Le coco-fesses: la plus grosse graine du monde
Le coco-fesses: une graine géante de forme suggestive. Source: www.eagleheadline.com
Au cours des 17e et 18e siècle, des marins rapportaient à l’occasion un mystérieux fruit géant qu’ils avaient trouvé, flottant dans la mer près des îles Maldives. Ne sachant pas de quelle plante provenait la noix, les gens de l’époque présumaient que c’était la noix d’une sorte de palmier géant (le fruit ressemble beaucoup à une énorme noix de coco) qui pousserait quelque part sous la mer. On a donc appelé le palmier «cocotier de mer» et le fruit, «coco de mer».
Mais d’autres noms sont venus de la forme très suggestive de la noix bilobée qui ressemble à un postérieur féminin : coco-fesses, coco indécent et cul de négresse (le dernier n’est pas très politiquement correct, mais c’est bien le terme utilisé).
Les scientifiques, se basant uniquement sur la noix flottante, ont néanmoins donné un nom botanique à la plante : Lodoicea (pour le roi Louis XV) maldivica, car on présumait que le cocotier de mer poussait sous l’océan près des Maldives. Un autre nom, maintenant discrédité, était Lodoicea callipyge, ce dernier nom signifiant «belles fesses».
Du mythe à la réalité
C’est l’explorateur français Marc-Joseph Marion du Fresne qui a finalement découvert l’origine de ces graines géantes lors d’un voyage de découverte dans l’océan Indien en 1768, sauf qu’il ne les a pas trouvées aux Maldives, mais plutôt aux Îles Seychelles, alors inhabitées. Plutôt que de provenir d’un arbre sous-marin, elles poussaient sur un immense palmier terrestre mesurant jusqu’à 34 m de hauteur (un spécimen a même atteint 56,7 m de hauteur). C’étaient les courants marins qui avaient transporté les noix des Seychelles aux Maldives, un voyage de plus de 2000 km.
Les frondes géantes costapalmées* de ce palmier atteignent 10 mètres de diamètre avec un pétiole de souvent plus de 4 m de long. Les frondes sont conçues comme un entonnoir pour attraper l’eau de pluie et la diriger jusqu’aux racines du palmier.
*Costapalmée se dit d’une feuille à mi-chemin entre une feuille palmée et une feuille pennée.
Le cocotier de mer est monotypique, étant la seule espèce dans le genre Lodoicea.
Les graines sont énormes — de 40 à 50 cm de long! — et peuvent peser jusqu’à 20 kg, soit environ le poids d’un enfant de 4 ans. Elles peuvent prendre jusqu’à 7 ans pour mûrir sur le palmier et 2 années supplémentaires pour germer une fois qu’elles tombent au sol.
Assez curieusement pour une graine trouvée à l’origine flottant sur la mer, les graines fraîches de cocotier de mer ne flottent pas, mais coulent au fond. C’est seulement après quelques années sous l’eau qu’elles deviennent partiellement pourries et se mettent à flotter.
Vous trouverez souvent des graines de cocotier de mer dans les expositions scientifiques, les musées de science naturelle et les jardins botaniques en tant que curiosités.
Malgré tout, ces graines sont une denrée rare, car le cocotier de mer produit relativement peu de graines. Elles sont suffisamment rares, d’ailleurs, pour que leur récolte soit maintenant contrôlée : elles ne peuvent être récoltées et vendues qu’avec les permis appropriés. De plus, l’espèce elle-même est considérée comme menacée de disparition et donc théoriquement pleinement protégée dans son pays d’origine (les Seychelles), où le palmier est limité à quelques bosquets sur deux îles distinctes (bien que de jeunes spécimens aient été introduits ou réintroduits dans d’autres îles des Seychelles).
Malgré cette protection, le commerce illégal de cocos de mer est florissant, notamment en Chine, où les noix volées sont coupées en tranches minces et sont vendues à des prix exorbitants en tant qu’aphrodisiaques.
Où voir un cocotier de mer
Vous n’avez pas à aller jusqu’aux Seychelles pour voir un cocotier de mer. Il est souvent cultivé comme curiosité dans les grands jardins de climat tropical et, plus rarement, dans les serres des jardins botaniques en région tempérée.
Toutefois, dans les jardins, on trouve presque toujours un spécimen unique, car c’est un grand palmier qui occupe beaucoup d’espace. Et, pour cette raison, les palmiers cultivés dans les jardins produisent rarement des graines, car l’espèce est dioïque, ce qui signifie qu’elle produit des fleurs mâles et des fleurs femelles sur des plantes séparées. Il faut avoir les deux en fleurs en même temps (et la présence d’un pollinisateur) pour assurer la fécondation des fruits. Et même si le jardin en a planté deux spécimens et a eu la chance d’en avoir un de chaque sexe, encore leur faut-il attendre environ 80 à 100 ans pour que les palmiers atteignent une taille suffisante pour fleurir!
Cultiver votre propre cocotier de mer?
Pas une bonne idée! Peu de noix fraîches (et légales) sont disponibles dans le commerce et celles qui sont offertes coûtent très cher (jusqu’à 300 USD par noix). Le site www.rarepalmseeds.com en propose occasionnellement sur la base du premier arrivé, premier servi.
Aussi, même si votre budget vous permet de faire un tel achat, la patience est de mise, car le cocotier de mer pousse très, très lentement : il vous faudra attendre au moins 20 ans avant qu’il commence à produire un tronc (en fait, un faux-tronc appelé stipe). Et que d’espace est nécessaire pour cultiver ce palmier géant! Votre serre n’est certainement pas assez grande.
Pour aggraver davantage la situation, la curieuse façon de germer du cocotier de mer rend sa culture en pot compliquée, car il produit un fragile «cotylédon tubéreux» de 2 à 4 m de long, parfois plus, qui rampe sur la surface du sol au début avant de «choisir» un endroit pour s’enfoncer en profondeur. C’est de ce cotylédon atypique que naîtront les racines initiales et la première feuille… à une bonne distance de la noix.
Dans la nature, c’est probablement une technique avantageuse : même si la noix tombe près de la plante mère (le cas typique pour une noix aussi pesante), le cotylédon peut s’échapper de l’ombre profonde que cette dernière produit et permettre au semis de pousser dans un emplacement plus dégagé. Quand on essaie de cultiver la noix en pot, il faut suivre les déplacements du cotylédon fragile, s’assurant qu’il y ait toujours un gros pot de terreau sous sa pointe.
Le cocotier de mer est très tropical aussi, préférant une température de 24 à 30 °C en tout temps. Une température de moins de 18 °C peut d’ailleurs lui être fatale. Autrement dit, à moins que vous ne viviez sous les tropiques, c’est une plante à laisser aux jardins botaniques plutôt qu’à cultiver soi-même.
Le cocotier de mer: mythique, curieux, gigantesque et historique. Oui, allez le voir absolument dans un jardin botanique lorsque vous voyagez dans les régions tropicales, mais non, il ne fait pas une bonne plante d’appartement!
J’en avais déjà entendu parler et vu, mais j’ai trouvé l’article intéressant à lire !
J’ai aimé ton article sur le cocotier fesse
Je suis d’accord de le laisser au jardin botanique et de protègera leur milieu naturel
Il faudrait faire suivre à Boucar Diouf et Francis Reddy…
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