Les fleurs doubles: jolies, mais nulles pour les pollinisateurs
Les jardiniers adorent les fleurs doubles. C’est vrai qu’une fleur dense et fournie avec beaucoup de pétales est belle. De plus, ces fleurs sont généralement stériles ou presque stériles. Comme elles ne sont pas pollinisées, il arrive fréquemment qu’elles restent épanouies plus longtemps, un autre avantage pour le jardinier.
Pour l’insecte pollinisateur — abeille, syrphe, papillon, etc. — , cependant, les fleurs doubles sont une perte de temps.
La plupart du temps, la mutation qui mène à une fleur double convertit les étamines en pétales. Mais dans la nature le rôle de l’étamine — typiquement un filament coiffé d’une anthère jaune — est de fournir du pollen… exactement ce qui beaucoup de pollinisateurs viennent chercher dans une fleur. Pour plusieurs, c’est leur source principale de nourriture. Mais alors il n’y a plus de pollen… ou du moins, moins. (Certaines fleurs doubles ont quand même des étamines fonctionnelles, mais souvent elles sont cachées par les pétales trop nombreux.)
Quant aux créatures qui viennent plutôt chercher du nectar, comme les papillons, les abeilles à longue trompe et les colibris, les nectaires sont généralement au fond de la fleur… désormais caché par les pétales en surnombre. Souvent, l’accès est difficile, parfois complètement bloqué. Donc, les fleurs doubles ne sont pas une bonne source de nectar non plus.
Une perte de temps
Très souvent, les pollinisateurs continuent de visiter les fleurs doubles même si elles ne peuvent pas les nourrir. C’est qu’ils suivent certains signaux — la couleur de la fleur, son parfum, etc. — qui, dans la nature, indiquent normalement la présence de pollen ou du nectar… mais ils ne sont pas nécessairement assez intelligents pour apprendre de leurs mauvaises expériences. Ainsi ils vont de fleur en fleur sur la même plante à fleurs doubles, gaspillant leur énergie, jusqu’à ce qu’ils trouvent enfin, sur un autre plante, des fleurs où le pollen ou le nectar sont plus accessibles.
Les fleurs semi-doubles
Ces fleurs sont intermédiaires entre une fleur simple et une fleur double: seulement une partie des étamines ont été converties en pétales. Selon la variété, elles peuvent produire autant de pollen et de nectar qu’une fleur simple ou moins, et leurs anthères et nectaires peuvent être aussi faciles à atteindre ou peu accessibles. Habituellement, si vous pouvez facilement voir des anthères jaunes dans le centre de la fleur, elles conviennent aux pollinisateurs.
Pas de panique, toutefois
Si votre plate-bande est composée uniquement de fleurs doubles, c’est vraiment un désastre pour les pollinisateurs, mais c’est rarement le cas.
Une plate-bande typique contient habituellement beaucoup de fleurs simples et même en général la grande majorité des fleurs sont de ce type. Comme la concentration de fleurs dans une plate-bande est nettement plus grande que ce qu’on retrouve dans la nature (et encore beaucoup, beaucoup plus que dans une pelouse!), ces jardins demeurent une source fiable de nourriture pour les pollinisateurs, assez d’ailleurs que plusieurs sont prêts à parcourir de longues distances, souvent plusieurs kilomètres, pour les atteindre.
Et d’ailleurs, ne pensez pas que seulement les fleurs domestiquées attisent les pollinisateurs sans leur donner leur dû. La nature est pleine de fleurs qui leurrent les insectes avec des promesses de pollen et de nectar, mais qui ne livrent pas la marchandise. Beaucoup d’orchidées, notamment, sont des spécialistes dans les leurres visuels, olfactifs et sexuels: elles promettent tout et s’organisent pour assurer leur propre pollinisation, mais l’insecte repart bredouille.
Votre propre plate-bande
Il n’en reste pas moins que quand vous vous spécialisez dans des plantes où la majorité des cultivars sont doubles (pivoines, rosiers, œillets, etc.), il serait gentil de votre part d’inclure une part de fleurs «plus simples» (avec des étamines jaunes visibles) pour soutenir nos amis, les pollinisateurs.
Pourriez-vous citer quelques fleurs simples et fleurs pour papillons et abeilles
Toutes les fleurs de la famille de la marguerite (Astéracées) et de la carottes (Apiacées), du moins les variétés sauvages ou cultivars simples, conviennent.