Construire sans détruire la forêt

Développement domiciliaire des années 1960: terrain plat et gazon omniprésent, guère un arbre en vue! Source: Sam Beebe, Flickr
À quoi, d’après vous, ressemblerait le «terrain idéal», là où vous aimeriez faire construire votre maison de rêves? Alors qu’il y a 50 ans, ce terrain était aplati, égal et dénudé de toute végétation autre qu’une vaste pelouse verte, de nos jours la mode est aux terrains boisés et, si possible, à plusieurs dénivellations. Les nouveaux propriétaires veulent se sentir à la campagne, même en banlieue… et ne tiennent plus à voir les moindres faits et gestes de leurs voisins.

On veut aujourd’hui intégrer notre demeure à la forêt… mais comment faire? Source: VRBO
Malheureusement, le nouveau propriétaire d’un «terrain boisé» est souvent très déçu des résultats à long terme: au bout de 5 à 10 ans, la belle forêt qui entourait sa demeure neuve est morte ou mourante. Que s’est-il passé?
Il y a trois problèmes principaux concernant la protection d’un terrain boisé résidentiel auxquels doit faire face tout nouveau propriétaire de terrain boisé: une mauvaise sélection des arbres à conserver, des dérangements trop sévères lors de la construction et un entretien inadéquat de la forêt par la suite.
Bien choisir

Certains arbres sont si endommagés pendant la construction que le seul choix logique est de les abattre.
Veut, veut pas, il n’est pas possible de garder tous les arbres lors de la construction d’une maison sur un terrain boisé. Non seulement les arbres les plus près du site de construction seront-ils sévèrement endommagés par le passage de la machinerie nécessaire à la construction (bris des branches, écorce arrachée, compression des racines, etc.), mais le fait même d’établir une maison dans ce qui était jusqu’alors une forêt dense affaiblit les arbres environnants. N’oubliez pas que les arbres hauts et minces de la forêt ont toujours poussé dans un milieu fermé, protégés des éléments par les arbres environnants. Exposés subitement aux vents et au froid hivernal par une ouverture dans la forêt, ils ont tendance à casser ou à mourir peu à peu au cours des années suivant la construction.
Pour protéger tant soit peu la forêt sur un terrain privé, mieux vaut bien choisir les arbres que vous y maintiendrez. Comme les grands arbres sont les premiers à souffrir d’un dérangement, il est préférable de les sacrifier dès le départ s’ils sont près de la maison, d’autant plus si ce sont des espèces n’ayant pas la capacité de bien récupérer des dommages aux racines ou aux branches, comme l’érable à sucre (Acer saccharum), le noyer noir (Juglans nigra) ou le chêne blanc (Quercus alba). Gardez plutôt les jeunes arbres: ils sauront mieux s’adapter.

Une bande intermédiaire entre la zone intensivement cultivé et la forêt aidera à protéger cette dernière. Source: Acabashi, Wikimedia Commons
Au fond du terrain, par contre, là où la machinerie n’est pas passée, il est possible de maintenir les grands arbres… mais à condition de ne pas leur faire subir un changement trop radical. À cette fin, songez à protéger une «bande intermédiaire» de jeunes arbres, d’arbustes et de vivaces qui agiront comme tampon entre la partie nouvellement dénudée du terrain et la vraie forêt.
Si vous avez de la difficulté à choisir les arbres à maintenir, consultez un arboriculteur certifié. Il pourra de plus vous indiquer s’il y a des arbres frêles, malades ou mal placées et qui seraient alors à abattre et aussi à faire un élagage des arbres restants en vue de réduire les dommages lors de la construction.
Protégeons les arbres qui subsistent

La clôture de protection indiquera la zone interdite à la machinerie. Source: HNC
Une fois que la sélection des arbres à garder est faite, il faut les protéger de la machinerie lourde. Délimitez avec une clôture de sécurité couleur voyante, en consultation avec votre entrepreneur, une «zone de construction», une «zone de circulation» et une «aire de stationnement». Autrement dit, défense absolue pour lui de passer ailleurs sur le terrain. La surface ainsi protégée devrait de préférence être aussi large que l’étendue des branches des arbres à protéger. Défense aussi d’entasser de la terre sur les racines des arbres, même temporairement: ils n’en mourront que plus vite.

Les branches déchiquetées des arbres abattus peuvent servir de paillis pour protéger les arbres restants pendant la construction. Source: PublicDomainePictures.net
De plus, recouvrez les zones de circulation et de stationnement d’un épais (15 cm ou plus) paillis organique grossier: des branches déchiquetées feront bien l’affaire. Ainsi on peut ainsi éviter la compression du sol, même sous le poids de la machinerie lourde, ce qui protège les arbres à proximité contre la mort lente par l’asphyxie de leurs racines comprimées.
Un entretien sensé

Laissez la forêt au naturel plus plus possible, avec tout simplement peut-être des sentiers et quelques plantations… et surtout pas de pelouse! Source: Dirk Ingo Franke, Wikimedia Commons
À la fin de la construction, enlevez d’abord le paillis protecteur tout en laissant l’humus de la forêt sur place. Et n’allez pas trop vite pour installer du gazon dans la section boisée: non seulement les graminées poussent-elles difficilement à l’ombre des arbres, mais en recouvrant les racines de ces derniers d’une couche de terre pour permettre l’installation d’une pelouse, vous les dérangerez énormément et détruirez aussi le complexe système de la flore microbienne du sol qui permet la survie de la forêt. Laissez plutôt votre sous-bois au naturel, limitant vos interventions à l’installation, en bordure de la forêt, d’arbustes et de plates-bandes et, dans le sous-bois lui-même, de la plantation de plantes d’ombre: fougères, hostas, plantes indigènes, etc.
Enfin, n’enlevez surtout pas les feuilles d’automne dans le sous-bois, car seule la présence de l’humus riche qu’elles produisent garantit la permanence de la forêt.

En aménageant un peu dans le secteur accessible et en laissant la forêt au naturel ailleurs, on vient à un équilibre qui se maintient presque sans efforts. Photo: JamesDeMers, Pixabay
Le «jardin quasi naturel» qui résulte d’une plantation et d’un entretien minimaux dans la zone des racines des arbres créera, au cours des décennies à venir, une «belle complicité» entre la forêt naturelle et vos buts d’embellissement: une complicité qui garantira la survie à court, moyen et long terme de votre beau terrain boisé.
Il est bien de proposer des mesures pour protéger la forêt où on s’installe, mais si tout le monde irait se bâtir ce genre de maison dans la forêt, il n’y aurait plus de forêt. La meilleure façon de respecter la forêt est de vivre dans une tour dans un centre-ville. L’étalement des habitations humaines ravage l’environnement.
Bien d’accord!
Il y a 4o ans nous avons acheté un grand boisé èa St-Apollinaire de 43 arpents. Nous avons choisi l’emplacement de la maison et avons créé une trouée puis construit la maison sans espace gazonné seulement les routes d”accès et les aires de séjour
Bravo Larry, Un très bon conseil pour les amateurs de jardinage… Jean-Pierre http://www.jardinjp.ca
Merci pour cette article, c’est un must à savoir!