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C’est le 25e anniversaire de mes plantes alpines survivantes!

Il y a 25 ans cette année, j’ai commencé à m’intéresser aux plantes alpines. Ça m’est tombé dessus, sans crier gare: l’élément déclencheur fut une commande pour rédiger un article sur le sujet dans une revue de jardinage. J’ai fait un peu de recherche. Je me suis procuré quelques plantes. J’ai même appris à construire des auges! Un chroniqueur horticole, s’il veut bien faire son travail, a un peu la responsabilité d’être bon dans tout, de tout connaître sur tout. Souvent, je plonge dans un sujet, tête première, pour ne plus y repenser quand la nouvelle thématique arrive. Mais ce ne fut pas le cas pour les plantes alpines. Ma passion et mon intérêt pour ces plantes n’ont fait que grandir, au point que je m’offre occasionnellement un petit voyage dans les hauts sommets pour les apprécier dans leur milieu naturel. Les montagnes Rocheuses du Colorado, c’est mon «Cancun» à moi!

Bien sûr, la culture des plantes alpines n’est pas la plus simple des passions horticoles. C’est beaucoup plus facile de se passionner pour les hémérocalles ou même pour des variétés de légumes anciens (un autre de mes dadas). Être passionné de plantes alpines, cela veut dire se procurer quasiment toutes ses plantes sous forme de semences. Cela veut dire devenir un pro des semis compliqués. Et cela veut dire essayer beaucoup de plantes qui ne survivront probablement pas longtemps dans un jardin de banlieue du nord du Québec.

Ce printemps, je célèbre donc mon 25e anniversaire de culture des plantes alpines. Et en vérité, même avec des centaines de semis à mon actif, elles ne sont pas nombreuses ces plantes qui se trouvent dans mon jardin depuis les tous débuts. Celles qui ont survécu, ce sont des gagnantes toutes catégories confondues! Ce sont celles qu’un jardinier débutant peut cultiver avec la quasi-certitude que ce sera un succès assuré!

Quelques plantes alpines dans leur milieu naturel. Ici, Diapensia lapponica (fleurs blanches) et Rhododendron lapponicum (fleurs pourpres) dans les montagnes du New-Hampshire. Photo: Julie Boudreau.

Qu’est-ce qu’une plante alpine?

Les plantes que je m’apprête à vous présenter ne sont pas toutes de vraies plantes alpines. La définition d’une plante alpine a bien évolué. À l’origine, une plante alpine était une plante qui pousse dans les Alpes. Puis, la définition s’est élargie pour inclure toutes les plantes qui poussent en haute altitude, généralement au-dessus de la ligne des arbres. Eh oui, quand on gravit une montagne, on commence la balade dans la forêt, puis graduellement, les arbres rapetissent, ils deviennent clairsemés, puis on arrive dans les krummholz, ces conifères rabougris et tordus par les caprices de la nature. Et enfin, le sommet! Celui qui offre une belle vue à 360 degrés sur les montagnes environnantes (par journée ensoleillée). Celui où c’est plus venteux, parfois plus froid. Et quand on est chanceux, le sommet est celui où on côtoie les neiges éternelles. Mais le sommet, pour une horticultrice, c’est le paradis des petites plantes!

En ce sens, une plante alpine est une petite plante qui pousse en altitude, en région montagneuse. Mais la définition s’est à nouveau élargie. On considère maintenant les plantes alpines comme une collection de plantes qui atteignent généralement moins de 20 cm. C’est ainsi que quelques hostas miniatures, surtout originaires des îles japonaises, se sont retrouvés dans la catégorie des plantes alpines. Certaines plantes des milieux désertiques ont aussi gagné les rangs des plantes alpines. Tout un contraste!

Les championnes sont…

Ce n’est pas une surprise de découvrir un hosta miniature dans ces plantes alpines qui habitent mon jardin depuis 25 ans. Le Hosta venusta est considéré comme un des plus petits hostas miniatures qui soient. Du haut de ces 10 cm, il est assez fascinant. Il s’agit d’une espèce sauvage que l’on retrouve surtout en Corée du Sud. Son feuillage est d’un vert bien ordinaire, mais il porte de belles grandes grappes de fleurs mauves. Les fleurs semblent un peu trop grosses pour la grosseur du plant et c’est une des belles qualités des plantes alpines. En général, les fleurs sont démesurément grosses quand on les compare aux dimensions de la plante. Autre particularité de cet hosta: il se développe en talles, c’est-à-dire qu’il se multiplie et que la plante élargit chaque année. C’est donc facile de le diviser pour en offrir en cadeau! On le dit rustique jusqu’en zone 3, ce qui ne m’étonnerait pas, car il vit ici dans une petite auge.

Une généreuse portion de Hosta venusta, dans un de mes vieilles auges. Photo Julie Boudreau.

La plante suivante est arrivée dans mon jardin sous forme de cadeau et j’ai vite craqué pour ses fleurs d’un bleu royal (un VRAI bleu!). Il s’agit de la Véronique de Whitley (Veronica whitleyi). Cette plante est un peu un mystère, car elle est de plus en plus commercialisée, mais ses origines demeurent floues. Il ne s’agit pas d’une espèce reconnue chez les véroniques. Pourtant elle est belle et bien réelle dans mon jardin! La plante forme un tapis de feuillage finement découpé. Quand elle n’est pas en fleur, on pourrait facilement la confondre avec un thym laineux. Mais en mai, pas de doute possible, car le feuillage disparaît littéralement sous la tonne de petites fleurs bleu foncé. À quelques reprises, j’ai dû contrôler la plante pour qu’elle n’envahisse pas ses voisines. Elle a même tenté une évasion dans la pelouse! Qu’à cela ne tienne. Je me laisserais envahir n’importe quand par une aussi belle plante.

La véronique de Whitley, dans mon jardin. Quel beau bleu! Photo: Julie Boudreau.

La suivante est une plante que j’ai démarrée par semis. L’œillet sanguin (Dianthus cruentus) est une véritable plante alpine originaire d’Albanie et de Bulgarie. On la connaît bien peu et je crois qu’elle mériterait toute notre attention. D’abord, parce que les semis de Dianthus sont très faciles à réussir. C’est donc un genre parfait pour s’adonner à nos premières expériences de semis. Ensuite, nombreux sont les œillets qui ont une espérance de vie relativement courte au jardin. Ce n’est pas le cas avec eux! Après plus de vingt ans, ils reviennent fidèlement chaque année. L’œillet sanguin est une plante très intéressante, car elle développe une petite rosette de feuilles basses au-dessus de laquelle s’étirent de longues hampes florales qui se terminent par de petits pompons de fleurs rouge vin foncé. C’est une vraie beauté et elle apporte un peu de hauteur (25 à 30 cm environ) à ces collections de plantes qui dépassent rarement 10 cm de haut.

Un bel oeillet bien résistant et durable! On voit bien les longues tiges florales en arrière plan. Photo: Julie Boudreau.

Encore plus alpine que la précédente, car elle est vraiment originaire des Alpes, la primevère auriculée à gorge blanche (Primula auricula var. albocincta) est depuis toujours une de mes plantes chouchou du jardin! Je voue un amour inconditionnel aux primevères de tout genre et celle-ci s’est taillé une belle réputation de plante pour collectionneur. Quel ravissement de la voir persister aussi facilement depuis toutes ces années! Je l’ai même divisée à l’occasion pour en offrir à des amis. Il faut souligner que c’est une primevère très tolérante à la sécheresse. En général, les primevères sont davantage des plantes de sous-bois frais et humide. Les feuilles de la primevère auriculée à gorge blanche sont coriaces et épaisses, légèrement teintées de gris. La floraison est d’un beau jaune éclatant avec un petit halo blanchâtre en son centre. Plantée dans ma toute première auge, nous arrivons au point où l’auge se désagrège… mais la primevère persiste du haut de ses 15 cm de hauteur.

Comment ne pas tomber sous le charme de cette primevère auriculée? J’ai moi-même peine à croire que je profite de sa belle floraison chaque année, sans défaut, depuis 25 ans. Photo Julie Boudreau.

Je mentionnerai en vitesse un penstemon alpin, le penstemon hirsute (Penstemon hirsutus var. pygmeus) que j’ai eu le grand bonheur d’observer dans les Rocheuses du Colorado. Aussi parti par semis, il y a de cela une quinzaine d’années, il est parfaitement heureux, non loin de mon petit jardin de tuf. Il mesure à peine 20 cm de hauteur et il s’est même ressemé en quelques endroits. Rien d’envahissant, je vous rassure. Mes plants portent des fleurs tubulaires d’un mauve un peu plus foncé que le rose lilas qui est habituellement la couleur des fleurs. Cette petite plante m’épate. Il faut dire que les penstemons, en général, se plaisent vraiment dans mon jardin.

Ces plantes qui cumulent 25 beaux printemps dans mon jardin ne font pas légion. Elles sont peu nombreuses. Bien sûr, je passe les évidences, comme les joubarbes (Sempervivum spp.) et les sedums (Sedum spp.). Je dois avouer qu’il y a beaucoup plus de plantes alpines qui n’ont pas survécu à leur première année dans mon jardin! Mais que celui qui n’a jamais tué une plante me lance la première pierre… et je l’utiliserai pour agrandir mon jardin alpin!


commentaire sur "C’est le 25e anniversaire de mes plantes alpines survivantes!"

  1. Fascinant! Malheureusement j’habite au Sahel.

    • Bonjour, j’ai découvert la véronique de Whitley dans le livre “Les coups de cœur du jardinier paresseux” du regretté Larry Hodgson. J’habite en Belgique. J’ai essayé de trouver cette plante sur internet, mais il s’avère que les sites qui la proposent sont presque exclusivement américains, principalement canadiens. Cette plante n’existe-t-elle pas ailleurs dans le monde ? Ou alors sous un autre nom ? Y aurait-il moyen de se procurer des graines quelque part ? Merci d’avance si vous avez des renseignements.

  2. Super intéressant! Cette année je veux faire un jardin pour les papillons monarques. Peut être que l’an prochain je me lancerais dans un jardin alpin!

  3. Merci de cette belle nouveauté….

  4. Bonjour Julie et merci pour ce bel article. Est-ce que tu sais où je pourrais me procurer le cultivar Hosta venusta svp.

  5. Merci pour cet article!
    Est-ce que c’est préférable de les planter dans des auges ou si on peut les mettre en pleine terre (je pense à la primevère)? Quel genre de sol est préférable? Mi-ombre? Plein soleil possible? Cette petite plante est bien tentante! 🙂

  6. Moi aussi j’aimerais avoir ce robuste petit Hosta venusta. Ou me le procurer ? ou faire des échanges !

  7. Très intéressant, bien hâte à demain et de vous entendre pour la conférence à la Société de plantes alpines et de rocailles du Québec. Moi aussi, j’ai un faible pour les primulas auriculées et P. pubescentes

  8. superbe!!! Merci.

  9. J’ai de la véronique chez moi, j’ignorais que c’était une plante alpine!

  10. Merci de m’avoir fait découvrir les plantes Alpine je crois que je vais agrandir un coin de mon jardin. Ou peut-on commander les semences?

  11. Article super intéressant comme toujours!?

  12. Vous êtes drôle et intéressante Mme Julie, bravo !

  13. Vraiment intéressant Mme Julie ! Vous avez de quoi être fière.
    Une question: Pourquoi construire des auges ? Pour imiter le milieu montagneux?

  14. La Primula auricula se plaira bien aussi dans le jardin. Il faut que le sol soit bien drainé car le collet va pourrir si il reste dans l’eau. Donc, l’idéal, c’est une bordure de plate-bande surélevée. Mi-ombre, car c’est une plante de montagne, donc climat frais.

  15. Merci pour la leçon de botanique!

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