La coriandre mexicaine: une fine herbe à découvrir
Par Larry Hodgson
Beaucoup de jardiniers connaissent la coriandre, ou coriandre cultivée (Coriandrum sativum), mais connaissez-vous sa version latino-asiatique, soit la coriandre mexicaine (Eryngium foetidum)? On l’appelle aussi culantro, coriandre longue, chardon béni ou, en Asie du Sud-Est, coriandre chinoise et ngò gai. Les anglophones et hispanophones l’appellent souvent culantro, un nom dérivé de cilantro, le nom espagnol pour C. sativum. Mais aussi Mexican coriander, Mexican cilantro et une longue liste d’autres noms.
Cette «nouvelle» coriandre n’est plus si rare. Suite à l’immigration provenant de l’Amérique latine et de l’Asie dans beaucoup de régions, cette plante a connu une forte augmentation de sa demande depuis quelques années. On la trouve désormais assez facilement dans les lots des jardins communautaires et dans les marchés de fermiers asiatiques, mais aussi — de plus en plus! — dans nos supermarchés.
Liens de goût et d’arôme, pas de sang
Mais la coriandre mexicaine n’a qu’une très lointaine parenté avec la coriandre. Les deux appartiennent bien à la famille des Apiacées ou ombellifères, mais à différentes branches de la famille. Là où elles se ressemblent, c’est plutôt dans leur arôme et leur goût.
C’est, d’ailleurs, un arôme que tout le monde n’aime pas, même si beaucoup de connaisseurs l’adorent. Les opposants prétendent que la coriandre, que ce soit la cultivée ou la mexicaine, goûte le savon! À Cuba, la coriandre mexicaine est souvent appelée yerba de sapo ou herbe de crapaud, indiquant clairement un certain dégoût. Et même le nom botanique, foetidum, signifie puant!
Je dois admettre, cependant, que je suis un amateur de coriandre mexicaine (et de la coriandre cultivée aussi). Je trouve qu’une bouffée de coriandre mexicaine venant de la cuisine stimule vraiment l’appétit et prépare les glandes salivaires pour le délicieux repas à venir!
Ses origines
La coriandre mexicaine est une petite plante bisannuelle originaire des Amériques tropicales incluant les Antilles et même la Floride. Elle est largement utilisée dans la cuisine dans toute cette région, mais aussi en Asie où elle est cultivée depuis au moins 300 ans. D’où le nom de coriandre chinoise. Les Vietnamiens l’appellent ngò gai et je vois ce nom dans les marchés au Québec. La coriandre «mexicaine» est même si populaire en Asie qu’il est difficile d’imaginer la cuisine asiatique sans elle!
Donc, arôme et goût similaires, mais physiquement, les deux plantes, coriandre cultivée et coriandre mexicaine, ne se ressemblent en rien.
Apparence
La coriandre mexicaine (E. foetidum) forme d’abord une rosette basse aux feuilles lancéolées et sans pétiole plutôt coriaces. Leur marge munie de petites dents leur donne une allure de chardon, d’où sans doute le nom de chardon béni qu’on lui donne dans les Caraïbes. Les feuilles atteignent jusqu’à 30 cm de long et 4 cm de large et poussent en spirale autour d’une tige très courte à peine soulevée du sol. Sous terre, elle a une racine pivotante blanche.
Lorsqu’on laisse fleurir la coriandre mexicaine, elle forme une épaisse tige dressée et lisse surmontée de petits bouquets d’inflorescences un peu chardonèsques. Un anneau de bractées vertes, étroites et piquantes entoure alors un cône de minuscules fleurs blanches.
Comme cette herbe est bisannuelle, elle pousse une année et fleurit l’année suivante. Puis, elle produit des graines et meurt. Ensuite, le cycle se répète.
La coriandre (C. sativum) est une plante aux feuilles découpées munies d’un long pétiole. Elle ressemble un peu à un plant de persil, mais en plus délicat. Il n’y a vraiment aucune ressemblance avec la courtaude coriandre mexicaine (E. foetidum)! Même ses fleurs, des dômes de petites fleurs blanches ou rose pâle créant un effet aéré et gracile, sont très différentes des fleurs plus denses et consistantes des fleurs de la coriandre mexicaine.
Non, il n’y a vraiment aucun risque que l’on confonde les deux au jardin!
Cuisiner avec la coriandre mexicaine
Aujourd’hui, la coriandre mexicaine est principalement utilisée en cuisine, notamment comme aromatisant et assaisonnement dans la cuisine des Caraïbes, de l’Amérique latine et de l’Asie. Cela comprend les sauces, les ragoûts, les chutneys et toutes sortes d’autres plats, souvent avec de la viande. Bien adaptée aux tropiques chauds, la coriandre mexicaine y remplace aisément la coriandre cultivée, difficile à réussir dans les régions tropicales.
Si une recette demande de la coriandre, vous pouvez toujours la remplacer par la coriandre mexicaine. Utilisez-en simplement un peu moins, car elle a un arôme et un goût plus intenses que la coriandre cultivée.
Traditionnellement, dans les potagers familiaux, la coriandre mexicaine se récolte au besoin. Il suffit de couper ou d’arracher une feuille ou deux à la base de la plante, là où elle est fixée à la rosette. Souvent, on l’utilise alors finement hachée.
Contrairement aux feuilles de coriandre, qui résistent mal à la chaleur de la cuisson et doivent être ajoutées aux mets à la dernière minute, la coriandre mexicaine est très résistante à la chaleur. Elle conserve sa couleur, son arôme et sa saveur pendant la cuisson. D’ailleurs, on l’ajoute souvent au début de la cuisson, ce qui laisse mieux infuser son goût.
La coriandre mexicaine sèche également très bien, contrairement à la coriandre. Typiquement, on arrache la plante entière et on la fait sécher avec sa racine, puis on retire les feuilles quand elles sont bien sèches. On les coupe en petits morceaux pour faciliter l’entreposage. Dans une bouteille ou un contenant scellé, les feuilles séchées se conservent des mois, voire des années.
Et vous pouvez conserver la coriandre mexicaine fraîche au réfrigérateur jusqu’à 2 semaines dans un récipient scellé.
Utilisations médicinales
Dans son aire de répartition d’origine dans les Amériques, ainsi qu’en Asie, la coriandre mexicaine est un médicament traditionnel populaire pour traiter un large éventail de maux, des rhumes, fièvres et maux d’estomac à l’asthme, au diabète et aux convulsions. Elle est même recommandée pour traiter des piqûres de scorpion! Son ancien nom botanique, E. antihystericum, fait allusion à son rôle dans le traitement des crises d’épilepsie.
Des études scientifiques montrent que la coriandre mexicaine contient de l’eryngial, un composé chimique ayant une valeur anti-inflammatoire et antibactérienne.
Comment cultiver la coriandre mexicaine
Vous pouvez acheter des plants de coriandre mexicaine dans de plus en plus de pépinières, certaines en ligne, et aussi des semences à plusieurs endroits. Au Canada, il y a Jardins la brouette, Flora Exotica et Richters Herbs qui en offrent par commande postale. En Europe, essayez AlsaGarden, Graines Baumaux et Seeds Gallery.
Cette plante, étant d’origine tropicale, a besoin de températures chaudes en tout temps, mais malgré cela, elle n’apprécie pas la canicule, surtout combinée avec les longues journées d’été des régions tempérées. Cela peut provoquer une montée en graine prématurée. Visez donc une température de 20 à 33 °C le jour et pas moins de 10°C la nuit. Pour cette raison, il vaut souvent mieux planter la coriandre mexicaine à la mi-ombre là où les étés sont torrides, mais au plein soleil là où ils sont frais.
Notre sujet s’adapte à la plupart des sols de jardin, y compris les sols pauvres, à condition que le drainage soit bon. Un pH de 6 à 7,5 serait parfait.
Dans les climats chauds profitant d’une longue saison de croissance (zones de rusticité USDA 8 à 11), vous pouvez semer les graines de coriandre mexicaine à l’extérieur, au début du printemps, là où elles pousseront tout l’été. Cependant, la plupart des jardiniers des climats tempérés devront démarrer la coriandre mexicaine à l’intérieur. Si tel est votre cas, semez les graines environ 8 semaines avant la dernière date de gel dans votre région.
Comme la coriandre mexicaine a une racine pivotante qui n’apprécie pas les perturbations, semez-la dans un pot biodégradable (fait de tourbe, de fibre de coco ou de bouse de vache).
Préhumidifiez le terreau (il doit avoir la texture d’une éponge essorée). Il peut s’agir d’un terreau pour semis ou tout simplement d’un terreau d’empotage tout à fait ordinaire. Remplissez un petit contenant de terreau et semez-y les graines, à raison de 2 ou 3 par pot. Appuyez doucement sur les graines pour les enfoncer légèrement dans le terreau. Ne les recouvrez pas de terreau, car elles ont besoin de lumière pour germer.
Placez le pot à l’étouffée (sous un dôme ou un sac transparent) afin de maintenir une humidité élevée et une température stable. Une bonne chaleur est nécessaire pour une germination réussie, idéalement 26°C ou plus. Ainsi, un tapis chauffant peut être utile. Exposez les pots à une lumière vive pendant la germination, mais pas encore au plein soleil.
La germination est souvent lente et irrégulière, prenant de 14 à 30 jours. Cependant, les plantes poussent assez rapidement par la suite. Lorsque les petits semis commencent à produire leurs premières «vraies feuilles» (faisant donc abstraction des 2 cotylédons à la germination), il est temps de retirer le revêtement protecteur et de déplacer les petites potées sur un rebord de fenêtre ensoleillé. Le tapis chauffant a alors moins d’importance, à moins que votre emplacement soit naturellement frais. Après quelques semaines, éclaircissez pour ne laisser qu’un plant par pot, conservant le semis le plus fort.
L’entretien principal à faire pendant le séjour des plants à l’intérieur sera d’arroser soigneusement dans le but de garder le milieu de culture toujours légèrement humide.
Environ 2 semaines avant de pouvoir repiquer les jeunes plants au jardin, commencez à les acclimater aux conditions extérieures. Commencez par les placer dans un endroit ombragé et protégé du vent, puis déplacez-les progressivement vers une lumière plus intense et un emplacement plus exposé. Si les soirées printanières restent fraîches dans votre région, vous devriez peut-être rentrer les semis à l’intérieur la nuit. (La coriandre ne se porte pas bien dans des conditions trop fraîches.) Vous ne devez pas non plus repiquer les plantes à leur place permanente dans le jardin tant que les nuits ne dépassent pas 10 °C.
Vous pouvez planter de jeunes plants dans le potager ou en jardinière. Évidemment, plantez-les en laissant leur pot biodégradable intact afin de ne pas déranger les racines. Dans les régions aux étés tardifs, on les cultive surtout en jardinière, toutefois. C’est parce que les températures y sont plus chaudes en début et en fin de saison, ce qui aide beaucoup à hâter puis à prolonger la saison de récolte. Vous pouvez les planter à raison d’environ 1 plante par pot de 4 litres. Au potager, espacez-les d’environ 20 à 30 cm.
Pendant la saison de croissance, arrosez au besoin, en gardant le sol légèrement humide. Ce n’est pas une plante qui tolère la sécheresse! N’hésitez pas à couvrir la zone racinaire de la plante avec du paillis, surtout si vous cultivez votre coriandre mexicaine en plein soleil. Le paillis aide à garder les racines à la fois plus fraîches et plus humides.
Pendant l’été, vous pouvez fertiliser avec un engrais biologique tout usage pour une taille et une coloration supérieures, en suivant le dosage recommandé sur l’étiquette du produit.
Si tout va bien, votre coriandre mexicaine fournira des feuilles fraîches tout l’été et jusqu’en automne… même tout l’hiver dans les climats tropicaux et subtropicaux. Si la plante commence à monter en graine (à fleurir) — et cela arrive! —, calculez que la saison est terminée! Récoltez alors toutes les feuilles dont vous aurez besoin pour une utilisation fraîche immédiatement et au cours des prochaines semaines et séchez les autres comme expliqué ci-dessus.
Il faut ressemer ou replanter la coriandre mexicaine chaque année, même là où elle survit à l’hiver, car les plantes de deuxième année monteront rapidement en graines avec le retour du printemps. Alors, arrachez vos plantes à la fin de la saison en prévision du jardin de l’année suivante.
Enfin, les graines de coriandre mexicaine ont tendance à être de courte vie. Vous devriez envisager de récolter vos propres graines en laissant une plante monter en graine. (Ainsi, vous pourriez récolter et stocker les graines produites). Sinon, il faudrait envisager d’acheter des graines fraîches au moins tous les 2 ans.
La coriandre mexicaine: c’est une plante que vous ne connaissiez probablement pas du tout avant de commencer à lire cet article, mais maintenant, j’espère, vous avez hâte de la cultiver.
Mais une dernière note… il y a aussi une autre plante qui remplace facilement la coriandre cultivée dans la cuisine. On l’appelle couramment coriandre vietnamienne et son nom botanique est Persicaria odorata. Sa culture est encore différente de celle de deux autres coriandres. Je vous la présenterai dans un futur billet!
Ses arômes dont plus prononces que cilantro, nous l’utilisons beaucoup en cuisine, infusions, farces, etc
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Merci pour cet article génial! En attendant de trouver des semences, me voilà mieux outillée pour profiter de mes visites aux épiceries asiatiques du quartier. Bien hâte de lire votre prochain billet sur la coriandre vietnamienne. Merci encore et bonne journée!
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On peut utiliser tout ce qui est hotuynia cordata, avec des arômes de coriandre, en pesto, dans les dashi, les farces, crèmes etc…qui est une demi aquatique, tout comme la coriandre asiatique de la famille des polygonum.
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Voilà ce que je cherchait depuis longtemps. Merci beaucoup pour cette information. Dans mon pays Colombie on l’appelle Cimarron. Ma mère l’utilisait dans la préparation d’une soupe avec du banane plantain et du manioc. Également pour la soupe au poulet. C’est cette plante qui donnait un goût especial. Elle faisait un «bouquet garnie » avec le persil, la coriandre cultivée, le thym, l’origan, romarin. Délicieux. Je vais essayer de trouver les semences , j’espère. Bonne journée.
Bonjour, merci mille fois, je ne connais pas cette coriandre, mais j’adore la saveur de l’autre qui a hélas le défaut de monter en graine dès les chaleurs de juin et de refuser de pousser l’été. Bien hâte de cultiver le culantro donc qui se plaira sûrement en Bretagne aux étés tièdes.
Quant aux arômes qui ne plaisent pas à tout le monde, je leur trouve personnellement une gênante ressemblance avec l’odeur de la punaise végétale que j’abhorre. Curieux comme on peut raffoler de certaines saveurs comme par exemple celles des fromages affinés qui nous gênent quant elles ont d’autres origines. Je n’en dis pas plus.
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Je constate que beaucoup de grainetiers français confondent la coriandre mexicaine avec la vietnamienne. Ils annoncent la première sous le nom de vietnamienne, chinoise ou asiatique ou de persil thailandais. N’importe quoi.
Oui, il y a beaucoup de confusion! ?
Merci pour cet article qui me fait penser que j’ai fort probablement déjà goûté à la coriandre asiatique lors d’un séjour en Chine lors d’un souper “hot pot”. Une des sauce était à base de coriandre et je dois admettre que je n’ai jamais retrouver le goût cette coriandre depuis. Je crois me souvenir que le goût était plus intense.
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La coriandre vietnamienne est une persicaire ou renouée, genre très répandu de la famille des polygonacées, comme le sarrazin ou l’oseille rumex, la rhubarbe, la renouée des oiseaux une adventice, et des envahissantes importées en Europe, comme la Renouée de Sakhaline ou de Corée, et les falopes grimpantes et envahissantes.
Chez l’être humain, quand le gène qui contrôle la sensibilité des récepteurs olfactifs et gustatifs aux aldéhydes ( un des composants chimiques de la coriandre) est surexprimé, le goût perçu ne plaît pas…
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Merci beaucoup pour cet article très intéressant. Je ne connaissais pas la coriandre mexicaine et vous m’avez donné envie d’essayer ?
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Je me suis empressée d’aller sur le site de Richters pour me procurer des semences, mais je me suis un peu égarée sur le site, finalement la facture s’est élevée à plus de 50$… ????
Trop de choix!