Categories

Recherche

Longue vie aux abeilles?

Par Julie Boudreau

L’hiver dernier, je lisais un article scientifique qui m’a bien attristée. Étant une «sauveuse d’abeilles par ricochet», comme j’aime l’entendre (parce que je sème et je plante des tonnes de fleurs), mon intérêt pour les insectes pollinisateurs est grand.

Cet article révélait que deux chercheurs de l’Université du Maryland ont constaté que les abeilles vivent moins longtemps que dans les années 1970. Leur espérance de vie serait carrément réduite de moitié!

Les abeilles vivent environ deux semaines de moins qu’il y a 50 ans, ce qui réduit leur espérance de vie de moitié. Photo: Alexa sur Pixabay.

La vie en laboratoire

En fait, nos deux comparses s’intéressaient à l’alimentation des abeilles captives. Le fait que celles-ci aient une espérance de vie moyenne de 17,7 jours leur est apparu comme une découverte accidentelle… et malheureuse. Élevées dans les mêmes conditions dans les années 1970, les abeilles domestiques (Apis mellifera) vivaient environ 34,3 jours.

Pourquoi les abeilles vivent-elles moins longtemps?

Certes, on associe souvent la courte espérance de vie de ces insectes ou les forts taux de mortalité dans les ruches à plusieurs facteurs, dont les maladies et les parasites (comme le varroa), les pesticides ou le manque de nourriture. Toutefois, cette étude semble indiquer qu’une partie du problème se trouve dans les abeilles elles-mêmes.

Comme pour tout élevage, nos ouvrières butineuses sont sujettes à la sélection et à l’amélioration génétique. On peut donc supposer qu’en sélectionnant, par exemple, des abeilles plus résistantes aux maladies, on a du même coup, privilégié des abeilles qui vivent moins longtemps. Ce qui aurait du sens, car cela réduit les chances de propager une maladie.

Aussi, des abeilles qui vivent moins longtemps ont moins de temps pour récolter du pollen et du nectar. Ainsi, les réserves sont insuffisantes pour survivre à l’hiver, ce qui entraîne de hauts taux de mortalité dans les ruches. C’est une autre des hypothèses avancées qui découle des résultats de cette étude. Il y a d’ailleurs une relation très nette entre la vie écourtée des abeilles et le déclin de la quantité moyenne de miel produite par colonie, par année.

Il y a un lien direct entre la baisse de production de miel des ruches et la longévité des abeilles. Photo: PollyDot sur Pixabay.

C’est maintenant le temps de renverser la vapeur! Redonnons aux abeilles les deux semaines de vie perdues et dont elles ont besoin pour assurer le bon fonctionnement de la ruche. Et pourquoi ne pas y ajouter un peu de variabilité génétique? Car, c’est bien connu: la monoculture (ou le «monoélevage») n’a jamais apporté rien de bon. Vive la diversité! Et sauvons les abeilles!

Étiquettes + Faits sur les abeilles, Jardin pour pollinisateurs


  1. Merci pour cet information Julie… Une diminution de 50 % de longévité, c’est très préoccupant comme découverte. De plus, un manque de diversité génétique les rend moins adaptable de façon générale, donc possiblement plus à risque en cas de changement (climat, nouvelle maladie, etc…). . Tellement triste ce que l’on sacrifie souvent au nom de la rentabilité …

    • Bonjour Julie merci pour cet article, étant moi-même apiculteur c’est la première fois que j’en entend parler. Là ou je suis moins d’accord c’est concernant les réserves pour l’hiver la majorité des apiculteurs au Québec donnent à l’automne un sirop fait à base de sucre blanc pour aider justement les abeilles à passer l’hiver. Pour le reste de l’article je entièrement d’accord avec toi.Bonne journée

  2. Renée-Johanne Campeau

    Bonjour ! Mais comment peut-on renverser la vapeur? Quelque chose à faire au niveau individuel ?

  3. Bonjour, qu’entendez vous par diversité génétique ? En espérant pas de manipulation génétique !

  4. Henri Jacques MOLLERON

    Les abeilles sont devenues des animaux domestiques élevés et sélectionnées comme les vaches laitières ou les poulets en batterie pour les besoins de pollinisation des grandes cultures intensives : c’est le seul polinisateur “stakhanoviste” capable de gonfler sa population en quelques jours pour polliniser des km² de monoculture de colza ou d’amandiers en fleurs. Cela donne lieu au mécanisme des “ruches transhumantes” que l’on déplace en semi-remorques d’une culture à l’autre au fil des saisons : les reines sont épuisées en moins d’un an et le miel n’est qu’une fonction annexe (mais rémunératrice) de la fonction pollinisatrice
    Le paradoxe est que les grandes monocultures industrielles constituent un milieu toxique pour les abeilles du fait des intrants chimiques. Pour résoudre ce dilemme on a sélectionné l’abeille Buckfast, productive et peu agressive mais il en résulte une atrophie de la diversité génétique de cette variété : elle n’est guère plus capable de survivre dans la nature qu’un poulet échappé d’un poulailler industriel. La filière est tellement industrialisée que l’hémisphère Nord importe massivement (des centaines de milliers) des reines de l’hémisphère Sud en opposition de saison (Chili, Argentine, Nouvelle-Zélande, etc.) afin de gagner en productivité dans la multiplication des populations
    La prédominance de Buckfast dans les ruches transhumantes a pour effet de polluer génétiquement les réservoirs de l’espèce (par exemple l’abeille noire de Provence), ce qui appauvrit génétiquement toute l’espèce, mondialement. Buckfast est ainsi devenue une véritable espèce invasive qui colonise apis mellifera génétiquement et qui évince les autres pollinisateurs sauvages (les bourdons par exemple) en conquérant leurs niches écologiques… or on sait que le bourdon pollinise mieux et permet d’avoir de plus beaux fruits dans un jardin, mais il prend son temps et ne peut pas couvrir des hectares de vergers arrosés de pesticides… Il a bien ra
    La morale de l’histoire est simple : au jardin, inutile d’accueillir une ruche (à moins de travailler avec un conservatoire d’abeille d’origine), éliminer les intrants chimiques et se réjouir de la diversité des pollinisateurs sauvages en les attirant par des plantes à fleurs soigneusement diversifiées pour avoir une floraison continue du printemps à l’automne, sans oublier les hôtels à insectes adaptés

  5. Bonjour Julie. Merci pour cet article intéressant. Certes, les monocultures appauvrissent la biodiversité, incluant les pollinisateurs, puis des impératifs de profitabilité imposent un usage trop souvent abusif des pesticides. J’ai déjà été un apiculteur amateur, sans grand succès, jusqu’au moment où je réalise mon erreur de m’être installé près d’une petite rivière en milieu rural, après avoir pris connaissance de l’état des cours d’eau par l’entremise des suivis des pesticides par le ministère de l’environnement https://www.environnement.gouv.qc.ca/eau/flrivlac/pesticides.htm
    Ces études démontrent la présence de plusieurs herbicides et fongicides dans les rivières du Québec à des concentrations qui excèdent fréquemment divers critères de protection, mais les insecticides néonicotinoïdes, très toxique pour les pollinisateurs, posent non seulement des problèmes lors du butinage aux champs, mais également s’ils viennent s’abreuver aux abords des cours d’eau contaminés, puisque bien des concentrations observées dans l’eau sont supérieures aux doses létales (DL50) admises pour ces produits, notamment pour l’abeille et aussi pour les autres insectes. À moins d’une prise de conscience et un changement rapide des méthodes culturales, la poursuite de l’effondrement du biote m’appert prévisible à bien des endroits.

  6. J’ai une cabane d’oiseaux décorative dont les abeilles (en tt cas, c’estce qu’il me semble) se sont accaparées. L’entrée est très achalandée et il semble y avoir un gros nid à l’intérieur. Ce n’est pas un problème car pas à proximité d’un espace de vie mais je me demande ce que je devrai faire lorsque je devrai entreposer la cabane (car trop de neige à cet endroit). Quelqu’un peut me conseiller?

  7. Éclairant.
    Je viens de faire un court vidéo d’une abeille se délectant dans mon thym.

  8. Malheureusement pour être une sauveuse d’abeilleS il ne faut pas semer des tonnes de fleurs justement… En tout cas pas n’importe quoi et n’importe comment …
    1 – semer des fleurs ne favorise QUE les abeilles domestiques, qui sont les abeilles des ruches, qui ne représentent qu’une seule espèce parmi les 1000 présentes en France. Par ce que l’abeille domestique ayant une langue moyenne peut consommer dans pleins de fleurs différentes ce qui n’est pas le cas des abeilles sauvages.
    2 – semer pleins de fleurs remplace la flore spontanée favorable aux pollinisateurs locaux. Certaines espèces d’abeilles ne font que 200m entre leur espace de nidification et leur espace d’alimentation. Donc si vous remplacez leur alimentation par une autre fleur les abeilles sauvages dépendantes de ces fleurs crèvent …
    3 – semer à tout va, comble les espaces de terre à nue qui sont le lieux principal de nidification des abeilles sauvages, car elles sont à 70% terricoles !
    4 – de plus attention aux plantes horticoles qui sont sélectionnées et ne contiennent parfois plus rien de bon pour les abeilles, par exemple le bleuet cultivé n’a pas pu peu de nectar comparé au bleuet sauvage. Les sachet de prairie fleurie sont malheureusement souvent composées de plantes non locales sélectionnées pour leur esthétisme. Et arrêtons de croire également aux slogans “favorable aux insectes”, “attire les insectes” … Attirer les insectes c’est bien, être favorable aussi mais encore faut il que ça ai un vrai intérêt prouvé. Par exemple le buddleia attire les papillons mais a un nectar trop pauvre en nutriments et les feuilles ne peuvent pas être mangées par les chenilles donc c’est doublement négatif.

    Le problème c’est que la préservation des abeilles ne passe que par l’abeille domestique pour beaucoup, qui est je le rappelle un animal d’élevage. Que ce n’est pas la seule nécessaire à la pollinisation des fleurs.
    Et beaucoup de personnes ayant un fort audimat, transmette des infos sans malheureusement n’avoir de sources réellement scientifiques …

Chers lecteurs du Jardinier paresseux,

Nous améliorons actuellement notre système d’envoi des courriels pour vous offrir une meilleure expérience. Ce système vous permet de recevoir une notification dès qu’un nouvel article est publié. Comme tout changement technologique, quelques ajustements pourraient être nécessaires—merci d’avance pour votre patience!

Avant d’aller plus loin, nous voulons nous assurer que vous souhaitez toujours recevoir ces notifications chaque matin, beau temps, mauvais temps.

Pour continuer à recevoir votre dose quotidienne d’inspiration jardinage, confirmez votre abonnement dès maintenant!

Infolettre