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Mythe horticole: le sel d’Epsom dans le jardinage

Le sel d’Epsom: loin d’être un produit miracle dans le jardinage.

20170525A.gifSi vous fouillez sur l’Internet, vous verrez de nombreux sites qui préconisent l’utilisation du sel d’Epsom dans le jardinage. Certains prétendent que ce produit stimule une croissance extraordinaire, d’autres qu’il fait grossir les tomates, encourage la floraison des roses, fait verdir le feuillage, renforce les racines et même… chasse les limaces! Évidemment, plusieurs de ces sites sont en fait commandités par des producteurs de sels d’Epsom (il est si facile de cacher son identité de nos jours!), mais d’autres viennent de jardiniers sincères qui pensent vraiment avoir trouvé un produit miracle.

Le sel d’Epsom s’appelle ainsi car on le préparait à l’origine en faisant bouillir l’eau de source minérale provenant de la ville d’Epsom en Angleterre.

Je me confesse: je me suis moi-même fait avoir avec ce leurre. C’est une vieillie croyance que j’ai hérité de mon père jardinier sans jamais me poser des questions. Pendant des années, doc, j’ai recommandé, entre autres, l’utilisation de sels d’Epsom pour prévenir le fendillement des fruits de tomate et pour obtenir des fruits plus gros, jusqu’à ce que j’assiste à une conférence de Dre Linda Chalker-Scott, la réputée scientifique américaine spécialisée en horticulture de l’université de l’État de Washington, sur les mythes horticoles les plus persistants qui me démontre que je partageais une fausse information. J’ai consulté par la suite les détails sur son site et elle avait bien raison. Mea culpa!

Pas un produit miracle

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Sel d’Epsom. Photo: Chemicalinterest, en.wikipedia

Essentiellement, ce que la Dre Chalker-Scott dit est que le sel d’Epsom n’a rien d’un produit miracle. Il s’agit tout simplement d’un produit bêtement chimique: le sulfate de magnésium (MgSO4·7H2O). Il contient alors du magnésium et du soufre (plus de l’oxygène et de l’eau). Oui, il pourrait servir d’engrais… mais sera seulement utile si le sol manque de magnésium ou de soufre. Or, la plupart des sols n’en manquent pas.

Son utilité se limite donc aux cas de carence, quand l’un ou l’autre des deux éléments manque dans le sol. Si oui, la plante pourrait profiter d’un traitement aux sels d’Epsom.

Personnellement, quand je soupçonne qu’une plante souffre d’une carence (son feuillage est anormalement jauni, rougi ou rabougri, etc.), ce n’est pas le sel d’Epsom que j’appliquerais, mais un engrais biologique complet, comme un engrais d’algues ou une émulsion de poissons, un qui contient tous les oligoéléments. Après tout, ce n’est peut-être pas le magnésium ou le soufre qui manque, mais un autre oligoélément: zinc, fer, bore, molybdène ou autre. Aussi bien de donner la gamme complète de minéraux que seulement deux.

Aussi, quand on applique un produit inutilement (du soufre ou de magnésium à un sol qui n’en a pas besoin), ce produit aboutit par ruissellement dans la nappe phréatique ou dans les cours d’eau, encore un autre polluant ajouté par l’être humain. Triste!

Quelques cas spécifiques

Pourriture apicale de la tomate

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Le sel d’Epsom ne peut pas guérir la pourriture apicale: elle résulte d’une carence en calcium, pas en magnésium ou soufre. Photo: Scot Nelson, Flickr

On recommande souvent un traitement au sel d’Epsom pour prévenir la pourriture apicale sur les tomates. Dans cette maladie, causée par une carence, l’extrémité du fruit noircit et s’enfonce.

Alors, sel d’Epsom à la rescousse! On le dilue dans l’eau, on en arrose la plante et les fruits qui suivent restent en bon état. Un succès!

En fait, un faux succès!

La pourriture apicale est causée par une carence en calcium, pas en magnésium ou en soufre. Habituellement, ce n’est pas tant que le calcium n’était pas présent (c’est un élément très courant dans les sols), mais que le sol était trop sec et alors que les racines de la plante ne pouvaient pas en absorber correctement. Donc, le traitement de base est tout simplement… d’arroser la plante régulièrement. Évitez les arrosages en dents de scie et maintenez plutôt le sol également humide et la pourriture apicale disparaîtra comme par magie. Vous aurez le même résultat que vous ajoutiez du sel d’Epsom à l’eau ou pas. C’est l’eau qui fait la différence, mais les minéraux qui y sont dissous.

Tomates plus grosses

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Si vous voulez une tomate géante, plantez une tomate géante! Ici ‘Big Zac’. Photo: Ezra’s Organics

Fertilisez correctement vos tomates avec un engrais complet (qui contiennent tous les oligoéléments), arrosez régulièrement pour maintenir une humidité assez constante du sol, offrez de bonnes conditions de culture (plein soleil, endroit plutôt chaud, etc.) et vous aurez de belles tomates de grosseur normale pour cette variété. L’application de sel d’Epsom ne fera pas du tout grossir les fruits. Si vous voulez des tomates géantes, choisissez une lignée réputée pour ses gros fruits, comme ‘Big Zac’, et entretenez-la convenablement.

Engrais général

Certains sites recommandent le sel d’Epsom comme engrais à appliquer à toute plante, prétendant que cela donnera de résultats extraordinaires, notamment dans le verdissement des feuilles et la croissance des racines. Mais cela ne fonctionnerait que si le sol manquait de magnésium ou de soufre. Sachant que la plupart des sols contiennent déjà ces éléments en quantités suffisantes pour les plantes, il serait logique de faire faire une analyse de sol en laboratoire avant d’appliquer du sel d’Epsom, et cela, pour s’assurer qu’il sera bien utile. Sinon, essentiellement, vous ne faites que polluer l’eau.

Et certains sols — notamment les sols sablonneux et acides qui retiennent peu de minéraux — peuvent manquer de magnésium ou de soufre. Même dans ce cas, je suggérerais plutôt une application de compost ou d’engrais complet pour rajouter tous les oligoéléments manquants… mais l’utilisation de sel d’Epsom dans ce cas serait raisonnable, car au moins les plantes auront leur juste part de magnésium et de soufre.

Engrais pour les rosiers

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Cultivez vos rosiers dans un sol riche en y apportant de l’engrais et vous n’aurez une belle floraison sans appliquer du sel d’Epsom.

Dans les années 1930 à 1960, plusieurs rosiéristes recommandaient des applications de sel d’Epsom pour stimuler une belle croissance et une floraison abondante chez les rosiers… mais cela est moins vrai de nos jours. Chaque expert a quand même son régime de fertilisation préféré — certains préfèrent des engrais complets, d’autres des mélanges de produits, etc. —, mais aujourd’hui, peu utilisent encore le sel d’Epsom, largement considéré dépassé. D’ailleurs, vous aurez beau chercher des études sur l’efficacité des sels d’Epsom sur les rosiers: elles n’existent pas.

Protection contre les maladies

Aucune étude fiable ne démontre que les traitements avec du sel d’Epsom préviennent ou guérissent les maladies végétales infectieuses: fongiques, virales ou bactériennes, etc. Par contre, bien sûr, si la plante soufre d’une carence en magnésium ou en soufre, un tel traitement lui sera très bénéfique.

Répulsif contre les insectes et les limaces

Aucune étude ne démontre non plus la moindre réaction négative de la part des insectes ou des mollusques suite à une application de sel d’Epsom.


Donc, le sel d’Epsom n’est vraiment utile que dans de très rares cas, soit pour le traitement d’une carence en magnésium ou en soufre. Même là, une application d’engrais complet ou même du compost aurait donné le même résultat sans nécessiter l’achat d’un produit spécial. Dans le monde du jardinage, le sel d’Epsom est généralement un produit bidon.

Références

Miracle, myth … or marketing: Epsom salts

Epsom Salt for Plants

Étiquettes + Sel d'Epsom, MgSO4·7H2O, Sulfate de magnésium, Carences végétales


commentaire sur "Mythe horticole: le sel d’Epsom dans le jardinage"

  1. Myriam Lavoie dit :

    Dans notre maison (ancienne) j’ai trouvé pas mal de bois brûlé (charcoal) et de morceaux de bitumen (??) dans les plates bandes. Les anciens propriétaires étaient de fervents jardiniers, ça semble être un ajout volontaire.
    Est ce que vous savez si c’était aussi des matériaux typiquement ajoutés “dans le temps” comme engrais?

    • Aujourd’hui, on parle souvent de “terra preta”, une terre améliorée par l’ajout de charbon de bois. Voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Terra_preta. Et en passant, les experts émettent de plus en plus de doutes sur son utilité. Mais tout cela, c’était un Brésil: je ne connais aucune croyance simiiaire ailleurs. Je pense tout simplement que les premiers habitants de la maison jetaient tout simplement leurs résidus de poêle dans le jardin.

  2. Steve dit :

    eh ben, j’avais essayé le sel d’Epsom dans le jardin et j’avais eu l’impression que cela avait plus nuit qu’autre chose. En ce qui concerne le charbon de bois, il y a des études qui semblent y trouver des bénéfices en agriculture. https://www.agrireseau.net/agroenvironnement/documents/Major.pdf

    • alain menard dit :

      merde jaurait jamais du mettre cela pour mes plant de piment les feuille sont toute molle et tombe grrrrrrrrrr dhabitude je me renseigne mieu que sa avant de faire quelque choses

  3. Roomanies dit :

    Wow, si cela peut faire pousser de telles tomates, alors il faut s’en procurer sans aucun doute! Merci de ce savoir!

  4. France de Villers dit :

    Je n’ai jamais utlisé les mycorhizes jusqu’à maintenant. Je ne fertilise qu’avec du compost et j’ajoute de la poudre d’os lors de la plantation des plants et des bulbes. Il me semble que le compost doit contenir une bonne proportion de mycorhizes, compte tenu du processus de décomposition.. Qu’en pensez-vous?

    • On peut en trouver dans le compost… mais aussi dans le sol. Je n’ajoute des mycorhizes qu’aux sols perturbés… ou fraîchement sortis d’un sac. Dans un bon sol de jardin, il y en a déjà.

  5. Bertie dit :

    Dans les vielles maisons ou l’on “faisait tout dans la cheminée, et, ou il y avait un tas de fumier et, pas les poubelles qui passait toutes les semaines ! les restes du foyer, donc des bois et des tisons allaient aussi au tas de fumier et se retrouvaient … dans le jardin tout naturellement .
    Avec aussi des capsules de bouteilles en alu que vous devez trouver aussi !

  6. Benjamin dit :

    Merci de votre article, cependant plusieurs remarques me viennent à l’esprit .

    Effectivement, vous parlez du sel d’Epsom utilisé par arrosage, hors, il est préférable (voir à mon sens obligatoire) de l’utiliser en pulvérisation FOLIAIRE, de sorte à ce que le Magnésium, qui permet entre autre la création de la chlorophylle, soit directement dirigé vers les feuilles, la ou il doit en définitive aller MAIS tout en évitant tout problèmes d’antagonismes avec le K, Ca et quelques autres … Ce qui provoque effectivement un coup de boost au jardin, lié tout simplement à l’accroissement de la capacité de synthèse chlorophyllienne et à l’augmentation de la capacité d’absorption du P et du N, au détriment du K… Sur une période de 24h seulement si le sel d’Epsom est utilisé en foliaire et non en arrosage !
    Explication:
    >>> (En présence d’eau, ce sel produit des anions sulfate SO42- et des cations magnésium Mg2+.
    Dans le sol, Mg2+ peut être fixé sur le complexe d’échange ou bien absorbé directement par les racines.
    L’absorption par les racines de Mg2+ et celle du cation potassium K+ sont antagonistes, c’est-à-dire que lorsque la solution du sol s’enrichit en Mg2+, l’absorption de K+ diminue, et vice-versa.
    Les cations sulfate SO42- apportés au sol par le sulfate de magnésium sont considérés comme acidifiants, mais c’est aussi une source) <<>>> la plante va mieux, carence “en Mg confirmée
    OU SINON >>>> plante qui ne change pas d’état, ça ne vient pas de la donc on cherche ailleurs, mais dans tous les cas la pulvérisation de sel d’Epsom n’aura que très peut d’impact sur l’aggravation du soucis si ce n’est effectivement pas une carence en Mg, la quantité stockable étant infime (j’utilise personnellement 5g/4L d’eau en foliaire, et JAMAIS en arrosage ou épandage sur le sol), le solution étant assimilable à 90% dans les 24h.)
    A savoir qu’une carence en Fer ressemble à une carence en Mg mais ne se traite pas du tout de la même façon …
    Le plus important à mon sens avant toute chose, est d’identifier au plus sur, QUEL est l’élément nutritif que la plante n’arrive pas à correctement assimiler…

    La ou je vous rejoint, c’est que bien avant d’envisager d’utiliser ou non du sel d’Epsom, tout jardinier doit IMPÉRATIVEMENT veiller en priorité à la vie de son sol ! ( apports de compost, rotation des cultures, engrais verts, couverture permanente du sol, utilisation de mêlasse ou de thé de compost oxygéné/aéré (TCO ou TCA) et autres )

    Un sol vivant, normalement constitué (taux de matière organique, humus, complexe argilo humique, argiles etc en bonnes proportions) ne demande généralement pas d’apport de la part du jardinier, si ce n’est quelques apports généralistes comme vous le citez dans votre article, ce qui n’est malheureusement pas le cas de la plupart des jardiniers actuellement, qui se retrouvent souvent avec des carences divers et variées (si je devais donner quelques causes ? Travail du sol, engrais trop azoté, engrais minéraux, dépôts de sulfate de cuivre dans le sol, arrosages avec une eau du robinet contenant du calcaire et du chlore (voir chloramine), la non couverture du sol, la mono culture, le manque d’apport de matière organique, et malheureusement encore trop d’erreurs souvent appliquées …)

    Cependant encore merci de votre article, c’est en discutant autours de nos expériences et de ce que nous offre la science que le monde du jardinage avance dans le bon sens, donc merci 😉

    • Proupbéro Roland dit :

      C’est un fait que le Mg est un oilgoélément essentiel pour la molécule de chlorophylle : elle ne ne peut absolument pas fonctionner sans magnésium, le moindre affaiblissement du sol en mg affecte directement la fonction chlorophyllienne et donc la production de matière par la plante..
      Les nutritionnistes conseillent d’ailleurs vivement de consommer des plantes vertes ( persil, épinards, blettes) aux personnes souffrant de manque de Mg !.
      Par conséquent l’utilisation du sel d’Epsom se justifie sur un sol pauvre en Mg et complètement inutile sur un sol équilibré. CQFD.

      • Benjamin dit :

        Bonjour Roland, relisez mon premier commentaire, vous ne faites que répéter ce que j’ai rédigé 😉

        Il est évident qu’un sol équilibré n’a pas besoin de recevoir de sel d’Epsom, la question n’est pas la, ce que je disais lors de ma première intervention, c’est que l’action du sulfate de magnésium sur les racines (antagonismes) n’a rien à voir avec son action sur les stomates (vacuole, cytoplasme etc, sur les cellules au sens propre du terme quoi), et que par conséquent, face à un doute de carence en Mg sur une plante, plutôt que de donner un engrais généraliste, ce que je trouve risqué, je préfère une application foliaire de sel d’Epsom, celui ci étant assimilable très rapidement, et devrait améliorer, ou non, le soucis…

        Après je le répète, sur un sol équilibré, riche en matière organique, non retourné (charrue etc), bien sur que le sel d’Epsom est superflu, voir même risqué à utiliser, justement à cause des déséquilibre qu’il pourrait créer, notamment par son antagonisme avec le potassium …

        Après de la à dire que le sel d’Epsom est un mythe, tout de même …

  7. cisit dit :

    pollution des nappes. Moi j’en bois, du sel d’Epsom

  8. […] Peut-on traiter la pourriture apicale avec le sel d’Epsom?Voilà une vieille croyance qui a la vie dure. Le sel d’Epsom (sulfate de magnésium) contient du soufre et du magnésium, mais ce qui manque à la plante, c’est du calcium. Quand vous arrosez avec une solution de sel d’Epsom et que le problème s’estompe, c’est à cause de l’H2O que vous avez appliqué, pas du sel d’Epsom. Pour plus d’information, consultez Mythe horticole: le sel d’Epsom dans le jardinage.  […]

  9. Merci beaucoup pour cet article très instructif qui va à l’encontre de ce que l’on peut lire un peu partout sur internet !

  10. Mesure dit :

    Merci très intéressant, j allais justement en acheter ?

  11. Dupre Patrick dit :

    C’est pas bien de casser du sucre sur le sel d’epsom. Exemple: Dire qu’il n’y a aucun résultats pour faire fuite limace et escargot?? C’est quand même simple de faire soit même son expérience et si c’est faux et le dire dans une publication. Je suis étonné de savoir qu’il n’y a que la ville d’Epsom qui fabrique le sel d’Epsom ?

  12. legrand dit :

    je recommande de toujours faire des testes éprouvettes pour tout : Là isoler quels que plants pour faire ses testes de sel E .Il ne sert a rien de tous faire tous tout de suite . . . Actuellement je fais des textes et il semblerai que le sel d’E a effectivement des effets bénéfiques sur ces plants .Je ne comprends pas que l’on peut utiliser le d E pendant tant d’années et au final ne pas se rendre compte d’un point négatif ou positif .Voilà bien l’importance de faire ces types de textes .La cendre bois de part son coté soporifique a cet avantage d’empêcher la terre de s’agglomérée tout en la rendant plus légère .Ce qui a pour effet que la terre est mieux ventilé et profite mieux de son arrosage qui pénètre mieux jusque à la racine. L’on remarque aussi ce phénomène auprès des feux de forêts

  13. Micka dit :

    J’ai tjs été sceptique sur les sels d’epsom. Par contre j’ai trouvé une super recette à base de coquilles d’oeuf, peau de banane et marc de café. J’en aurai pas mis ma main à couper mais ça marche super bien comme engrais!

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