Cultiver sa tisane et son réconfort
Quelques mois avant la construction des premiers bacs aux Jardins du bassin Louise, nous avons mis sur pied une campagne de sociofinancement afin de nous aider dans la réalisation de ce projet. Nous devions réfléchir à des contreparties à offrir selon les dons reçus. Plusieurs belles idées ont été mises sur la table: des bacs de jardinage, des aquarelles à thématique maraîchère, des t-shirts et même des tisanes! La dernière idée m’avait surprise et intriguée puisque lesdites tisanes seraient cultivées directement dans les bacs de la ferme urbaine. Nous allions créer des mélanges, cultiver, récolter les plantes selon leurs caractéristiques propres et les faire sécher correctement. Je serais aux premières loges de la production.
Boire les plantes
J’ai testé une foule de légumes et d’herbes au fil de mes années aux Urbainculteurs, mais je n’ai jamais cultivé de plantes qui seraient destinées à être séchées puis infusées. Autant vous dire que nous avons sauté sur cette occasion de nouvelle acquisition de savoir!
Ce projet a été réalisé en partenariat avec l’organisme Croissance travail ainsi qu’avec un comité en implication citoyenne. Les bénévoles, les organismes participant à la vie de la ferme urbaine ainsi que les passants curieux ont tous été enthousiastes et fascinés par ce nouveau «projet». Une activité pédagogique ayant remporté un grand succès a même été mise sur pied: «Infusion de savoir». Plusieurs disaient: «Je n’ai jamais pensé que je pourrais faire cela à la maison!» Mais oui! En raison de sa popularité auprès de plusieurs, j’ai eu envie de vous partager l’une de nos recettes afin que vous puissiez la reproduire à la maison. De plus, ces tisanes pourront vous apporter chaleur et réconfort durant les mois d’hiver, et pourquoi pas, vous rappeler un peu votre potager.
Midi au soleil
Je vous présente le mélange «Midi au soleil», composé de romarin, thym, calendule, camomille et mauve. Les plantes utilisées dans ce mélange sont toutes très faciles à trouver. Elles sont esthétiques et se cultivent aussi bien sur un balcon qu’en plein sol. Bref, un charme pour les yeux et pour les papilles! Regardons de plus près chacune de ses composantes.
Romarin – Rosmarinus officinalis
Le romarin est davantage connu pour son utilisation en cuisine. Vivace à certains endroits, il est cultivé comme une annuelle au Québec. Plantez 2 à 3 plants afin de toujours en avoir sous la main et de faire une rotation dans la récolte. Le romarin est puissant au goût et à l’odeur, on le considère comme une plante tonique, revigorante et stimulante.
Pour la tisane, nous voulons récolter les feuilles. Attendez que le plant ait une hauteur de 15 à 20 cm et sélectionnez les tiges les plus longues. Vous pouvez les rabattre, disons de 5 cm, afin de stimuler la croissance. Attention de ne pas trop récolter à la fois, nous voulons que ça repousse toute la saison durant. On récolte maximum 30% de la surface végétative à la fois. De ce fait, avoir plus d’un plant permet une meilleure reprise. Vous pourrez utiliser les bouts de tiges en entier dans la tisane, pas besoin de séparer les feuilles individuellement (quel travail!).
Thym – Thymus vulgaris
Le thym est abondamment utilisé en cuisine, on peut dire que c’est un incontournable. Il est cultivé comme une vivace et se décline en quelques variétés. Si vous jardinez en pot, vous pourriez consacrer un pot entier au thym, car il a tendance à s’étendre avec le temps. Son goût est puissant, mais irrésistible à la fois.
Comme pour le romarin, je vous conseille d’avoir plus d’un plant afin de pouvoir l’intégrer dans vos recettes préférées et pour assurer une rotation dans la récolte. On coupe les tiges tôt en saison pour les plants de deuxième année. La récolte peut se poursuivre jusqu’à la fin de l’été. Pour les plants de 1ère année, il faut attendre au milieu de l’été. Aussi, il est important de cesser la récolte au moins 5 à 6 semaines avant les premiers gels d’automne afin de permettre sa survie à l’hiver. Encore une fois, on récolte un maximum de 30% de la surface végétative à la fois. Pas besoin de séparer les feuilles de la tige. En tisane, le thym est entre autres reconnu pour ses propriétés antiseptiques, toniques et expectorantes.
Calendule – Calendula officinalis
La calendule, qu’on nomme aussi souci, est une fleur qui me fait penser à de beaux petits soleils éclatants. Elle se décline dans des teintes de jaune à orange, certaines ont même des fleurs doubles. C’est une annuelle qui se ressème abondamment au jardin, elle est facile à cultiver et attire une foule d’insectes utiles. Au Québec, elle fleurit de juin à octobre. La calendule se récolte régulièrement, plusieurs fois par semaine. Cela stimule une floraison constante et permet d’avoir les fleurs les plus «fraîches». On récolte la fleur au complet, on peut même tailler plus bas (à l’aisselle de la tige) afin de stimuler la pousse. Vous pourrez utiliser les boutons floraux entiers, sans la tige. Son goût est discret, légèrement poivré et épicé.
Camomille allemande – Matricaria recutita
Dans l’univers des tisanes, on peut dire que la camomille se passe de présentation. On la boit pour relaxer, pour se préparer au sommeil; ses vertus sont multiples. Elle peut atteindre une hauteur de 60 cm et produit une quantité impressionnante de petites fleurs jaunes et blanches. C’est précisément ces petits capitules floraux qui nous intéressent, ils pourront être récoltés de juin à septembre. Comme pour la calendule, faites une récolte régulière afin de stimuler une croissance constante. La camomille est cultivée comme une annuelle, mais se ressème abondamment.
Mauve – Malva sylvestris
On termine avec la plus grande du lot, la mauve, pouvant atteindre une hauteur de 1,5 m. Avec la mauve, il faut de la rigueur. Ses fleurs délicates se fanent et s’altèrent très rapidement. Une récolte presque journalière est de mise! Elle ajoutera une belle coloration à vos tisanes, et on dit qu’elle a une action adoucissante. La mauve est une bisannuelle, mais pour ma part, je l’ai toujours cultivée comme annuelle et retirée de terre à l’automne. Elle s’enracine bien, il n’y a pas de doute! Elle a aussi tendance à se ressemer.
Le séchage
La fabrication de tisanes s’échelonne sur toute la saison horticole. Vous cumulez et séchez vos plantes au fur et à mesure de leur production. Soyez délicats lors des manipulations et tentez de réduire le plus possible le temps entre la récolte et le début du séchage. Les méthodes de séchage sont multiples, elles seront choisies selon le matériel que vous avez sous la main et l’espace dont vous disposez. Dans tous les cas, on souhaite faire sécher les plantes dans un endroit exempt de lumière et d’humidité. Prévoyez un ventilateur. Il existe des filets de séchage étagés qui peuvent être suspendus au plafond. Vous pouvez aussi utiliser un déshydrateur ou confectionner des cadres de séchage avec un filet alimentaire. Essayez d’étendre les plantes en une seule couche afin d’optimiser le séchage. On dit de laisser sécher en moyenne 2 semaines, mais n’oubliez pas que chaque plante a ses particularités.
Vous saurez que vos plantes sont prêtes lorsqu’elles se brisent facilement entre les doigts et que l’odeur d’humidité est complètement disparue. Vous pourrez accumuler vos récoltes dans des contenants hermétiques identifiés selon chaque plante. S’il y a présence de moisissure blanche ou noire, on ne prend pas de risque et on met au compost.
Mélange et conservation
Je vous propose aujourd’hui les proportions qui ont été utilisées pour la création de «Midi au soleil», mais ne vous gênez pas pour expérimenter, changer, intégrer de nouvelles plantes dans votre mélange. Créer et essayer, ça fait aussi partie de l’expérience, les possibilités sont multiples! Donc, pour 100 grammes de tisane, on compte 20 grammes (20%) de romarin, 20 grammes (20%) de thym, 20 grammes (20%) de calendule, 30 grammes (30%) de camomille et 10 grammes (10%) de mauve. Après avoir tout mélangé, conservez votre précieuse création dans un pot hermétique, à l’abri de la lumière. Bonne dégustation!
Une visite inspirante
En terminant, je vous laisse avec quelques clichés de notre visite d’équipe à l’herboristerie La Maria, à Saint-Michel-de-Bellechasse, à l’été 2022. Une multitude de tisanes biologiques, entre autres, y sont produites. Cette visite nous a grandement éclairés sur tout le travail, la minutie et la passion qui sont nécessaires afin de produire, de façon commerciale, des tisanes de grande qualité. Un autre univers passionnant à découvrir.
Bonjour
Un grand merci pour ce partage de recette
Si vous en avez d’autres nous sommes preneurs
Je crois que je vais semer des mauves
Wow, merci pour ce bel article. Avez vous un livre à recommander sur la culture d’herbes et fleurs à faire pousser pour faire des tisanes ?
À l’intérieur nous cultivons déjà la menthe (qui est très facile) à l’année, dehors nous avons de la verveine citronnée. Je trouve la camomille un peu plus difficile car elle ne tiens pas dans le “rang”, elle s’étent un peu trop pour les petits jardins. Nous avons du thym que nous utilisons en cuisine mais je n’avais jamais pensé en mettre dans mes tisanes, quelle belle idée. C’est effectivement assez facile de cultiver des herbes et d’en faire des tisanes. On veut plus d’idées svp!! Merci pour ce partage! 🙂
Merci pour cet article. Je cultive plusieurs plantes pour faire mes tisanes et aussi parce que se sont de belles plantes souvent très odorantes, par exemple la valériane. Je suis triste de ne plus pouvoir planter de mauve car une autre plante a amené la rouille dans mon jardin et la mauve répandait allègrement cette tare. Y a il un moyen pour replanter la mauve sans être mal prise avec la rouille ?
Toujours intéressant vos articles Marie-Andrée . Je vais essayer de faire de la tisane au chalet cet été ! Pierre Piché
Suggestion de livre de Nathalie Beaudouin herboriste et naturopathe: Des fleurs dans votre assiette. Magnifique et instructif !
Acheter des tisanes bio de qualité, c´est pas donné! Cultiver des plantes aromatiques et médicinales nous permet d’économiser énormément! Chez moi, agastache, camomille, calendula, achillée, malva, plusieurs menthes, ortie, gaulthérie, thym, verveine citronnée, lavande, etc. On y va selon nos goûts et besoins.
J’ai planté des plants de verveine en bacs sur ma terrasse. En été je récolte les feuilles et les fais sécher. C’est délicieux le soir avant d’aller dormir. Bien autre chose que les petits sachets que l’on vend.
Le jardinage m’a récemment amenée à m’intéresser à l’herboristerie. C’est un domaine fascinant qui nous permet de jeter un regard nouveau sur nos habitudes de culture. Et félicitations pour vos jardins du Bassin Louise. J’adore aller y faire un tour pendant l’été. C’est un endroit stimulant!
Merci pour toutes ces informations! Et bravo aux Urbainculteurs pour le jardin du bassin Louise! J’irai le visiter cet été!
J’adore ma Mélisse en infusion froide l’été 🙂
Si ça pousse sous votre climat, je vous recommande la Sarriette des Alpes (Satureja montana) qui est une plante tapissante, rustique, ne demande aucun soin, sinon une tonte de temps en temps. Elle a beaucoup de ressemblance avec le thym, et pratiquement les mêmes usages pour la cuisine et la tisane. Elle peut être utilisée comme couvre sol.
Il existe a aussi la Sarriette commune (ou de Provence, où elle porte le nom de “pebre d’ase” : poivre d’âne). Elle est plus buissonnante et tient davantage de place.
Depuis 25 ans de tisanes cultivées à la maison dont mes québécoises préférées sont le thé du Labrador, le thé des bois, le thym citron, le vinaigrier et la menthe. Cette année je vais essayer deux plantes dont une qui a des fleurs bleues et lavandes devant faire un thé calmant bleu ou lavande (clitoria ternatea blue queen et lavender queen) et le Célosie Hig Yoku aux fleurs rouges en tisane.
J ai séché les petales de rose du rosier De recht ,rosier de portland remontant et si bien parfumé…
Merci pour cet article intéressant.
J’ai beaucoup de menthe poivrée dans mon jardin, mais en tisane, bien que délicieuse, prise le soir, elle m’-empêche de dormir. La verveine est-elle calmante, et si oui, quelle quantité de feuilles pour une tasse d’eau bouillante.
Le tilleul, ou la valériane poussent-ils au Québec ?
Merci.
Le tilleul américain est un arbre qui pousse bien en zone 4b, il produit une abondance de fleurs qui remplacerait très bien la camomille.