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Abeilles prisonnières d’une fleur de courge

Par Larry Hodgson

Commentaire : Je viens de sauver la vie de trois abeilles qui étaient restées prisonnières quand une fleur femelle de courge s’est refermée sur elles. Je les ai découvertes quand j’ai ouvert la fleur afin de la féconder avec une fleur mâle.

René Gauthier

Réponse: En fait, vous avez probablement perturbé le sommeil de quelques abeilles des courges très fatiguées ! On ne peut que vous remercier d’avoir tenté d’aider des insectes pollinisateurs en détresse, mais… ce n’était pas nécessaire!

Contrairement aux abeilles domestiques (abeilles à miel), les abeilles des courges sont solitaires et n’ont pas de ruche commune où séjourner la nuit. Ainsi, les mâles, ainsi que les femelles non accouplées, passent la nuit dans des fleurs de courges dont les pétales se fanent pour les recouvrir, puis se libèrent le matin. (Les femelles fécondées passent leurs nuits dans les tunnels qu’elles creusent pour la ponte.) Si vous tenez délicatement une fleur de courge fanée entre vos doigts en fin d’après-midi ou en soirée, vous pouvez souvent sentir ou entendre une ou deux abeilles bourdonner à l’intérieur.

Ne vous inquiétez pas de vous trouver si près d’une abeille des courges! Vous ne risquez pas de vous faire piquer : les abeilles de cette espèce n’ont pas d’aiguillon !

Abeilles des courges: l’abeille la plus utile dont vous n’avez jamais entendu parler !

En Amérique du Nord et du Sud, les abeilles des courges sont de loin les pollinisateurs les plus efficaces des courges (Curcubita spp.: courgettes, citrouilles, pâtissons, potimarrons, Hubbard, etc.). Il y a quand même les bourdons (Bombus spp.) qui pollinisent secondairement des fleurs de courges et ils sont quand même les principaux pollinisateurs des courges en Europe où il n’y a pas d’abeilles des courges. Les abeilles domestiques (Apis mellifera), cependant, sont de piètres pollinisateurs des courges : elles ne trouvent pas leur pollen collant et épineux à leur goût.

Il existe en fait deux genres de ces abeilles hautement spécialisées, Xenoglossa spp. et Peponapis spp., pour un total d’environ 20 espèces. L’abeille des courges pruinée (Peponapis pruinosa), celle utilisée comme exemple dans la suite de cet article, est cependant de loin l’espèce la plus répandue, ayant migré vers le nord depuis son foyer d’origine au Mexique jusqu’au Canada, suivant leur seule et unique source de nourriture, la fleur de courge, et ce, à mesure que les peuples autochtones, puis les agriculteurs modernes, ont adapté la culture de la courge aux climats septentrionaux au cours des siècles.

Abeille des courges femelle
Abeille des courges femelle avec ses pattes arrière poilues. Photo : USGS Bee Inventory and Monitoring Lab

Les abeilles des courges ressemblent vaguement à des abeilles domestiques (elles ont à peu près la même taille et ont une coloration similaire), mais elles ne portent pas le panier à pollen jaune sur leurs pattes arrière comme l’abeille domestique. Au lieu de cela, ce sont les pattes arrière très velues de l’abeille femelle qui font le travail de ramasser le pollen.

Les mâles et les femelles passent le gros de leur temps dans et autour des fleurs de courge, et ce, de tôt le matin au début de l’après-midi. Ils s’y accouplent même! Les mâles et aussi les femelles vierges dorment ensuite dans la dernière fleur qu’ils ont visitée, qui se referme autour d’eux en se fanant (les fleurs de courge durent moins d’une journée). De leur côté, les femelles fécondées s’envolent vers le nid qu’elles construisent ou ont construit, généralement dans les environs de la plantation de courges, d’ailleurs souvent à la base-même d’un plant de courge.

Le nid prend la forme d’un tunnel dans le sol avec une seule entrée de la taille d’un crayon. Il atteint de 12 à 45 cm de profondeur, avec 4 ou 5 tunnels latéraux dans lesquels la femelle pond ses œufs. Ensuite, elle dépose du pollen et du nectar dans le nid pour nourrir ses larves. Bien que ces abeilles soient solitaires (les femelles ne partagent pas de nids), elles ne sont pas territoriales et il peut donc y avoir plusieurs nids à proximité.

Les larves demeurent dans leur tunnel dans le sol, se nourrissant du pollen que leur mère leur a préparé, puis y deviennent des pupes, restant dans cet état jusqu’à l’été suivant. Elles sont très vulnérables à de nombreuses pratiques de jardinage qui perturbent le sol, telles que le binage et le labourage. La culture sans labour ou encore seulement un labourage très superficiel (à une profondeur de moins de 10 cm) aideront à les préserver. De même, si vous souhaitez contribuer à la sauvegarde des abeilles des courges, évitez l’usage excessif d’insecticides, notamment les néonicotinoïdes.

La nouvelle génération d’abeilles apparaît au début de l’été (juillet dans les régions nordiques) et le cycle recommence.


Les abeilles des courges : si utiles, mais si peu connues !

Étiquettes + Peponapis pruinosa, Abeille des courges


commentaire sur "Abeilles prisonnières d’une fleur de courge"

  1. Magne Gisèle dit :

    Merci au jardinier paresseux de ces réponses toujours très renseignées et toujours positives: pas de critiques acerbes mais au contraire des encouragements

  2. Agnès SLACIK dit :

    bonjour Larry, je suis très surprise que vous disiez qu’il n’y a pas “d’abeilles des courges” en Europe, mon jardin en est plein 😉 je vous remercie de tout coeur pour ces petits billets que vous égrenez au fil des jours, ils sont passionnants. Gratitude. Merveilleuse journée à vous, Agnès

    • J.J. dit :

      Agnès Slacik @ “bonjour Larry, je suis très surprise que vous disiez qu’il n’y a pas « d’abeilles des courges » en Europe, mon jardin en est plein “.
      Elles ont du oublier de se signaler aux services de l’Émigration !?

      Attendu que la culture des courges et courgettes s’amplifie considérablement en Europe, en particulier auprès des jardiniers amateurs, il n’est pas vraiment étonnant de voir apparaître leurs insectes “commensaux”.

      Encore un exemple, positif, celui-ci, de la facilité avec laquelle circulent plantes et animaux, parfois malheureusement indésirables, comme le frelon asiatique destructeur d’abeilles.

      • D’après mes recherches, il n’y a pas d’abeilles des courges en Europe (Xenoglossa spp. et Peponapis spp.). Il y a d’autres abeilles, mais pas ces deux genres. Mais je n’ai pas de preuves.

      • Anonyme dit :

        JJ j’ai bien aimé les “abeilles qui ont oublié de se signaler aux services de l’émigration”, bonne journée

    • Beaucoup d’abeilles peuvent visiter les fleurs de courge, mais les abeilles des courges consistent en 2 genres uniquement trouvées en Amérique (Xenoglossa spp. et Peponapis spp.). Je ne vois aucun rapport qu’une de ces espèces soit présente en France.

  3. Francine dit :

    Merci pour cet article intéressant! Les insectes ne cessent jamais de nous étonner par leurs façons étranges de s’adapter et survivre.

  4. Anonyme dit :

    Merci à vous !

    Je viens d apprendre quelque chose. J ai observé avec mes petits enfants une abeille qui creusait un trou près de ma piscine dans du sable. Plusieurs entrées étaient dans un périmètre de 12″…

  5. Diane dit :

    Vous êtes toujours aussi intéressant et vos articles sont très instructifs et pertinents! Merci beaucoup!

  6. llenya20Line dit :

    Incroyablement intéressant! Je n’en avais aucune idée. Merci pour toutes ces informations! ??

  7. Zofia Walnik dit :

    Vos articles sont très intéressants. Merci beaucoup!

  8. Anonyme dit :

    Très intéressant et instructif à la fois. Je vous apprécie beaucoup car vous êtes une source de connaissances et aime que vous acceptiez de nous les partager.

  9. Clo dit :

    Merci j’en apprends tous les jours.

  10. Louise dit :

    Super intéressant !!!! Merci beaucoup ?

  11. valukhova dit :

    Merci Larry, en fait chez nous, à 1000 mètres voire plus, je n’ai jamais vu d’abeilles des courges. Et puis, même les autres se font bien plus rares. Sauf si l’on a vraiment des rûches. Ce n’est pas le cas, j’ai trop de boulot et puis je vieillis aussi ! Merci pour tout le québécois !!

  12. Denis dit :

    Merci pour cet article. Les fleurs de mes potimarrons et de mes courgettes (exubérants cette année avec la pluie de juillet ici dans les Vosges) sont toutes visitées intensément par des abeilles (de courges ?) au point que c’est presque inquiétant tant le bourdonnement est intense. Je n’ai ici d’équivalent que les fleurs de pavots où les bourdons – que j’aime bien – arrivent à chasser les abeilles tant ils s’enivrent du pollen et nectar de ces fleurs.

    • valukhova dit :

      Réponse à Denis et tous les autres sur le blog de Larry que j’adore consulter. On apprend beaucoup de choses, même si l’on ne vit pas sur le même continent. Et c’est cela qui est merveilleux. Et vous, Denis, dans les Vosges que San Antonio décrivait comme la “ligne bleu des Vosges”… c’est heureux de savoir qu’il y a des gens qui sont “encore capables” d’observer le comportement des “petits soldats de la Nature”… Persistons dans ce sens, à contre-sens des grands destructeurs quasi criminels de ce qui prouve l’existence d’une “supériorité absolue”….

  13. johanne vidal dit :

    Quelles sont donc les abeilles qui pondent dans les nichoirs de type silo ? Dois-je les nettoyer à l’automne? J’ai aussi des abeilles qui grugent le bois de ma cloture, pourquoi?

    • Il y a environ 300 espèces d’abeilles au Québec, encore plus en France. La plupart sont solitaires et préparent des nids de forme différentes. Donc, l’identification est difficile. Les abeilles charpentières percent des tunnels dans le bois pour élever leurs jeunes.

  14. Mahiloulou dit :

    Si on enlève le plant de courges à la fin de l’été, est-ce qu’on risque de leur nuire?

  15. Corinne dit :

    A la lecture de votre article sur les guêpes fouisseuses, j’ai eu peur de me faire piquer en voyant plein de petits trous à un endroit dénudé du jardin que je voulais travailler (niveler le sol et ressemer du gazon et trèfle). Mais je ne voyais aucune activité autour de ces trous … Maintenant, je crains de déranger des abeilles de courges, si utiles. Sauf que ces trous sont un peu loin de mes caisses de courges (où le sol pourrait être trop meuble pour qu’elles y fassent leur nid)… je verrai.

    La ligne bleue des Vosges me manque terriblement parfois, le Ballon d’Alsace et ses myrtilles. Y en a-t-il encore ? Cet hiver je ressortirai mes San-A 😉

  16. Françoise C dit :

    Wow ! J’observais depuis quelques années ces petites abeilles qui semblaient dormir dans mes fleurs de courges. Je suis émerveillée par la beauté et par l’intelligence de la nature. Nous sommes interreliés !

  17. Jean Denis Brisson dit :

    Pour le guêpes ou abeilles fouisseuses, il y a un guide qui en décrit les groupes et leur comportement – Brisson, J. D., M. Lajoie, J. Allard & A. Jacob-Remacle. 1995. Les insectes pollinisateurs : des alliés à protéger. Les Éditions Versicolores, Collection Fleurs Plantes & Jardins, Collection No 3, 48 p. – https://www.agrireseau.net/agroenvironnement/documents/79851/les-insectes-pollinisateurs-des-allies-a-proteger-comment-mieux-les-reconnaitre-pour-mieux-les-proteger-52-mo. .

  18. ryndam1962 dit :

    bonjour moi souvent sur mon balcon des gros bourdons dorment presque a l’interieur de mes fleurs je les aime et jamais je ne leur ferait du mal bienvenus sur mon balcon et merci a vous gentil jardinier pas si paresseux que ça

  19. Daniel Fantino dit :

    Merci Larry. J´ignorais totalement cette espèce.
    Mon ami, vous manquez un printemps hâtif. Vous auriez tellement aimé. Toutes mes salutations “d´en bas” .

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