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Trois plantes ombrelles géantes

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La feuille de l’astilboïde est peltée: son pétiole est fixé au centre.

Les feuilles rondes sont déjà rares dans la nature, mais encore davantage dans les climats tempérés. Elles ont la curieuse habitude d’avoir un pétiole presque au centre de l’arrière du limbe de la feuille, comme un bouclier. Botaniquement, on dit que ces feuilles sont «peltées», mais le jardinier moyen dira probablement qu’elles ont des feuilles comme un parapluie, un parasol ou une ombrelle.

Les plantes ombrelles sont tout aussi rares dans nos jardins que dans la nature, mais il y en a trois à noter particulièrement: l’astilboïde, le darmera et le pétasite du Japon. À cause de leur grande taille, on pourrait presque les utiliser comme ombrelle!

Malgré des différences assez nettes, souvent les jardiniers les confondent. Voici comment les distinguer.

Astilboïde
Astilboides tabularis

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On cultive davantage l’astilboïde (Astilboides tabularis) pour ses feuilles que pour ses fleurs.

Des trois vivaces ombrelles présentées ici, c’est celle qu’on pourrait le plus facilement servir comme parasol, car ses feuilles sont larges (jusqu’à 90 cm de diamètre) et presque parfaitement rondes. Elles sont découpées sur le bord, vert pâle et légèrement couvertes de poils, ce qui leur donne une texture matte. L’épais pétiole qui retient la feuille peut mesurer 1 m de hauteur. Les botanistes qui l’ont décrit trouvaient que la feuille ressemblait à une table, d’où l’épithète tabularis.

Et ils trouvaient aussi que les fleurs rappelaient une astilbe (Astilbe), d’où le nom générique Astilboides (qui ressemble à une astilbe). Et effectivement, le bouquet de minuscules fleurs blanches a la même apparence mousseuse qu’une astilbe… mais une très grande astilbe, car la tige florale peut mesurer 1,5 m de hauteur! Notez toutefois que l’astilboïde est davantage apparentées aux rodgersias (Rodgersia spp.) qu’aux astilbes et d’ailleurs fut autrefois connu sous le nom Rodgersia tabularis.

La plante pousse en touffe à partir d’un rhizome court et épais. Malgré sa grande taille, l’astilboïde est le plus délicat des trois parasols décrites ici. Pour bien réussir, il lui faut un emplacement humide et protégé du vent, de préférence à la mi-ombre. Pour obtenir de grandes feuilles, il lui faut un sol riche et meuble qui ne s’assèche jamais. Dans un milieu trop sec, il tend à disparaître peu à peu. Sa croissance est lente et il n’est nullement envahissant.

On cultive surtout l’astilboïde pour son feuillage géant, car sa floraison, bien que fiable, est plutôt modeste.

Enfin, il est bien rustique, jusqu’en zone 3.

Darmera ou plante ombrelle
Darmera peltata (Peltiphyllum peltata)

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Darmera (Darmera peltata)

Nettement plus petite que l’astilboïde, la feuille du darmera a toutefois la même forme: un limbe rond avec un pétiole en plein centre. Elle est donc peltée (d’où l’épithète peltata). Typiquement la feuille mesure 30 cm de diamètre, mais peut en atteindre le double dans un milieu bien humide. La feuille est un peu rougeâtre à sa formation, mais vert moyen l’été, et prend diverses teintes rouges l’automne quand elle est peut-être à son plus beau. Contrairement à l’astilboïde, aux feuilles poilues et mattes, les feuilles du darmera sont lisses et luisantes.

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Rhizomes à fleur de sol du darmera.

Les feuilles poussent, non pas en touffe, mais individuellement à partir d’un rhizome rampant enterré ou partiellement exposé. De croissance modeste au début, le darmera finit par former une véritable colonie avec le temps. Il n’est pas vraiment envahissant (sa progression est trop lente pour rencontrer cette définition!), mais peut éventuellement dépasser les bornes. On peut contrôler son expansion à la hache ou la pelle si elle va trop loin. Sa dense masse de rhizomes en fait un excellent choix pour retenir les berges.

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Les curieuses fleurs du darmera sortent au printemps, bien avant le feuillage.

Il ne faut pas passer sous silence les fleurs. Elles sortent assez tôt au printemps sur des tiges dressées rugueuses et pourprées de hauteur variable. J’ai vu des tiges de 30 cm comme des tiges de 150 cm! Elles forment une ombelle en forme de dôme et peuvent être de différentes teintes de rose ou, plus rarement, blanches. Il faut souligner que cette plante fleurit à nu, c’est-à-dire que les feuilles sont absentes au début de la floraison, ce qui la rend encore plus spectaculaire… ou bizarre, car sous certains angles on dirait de drôles de champignons!

Comme l’astilboïde, le darmera préfère les milieux humides à bien humides, mais tolère aussi les zones détrempées, pouvant pousser avec sa souche sous quelques centimètres d’eau. Il pousse aussi sans broncher dans les sites qui sont inondés au printemps, mais d’humidité normale l’été. L’idéal est toutefois un emplacement tout simplement humide à détrempé, pas nécessairement sous l’eau: en bas d’une pente, dans une dépression du terrain, en bordure d’un bassin, etc. Il s’adapte quand même très bien aux sols de jardin au degré d’humidité normal, mais ses feuilles y seront généralement plus petites. Paillez-le abondamment dans une telle situation et arrosez-le si possible en période de sècheresse.

Cette plante pousse mieux à la mi-ombre ou dans un site qui est ombragé l’été, mais qui profite d’un bon ensoleillement printanier. Elle tolère le plein soleil si son sol est toujours humide.

Enfin sa rusticité est beaucoup plus grande que ce que la plupart des autorités semble penser. Généralement on le dit de zone 4 ou même de zone 5 et pourtant, il y a de superbes exemples de D. peltata qui poussent en zone 2 depuis des décennies!

Pétasite du Japon
Petasites japonicus

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Pétastie du Japon (Petasites japonicus)

Les feuilles du pétasite du Japon ne sont pas vraiment rondes, mais plutôt en forme de rein (réniformes). Toutefois les gens le confondent néanmoins avec les deux plantes ombrelles précédentes. Pour le distinguer à tout jamais de l’astilboïde et du darmera, pensez que ses feuilles sont en forme de siège de tracteur plutôt qu’en forme de parapluie.

Et les feuilles sont énormes, mesurant jusqu’à 80 cm de diamètre, et portées sur de solides pétioles. Le nom Petasites vient justement de ses grandes feuilles. Le nom veut dire «comme un chapeau» et justement, quand il pleut, on peut arracher une feuille et la porter comme chapeau de pluie.

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Les feuilles du pétasite du Japon sont énormes!

Chaque plante ne produit que 3 à 6 feuilles caduques, mais aussi plusieurs rhizomes souterrains. Ces rhizomes donnent naissance à d’autres plantes et dans peu de temps vous avez un vaste tapis de verdure. C’est une plante très envahissante, notamment dans les milieux humides, mais même dans une platebande «normale», soit une qui est bien drainée, le pétasite court assez rapidement et tend à étouffer les végétaux voisins.

Un truc pour le contenir consiste à enfoncer une grande cuve de plastique épais dans le sol, comme une piscine d’enfants, laissant dépassant le bord de 2,5 cm (vous pourriez recouvrir le bord de paillis pour le cacher) et de planter le pétasite dedans. Cela donnera assez rapidement un énorme dôme vert juste un peu plus gros que le récipient et ne pourrait pas aller plus loin. Il n’est pas nécessaire de percer des trous de drainage dans la cuve: le pétasite compose très bien avec les sols détrempés qui surviennent dans un contenant sans trou de drainage.

Le pétasite du Japon aime justement les sols humides. Il poussera dans un sol d’humidité moyenne, mais aura tendance alors à faner à tous les jours en plein été, ce qui n’est pas très joli. Mettez-le en bordure de l’eau, par contre, et il sera aux anges. Il peut même pousser dans un étang, avec ses racines légèrement couvertes d’eau.

Il est presque indifférent à la qualité du sol, même à l’intensité lumineuse. Ainsi, il poussera indifféremment dans le sable ou la glaise et au soleil ou à l’ombre. Au soleil, toutefois, il faut vraiment assurer un sol détrempé, rien de moins. À l’ombre, c’est le soleil du printemps, tel que reçu sous les arbres à feuilles caduques, qui sera important; il ne profitera pas dans les endroits qui sont ombragés toute l’année.

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Dommage aux feuilles de pétasites causé par la grêle.

Notez aussi que des feuilles sont facilement endommagées, voire déchiquetées, par la grêle et les vents forts. Cela ne nuit pas à la santé de la plante, mais les résultats ne sont pas très beaux à voir. C’est une des raisons pour lesquelles cette plante est souvent plus intéressante à l’ombre de grands arbres: ils le protègent de la grêle et coupent le vent.

Les feuilles sont aussi sujettes aux limaces, surtout en début de saison.

En plus de servir de plante ornementale, le pétasite du Japon est aussi un légume. Au Japon, on mange ses jeunes feuilles et pétioles printaniers. Il faut toutefois savoir apprêter les feuilles correctement, car autrement elles sont un peu toxiques.

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Fleurs de pétasites du Japon: on dirait une autre plante, pas juste une tige florale!

Comme le darmera, le pétasite est nudiflore: les fleurs apparaissent avant les feuilles. Elles sortent tôt au printemps sur de courtes tiges (15 à 30 cm) entourées de bractées vert pâle. Chaque tige se coiffre d’un dense dôme de fleurs jaune pâle. On dirait une plante entière, non pas une tige florale! Votre première réaction en sera sûrement une d’étonnement: «D’où vient cette plante? Je ne me souviens pas de l’avoir plantée!» Par la suite, quand les fleurs fanent et que les bractées vertes disparaissent, les énormes feuilles estivales apparaissent: c’est alors que vous vous rendrez compte qu’il ne s’agissait pas d’une plante autonome, mais bel et bien d’une simple tige florale.

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Pétasite panaché (Petasites japonicus ‘Nishiki-buki’)

Il existe aussi un pétasite du Japon à feuillage marbré de jaune au printemps et de vert pâle l’été, soit le pétasite panaché (P. japonicus ‘Nishiki-buki’, syn. P. japonicus ‘Variegatus’). Et pour les amateurs de feuilles vraiment géantes, il y a le pétasite du Japon géant (P. japonicus giganteus), aux feuilles mesurent de 1 m à 1,2 m de diamètre et jusqu’à 1,5 de hauteur. Attention: les deux sont aussi envahissants que l’espèce!

La pétasite du Japon est normalement rustique en zone 4 dans les emplacements exposés, mais réussit parfaitement aussi dans les sites protégés de la zone 3.

Multiplication

Toutes les trois plantes se multiplient surtout par division, au printemps ou à l’automne.

Autres «plantes ombrelles»

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Gunnera géant (Gunnera manicata): spectaculaire, mais pas adapté aux climats froids.

Il y a quand même d’autres plantes à feuilles péltées que vous pouvez cultiver dans vos platebandes de climat tempéré – Podophyllum peltatum, Diphylleia cymosa, Syneilesis aconitifolia, etc. – mais elles sont toutes de taille relativement modestes. Par contre, si vous vivez dans les zones 7b à 9, vous pourriez tenter la plante la plus ombrelle de toute, la superbe mais peu rustique gunnera géant (Gunnera manicata), aux feuilles pouvant atteindre presque 2 m de diamètre sur des pétioles aussi épais qu’un bras humain.

Mais si vous vivez au Québec et voulez épater le voisinage avec vos propres plantes ombrelles, je vous suggère de commencer avec l’une des plantes décrites précédemment: l’astilboïde, le darmera ou le pétasite.20160822I

 

Étiquettes + Astilboides tabularis, Astilboïde, Darmera, Darmera peltata, Plantes ombrelles, Plantes ombrelles géantes, Peltiphyllum peltata, Pétasite du Japon, Petasites japonicus, Petasites japonicus giganteus, Petasites japonicus 'Nishiki-b, Petasites japonicus 'Variegatus', Pétasite panaché, Gunnera manicata, Gunnera géant


commentaire sur "Trois plantes ombrelles géantes"

  1. Danielle Bibeau dit :

    De toute beauté, ces plantes géantes à feuilles ronde! Dommage que le Gunnera géant ne soit pas adapté notre climat…il est vraiment magnifique!

  2. Alain Bignet dit :

    Excellent article, très clair et précis.

  3. Francois dit :

    Merci pour ce bel article qui répond pleinement à mon questionnement.
    F. Lafantaisie

  4. Diane dit :

    Comment ce débarrasser de la pétasite…………. merci………….

  5. Véronique Haentjens dit :

    le petasite du japon et le petasite hybride sont répertoriés par la ville de Lévis comme des plantes exotiques envahissantes…? ( cf p. 29 de la politique environnementale de la ville de Lévis)

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