Comment les chênes et les hêtres contrôlent leurs prédateurs
Certaines années, il y trop de glands pour les écureuils; d’autres, pas assez… et c’est voulu ainsi! Ill.:: www.sccpre.cat, montage: jardinierparesseux.com
Les écureuils, les geais et d’autres animaux mangeurs de noix n’aiment rien de mieux que de s’engraisser de glands, de châtaignes et de faînes en prévision de l’hiver. Ils sont riches en huiles, en protéines et en glucides, ainsi qu’en calcium, phosphore, potassium et vitamine niacine. Non seulement les mangeurs de noix s’en gavent, mais ils enterrent d’innombrables noix un peu partout comme réserves pour l’hiver, mais alors, en oublient une partie ou en plantent plus qu’ils ne peuvent en consommer. Ainsi, ils plantent les futures forêts de hêtres, de châtaigniers et de chênes, au grand bénéfice de ces arbres.
Contrôle de la population
Mais les arbres producteurs de noix sont plus astucieux que vous ne le pensez.
S’ils produisaient un nombre égal de noix chaque année, la population d’écureuils et de geais resterait élevée et ceux-ci consommeraient la plupart des noix tombées. Au lieu de cela, ces arbres ont des années de production massive synchrone appelées années semencières ou «mastings» (on les appelle «glandées» s’il ne s’agit que de chênes et «grandes faînées» quand il ne s’agit que de hêtres). Au cours de ces années, les arbres produisent d’énormes quantités de noix, bien plus que ce que leurs prédateurs ne pourraient manger, mais ces années sont suivies de plusieurs années d’affilée de faible production. Ces «années maigres» maintiennent la population d’écureuils et de geais à un niveau relativement faible.
La fréquence de ces mastings varie beaucoup, d’aussi peu que trois ans à jusqu’à 15 ans.
Voici comment cela fonctionne:
Lorsqu’un masting survient et que la nourriture est abondante, il n’y a pas beaucoup de prédateurs dans les environs puisqu’ils ont traversé plusieurs hivers difficiles auparavant, ce qui a maintenu leur population basse. L’hiver suivant un masting, où les provisions sont abondantes, beaucoup plus de prédateurs survivent et alors les forêts regorgent d’écureuils et de geais. Mais le deuxième hiver suivant le masting, après une récolte de noix maigre, laissant peu à manger, moins d’écureuils et de geais survivent. Et plusieurs années consécutives de faible production de noix, avec juste assez de noix pour que ces animaux ne disparaissent pas (après tout, ils plantent les futures générations d’arbres!), permettent de maintenir une population faible, mais fiable.
Aussi, les années creuses, c’est-à-dire lorsque peu de noix sont produites, permettent aux arbres à noix de stocker plus d’énergie pour la prochaine année de production massive.
La coordination est la clé
Bien sûr, cela ne fonctionnerait pas si chaque chêne, châtaignier et hêtre de la forêt suivait son propre programme. Il y aurait alors toujours des arbres produisant une bonne récolte chaque année et la population de mangeurs de noix resterait élevée. Au lieu de cela, les arbres semblent collaborer dans une région donnée pour coordonner leur production. Ainsi, presque tous les arbres à noix d’une région donnée auront leur masting en même temps, puis auront plusieurs années coordonnées de faible production.
Comment les arbres coordonnent-ils leurs années de production massive? Cela reste un mystère. Peut-être y a-t-il un signal climatique quelconque qui indique qu’une année donnée serait une bonne année pour un masting. D’autres théorisent que les arbres communiquent les uns avec les autres, pas avec des mots, mais en envoyant des signaux d’arbre en arbre par leurs racines. («Hé, les gars! Cela fait six saisons que nous nous reposons, accumulant notre énergie. Pourquoi ne faisons-nous pas de cette année une saison exceptionnelle?»)
Quelle que soit la raison, les forestiers (et les cueilleurs de noix) remarquent ces années de production massive suivies de disettes terribles depuis des générations, mais ce n’est que depuis peu que les experts saisissent ce qui les a motivées: une surproduction suivie d’une sous-production afin de contrôler les prédateurs.
Ne présumez jamais qu’un arbre ne réagit pas à l’environnement qui l’entoure: il est beaucoup plus alerte et réactif qu’on ne le soupçonne!
D’après vous cette année est-ce qu’ils se sont donné le mot. J’habite dans votre région et j’ai énormément de noix cette année comparé aux années passées assez que j’ai pensé acheté un ramasse noix mais ce n’est pas donné.
Sans doute que oui, mais dans une région tout à côté, ça peut être une année de disette!
En Mauricie près de Lanaudière, grosse année aussi pour les chênes et les hêtres. Au point où marcher sous mon chêne, c’est comme marcher sur un sol où on aurait échappé plein plein de billes! Merci de l’explication, car j’ai été étonnée de la quantité cette année!
Cette semaine j’ai vu un film intitulé ‘L’intelligence des arbres’. On y explique comment les arbres communiquent entre eux et comment ils stockent des données en mémoire. Cela fait beaucoup réfléchir sur les gestes que nous posons en forêt.
Très intéressant, merci! Mais qu’en est-il des noyers ou châtaigners ‘cultivés’, c’est-à-dire isolés dans un jardin ou un verger, et de ceux d’une variété non sauvage? Chez moi, il y a des forêts de hêtres mais pas de noyers. Et j’ai deux noyers dans mon jardin, de deux variétés différentes. Effectivement il y a des années ‘sans’ et des années ‘avec’, mais c’est plutôt un an sur deux. Avant de lire votre article, je mettais toujours cela sur le compte de la météo ou de l’alternance que l’on constate sur certains fruitiers (comme les pruniers).
Je me suis limité aux chênes, aux châtaigniers et aux hêtres parce que j’avais l’information nécessaire. Je n’avais pas l’info sur les noyers. Je soupçonne que cela doit être le cas dans une forêt naturelle où les noyers sont présents. Das une plantation, avec des arbres de différentes origines, il n’est pas certain que cela fonctionne.
[…] alors là beaucoup de rejetons. Ce que je vous montre là est le résultat d’une glandée, comme l’a déjà expliqué Larry Hodgson. C’est assez effarant, et suffisant pour rendre le passage sous le grand chêne, pieds nus, […]
Dans mon chêne cette année j’ai des grosses boules blanches et un peu rose qui se sont formées après la floraison. Nous les avons coupés de peur que ce soit des chenilles. Cette boule n’était pas mole et plutôt dure . Merci de m’aider . J’ai des photos de ce phénomène. Certaines boules étaient grosses comme des balles de tennis
https://jardinierparesseux.com/2016/06/25/les-galles-bien-visibles-mais-rarement-nuisibles/
cette année en 2021 dans ma région Montérégie les noix sont en abondance, tellement que j’ai rarement vue comparativement aux années antérieures
Les écureuils vont être heureux!