Comment obtenons-nous des fruits sans pépins?
Par Christine Bradish, Ashland Inc.
Il est fort possible que vous ayez déjà vu une publicité pour «23 and Me» faisant la promotion d’un test ADN pour déterminer l’origine de vos ancêtres. Le «23» représente l’ADN chez l’être humain, contenu dans 23 chromosomes. En fait, cependant, les humains ont 2 paires de chromosomes, l’une de leur mère et l’autre de leur père, donc 46 chromosomes. À quelques exceptions près, les animaux aussi possèdent 2 paires de chromosomes. Nous disons qu’ils sont diploïdes (di = deux, ploïde = paires de chromosomes). La taille de l’animal n’est pas un facteur important: par rapport à l’homme (46 chromosomes), les souris en ont 40, les éléphants 56 et les chiens 78.
Les plantes sont un peu différentes. Oui, la plupart sont diploïdes (ont 2 paires de chromosomes), mais elles peuvent aussi avoir de multiples paires de chromosomes, un état appelé polyploïdie. Beaucoup de nos fruits et légumes préférés sont des polyploïdes. La polyploïdie peut se produire naturellement, où des espèces sauvages «additionnent» leur ADN plutôt que de le combiner. Le blé et les fraises en sont deux bons exemples. Le blé (Triticum aestivum) est un hexaploïde, ce qui signifie qu’il possède 6 paires de chromosomes, alors que le fraisier (Fragaria x ananassa) est un octoploïde avec — vous l’avez deviné — 8 paires!
Les hybrideurs de végétaux développent intentionnellement des polyploïdes présentant des caractéristiques souhaitables, par exemple les pastèques sans pépins.
Le cas de la pastèque
Normalement, les pastèques ou melons d’eau (Citrullus lanatus) sont diploïdes et produisent des pépins fertiles… beaucoup de pépins fertiles. En utilisant des composés chimiques tels que la colchicine, dérivée d’une plante commune de nos jardins, le colchique (Colchicum spp.), les hybrideurs peuvent réussir à doubler le nombre de chromosomes dans une plante, donnant dans ce cas une pastèque tétraploïde (ayant 4 paires de chromosomes) qui est fertile et produit des pépins. Mais quand on croise la pastèque tétraploïde (4 paires de chromosomes) avec une pastèque diploïde standard (2 paires de chromosomes), cela donne des graines de pastèque triploïdes (3 paires de chromosomes).
Ces graines de pastèque triploïdes sont stériles, car vous avez besoin de paires de chromosomes pour former des graines fertiles. C’est pourquoi les animaux et les plantes ont normalement des multiples de 2 chromosomes.
Si vous voulez cultiver vos propres pastèques sans pépins, vous devez planter aussi au moins une pastèque standard (à pépins) dans votre potager pour servir de source de pollen. Curieusement, ce pollen stimule la production de fruits même s’il ne contribue pas à la génétique des fruits produits.
Les semences de pastèque sans pépins sont plus chères, car maintenir des lignées tétraploïdes et produire de pépins triploïdes, un acte qu’il faut répéter annuellement, coûtent très cher.
Les bananes aussi sont des polyploïdes
Mais la pastèque sans pépins n’est pas la plus connue des plantes triploïdes stériles. Cet honneur appartient à la banane (Musa x).
Dans la nuit des temps, bien avant que les humains connaissent quoi que ce soit de la génétique, quelqu’un dans la jungle sud-asiatique a trouvé un bananier sauvage sans graines et l’a reproduit par division. Ce fruitier a fini par gagner le monde tropical tout entier!
Comme vous l’aurez deviné, le bananier sans graines était triploïde, le résultat d’un croisement fortuit entre un bananier sauvage diploïde et un autre qui était tétraploïde.
La prochaine fois que vous mangerez une banane, cherchez les petits points noirs au milieu du fruit: ce sont les graines stériles, tout ce qui reste des grosses graines que les bananes sauvages produisent normalement. Les agriculteurs ne sont pas obligés d’acheter de nouvelles graines de bananier chaque année, car les bananes poussent à partir d’une herbe pérenne géante, presque comme un arbre, qui produit des rejets à son pied, rejets qu’on peut utiliser pour le multiplier la plante.
La polyploïde dans l’hybridation
La polyploïdie est un outil supplémentaire que les scientifiques peuvent utiliser pour se renseigner sur la génétique des plantes cultivées. Les hybrideurs utilisent des méthodes de sélection traditionnelles de végétaux (non, les plantes polyploïdes ne sont pas de OGMs!) pour modifier la polyploïdie afin de produire des cultures améliorées plus rapidement et plus efficacement. C’est une technique très complexe, car la polyploïdie implique qu’il y a beaucoup de chromosomes à gérer, mais c’est un «outil» parmi tant d’autres que les hybrideurs utilisent pour développer des végétaux plus forts, plus résistants et meilleurs au goût!
Ce blogue a écrit pour le compte de l’American Society of Agronomy et de la Crop Science Society of America et traduit et adapté de l’américain par laidbackgardener.blog.
Article tellement instructif, merci! Est-ce le même principe qui s’applique pour les raisins verts ou rouges des épiceries à grandes surfaces?
Dans leur cas, la raison est différente: ils ont une mutation génétique que fait que la graine avorte avant d’arriver à maturité.
Merci! Et ça vaudrait probablement un article sur la question (quand vous en aurez le temps!) puisque la plupart des gens ne veulent plus manger de raisins à pépins! Bonne fin de journée!
Bonne idée!
Bonjour 🙂 Je cherche de l’information sur la culture de champignon avec MYCÉLIUM . J’ai cherché sur le blog et ça m’étonnait de rien trouver sur le sujet. J’aime beaucoup vos explications et la façon dont vous vulgarisé l’information. Il y a beaucoup de kit DIY et je ne sais pas si c’est trop compliqué pour la jardinière paresseuse en moi…. Je trouvais que c’était une bonne idée de sujet pour votre blog étant donné que certain champignon sont bon à mettre au potager et d’autre en pot.
merci et continuer votre bon travail 🙂
Je le ferais peut-être un jour. C’est une question personnelle, dans le fond: je ne “trippe” pas sur la culture des champignons. Ils ne sont pas des plantes et mon cerveau a de la difficulté à accepter leur culture comme étant du jardinage!
A reblogué ceci sur lebienetreauboutdesdoigtsnaturellement.
Est-ce qu’on peut trouver ces fruits AVEC leur semence question de préserver l’autonomie alimentaire?
Bien sûr! La plupart des cultivars produisent des semences. Je ne vois pas toutefois le lien avec l’autonomie alimentaire: on peut cultiver les fruits de climat tempéré dans nos jardins qu’ils soient fertiles ou sans pépins.