumes frais, des produits médicinaux, de belles fleurs et pourquoi pas des matériaux, du sirop d’érable, du miel et j’en passe!
Si le jardinage est si important, c’est qu’il est à la base de notre évolution en tant qu’humain sédentaire. Si nous n’avions jamais appris comment jardiner, nous n’aurions pas pu créer une aussi grande civilisation. La nutrition, l’art, la médecine: tant de choses ont été créées des suites de la domestication des plantes!

Outre l’usage pratique, il ne faut pas oublier le jardinage d’ornement. Offrir un bouquet de fleurs ou agrémenter notre devanture de quelques plants ornementaux fait partie de notre culture. Même si on ne vit pas tous en forêt, la nature peut être appréciée de plusieurs façons grâce à vos pouces verts.
Si on jardine, c’est pour en tirer des bénéfices. La satisfaction de cueillir un beau concombre, d’observer les bourdons butiner ou de boire une bonne tisane de plantes médicinales dans sa tasse préférée (pleine de plantes, hein!) est sans égal pour le jardinier qui y a mis tout son cœur.
Une activité physique… et mentale!
Jardiner, c’est bon pour le cœur! Passer la tondeuse, désherber, charrier de la terre. Le côté actif du jardinage est sans aucun doute très physique. Faites-vous du sport en hiver? Non? Eh bien, c’est une chance pour votre corps que vous jardiniez en été! Encore faut-il bien le faire hein! Je vous mets un petit rappel de coach Audrey…
Votre corps travaille, mais votre cerveau aussi! Les besoins de chaque plante, l’emplacement de vos différentes variétés au jardin, toutes les connaissances que vous développez avec la pratique du jardinage: c’est énorme! Quoi regarder, quand s’inquiéter, comment différencier vos plantules des herbes sauvages à retirer, reconnaître les indésirables, savoir où aller chercher les informations…
Juste le nom des plantes, c’est tout un exercice! Avant de vous intéresser au jardinage, les mots ZZ, dracaena et Fabacée, c’était du chinois! Mais après quelques années, le jargon: rhizomes, cotylédons, chrysomèles, mycorhize, etc., est bien intégré à votre vocabulaire. Vous avez développé tout un lexique en vous mettant au jardinage!
Communion avec la nature
Il a été prouvé que la nature au sens large a un effet positif sur la santé mentale. Il n’est pas possible d’aller se promener en forêt quotidiennement pour tout le monde, mais prendre soin de ses fines herbes, de son hibiscus, de ses hostas, ça compte comme de la nature.
Le lys de paix provenant des funérailles de votre grand-père, l’orchidée offerte par votre fille, la langue de belle-mère achetée en emménageant dans votre première maison: ces plantes vous font certainement du bien.
Même si je suis sceptique sur beaucoup de croyances populaires, si ça vous fait plaisir de penser que votre air d’appartement est plus pur grâce à votre schefflera, ou que vos chakras sont bien alignés à cause de la position sud-ouest de votre lucky bamboo, l’important, c’est que ces plantes vous aident au quotidien.
Bref, le jardinage, c’est bon pour la santé mentale.
On peut aussi ajouter que les îlots de nature que vous créez chez vous sont généralement des havres pour les animaux. Le sol sera en santé, les insectes vivront leur vie, les oiseaux se régaleront des graines et des insectes. Bref, peu importe où vous êtes, en ville ou en campagne, ce que vous plantez a généralement un impact positif sur l’environnement. J’insiste: généralement. Que je n’en vois pas un planter des phragmites ou de la renouée du Japon volontairement!
Conclusion: je n’ai pas de réponse simple!
À la lumière de tout ceci, il me semble encore plus difficile de répondre à la question «qu’est-ce que c’est que le jardinage?» Notre belle communauté de jardiniers paresseux sera certainement d’accord avec moi: il existe probablement autant de visions et de définition du jardinage que de jardinier.
Pour moi, le jardinage est un moyen de se rapprocher de la nature, tout en prenant soin de nous-mêmes. C’est un loisir, un retour aux sources, un moyen de personnaliser son espace et de s’approvisionner. C’est une célébration de la vie à tous les niveaux.
Et pour vous, c’est quoi le jardinage?
Le jardinage est la plus belle façon d’occuper mes journées, à l’extérieur dès que c’est possible, à l’intérieur le reste de l’année. Prendre soin des arbres, arbustes, plantes vivaces ou annuelles, exotiques ou indigènes, herbes et légumes assure plaisir et santé mentale. En plus de créer de la beauté pour les yeux, des flagrances pour le nez et du bonheur pour le coeur! Tant pis pour les ongles cassés et remplis de terre!
Bonjour,
J’aime bien votre humour Audrey, merci.
Jardiner pour moi est un moyen pour arrêter mon mental……je jardine depuis la mi-vingtaine et ait acquis beaucoup d’informations tout au long des années. Maintenant à la retraite j’ai le temps d’aider mes enfants à réaliser leurs jardins. Je me promène avec les petits-enfants dans les jardins et leur fait voir, sentir et toucher les fleurs arbres etc…pour ne pas parler des bibittes que mon petit-garcon de 7 ans adore découvrir.
Je viens de déménager plus près des enfants et je recommence à zéro dans mes jardins., tout est à refaire…un nouveau défi de jardinage!
Je n’aurais pas mieux décrit cette merveilleuse thérapie, dont je ne me lasse pas !
Pour moi, le jardinage est un temps de pleine conscience. Je suis entièrement là et je ne pense à rien d’autre.
Pour moi c est ce que vous avez écrit mais j ajouterais ceci: jardiner c est des couleurs….des nuances de vert à l infinie. Des rouges des bleues des blancs et des violets. Une palette splendide de couleurs . C est aussi des odeur !!!…de terre, sèche ou mouillée, de légumes qu’ on coupe pour les cuisiner,etc…je m arrête, je crois que je suis accro au jardinage à cause de tous ces sens stimulés!!!
J’adore votre commentaire ! Vive les sensation du jardinage !
Pour moi, jardiner c’est entre autres embellir mon environnement. Il n’y avait que du gazon quand nous sommes arrivés dans Villeray il y a 20 ans. Il y a maintenant un jardin échevelé et coloré en avant, un potager sur le côté, des plantes médicinales, des fleurs dans la cour, et ce qu’on appelle un sous-bois entre notre maison et celle du voisin, un corridor de 6 pieds de large où le soleil tape 90 minutes par jour. Je passe mes journées les mains dans la terre et la tête dans les livres… que de choses à apprendre: les besoins de chaque légume, les insectes, les maladies, les plantes de chaleur et les plantes de fraicheur, qui aime l’eau, qui aime ca sec, le temps de récolte de chacun, comment récolter des graines… il n’y a pas de fin. J’adore.
Jardiner … temps de liberté et pas d’interrogation.
Pourquoi certains ( trop) plans de cosmos ne poussent qu’en feuillage deviennent très gros sans fleurir ?
La plus belle façon de nourrir mon corps et mon cœur ??.
Comme toujours vos chroniques sont originales et pleine d’humour, j’aime votre côté » à côté » des autres chroniqueurs ! Votre simplicité et vos points de vue sont rafraîchissants ! En plus j’apprends beaucoup …Merci , bonne continuation !
Je citerai Cicéron « une bibliothèque et un jardin suffisent au bonheur ».
A partir de ces deux pistes, le chemin nous mène à la cuisine et à l’écriture, à la dégustation des vins et la recherche du livre rare.
Bref, le jardin est un mode de vie d’une diversité enrichissante. Bon pour la tête et le corps, bon pour entretenir le lien social et la curiosité exigeante, véritable antidote au vieillessement.
Je suis très d’accord avec votre définition, ainsi que la citation de Cicéron.
Merci Audrey! Je te seconde. Ta chronique me fait réaliser tous les bienfaits du jardinage. Le jardiner est une passion pour moi. Je suis en état permanent d’émerveillement et de contentement quand j’ai les mains dans la terre. Puiser son énergie est si fortifiant et je suis à l’instant présent .
Bonjour! Encore une belle chronique qui me fait encore plus aimer jardiner. J’habite une coop d’habitation et nous jardinons sur les toits, alors jardiner c’est se nourrir a partir de peu de choses mais aussi quand on habite la ville, cest aider a avoir moins d’îlot de chaleur.
Mon jardin c’est ma visite journalière chez le psy.
Merci pour vos chroniques et bénissons Larry d’ avoir inventé ce site.
Merci Audrey pour votre ouverture d’esprit. Pour moi le jardinage m’apaise en période de stress ou de tristesse, me ravit en période d’éclosion et de floraison, me donne une certaine fierté en voyant le résultat de mes efforts et me rassure car je sais que tout cela me reviendra année après année .
Votre article me rappelle cette citation de Stephen Harrod Buhner: « The tree does not end at its skin but exists also in the rain that falls downwind, many miles from the forest. In the seed exists the acorn, the oak, and the shade. »
Les arbres ne s’arrêtent pas à leur peau, mais existent aussi dans la pluie qui tombe emportée par le vent à plusieurs miles de la forêt. Dans la graine existent le gland, le chêne et l’ombre.?
Il en va de même pour le jardinage qui ne s’arrête pas au geste de soins, multiplications et récolte des végétaux, mais toutes les implications et effets de ceux-ci!
Chère Audray Pepin, nous aurions été capable de nous passer de la version anglaise, mais, il est difficile d’avoir une version Française atrophiée.
( à plusieurs miles de la forêt)
En Français,la distance se calcul en mille.
Merci et a plaisir de te lire prochainement.
Belle chronique ce matin!
Pour moi le jardinage pourrait se résumer ainsi : C’est de l’agriculture à petite ou très petite échelle axer sur le plaisir, la détente, et l’amour des plantes. Quand cela prend trop de place et que cela devient astreignant cela n’est plus du jardinage , c’est de l’agriculture. Par-contre s’occuper d’un seul pot d’une plante que l’on aime, ça c’est du jardinage.
Je me retrouve tout à fait dans la proposition de M. Laliberté. Une forme d’agriculture limitée dans l’espace, où la rentabilité n’est pas l’objectif. Une pratique d’amateur: cela n’exclut pas d’atteindre une certaine technicité, comme pour d’autres activités qui existent sous forme professionnelle aussi. A vrai dire, en lisant le titre de l’article, j’avais en tête d’autres types de limites, tenant à la conscience lucide de ce qui peut et ne peut pas s’atteindre: le jardinier est peut-être menacé par deux illusions, surtout s’il se pique au jeu : 1) tout ne pousse pas partout et n’importe quand, on peut ruser jusqu’à un certain point, mais il ne faut pas oublier qu' »on ne commande à la nature qu’en lui obéissant » (Francis Bacon), contrairement aux délires de Mitchourine et Lyssenko (des agronomes staliniens qui j’exagère à peine affirmaient faire pousser en Sibérie des plantes mangeables de la racine au fruit en passant par les feuilles) ou transhumanistes actuels à la Elon Musk; 2) les cultivateurs amateurs sont sympas (pas tous…) mais ce n’est pas le jardinage à lui seul qui sauvera la planète, les dimensions politiques et industrielles lui échappent. Aimons jardiner, par exemple faire pousser du melon là et quand c’est possible, mais sans le choper… Une activité qui permet en somme de dépasser plus ou moins ses propres limites en apprenant à faire autre chose que ce que la division du travail dominante nous impose dans notre existence, qu’on le veuille ou non (comme le bricolage et les pratiques artistiques amateurs), et c’est très bien de (re)trouver une certaine polyvalence humaine « naturelle », mais pour autant restons lucides sur les effets réels, planétaires, de notre gentil passe-temps.
100 pour cent d’accord Audrey, merci
Moi le jardinage m’a sûrement sauvé d’une dépression ou d’une une addiction malsaine lors d’une longue séparation avec mon conjoint de l’époque ,je me suis accrochée sur tout ce qui était livre et revues de jardinage et conférences pendant les saisons froides et jardins l’été c’était quasiment une obsession . Aujourd’hui je vis paisiblement entouré de plantes , petit potager ,d’oiseaux, et je regarde la nature avec amour . Un vrai bonheur simple et je constate les connaissances que j’ai acquises c’est pas rien même mon entourage en reviennent pas lorsque je leur nomme le nom de tel plante ou les installées ombre ou soleil etc….ça remonte notre estime de soi en bonus .
Merci pour cet article et pour votre poésie:-)
Ma définition du jardinage colle exactement sur la tienne. Même l’élément de ne pas faire de sport en hiver mais l’été, je jardine. D’ailleurs, quand j’en parle aux non jardiniers je ne dis plus que je jardine car pour eux jardiner = tirer sur une pousse de mauvaise herbe. Je dis maintenant que je fais de l’aménagement paysager. Ils comprennent mieux pourquoi j’appelle ça mon activité physique.