Par Larry Hodgson
Si vous êtes assez nouveau dans la culture de légumes, vous trouverez peut-être un peu exaspérant le développement des cucurbitacées (concombres, courges, melons, pastèques, etc.). C’est que les premières fleurs qui apparaissent sont des mâles. Que des mâles! Elles s’ouvrent magnifiquement, laissant espérer des fruits à venir, puis tombent sans rien produire. C’est frustrant!
Mais ne vous inquiétez pas : tout cela fait partie du plan de mère Nature.
La stratégie «Mâles d’abord»
En effet, la production de fleurs mâles nécessite relativement peu d’énergie, de sorte que la plante peut en générer abondamment dès le début de la saison. Pourquoi avant l’apparition des fleurs femelles? Afin de créer une habitude chez les abeilles visiteuses, car les fleurs de cucurbitacées ne sont pas si attrayantes pour la plupart des pollinisateurs. Donc, la plante essaie de les fidéliser.
En produisant des fleurs mâles en abondance croissante dès le début de la saison et toujours des fleurs fraîches chaque jour, la plante s’assure que les pollinisateurs prennent l’habitude d’inclure la visite de ses fleurs dans leur routine quotidienne. Et qu’ils viennent les visiter tôt dans la journée aussi, puisque les fleurs de cucurbitacées durent moins d’une journée; elles se sont déjà fanées en fin d’après-midi.
Ainsi, lorsque les fleurs femelles commenceront enfin à apparaître (vous les reconnaîtrez à l’ovaire à leur base qui a la forme du fruit à venir), les abeilles pollinisatrices auront pris l’habitude de visiter quotidiennement le carré de cucurbitacées et seront moins susceptibles de rechigner à visiter les fleurs femelles, qui sont moins attractives que les fleurs mâles, car elles n’offrent que du nectar aux abeilles (les fleurs mâles leur présentent à la fois du nectar et du pollen).
Alors, maintenant vous savez la raison du retard !
Le Cucamelon : pas comme les autres
Ce qui précède s’applique à la plupart des cucurbitacées : notamment les courges de toutes sortes (et cela inclut les citrouilles, les courgettes, les pâtissons, les potimarrons et bien d’autres), les concombres, les pastèques et les melons. Curieusement, cependant, il y a au moins une cucurbitacée qui fait les choses différemment.
Le cucamelon (Melothria scabra), aussi appelé melon de souris et concombre du Mexique, produit d’abord des fleurs femelles. Ce n’est qu’après quelques semaines de floraison quotidienne de fleurs femelles que les premières fleurs mâles apparaissent… suivies, bien sûr, des premiers fruits mûrs, car à partir de ce moment, la pollinisation devient possible.
Pourquoi inverse-t-il la stratégie de pollinisation millénaire des autres cucurbitacées? Je ne sais pas, mais c’est comme ça que ça fonctionne.
En Amérique du Nord et du Sud, les principaux pollinisateurs des fleurs de courge (Cucurbita pepo, C. moschata et autres) sont des abeilles solitaires appelées abeilles des citrouilles (Peponapis spp. et Xenoglossa spp.). Le deuxième pollinisateur majeur, c’est le bourdon. L’abeille domestique n’est pas une très bonne pollinisatrice des courges: apparemment, elle trouve leur pollen trop lourd, collant et épineux.
Les différentes courges sont toutes originaires du Nouveau Monde et les abeilles des citrouilles ont co-évolué avec elles. En conséquence, on ne trouve aucune espèce d’abeille des citrouilles en Eurasie, Afrique ou Australie. Dans ces régions, ce sont d’autres abeilles (habituellement des bourdons) qui effectuent la pollinisation des fleurs de courge à leur place.
Trois faits surprenants au sujet des abeilles des citrouilles
- Elles n’ont pas de dard et donc ne piquent pas.
- Elles passent souvent la nuit à l’intérieur des fleurs de courge fanées.
- Elles sont spécifiques aux diverses courges et ne visitent pas les fleurs d’autres plantes, même pas d’autres cucurbitacées comme les pastèques, les concombres et les melons.

