Les vers sauteurs: la prochaine catastrophe écologique?
Dans le récent blogue Quand les vers de terre envahissent les forêts nord-américaines, j’ai écrit au sujet du problème des vers de terre européens qui envahissent l’Amérique du Nord et des dommages qu’ils causent aux forêts et aux prairies, mais ce n’est peut-être que le début. Les écologistes du secteur sont encore plus préoccupés par un autre envahissement déjà en cours: celui de vers non pas européens, mais asiatiques, appelés vers sauteurs, surtout Amynthas agrestis, A. tokioensis et Metaphire hilgendorfi.
Ces vers auraient été introduits accidentellement dans le sud-est des États-Unis au 19e siècle, probablement par le biais de matériel de pépinière contaminé importé du Japon ou de la Corée. Mais leur propagation vers le Nord serait récente, au cours des 15 dernières années. Ils sont déjà apparus dans tous les États du nord-est des États-Unis et auraient récemment sauté la frontière jusqu’à l’Ontario (un seul cas noté), en plus d’avoir traversé le Midwest américain avec des populations çà et là. On en trouve même de l’autre côté des Rocheuses, en Oregon. Notez que leur présence est encore très sporadique sur ce vaste territoire, mais augmente rapidement.
On les trouve en Europe aussi, mais on en fait jusqu’ici peu de cas… pour l’instant. (C’est souvent comme cela au début d’une épidémie: qui ne sait rien ne se doute de rien, comme on dit!) Et des espèces plus méridionales comme A. corticis et A. gracilis ont été accidentellement introduites un peu partout dans les tropiques et subtropiques.
Que sont les vers sauteurs asiatiques?
Les vers sauteurs sont d’assez gros vers de terre, mesurant jusqu’à 20 cm de long, ressemblant beaucoup au ver de terre commun ou lombric (Lombricus terrestris), mais avec une habitude surprenante: ils sautent et se débattent lorsqu’ils sont dérangés! Ils sont très animés pour des vers de terre. Leurs mouvements ultérieurs sont plus comme ceux d’un serpent ou d’une anguille qu’un lombric, car ils ondulent en sinuant.
Comment les reconnaître
Si le fait de sauter et de se débattre comme un beau diable ne suffit pas pour assurer la distinction entre le ver sauteur et le lombric commun, regardez son clitellum, cet anneau que les vers portent autour de leur corps. Celui du ver sauteur est lisse et de couleur claire, parfois presque blanc, pas aussi rose que celui du lombric. Aussi, il est au ras de la peau plutôt que gonflé et rainuré. C’est un ver assez foncé, de couleur presque grise, avec une peau lisse et brillante.
Quand on le dérange, il a tendance à essayer de se sauver en rampant plutôt qu’en creusant.
Autre détail, il relâche parfois sa queue comme mécanisme de défense pour échapper aux prédateurs.
Le ver sauteur ne creuse pas de tunnels, ni ne se nourrit sous terre, mais reste dans les premiers centimètres de terre où il se nourrit de litière de feuilles. Au lieu de laisser des déjections en forme de turricules comme un lombric, il recouvre le sol de déjections sèches et granuleuses qui ressemblent à du marc de café sec. Cette couche empêche souvent les graines de germer et peut aussi déstabiliser le sol qui glisse quand on le frôle.
Notez qu’il est plus facile de reconnaître les vers sauteurs à la fin août et en septembre, lorsqu’ils ont atteint leur pleine taille.
Cycle de la vie
Contrairement aux lombrics, qui peuvent vivre 6 ans ou plus, les vers sauteurs ont un cycle de vie annuel. Les adultes meurent à la fin de l’automne, mais laissent sur le sol de minuscules cocons d’œufs difficiles à repérer. Ils ont la capacité de survivre à des températures aussi froides que -40 °C. Les jeunes croissent rapidement au printemps et éliminent souvent les autres vers de terre du secteur par leur concurrence et leur agressivité.
Hermaphrodites, ils peuvent se reproduire sexuellement, mais aussi par parthénogenèse, produisant des œufs sans fécondation. Ainsi, il n’en faut donc qu’un pour démarrer une nouvelle colonie. En région froide, il n’y a qu’une génération par année.
Une lueur d’espoir est qu’ils semblent préférer les sols neutres et alcalins aux sols acides, ce qui pourrait aider à ralentir leur invasion dans certaines régions.
?? Remarque: À cause du risque d’envahissement causé par les vers sauteurs, certains états américains ont déclaré illégale leur possession dans l’intention de les vendre, les importer, les acheter, les transporter ou les introduire. C’est peut-être une loi à adopter ailleurs aussi.
Dommages
Les vers sauteurs vivent en populations plus concentrées que les vers de terre ordinaires et sont plus polyvalents dans leur choix de nourriture. Ainsi, ils consomment la couche de litière forestière à grande vitesse, la réduisant de 95% et laissant le sol essentiellement nu. La dégradation de la litière est si rapide que les nutriments libérés ne peuvent pas toujours être absorbés par le sol et les racines des plantes. On peut comparer cela à un engrais à libération rapide au lieu d’un engrais à libération lente. Cela entraîne l’appauvrissement des couches supérieures du sol, le compactage des couches inférieures et la pollution par l’azote et le phosphore des plans d’eau à proximité.
Les vers sauteurs mangent aussi les graines de plusieurs plantes et épuisent ainsi la réserve semencière du sol.
En conséquence, le sol forestier devient dénudé et pauvre en espèces végétales. Les espèces forestières indigènes, dépendantes d’une litière de feuilles épaisse, sont vite éliminées, principalement remplacées par de mauvaises herbes exotiques envahissantes. Notez aussi que les vers sauteurs semblent aussi dommageables dans les prairies que dans les environnements forestiers.
Les animaux indigènes sont également affectés. Les salamandres et de nombreuses espèces d’oiseaux ne mangent pas ces vers. On voit souvent les oiseaux les recracher ou sinon, après un essai initial, ne plus vouloir y goûter une seconde fois. Les oiseaux nichant au sol n’arrivent pas à maintenir leur couvée en leur présence.
Les taupes, par contre, semblent beaucoup les aimer et peuvent alors aider à réduire leur nombre.
Comment éviter les vers sauteurs
On pense que la diffusion actuelle des vers sauteurs dans le nord-est de l’Amérique du Nord a été en grande partie provoquée par le transport de matériel de pépinière contaminé et aussi par leur utilisation comme appât de pêche. Pour cette raison, les méthodes de contrôle suivantes peuvent être utiles:
- Vérifiez toujours pour la présence de vers lors du déplacement des plantes et notamment à l’achat. Préférez des végétaux à racines nues si possible.
- Nettoyez les véhicules, l’équipement personnel (y compris les bottes et les chaussures) et les outils de jardinage, le compost, la terre et tout débris avant d’aller à de nouveaux sites.
- N’achetez pas et n’utilisez pas des vers sauteurs comme appât de pêche ni dans le vermicompostage ou le jardinage.
- N’achetez que du compost qui a été chauffé à des températures suffisamment élevées et pendant une durée appropriée pour tuer les vers.
- Jetez les vers vivants à la poubelle ou placez-les dans un sac et laissez-les au soleil pendant au moins 10 minutes. Ensuite, jetez le sac.
- Vous pouvez vérifier la présence de vers de terre sur votre propriété en utilisant une solution de moutarde. (Ne vous inquiétez pas, elle est inoffensive pour les plantes!) Mélangez 80 ml de graines de moutarde moulue à 4 litres d’eau et versez la solution lentement sur le sol. Cela poussera tous les vers à remonter à la surface. Si vous découvrez la présence de vers sauteurs, évitez par la suite de déplacer les plantes ou le sol de votre jardin.
Comment contrôler les vers sauteurs
Il n’existe actuellement aucune méthode de contrôle efficace contre les vers sauteurs, bien que des études soient en cours sur d’éventuels répulsifs et pesticides. Par exemple, asperger le sol de produits contenant des saponines naturelles, comme la farine de graines d’arbre à thé (Leptospermum scoparium). Et le brûlage dirigé fait en novembre pourrait détruire les cocons présents dans le sol.
Actuellement, toutefois, le seul contrôle considéré efficace est d’empêcher leur distribution.
Les vers sauteurs sont présents en France et depuis peu en Ontario, mais pas encore au Québec ou au Nouveau-Brunswick, ou du moins, on le croit, mais leur présence juste de l’autre côté de la frontière américaine est très inquiétante. Faites très attention quand vous achetez des plantes dans les pépinières du secteur!
Voici un autre article au sujet des vers sauteurs: Les vers de terre exotiques au Québec: état de la situation.
Bonjour le paresseux,
Entre ça et le vers plats, nous voilà mal embarqué…
Question : Dans leur habitat d’origine, en Asie, comment le sol est-il maintenu en bon état, vu que ce vers ne mélange pas les différentes couches de terre ?
Évidemment, dans leur milieu naturel, il y a sûrement beaucoup d’autres facteurs impliqués, dont des prédateurs efficaces qui réduisent leur nombre, des plantes très adaptées, etc. Et un sol aux strates peu différenciées, à l’européenne, n’est pas la norme mondialement et les végétaux locaux semblent bien s’y accommoder.
[…] Si cet article fait réfléchir, sachez qu’un nouveau type de ver envahissant, encore plus dommageable, menace maintenant nos forêts: le ver sauteur asiatique. Voici un article à son sujet: Les vers sauteurs: la prochaine catastrophe écologique? […]
Bonjour,
peut-être que je me trompe, je vais devoir vérifier cet été, mais je crois que j’en ai dans mon potager à Montréal. Des vers ont transformé en moins de deux mon paillis et le compost et ont recouvert le sol de déjection ressemblant à du marc de café épais comme décris. Impossible de semer là-dedans.
Oui, vérifiez cela l’été prochain. Et avertissez Dr Jean-David Moore ici: recherche.forestiere@mffp.gouv.qc.ca si vous penser en avoir.
Ça fait froid dans le dos ?
Je connais quelqu’un qui à un problème avec les vers sa pelouse est toute baiser ils font des trous partout ils sortes quand il pleut. Quoi FAIRE?
Ce sont des vers de terre normaux. Et les “dégâts” sont normaux. Sa terre est trop compacté. Il lui faudrait le terreauter avec du compost. https://jardinierparesseux.com/2019/05/14/terreautez-pour-avoir-un-beau-gazon/
je suis navre de vous apprendre que aujourd’hui j’aivue un vers sauteur dans la region de québec plus précisement au bas-st laurent il correspond à la même description que ce que vous avez affirmer il est pareil comme un vers et saute comme si il avait peur e en plus il était dans les herbe haute eum je m’inquite serieusement vue que vous avez dit qu’il n’y en a pas encore au bas st laurent
?