Curieux arbuste à gros bourgeons!
Galle en artichaut du saule. Photo: Geneviève
Par Larry Hodgson
Question : Cet arbuste à gros bourgeons est apparu spontanément sur mon terrain, dans un endroit où le sol est humide, mais assez bien drainé, en zone inondable au printemps. J’aimerais bien pouvoir l’identifier, pourriez-vous SVP m’aider?
Geneviève
Réponse : C’est un saule. Probablement un saule discolore (Salix discolor), mais l’identification exacte des saules est complexe. Cependant, le «gros bourgeon» que vous montrez dans votre photo peut facilement vous faire douter de mon identification. Après tout, les bourgeons des saules sont minuscules: jamais ils ne produisent des excroissances semblables par eux-mêmes.
Souvent, les gens prennent une telle plante pour un rhododendron, un magnolia ou une autre plante qui produit de très grands boutons floraux, qui aurait poussée spontanément dans leur entourage, et ils s’attendent alors à une floraison voyante au printemps suivant. Toutefois, la floraison ne viendra jamais.
D’autres prennent le bourgeon pour un fruit, mais ce n’est pas un fruit non plus. Le «fruit» des saules est une minuscule capsule qui libère des graines enrobées de mousse blanche, pas un bourgeon massif de 5 à 10 cm de longueur.
Et encore moins une pomme de pin (une autre idée erronée, même s’il ressemble à une pomme de pin), puisqu’il ne pousse même pas sur un conifère, mais sur un arbuste à feuilles larges.
Il s’agit, en fait, d’une galle provoquée par un petit insecte.
On appelle cette excroissance curieuse la galle en artichaut du saule, car on ne la trouve que sur les saules (Salix spp.). D’ailleurs, presque toute espèce de saule peut en porter.
La galle est provoquée par la cécidomyie strobilaire (Rabdophaga strobiloides), un minuscule moucheron d’à peine 3 mm de longueur, courant presque partout dans l’hémisphère Nord.
Typiquement, à la fin du printemps (fin d’avril ou mai), la femelle sort de la galle fabriquée l’année précédente, maintenant sèche et brune, et pond un œuf dans le bourgeon terminal d’une tige de saule. Quand la larve, un petit asticot rose, émerge quelques jours plus tard, elle émet un produit chimique qui provoque l’arrêt de l’élongation normale de la tige. Ainsi, les 30 à 60 feuilles qui devaient se former bien espacées tout le long de la tige à venir s’imbriquent plutôt les unes dans les autres, formant une galle rappelant une pomme de pin (ou un artichaut, d’après le nom de la galle) dans laquelle la larve du moucheron peut se nourrir.
La galle est vert pâle l’été, mais devient marron à l’automne et conserve cette coloration l’hiver.
Il n’y a qu’une seule larve de moucheron par galle, mais plusieurs autres insectes profitent de l’abri formé par la galle pour y élire domicile. Ainsi, si vous la coupez en deux, vous risquez d’y trouver plusieurs larves et insectes, dont peut-être des prédateurs de la larve de la cécidomyie. Par exemple, une minuscule guêpe injecte son œuf dans la larve et sa nymphe la mange de l’intérieur… oui, comme dans le film Alien, le huitième passager! Dans la nature, il y a rarement plus d’une galle sur quatre qui réussit à produire une cécidomyie adulte.
D’autres galles de saule
Les saules semblent particulièrement sujets aux insectes gallicoles et plusieurs y produisent des galles : sur les feuilles, sur les tiges, sur le tronc, etc.
Une autre cécidomyie (Radbophaga rosaria*, syn. Cecidomyia rosaria) provoque une galle assez semblable, mais où certaines feuilles s’ouvrent partiellement, donnant un effet de fleur verte à l’extrémité d’une tige de saule. Ainsi, on l’appelle galle en rosette du saule. Le cycle de vie de cet insecte est similaire à celui de la cécidomyie strobilaire.
*En fait, il y a plusieurs espèces de cécidomyie qui provoquent la galle en rosette du saule, mais la mieux connue est R. rosaria.
Le traitement
La galle en artichaut du saule est plus une curiosité qu’un problème majeur. Même quand un saule en porte plusieurs, cela ne mine pas vraiment sa santé. Ainsi, aucun traitement avec un pesticide n’est nécessaire. Et d’ailleurs, peu de traitements pesticides fonctionneraient, car la larve est bien à l’abri des vaporisations dans sa galle.
Dans la nature, laissez tout simplement les galles sur la plante. L’hiver, les oiseaux, et notamment les mésanges, les visitent et se nourrissent des insectes à l’intérieur.
Dans un jardin, si leur apparence vous dérange, supprimez les galles au sécateur dès que vous les voyez. Ou encore, laissez-les tout l’hiver comme ornementation et mangeoire pour les oiseaux et supprimez-les au printemps, avant que les adultes n’émergent à la fin d’avril ou en mai.
En supprimant et détruisant les galles, vous briserez le cycle de reproduction locale et votre saule sera libre de galles l’été suivant… à moins que d’autres cécidomyies n’arrivent d’ailleurs!
Laisser la nature travailler d’elle même, quel message magique. Un seul petit coup de pouce de temps à autre,
cest absolument ce qu’il faut. Merci, cher philosophe horticole.
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En fait je la trouve plutôt sympa cette galle. Si ce n´est toxique pour les oiseaux s´en nourrissant l´hiver, pourquoi ne pas lui ajouter une touche de couleur très voyante ? Amusant de voir le regard de la famille et des amis à propos de cette soudaine apparition. Et comme la santé de l´arbre n´est pas remise en question…
Merci à Geneviève pour cette curiosité.
Excellente idée!
Il y a toutes sortes de gales… Certains glands de chêne se transforment en boule bien ronde et lisse hormis quelques piquants… J’ai récemment découvert une gale sur un rosier sauvage, on dirait du corail rouge, magnifique !
https://www.bing.com/images/search?q=galle%20rosier&qs=SC&form=QBIR&sp=2&pq=gale%20rosi&sc=8-9&sk=SC1&cvid=6D4EE3E04F8840CFA3B4B5A811895EA4&first=1&tsc=ImageBasicHover
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